Biologiquementparlant, les femmes ne peuvent tomber enceinte que quelques jours par mois. Ceux-ci se situent juste autour de l’ovulation qui a lieu 15 jours environ aprĂšs la fin des rĂšgles. Math64 Le 28-12-2021 Ă  0041 + 1000 messages Bonjour, Fort heureusement, en France, une femme a le droit de concevoir un enfant avec qui elle veut et quand elle veut sas que son employeur n’ai de mot Ă  dire sauf si c’est son conjoint ! Il n'existe aucune obligation d'en informer l'employeur qui n'est absolument pas partie de cette dĂ©cision. Pour ce qui est de l'annonce, l'usage veut qu'on attende 3 mois afin de s'assurer de la viabilitĂ© de la grossesse. La pratique veut souvent que la salariĂ©e attende la fin de sa pĂ©riode d'essai, si celle-ci est longue, avant de concevoir son enfant mais rien d'obligatoire. RĂ©pondre Signaler ce contenu Visiteur Nicky02838 Le 28-12-2021 Ă  0425 J'ai oubliĂ© de prĂ©ciser que je suis du QuĂ©bec. Ils ne peuvent donc pas me mettre dehors si je comprends bien? Signaler ce contenu Visiteur Nicky02838 Le 28-12-2021 Ă  0429
Bouyguesest poursuivi pour travail dissimulĂ©, entre 2008 et 2011, sur le chantier du rĂ©acteur EPR construit par EDF Ă  Flamanville (Manche). Le procĂšs s’est ouvert, mardi, Ă  Cherbourg.
ï»żOn note de plus en plus de grossesses tardives en France. Qu’appelle-t-on grossesse tardive ? Jusqu’à quel Ăąge peut-on tomber enceinte ?IstockGrossesse tardive Ă  partir de quel Ăąge?AprĂšs 35 ans, Ăąge charniĂšre, il y a une forte baisse de la fertilitĂ©. L’ñge de 38 ans est considĂ©rĂ© comme un second palier de baisse. Et 40 ans, comme le seuil Ă  partir duquel on parle de grossesse tardive, les grossesses hyper-tardives concernant les femmes de plus de 45 du premier enfant a reculĂ©. L’INED Institut National des Etudes DĂ©mographiques a publiĂ© en 2017 un rapport selon lequel l’ñge moyen des femmes Ă  leur premier accouchement est passĂ© de 24 ans en 1974 Ă  30,7 ans en 2017. De mĂȘme, l’ñge du dernier enfant Ă  la quarantaine est devenu de plus en plus quel Ăąge peut-on tomber enceinte?La fertilitĂ© de la femme, autrement dit sa capacitĂ© Ă  concevoir un enfant, diminue fortement Ă  partir de 35 ans et devient nulle Ă  partir de la mĂ©nopause vers 50 ans. Mais la mĂ©nopause est en rĂ©alitĂ© un seuil ultime. Dans les faits, la capacitĂ© Ă  concevoir un enfant est dĂ©jĂ  nulle quelques annĂ©es avant la dĂ©claration de la mĂ©nopause. Au-delĂ  de 40 ans, non seulement le dĂ©lai pour tomber enceinte sera plus long, mais les risques pour le bĂ©bĂ© et pour la mĂšre seront eux aussi accrus. Selon l’INED, les risques de fausse couche sont de 12 % Ă  25 ans contre 30 % Ă  43 ans. Toujours selon cet institut, une femme dĂ©sireuse de tomber enceinte dans l’annĂ©e aura 75 % de chances de l’ĂȘtre Ă  30 ans contre 44 % Ă  40 ans. Par ailleurs, la PMA ProcrĂ©ation MĂ©dicalement AssistĂ©e a d’autant moins de chances d’aboutir que la femme a dĂ©passĂ© 35, voire 40 aprĂšs 45 ans est donc possible, mais plus compliquĂ© et plus NewsletterRecevez encore plus d'infos santĂ© en vous abonnant Ă  la quotidienne de adresse mail est collectĂ©e par pour vous permettre de recevoir nos actualitĂ©s. En savoir plus. Tombesous le coup de l'interdiction, tout travail ou service exigĂ© d'un individu sous menace d'une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s'est pas offert de plein grĂ©. Les dispositions des deux alinĂ©as qui prĂ©cĂšdent ne s'appliquent pas dans les cas Ă©numĂ©rĂ©s ci-aprĂšs: a. tout travail ou service exigĂ© en vertu des lois sur le service militaire obligatoire et affectĂ© Ă 

Peut-on tomber enceinte un mois et demi aprĂšs un rapport sexuel non protĂ©gĂ© ?Elodie, 30 ansLa rĂ©ponse de l'expertOn peut mettre en route une grossesse plusieurs jours aprĂšs un rapport sexuel non protĂ©gĂ©. En effet, les spermatozoĂŻdes peuvent attendre plusieurs jours que l'ovulation se produise, jusqu'Ă  5 ou 7 jours, maximum dĂ©crit. Pour savoir si l'on est enceinte aprĂšs un rapport sexuel, il faut faire un test de grossesse au plus tĂŽt 3 semaines aprĂšs le rapport sexuel Ă  risque. Plus tĂŽt, le test ne serait pas fiable. Catherine SolanoMĂ©decinSes convictions Chacun doit ĂȘtre encouragĂ© Ă  prendre en charge sa santĂ© physique et mentale car la mĂ©decine et les mĂ©decins ne peuvent pas tout, loin de lĂ . Et si tout le monde le faisait, les systĂšmes d’assurance maladie feraient du bĂ©nĂ©fice !ConformĂ©ment Ă  nos conditions d’utilisation, les mĂ©decins ne sont pas habilitĂ©s Ă  porter de diagnostic en ligne. Leur rĂŽle est d’éclairer et de proposer des pistes de rĂ©flexion Ă  l’internaute ainsi que des Ă©lĂ©ments d’information sans pour autant poser de diagnostic prĂ©cis. Leurs rĂ©ponses sont gĂ©nĂ©rales et ne doivent en aucun cas, remplacer une visite chez votre mĂ©decin. Recevez chaque jour des conseils d'experts pour prendre soin de thĂ©matiques Le Mag SantĂ© Naturelle SantĂ© Pratique Nutrition Minceur Psychologie Bien-ĂȘtre *Votre adresse email sera utilisĂ©e par M6 Digital Services pour vous envoyer votre newsletter contenant des offres commerciales personnalisĂ©es. Elle pourra Ă©galement ĂȘtre transfĂ©rĂ©e Ă  certains de nos partenaires, sous forme pseudonymisĂ©e, si vous avez acceptĂ© dans notre bandeau cookies que vos donnĂ©es personnelles soient collectĂ©es via des traceurs et utilisĂ©es Ă  des fins de publicitĂ© personnalisĂ©e. A tout moment, vous pourrez vous dĂ©sinscrire en utilisant le lien de dĂ©sabonnement intĂ©grĂ© dans la newsletter et/ou refuser l’utilisation de traceurs via le lien PrĂ©fĂ©rences Cookies » figurant sur notre service. Pour en savoir plus et exercer vos droits , prenez connaissance de notre Charte de ConfidentialitĂ©.

SMSAmour. Mon petit cƓur, je voudrais que tu saches que je n'ai jamais aimĂ© quelqu'un aussi profondĂ©ment que toi. tu es gravĂ© en moi. Chaque jour, chaque minute je ne pense qu'Ă  toi, je veux ĂȘtre Ă  toi seulement pour l'Ă©ternitĂ©. J'aimerais ĂȘtre ton sang et couler dans tes veines pour pouvoir faire battre ton cƓur.
Forum / BĂ©bĂ©s Bonjour les filles, voilĂ  j'ai besoin de vos tĂ©moignages ... mon homme et moi dĂ©sirons vraiment un enfant. je suis tombĂ© enceinte trĂšs rapidement mais malheureusement aprĂšs un contrĂŽle chez le gynĂ©co, on apprend que ma grossesse s'Ă©tait arrĂȘtĂ©e Ă  6 SA. c'Ă©tait horrible...c'Ă©tait ma premiĂšre grossesse... le gynĂ©co m'a donc prescrit un mĂ©dicament pour Ă©vacuer le bb. malheureusement sans succĂšs.. il Ă©tait bien accrochĂ©. du coup le gynĂ©co a pris la dĂ©cision de me faire un curetage. j'ai donc subit un curetage le 7 dĂ©cembre. je ne sais pas quand je vais avoir le retour des rĂšgles. savez-vous quand les rĂšgles vont revenir ? et Ă  partir de quand pourrons nous rĂ©essayer ? pensez-vous qu'il est dangereux d'essayer tout de suite ? j'ai Ă©galement trĂšs peur de refaire une fausse couche... je dois avouer que je suis un peu traumatisĂ©e.. on ne s'y attendait vraiment pas... merci beaucoup pour vos tĂ©moignages. Votre navigateur ne peut pas afficher ce tag vidĂ©o. Le retour de couches a lieu entre 4 et 6 semaines aprĂšs la fc, tu peux rĂ©essayer de suite si tu te sens prĂȘte. Si comme tu dis, tu es traumatisĂ©e, tu peux aussi laisser passer quelques mois avant de reprendre les tous les cas, il faut dĂ©passer ta peur, s'il y a eu fc, c'est que l'embryon n'Ă©tait pas viable et c'est malheureusement le cas pour environ 25% des grossessesJ'ai moi aussi fait une fc Ă  ma 1Ăšre grossesse, depuis j'ai eu 2 enfants, il n'y a pas de raison que tu ne retombes pas enceinte et que tout se passe bien. La peur est naturelle mais n'enlĂšve pas le danger c'est tout Ă  fait normal d'avoir peur d'une nouvelle fc, mais tu ne peux rien y faire 1 - J'aime En rĂ©ponse Ă  lotiris Le retour de couches a lieu entre 4 et 6 semaines aprĂšs la fc, tu peux rĂ©essayer de suite si tu te sens prĂȘte. Si comme tu dis, tu es traumatisĂ©e, tu peux aussi laisser passer quelques mois avant de reprendre les tous les cas, il faut dĂ©passer ta peur, s'il y a eu fc, c'est que l'embryon n'Ă©tait pas viable et c'est malheureusement le cas pour environ 25% des grossessesJ'ai moi aussi fait une fc Ă  ma 1Ăšre grossesse, depuis j'ai eu 2 enfants, il n'y a pas de raison que tu ne retombes pas enceinte et que tout se passe bien. La peur est naturelle mais n'enlĂšve pas le danger c'est tout Ă  fait normal d'avoir peur d'une nouvelle fc, mais tu ne peux rien y fairemerci beaucoup pour ta rĂ©ponse. je me sens prĂȘte Ă  ressayer .. j'ai juste peur que ça se reproduise... tu as mis longtemps Ă  retomber enceinte aprĂšs ta fausse couche ? J'aime En rĂ©ponse Ă  camron_3236667 merci beaucoup pour ta rĂ©ponse. je me sens prĂȘte Ă  ressayer .. j'ai juste peur que ça se reproduise... tu as mis longtemps Ă  retomber enceinte aprĂšs ta fausse couche ?quasiment 1 an jour pour jourmais certaines sont tombĂ©s enceinte le mois suivant, il n'y a pas de rĂšgle ! Il paraitrait qu'on est plus fertile les 6 mois post-fc J'aime En rĂ©ponse Ă  lotiris quasiment 1 an jour pour jourmais certaines sont tombĂ©s enceinte le mois suivant, il n'y a pas de rĂšgle ! Il paraitrait qu'on est plus fertile les 6 mois post-fc super cela a du ĂȘtre merveilleux. cela a pris un an car c'Ă©tait votre choix d'attendre ? je vais dĂ©jĂ  attendre mon retour de couche et on verra bien. J'aime Ici premiĂšre fausse couche je suis retombĂ©e enceinte au second cycle et seconde fausse couche je suis tombĂ©e enceinte quasiment un an aprĂšs. J’ai des cycles trĂšs longs jusqu’a 60 jours et de mĂ©moire mon retour de couches est revenu environ Ă  6 semaines. Certaines femmes n’ont mĂȘme pas de retour de couches et retombent directement enceinte. Je te souhaite que ca reconditionnement rapidement J'aime Vous ne trouvez pas votre rĂ©ponse ? En rĂ©ponse Ă  camron_3236667 super cela a du ĂȘtre merveilleux. cela a pris un an car c'Ă©tait votre choix d'attendre ? je vais dĂ©jĂ  attendre mon retour de couche et on verra a attendu 2-3 mois avant de reprendre les essais et puis ensuite, il a fallu que ça "remarche"Au final, je suis tombĂ©e enceinte le seul mois oĂč statistiquement, il y avait quasi 0 chance que ça fonctionne, j'y ai vu une jolie coincidence avec la date de ma fc J'aime En rĂ©ponse Ă  galoupete Ici premiĂšre fausse couche je suis retombĂ©e enceinte au second cycle et seconde fausse couche je suis tombĂ©e enceinte quasiment un an aprĂšs. J’ai des cycles trĂšs longs jusqu’a 60 jours et de mĂ©moire mon retour de couches est revenu environ Ă  6 semaines. Certaines femmes n’ont mĂȘme pas de retour de couches et retombent directement enceinte. Je te souhaite que ca reconditionnement rapidement merci pour ta rĂ©ponse. Normalement j'ai des cycles de 28-30 jours ... du coup je devrai avoir mes rĂšgles le 7 janvier... j verrais bien. Du coup, c'est possible d ovuler directement aprĂšs le curetage ? J'aime En rĂ©ponse Ă  camron_3236667 merci pour ta rĂ©ponse. Normalement j'ai des cycles de 28-30 jours ... du coup je devrai avoir mes rĂšgles le 7 janvier... j verrais bien. Du coup, c'est possible d ovuler directement aprĂšs le curetage ?Oui directement J'aime En rĂ©ponse Ă  galoupete Oui directement ok merci car moi actuellement j'ai l'impression d ovuler car j'ai mal Ă  l'ovaire droite... mais selon mes cycles, je ne devrai pas ovuler... j vais voir si j vais acheter un test d ovulation ... J'aime En rĂ©ponse Ă  camron_3236667 ok merci car moi actuellement j'ai l'impression d ovuler car j'ai mal Ă  l'ovaire droite... mais selon mes cycles, je ne devrai pas ovuler... j vais voir si j vais acheter un test d ovulation ...Les tests je les achetais en lot sur ebay ca me coutait que dalle comparĂ© aux clearblue J'aime
Sil n'existe pas de méthode infaillible qui permettrait de tomber enceinte rapidement à coup sûr, il est néanmoins possible de mettre toutes les chances de son cÎté en
Beaucoup de femmes se demandent aprĂšs avoir donnĂ© naissance Ă  un bĂ©bĂ© si c’est possible de tomber enceinte aprĂšs l’accouchement, juste aprĂšs le retour des rĂšgles. Bien que plusieurs femmes craignent le fait de retomber enceinte rapidement suite Ă  un accouchement et donner naissance Ă  un deuxiĂšme enfant, on remarque que d'autres ont du mal Ă  concevoir de nouveau malgrĂ© des essais rĂ©pĂ©titifs. Une grossesse peut-elle survenir directement aprĂšs un accouchement ? Quelles sont les consĂ©quences d’une telle grossesse sur la production du lait chez une femme allaitante ? Quels sont les risques d’une seconde grossesse qui survient juste aprĂšs l’accouchement ? Quelles sont les mĂ©thodes possibles pour prĂ©venir une deuxiĂšme grossesse non planifiĂ©e ? Tomber enceinte aprĂšs l’accouchement les probabilitĂ©s chez la femme qui allaite Plusieurs femmes allaitantes refusent de prendre des contraceptifs car elles pensent que l’allaitement provoque Ă  lui seul une baisse de fertilitĂ© et que ça sera presque impossible de tomber enceinte aprĂšs l’accouchement lorsqu’on allaite. Cette idĂ©e n’est pas vraie Ă  100% parce que l’allaitement n’inhibe pas toujours l’ovulation, donc c’est tout Ă  fait possible de concevoir de nouveau suite Ă  un accouchement mĂȘme si on allaite au sein. En rĂ©alitĂ©, l’allaitement maternel peut prĂ©venir la survenue d’une grossesse indĂ©sirable seulement si certaines conditions sont respectĂ©es Ă  savoir le bĂ©bĂ© est ĂągĂ© de moins de 6 mois, la femme allaite son bĂ©bĂ© jour et nuit, les rĂšgles sont encore absentes aprĂšs l’accouchement. Selon les spĂ©cialistes de santĂ©, le nombre et la frĂ©quence des tĂ©tĂ©es favorisent ou empĂȘchent le retour du cycle chez la femme. L’allaitement exclusif est gĂ©nĂ©ralement considĂ©rĂ© comme un moyen de contraception car l’hormone de la lactation appelĂ©e prolactine, qui est secrĂ©tĂ©e par l’organisme de la femme allaitante, empĂȘche la sĂ©crĂ©tion des hormones qui favorisent l’ovulation. Selon les statistiques, 90% des femmes qui pratiquent l’allaitement exclusif ne tombent pas enceintes durant les 6 premiers mois qui suivent l’accouchement Ă  condition que les menstruations soient toujours absentes. Une femme qui allaite son nouveau-nĂ© jour et nuit Ă  sa demande et entre 6 et 7 fois par jour, aura alors un minimum de chances de tomber enceinte aprĂšs l’accouchement. De toute façon, il est recommandĂ© de se fier Ă  un moyen de contraception plus efficace que l’allaitement maternel pour empĂȘcher une grossesse si vous ne dĂ©sirez pas avoir le bonheur de tomber enceinte une seconde fois juste aprĂšs l’accouchement. Tomber enceinte aprĂšs l’accouchement les probabilitĂ©s chez la femme qui n’allaite pas Une femme qui n’allaite pas au sein son petit aprĂšs qu’elle ait accouchĂ© sĂ©crĂšte gĂ©nĂ©ralement des hormones qui favorisent l’ovulation et le retour des rĂšgles. Par consĂ©quent, elle redevient fertile dans les 4 Ă  6 semaines aprĂšs l’accouchement et sera capable de concevoir de nouveau. En outre, il faut signaler que les femmes ne se ressemblent pas. La fertilitĂ© peut alors ne pas revenir rapidement mĂȘme si la femme n’allaite pas au sein et le temps pour tomber enceinte de nouveau peut dans des cas trĂšs rares ĂȘtre plus long. Tomber enceinte aprĂšs l’accouchement quels sont les risques ? Si vous souhaitez faire une planification familiale et espacer les naissances, il est alors crucial de suivre certaines rĂšgles pour ne pas tomber enceinte aprĂšs l’accouchement. La reprise des contraceptifs est fortement recommandĂ©e que ce soit pour les femmes qui allaitent au sein ou qui utilisent les prĂ©parations infantiles pour nourrir leurs bĂ©bĂ©s. Il faut toutefois choisir une mĂ©thode de contraception qui s’adapte Ă  la nouvelle situation, surtout lorsque vous allaitez au sein, pour bien vous protĂ©ger. Voici certains moyens contraceptifs disponibles les pilules contraceptives, les prĂ©servatifs, le stĂ©rilet, le diaphragme. Il est Ă  signaler que la pose d’un stĂ©rilet se fait 4 semaines aprĂšs l’accouchement par voie basse et 2 mois aprĂšs l’accouchement par cĂ©sarienne. Durant la pĂ©riode qui suit l’accouchement, il est conseillĂ© d’employer une autre mĂ©thode contraceptive pour minimiser les risques. Lisez aussi Comment tomber enceinte d’une fille des astuces qui marchent Quand faut-il commencer Ă  utiliser les contraceptifs pour ne pas tomber enceinte aprĂšs l’accouchement ? Bien que la prĂ©vision de la date de l’ovulation reste une chose impossible, il sera mieux de commencer l’utilisation des contraceptifs dĂšs que possible. La fertilitĂ© de la femme qui n’allaite pas au sein peut revenir trĂšs tĂŽt aprĂšs l’accouchement parce que l’ovulation peut avoir lieu entre deux et trois semaines. Mais la prise des pilules contraceptives doit ĂȘtre reportĂ©e jusqu’au retour des rĂšgles. Entre temps, il est recommandĂ© d’utiliser un autre moyen de contraception. Tomber enceinte aprĂšs l’accouchement y a-t-il des risques ? Durant la pĂ©riode de grossesse, l’organisme subit Ă©normĂ©ment de changements et de modifications qui peuvent fatiguer la future maman. Plusieurs transformations physiques et physiologiques apparaissent pendant les mois de la grossesse comme la modification du volume utĂ©rin, l’augmentation de la rĂ©sistance Ă  l’insuline, la dilatation des uretĂšres, l’augmentation du volume sanguin, des modifications au niveau de l’appareil respiratoire, l’augmentation du taux de triglycĂ©rides, etc. Ces changements ne sont pas permanents et tout revient dans l’ordre aprĂšs l’accouchement mais ça demande un peu de temps. C’est pour cette raison que les spĂ©cialistes recommandent d’attendre au moins 6 mois pour tomber enceinte aprĂšs l’accouchement. En ce qui concerne les femmes qui ont accouchĂ© par cĂ©sarienne, les experts conseillent d’attendre entre un an et un an et demi avant de tomber Ă  nouveau enceintes parce que l’utĂ©rus doit se remettre avant la deuxiĂšme grossesse. Il faut aussi que la cicatrisation de l’utĂ©rus soit complĂšte avant de penser Ă  concevoir. Pour les femmes allaitantes, il faut signaler que la production du lait chez la femme qui allaite peut baisser si elle tombe enceinte une deuxiĂšme fois aprĂšs un accouchement. Les hormones qui maintiennent la grossesse peuvent entrer en conflit avec la lactation et par la suite empĂȘcher la production du lait. Tomber enceinte aprĂšs l’accouchement comment le prĂ©venir naturellement ? Si pour une raison ou une autre, vous prĂ©fĂ©rez ne pas utiliser de moyens contraceptifs alors que vous ne dĂ©sirez pas tomber enceinte aprĂšs l’accouchement, vous devez alors prĂ©venir une Ă©ventuelle grossesse Ă  l’aide de mĂ©thodes naturelles. Dans ce cas, Ă©vitez tout simplement les rapports sexuels pendant la pĂ©riode de fertilitĂ©. Vous pouvez la calculer en vous basant sur la durĂ©e de votre cycle menstruel. Sinon, demandez Ă  votre conjoint d’éjaculer Ă  l’extĂ©rieur de votre vagin pour que son sperme n’entre pas en contact avec vos ovocytes. Tomber enceinte aprĂšs l’accouchement avec le miracle de la grossesse Vous essayez de tomber enceinte aprĂšs l’accouchement mais quelque chose ne va pas ? Qu’est-ce qui vous empĂȘche de retomber enceinte aprĂšs le retour du cycle normal ? Est-ce que les problĂšmes d’infertilitĂ© peuvent apparaĂźtre aprĂšs l’accouchement ? Vous voulez dĂ©couvrir les rĂ©ponses et parvenir Ă  tomber enceinte une seconde fois aprĂšs l’accouchement ? Consultez le fameux ouvrage de Lisa Olson Le Miracle De La Grossesse » pour vous renseigner sur les mĂ©thodes qui permettent d’avoir d’autres enfants directement aprĂšs l’accouchement. Cliquez ici pour plus de dĂ©tails sur Le Miracle De La Grossesse !
LaSASU limite la responsabilitĂ© de l’associĂ©. La SASU facilite le dĂ©veloppement de l’entreprise. Les dividendes versĂ©s par une SASU ne supportent pas les cotisations sociales. La SASU est un statut idĂ©al pour le maintien de l’ARE. La SASU facilite la transmission de l’entreprise. SynthĂšse des avantages et inconvĂ©nients de la SASU.

Aller à la page 1, 2, 3, 4, 5 AuteurMessageInvité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Mar 4 Mai - 147 Lise sursauta tandis qu’il s’indignait qu’elle ait pu couché avec une FILLE sans qu’il soit présent. Elle en aurait presque été offusquée si seulement elle avait pu s’arrÃÂȘter de rire. A croire qu’il ne s’entendait jamais parler, des fois
Câ€™ĂƒÂ©tait incroyable à quel point sa jalousie pouvait avoir différents visages ! Mais pour l’instant, il était déjà reparti sur sa belle voiture, aprÚs s’ÃÂȘtre étonné qu’elle n’ait pas continué sa carriÚre de mannequin. Effectivement si tel était le cas, il n’aurait jamais tenu et leurs jalousies communes auraient fini par les détruire. Et puis, les mannequins voyagent toujours à travers le monde, et il ne l’aurait pas vue souvent. Ca non plus, ni l’un ni l’autre ne l’aurait supporté de toute évidence. Mais ça, elle comptait lui en parler, mais pas ici. Elle se leva de son fauteuil pour aller prévenir la réceptionniste, qui ignorait complÚtement Aaron, qu’ils allaient s’absenter un moment, et qu’elle n’avait qu’à l’appeler sur son cellulaire lorsque les tenues seraient prÃÂȘtes. AprÚs coup, Lise réalisa qu’elle avait peut-ÃÂȘtre fait une erreur
Cette fille avait son numéro, son numéro actuel et non plus l’ancien ! Pour sûr, elle allait tenter de la poursuivre de ses assiduités, espérant quelque chose qu’elle n’aurait de toute façon jamais Si Lise sâ€™ĂƒÂ©tait laissée avoir une fois, elle était résolument hétéro et jamais elle ne recommencerait. Elle respectait trÚs bien la sexualité de tout le monde, tant que l’on ne l’obligeait pas à adhérer. Elle retourna donc avec un léger air inquiet vers Aaron, lui prenant la main pour le faire sortir de la boutique. Il devrait pourtant savoir qu’elle n’allait pas l’obliger à rester s’il n’en ressentait pas l’envie
 Voilà , allons faire une virée, puisque tu en meurs d’envie ! Je me demande vraiment si j’ai bien fait de t’acheter ce cabriolet, tu ne penses qu’à lui ma parole ! Et au fait, tu ne m’as toujours pas dit ce que câ€™ĂƒÂ©tait ta rÚgle numéro deux ! J’ai donné mon numéro à la fille, elle m’appellera dÚs que les tenues seront prÃÂȘtes. Ca nous laisse tout le loisir du monde pour faire un tour de cabriolet ! »Lise tenait toujours sa main, jusqu’au moment oÃÂč elle monta dans la voiture et s’installa confortablement. Câ€™ĂƒÂ©tait vrai qu’elle était paradisiaque, cette voiture
Confortable, fabuleuse, au design de la mort qui tue ! Lise ne regrettait pas du tout de lui avoir offert, au contraire, mais s’il continuait à en parler, elle risquait de la lui confisquer ! Surtout qu’elle ne doutait pas un seul instant qu’une fois rentrés, il allait s’empresser de joindre Paul pour la lui montrer, et il allait s’empresser également de pavaner à l’université au volant de ce superbe coupé cabriolet. Ca, Lise en était absolument certaine. D’ailleurs, ça lui avait donné envie de conduire, tout ça
Il était fort possible qu’elle se remette aux circuits, et qu’elle délaisse un peu son vieux vélo adoré pour faire un tour en solitaire avec sa new beetle, comme elle avait l’habitude de le faire par le passé. AprÚs tout, si lui avait le droit de se pavaner en voiture, elle ne voyait pas pourquoi elle n’aurait pas le droit d’en faire autant ! Et désormais qu’elle était opérée, elle n’avait rien à craindre à faire des trucs donnant des sensations fortes non ? A cette pensée, Lise eut un petit rire. Aaron serait à des années lumiÚre de se douter de tout ce qu’elle avait envie de faire
Saut à lâ€™ĂƒÂ©lastique, saut en parachute
Tout ce qu’elle n’avait jamais osé faire mais qui la tenaillait depuis quelques temps. Mais pour l’instant, elle était là , avec lui. Cette journée, cette soirée comme cette nuit allaient ÃÂȘtre à eux, et elle ne comptait rien gùcher
Et puis, il est vrai qu’elle avait un ronronnement absolument fabuleux, cette voiture ! Oui, j’ai couché avec cette fille ! J’te rappelle que j’avais un sérieux coup dans le nez. J’me suis juste réveillée dans le lit avec elle, à poil, et j’crois que y’avait un autre gars. J’suis plus sûre, j’avais tellement mal à la tronche, câ€™ĂƒÂ©tait horrible ! Mais ce qui m’agace le plus, c’est le fait que ce qui te choque, c’est pas que je l’ai fais, c’est que tu n’y ai pas participé ! Jamais de la vie on fait un plan à plus de deux, tu m’as comprise ? Jamais de la vie une autre fille te touche ! »Voilà que Lise jouait le mÃÂȘme jeu que lui, à jalouser et à imaginer des choses qui ne se passeraient pas. Disons qu’elle espérait qu’il n’irait pas jusqu’à lui proposer la chose, mais avec lui, rien nâ€™ĂƒÂ©tait jamais assuré par avance. Elle préférait donc prévenir plutÎt que guérir
Manquerait plus qu’il cherche une autre nana ou elle un autre mec pour faire une partie de jambes en l’air ! Non, jamais de la vie elle n’accepterait une chose pareille. Aaron était avec ELLE, et s’ils faisaient une partie de jambes en l’air, câ€™ĂƒÂ©tait à deux, pas à trois à quatre ou à on ne sait combien ! Tu sais, si j’avais continué le mannequinat, tu m’aurais jamais vue. J’aurais été aux quatre coins du monde pour des défilés, signer des autographes ou discuter avec les créateurs. Ca aurait été shoot sur shoot, défilé sur défilĂƒÂ©â€ŠSans compter sur le fait que t’aurais pas tenu une minute en me sachant entourée surtout de gars. Et moi, j’aurais pas tenu une seconde en sachant que tu étais tout seul, entouré de toutes ces prédatrices qui en veulent encore et toujours à ton corps ! Puis bon, si on voulait fonder une famille, tout ça
Pas possible non plus. Bref, pas pour moi ce genre de carriÚre oÃÂč j’aurais été loin de toi. Ca m’aurait détruite. Mais tu as honte que je sois future archéologue ou quoi ? Au moins, les fossiles et les fouilles te reluquent pas le cul à longueur de temps comme les mannequins masculins le faisaient quand j'étais dans le métier! Monsieur le beau médecin en blouse blanche ! »Lise aimait bien le taquiner sur le fait que sa blouse blanche lui allait bien
Mais en fait, à bien y réfléchir, tout lui allait à ravir. Et tandis qu’ils étaient à un feu rouge, elle en profita pour capturer fougueusement ses lÚvres. Elle se fichait qu’on soit en train de les regarder ou pas
 Ca me donne envie de conduire tout ça, je pense que je vais reprendre le circuit un peu, me faire plaisir avec la vitesse. Puis refaire de la plongée, monter sur une grande roue, rouler des heures au volant de ma superbe new beetle
AprÚs tout, puisque ton cabriolet occupe tes pensées, je vais prendre soin de ma titine aussi, na ! Bon, allez, puisque tu as voulu faire une virée en cabriolet, surprends moi mon ange ! » Invité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Mar 4 Mai - 227 Grimpant à bord de la voiture, il ne tarda pas à retrouver son sourire de gosse en entendant le bruit du moteur. Il en était vraiment raide dingue de cette voiture ! Forcément ce qui l’indignait le plus nâ€™ĂƒÂ©tait pas qu’elle ai pu coucher avec cette fille, mais simplement le fait de ne pas avoir été là ni pour voir, ni pour participer. Câ€™ĂƒÂ©tait carrément de la torture de penser à ça et ça le fut encore plus au moment oÃÂč elle lui avoua qu’un autre gars était présent. Aaron dû lutter de toutes ses forces pour ne rien laisser paraÃtre de ses émotions, imaginer Lise dans ce genre de situation – et surtout sans lui- relevait vraiment de la torture. Non pas qu’il soit particuliÚrement intéressé par ce genre de plan, Lizzie suffisait amplement à faire son bonheur mais disons que si à cette époque il avait été le gars en question, ça n’aurait pas été plus mal.  Forcément, comment voulais-tu que je réagisse ?!! Puis franchement, tu penses vraiment qu’il en faut si peu pour me choquer ?! Je suis loin d’ÃÂȘtre un ange je te rappelle puis j’avoue que c’est pas déplaisant de penser que tu as pu te trouver dans ce genre de situation. T’en fais pas, je te proposerai jamais un truc pareil, déjà , parce que ça me viendrait jamais à l’idée et deuxiÚmement parce que je ne veux que toi dans mon lit. Non disons juste qu’à lâ€™ĂƒÂ©poque, si j’avais pu ÃÂȘtre le gars en question, ça n’aurait pas été plus mal
 t’aurais pas préféré que je sois là plutÎt que ce soit ce type dont tu ne te souviens mÃÂȘme plus s’il a ou non véritablement existé ?! » Tout en roulant à vive allure, Aaron songea à ses propos, réalisant qu’effectivement, leur vie aurait été un véritable enfer si Lise avait voulu continuer dans cette voie. Bien entendu, il l’aurait soutenu mais de toute évidence, ça n’aurait pas marché sur le long terme. Déjà d’une part à cause de la distance il ne supportait pas d’ÃÂȘtre éloigné d’elle plus d’une heure alors imaginez durant des jours et à des milliers de kilomÚtres l’un de l’autre, non, câ€™ĂƒÂ©tait juste impensable. Puis d’autre part, il y avait cette jalousie et le fait de la savoir entourée de beaux mannequins tous plus séduisants les uns que les autres. Aaron se serait montré véritablement insupportable. Quand il l’entendit parler de l’archéologie, il tùcha de rapidement l’interrompre  Honte ?! T’es folle ou quoi ?! Je trouve ça carrément génial tu veux dire !! Ne me fait pas dire ce que je n’ai ni dit, ni pensé mon cÅ“ur. Puis d’abord je n’aurais jamais honte de rien te concernant. Je me disais juste que tu avais été un mannequin extraordinaire, rien de plus. Beaucoup de filles auraient tout donné pour avoir ta chance, j’en suis conscient. En revanche, je veux bien concevoir l’idée que ce soit un milieu pourri et propice à la décadence la plus totale mais bon
 tu as quand mÃÂȘme passé de bons moments je présume. Puis tu sais, concernant la blouse blanche
 je suppose qu’en blouse blanche et en plus, au volant du cabriolet, ça doit vraiment valoir le coup d’Å“il
 »Aaron se remit à rire et se pencha vers elle, prolongeant ce baiser tandis que le feu repassait déjà au vert. Il entendit les coups de klaxons derriÚre lui mais n’en fit rien, pas tant que leur baiser nâ€™ĂƒÂ©tait pas achevé et autant dire que le reste du monde pouvait bien attendre. Regardant dans le rétroviseur, Aaron soupira doucement et appuya d’un seul coup sur l’accélérateur, pris d’un petit coup de folie et d’une soudaine envie de vitesse. Cela faisait des années maintenant que Sarah refusait catégoriquement de monter dans une voiture à partir du moment oÃÂč il s’y trouvait lui aussi et à dire vrai, Paul avait confirmé comprendre pourquoi.  Putain, elle en a vraiment dans le ventre cette voiture !! On continue ?! »Le jeune homme n’avait toujours pas relùché l’accélérateur, au contraire, il continuait de fixer l’aiguille du compteur qui parcourait le cadran tandis qu’il passait ses vitesses en se délectant du bruit du moteur. Un vrai gamin en pleine partie de jeu vidéo. Il roula ainsi sur plusieurs dizaines de kilomÚtres avant de s’arrÃÂȘter en bord de mer et de descendre de la voiture en sautant par-dessus la porte comme dans les films. Il fit le tour de la voiture, les clés en main tandis que Lise se trouvait encore assise à sa place. N’allez pas croire qu’il faisait ça à contre cÅ“ur car au contraire, il pensait qu’elle avait le droit de s’amuser un peu elle aussi. Par conséquent, il afficha un large sourire et tendit le bras pour laisser pendre les clés au bout de ses doigts afin qu’elle les prenne.  Je ne vois pas pourquoi je devrais ÃÂȘtre le seul à m’amuser autant. Tu as envie de conduire, j’adore la vitesse, on a entre nos mains l’engin le plus rapide des Etats-Unis et une route presque déserte
 fais toi plaisir. RÚgle numéro 2 si je suis assez fou pour accepter de te laisser conduire la voiture, accepte vite avant que je change d’avis. » Invité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Mar 4 Mai - 256 Il est vrai que la voiture en avait dans le ventre, câ€™ĂƒÂ©tait un vrai délice de le sentir, et ça devait ÃÂȘtre d’autant plus agréable à conduire ! Mais Lise ne se leurrait pas, si Paul avait à peine le droit de la regarder, jamais Aaron ne la laisserait la conduire. Elle sâ€™ĂƒÂ©tait faite à l’idée, mÃÂȘme si elle l’avait conduite une fois pour l’amener jusqu’au parking de l’hÎpital, ce serait probablement la seule et unique fois qu’elle aurait pu toucher le volant. Elle quitta donc ce genre de pensées pour se concentrer sur ce qu’il disait. Il n’avait pas honte qu’elle soit future archéologue, câ€™ĂƒÂ©tait déjà ça ! Lise n’avait pas vraiment choisi ce métier parce qu’il lui permettait une vie de famille, qui plus est
Mais bien parce qu’elle était une vraie passionnée d’histoire et parce que cela lui semblait naturel d’en faire son métier. Il ne l’avait jamais vue dans une bibliothÚque, elle pouvait ÃÂȘtre tout autant excitée qu’en face d’une nouvelle robe magnifique ou de nouvelles chaussures
Parfois, Lise n’avait pas l’impression d’ÃÂȘtre une femme, par certains cÎtés. Câ€™ĂƒÂ©tait ce que William s’amusait à lui dire d’ailleurs ! Elle l’avait souvent étonné en préférant aller au musée plutÎt qu’aller faire du shopping
Les rÎles étaient parfois inversés au sein de leur amitié, puisque William avait plus souvent envie qu’elle d’aller faire du shopping. Lise était richissime, c’est vrai, mais elle nâ€™ĂƒÂ©tait pas superbement dépensiÚre pour autant. Elle joignait l’utile à l’agréable quand il le fallait, et l’achat du cabriolet pour Aaron était sa seule vraie folie depuis longtemps. Voilà pourquoi elle venait de lui faire part de son envie de faire des choses  un peu plus folles ». Il pourrait venir s’il en ressentait l’envie
Il ne savait pas à quel point Lise était une passionnée de vitesse ! Elle avait une conduite sûre, qui nâ€™ĂƒÂ©tait pas sÚche comme chez beaucoup de gens aimant la vitesse, et elle connaissait ses limites. S’ÃÂȘtre fait de belles frayeurs sur un circuit les lui avait apprises, et elle ne faisait jamais de choses inconsidérées sur une route oÃÂč il pouvait y avoir d’autres gens. Aaron avait l’air d’ÃÂȘtre autant amateur de vitesse qu’elle, voilà pourquoi elle avait tenu à lui offrir ce petit bijou. Par amour, on peut faire énormément de concessions
Et mÃÂȘme s’il semblait éperdument amoureux de son cabriolet, Lise savait qu’il n’avait, avant toute chose, d’yeux que pour Tu sais, des fois, William dit que je suis pas une femme. Je peux passer des jours entiers le nez dans des bouquins d’histoire, et je passe largement plus de temps à la plus grande bibliothÚque de la ville que je n’en passe dans les magasins. J’aime le shopping c’est vrai, mais William dépense trois fois plus que moi quand on va faire du lÚche vitrine ! Dis toi que t’offrir ce cabriolet est ma premiÚre folie depuis super longtemps
A la place, je me donne des sensations fortes. Je n’ai pas besoin de dépenser des milles et des cents pour ÃÂȘtre bien dans mes baskets
Je n’agis pas fonciÚrement comme une gamine pourrie gùtée, là -dessus. J’ai beaucoup de défauts, mais pas ça ! En somme, tout ça pour dire que contrairement à ce que certains pensent, je n’ai pas choisi de faire archéologie parce que ça me garantissait une vie de couple et de famille plus  calme » mais bien parce que je suis une dingue d’histoire. Je pourrais t’en parler de maniÚre inspirée pendant des heures
Mon passage préféré ? Les mythologies. J’ai un examen là -dessus le mois prochain, et je pense que je devrais le réussir les doigts dans le nez
J’ai tellement bossé dessus ! Mais je m’aperçois que finalement, on parle pas énormément de ce qui nous plait, on l’a jamais fait en fait. Dommage non ? Pourquoi tu as choisi médecine, d’ailleurs ? »Câ€™ĂƒÂ©tait humain de vouloir connaÃtre les goûts et les couleurs de son cher et tendre. En tout cas, pour Lise, câ€™ĂƒÂ©tait vital. Attention, elle n’avait aucune intention de s’adonner à un vrai interrogatoire, mais le laisser en parler était déjà un début. Et puis, ils avaient toute la vie pour s’apprendre, s’apprivoiser. Lise était un mystÚre à elle seule, voilà pourquoi elle avait toujours autant aimé les énigmes et les légendes des autres siÚcles. Mais visiblement, Aaron nâ€™ĂƒÂ©tait pas aussi passionné qu’elle là -dessus, puisqu’il s’arrÃÂȘta sans qu’elle ne puisse crier gare, sautant hors de la voiture comme dans les films américains, et fit le tour de la voiture pour mieux lui tendre ses clefs. Il voulait qu’elle conduise ?! Rien que cette proposition était alléchante ! Lise descendit donc de voiture, lui sautant au cou pour le remercier d’un baiser passionné. Elle le fit durer quelques instants d’ailleurs, partant du principe qu’ils avaient tout le temps du monde devant eux, et que le fait de conduire ce petit bijou pouvait bien attendre quelques minutes. Lorsqu’elle sépara son visage du sien, elle prit délicatement les clefs comme si elles allaient se briser, et se mit à sautiller tout en se dirigeant vers la place du conducteur, bondissant à l’intérieur comme il l’avait fait pour sortir, avec souplesse et attention. Le sourire aux lÚvres, Lise avait vraiment l’air excitée rien qu’à l’idée de tester le moteur ! Je vais lui faire du bien à ton bijou, t’inquiÚtes pas ! En plus, t’as jamais été le co pilote quand c’est moi qui conduit
Tu vas voir si je suis une femmelette ! »Lise mit illico le contact, avant de passer en marche arriÚre pour revenir sur la route. Il lui suffit ensuite d’appuyer sur le champignon pour se faire des sensations fortes. Lise conduisait légÚrement plus qu’Aaron à certains moments
Elle se testait, et elle testait le cabriolet pour l’instant. La conduite parfaitement à l’aise, elle semblait ne faire qu’un avec le volant, qu’elle semblait caresser en le tournant. Une as du volant, on vous a dit ! ÉNORME !!! »Lise avait exactement la mÃÂȘme réaction qu’Aaron au moment oÃÂč il l’avait testée, ce midi. Le sourire jusqu’aux oreilles, elle aimait ce test de vitesse sur une ligne droite, là oÃÂč elle ne risquait rien. Ce ne fut que lorsqu’elle sentit son cellulaire vibrer qu’elle du se garer sur le bas cÎté pour décrocher. Câ€™ĂƒÂ©tait la réceptionniste, qui annonçait que les tenues commandées seraient à leur disposition d’ici une demi heure. Ca ne leur laissait pas énormément de temps, mais ce nâ€™ĂƒÂ©tait pas bien grave
Il suffisait qu’ils sachent mettre à profit le temps qui leur restait ! Et puis s’ils étaient en retard, ce nâ€™ĂƒÂ©tait pas non plus la Ce sera prÚs d’ici trente minutes. Tu veux occuper le temps comment ? Je continue à te procurer des sensations fortes ou bien on s’arrÃÂȘte ici et on reste dans la voiture ? On peut toujours arriver en retard, si tu veux parler
Dis moi ce que tu veux mon ange? A moins que tu n’aies en tÃÂȘte que ton bijou ! Auquel cas, je reste aux commandes ! J’ai décidé d’ÃÂȘtre dominatrice aujourd’hui ! »Lise éclata de rire face à sa derniÚre phrase qui pouvait prÃÂȘter à confusion alors que ce nâ€™ĂƒÂ©tait absolument pas fait exprÚs. Elle se pencha pour capturer ses lÚvres, afin qu'il ne puisse pas rétorquer quoi que ce soit. Rien de tel que de le réduire au silence d'un baiser... Tu sais quoi? J'ai envie de fraises...C'est un truc de fou, mon obsession du jour! J'y pense depuis que je suis levée! » Invité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Mer 5 Mai - 133 Aaron semblait particuliÚrement amusé de voir les réactions de Lise pendant qu’elle conduisait sa petite merveille. Oh il avait confiance en elle et la vitesse ne lui faisait vraiment pas peur donc autant dire qu’il se sentait particuliÚrement à son aise. Puis câ€™ĂƒÂ©tait amusant de voir Lizzie prendre autant de plaisir que lui en conduisant. Ce cÎté garçon manqué sur les bords lui avait toujours beaucoup plu et c’est aussi ce qui faisait qu’il était complÚtement fou d’elle. Qui ne rÃÂȘverait pas d’avoir une petite amie diablement séduisante et en plus fan de vitesse et de sensations fortes ?! Se mettant à rire, il écouta ses commentaires et profita de cette petite escapade improvisée pour se détendre, se délectant tout aussi bien de la vue qui s’offrait à eux que du spectacle extraordinaire qu’il avait sous les yeux. Il avait beau connaÃtre Lizzie par cÅ“ur, il s’extasierait toujours de la mÃÂȘme maniÚre à chaque fois qu’il poserait son regard sur elle. Quand elle arrÃÂȘta la voiture, il comprit bien vite qu’il s’agissait de la fameuse jeune femme de la boutique, celle avec qui Lise avait osé avoir une expérience sans lui
 oh il nâ€™ĂƒÂ©tait pas prÃÂȘt d’oublier ce détail et d’ailleurs, il n’allait pas se gÃÂȘner pour remettre ça sur le tapis dÚs que l’occasion se présenterait. Suite à ses questions, il pencha la tÃÂȘte sur le cÎté, affichant un sourire volontairement provocant quand elle parla de domination et qui trahissait ses pensées mais il se reprit bien vite au moment oÃÂč elle se penchait vers lui pour s’emparer de nouveau de ses lÚvres. Aaron passa bien vite une main contre sa nuque afin de l’approcher davantage de lui, caressant sa langue de la sienne et glissant sa main dans ses cheveux délicatement. Il aurait tellement adoré que ce séjour ne s’achÚve jamais. Retrouver la dure réalité des cours, de New York, de leurs familles et du reste allait s’avérer extrÃÂȘmement difficile, cela ne faisait pas l’ombre d’un doute. Quand il se recula, il souffla doucement, comme pour se remettre de ses émotions et enchaÃna  Je serais tenté de te répondre qu’on pourrait facilement faire un mixte des deux
 du genre combiner un arrÃÂȘt en voiture ET les sensations fortes en tout genre mais une demie heure, ça passe horriblement vite, surtout quand on est ensemble. Puis tu avais l’air de tellement apprécier d’avoir le volant entre les mains que je ne voudrais pas gùcher ton plaisir. »C’est alors que Lise lui parla de son envie de fraises ce qui ne manqua pas de le faire rire. Pourquoi n’y avait-il pas pensé, hum ?! Lizzie était une véritable mordue de ce délicieux petit fruit rouge décliné sous n’importe quelle forme.  Ca tâ€™ĂƒÂ©tonne ?! Tu passes ton temps à manger des fraises. De ma vie entiÚre je n’ai jamais vu personne consommer une telle quantité de fraises, je t’assure mon amour, c’est impressionnant. Si tu en as tellement envie, on pourrait peut-ÃÂȘtre s’en faire monter dans la chambre ce soir
 avec de la chantilly et
 une coupe de champagne, tu en dis quoi ? »Et attention, quand Aaron disait  une coupe de champagne », ce nâ€™ĂƒÂ©tait pas qu’une façon de parler, il n’avait pas envie que Lise reprenne goût à l’alcool et encore moins qu’elle fasse des folies avec son foie désormais en bonne santé. Afin de mieux la convaincre, le jeune homme se pencha vers elle, ponctuant chaque phrase par un petit baiser déposé à la commissure de ses lÚvres. Une petite brise venait de se lever mais malgré tout, la chaleur se faisait encore bel et bien ressentir, à moins que ce ne soit tout simplement la présence de la jeune femme à ses cÎtés, allez savoir
 Je te laisse nous reconduire à la boutique ?! Je prendrai le relais pour rentrer à l’hÎtel, rien que pour faire rùler mon copain le voiturier. » Il se remit à sourire et attendit qu’elle démarre pour reprendre la conversation qu’elle avait lancée quelques minutes plus tÎt. Pourquoi avait-il voulu devenir médecin ? La réponse lui semblait évidente, Aaron n’avait jamais souhaité faire autre chose, à dire vrai, il n’y avait mÃÂȘme jamais pensé. Le fait que son pÚre soit également médecin nâ€™ĂƒÂ©tait probablement pas un hasard, cependant, ça relevait de son inconscient et pour Aaron, il était hors de question d’admettre un quelconque lien avec le choix de son Tu sais pour répondre à ta question de tout à l’heure concernant la médecine et bien
j’ai toujours été passionné par le fonctionnement du corps humain. Et là je parle pas que de l’anatomie féminine si tu vois ce que je veux dire
 plus sérieusement, j’ai toujours voulu faire médecine et ça depuis que je suis gosse. Je crois que la premiÚre fois que j’y ai pensé, c’est quand je me suis retrouvé à l’hÎpital pour un mois
 puis cette idée ne m’a jamais quitté. Je trouvais ça génial de pouvoir guérir les autres. Quand j’avais six ou sept ans, Sarah m’a posé la mÃÂȘme question et je lui ai répondu  Tu sais maman, si je veux devenir médecin, c’est uniquement pour pouvoir t’empailler le jour oÃÂč tu seras morte et te garder avec moi le restant de mes jours. » Cette réplique atroce fait fureur depuis dix-huit ans chaque fois qu’on fait un repas de famille !! Puis je crois surtout que j’avais une certaine motivation non négligeable à la base puis tu sais que j’ai toujours eu des facilités en cours
 Mais honnÃÂȘtement je ne pense pas que ça aurait suffit pour m’aider à surmonter les deux premiÚres années de médecine qui sont généralement horribles à vivre pour tout le monde. On te met une pression incroyable. Ce qui m’a poussé à réussir du premier coup et à arriver dans les premiers au classement, c’est de ne pas avoir levé le nez de mes bouquins pendant ces deux années là . J’avais de bonnes raisons de ne pas le faire car câ€™ĂƒÂ©tait soit étudier, soit penser à toi. Le choix me paraissait évident à ce moment là puis de toute maniÚre, à chaque fois que je refermais mes bouquins tu occupais de nouveau mon esprit. Ah oui et j’oubliais !! Si j’ai voulu faire médecine, c’est avant tout pour pouvoir me payer toute une collection de cabriolets comme celui-ci. T’en dis quoi, hum ?! Un de chaque couleur
 »Il détourna la tÃÂȘte en direction de Lise tout en affichant un large sourire. Il avait bien remarqué qu’elle était presque devenue jalouse de cette voiture – ce qui ne l’empÃÂȘchait visiblement pas de prendre beaucoup de plaisir à la conduire- du coup, il n’osait mÃÂȘme pas imaginé s’il en avait toute une collection.  C’est vrai, je trouve ça dommage qu’on ai jamais pris le temps de parler de nous et de nos rÃÂȘves. Finalement, j’ai l’impression qu’on se connaÃt à la fois trÚs bien et trÚs superficiellement. Non pas que ce soit une mauvaise chose, au contraire, je trouve ça fascinant d’apprendre à te découvrir. La preuve, je découvre des choses intéressantes comme cette histoire d’expérience avec 
 comment s’appelle-t-elle ?! Tu crois qu’elle a prévu quelque chose pour ce soir ?! » Aaron afficha un nouveau sourire taquin, avant de se pencher vers Lise pour déposer un baiser sur son épaule pendant qu’elle conduisait. D’ailleurs, ils n’allaient plus tarder à arriver devant la boutique afin de récupérer leurs tenues, ce qui laissait déjà Aaron relativement perplexe.  Tu crois vraiment qu’il aura eu le temps de finir ?! Je sais pas si je vais vraiment me sentir à l’aise dans cette tenue. Tu sais qu’on m’a déjà proposé de poser pour quelques photos ?! J’ai jamais voulu
 c’est dire à quel point je me sens à l’aise avec le milieu de la mode ! » Invité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Mer 5 Mai - 203 Entendre Aaron parler de ses rÃÂȘves était assez étrange. Intéressant, fascinant mÃÂȘme, et étrange à la fois, parce que Lise avait l’impression d’ignorer tout une partie de lui. Oh, il y avait sûrement des choses qu’il ignorait sur elle également, mais pour l’instant, les projecteurs étaient rivés sur Aaron, et non sur elle. Pour tout dire, ça ne lâ€™ĂƒÂ©tonnait mÃÂȘme pas qu’il ait dit à Sarah qu’il comptait bien l’empailler à sa mort
La connaissant, elle avait du ÃÂȘtre horrifiée par la chose au premier abord, puis elle devait en rire maintenant. Lise en riait elle-mÃÂȘme, tout en conduisant le magnifique cabriolet qu’elle lui avait offert pour les reconduire à la boutique. Les sensations étaient là , câ€™ĂƒÂ©tait certain
Lise était dans son élément, Aaron ne savait pas à quel point. Voilà bien quelque chose qu’il devait ignorer d’elle, puisqu’elle n’avait jamais fait de circuit ni de plongée à San Francisco. Elle avait gardé ces activités là pour quand elle était à New York, en véritĂƒÂ©â€ŠMais il devait aimer cette idée, puisqu’il ne lui avait fait aucune réflexion. Son cÎté garçon manqué parlait trÚs fort parfois
Elle étonnait énormément de ses connaissances masculines rien qu’en matiÚre de conduite, de vitesse ou mÃÂȘme de boisson. Lise était considérée comme une warrior dans tous les sens du terme, parce qu’elle était capable de supporter bien des choses par rapport à ses potes. Câ€™ĂƒÂ©tait sa petite fiertĂƒÂ©â€ŠMais il n’y avait rien de tout cela lorsqu’elle était en présence d’Aaron Elle se trouvait ÃÂȘtre parfaitement féminine, féline mÃÂȘme, portée avant tout sur le charme, la séduction et l’amour. Il n’y avait pas de cÎté garçon manqué qui tienne, sauf peut-ÃÂȘtre lorsqu’elle se trouvait au volant de ce magnifique cabriolet, qu’elle jalousait presque à cause des remarques incessantes d’Aaron
D’ailleurs, il reprit de plus belle en donnant pour derniÚre raison à vouloir devenir médecin le fait de se payer toute une collection de cabriolet. Rien que pour ça, elle lui donna un coup de poing amical contre son épaule, pour le  punir » en quelque sorte. Oh, elle n’avait pas quitté la route des yeux, mais il ne perdait rien pour attendre
S’il continuait son manÚge, elle allait ÃÂȘtre bien plus sévÚre ! Ah oui, tu veux te faire une collection, hein ? Bah tant pis, ce soir je ferais des bébés à mes fraises si jamais tu continues à m’emmerder avec ta folie des caisses ! Puis d’abord, j’suis sûre que sur un circuit je te bats. Question d’entraÃnement mon ange ! Et si t’es pas sage, je ferais des folies avec mes fraises et tu seras privé de bisous ! »Lise lui tira la langue, son cÎté enfantin ressortant divinement, mÃÂȘme si elle était en pleine conduite. Câ€™ĂƒÂ©tait une question de principe, aprÚs tout, il dépassait les bornes ! Elle acceléra d’ailleurs un poil pour se donner plus de sensations et oublier cette derniÚre réplique
Mais elle ralentit légÚrement tandis qu’il la taquina sur son expérience homosexuelle. Ah, elle ne risquait pas d’oublier cette erreur, diable ! S’il lui répétait à longueur de temps, Lise ne risquait pas d’oublier cette expérience qu’elle aurait préféré ne jamais avoir vécue.  Oh, mais si tu veux je lui donne ton numéro, et je vais aller voir mes amants hein ! Puis tu sais, j’ai eu énormément d’expériences masculines
Des musclés, des tatoués, des romantiques, des plans culs
Tout ça tout ça ! J’ai une vie sexuelle active moi, m’sieur ! Mais les plans à plusieurs
Pfeuh c’est juste inintéressant. Surtout avec cette fille d’ailleurs. Puis tu sais, tu es loin de tout savoir sur moi
Tu n’auras qu’à me faire subir un délicieux interrogatoire au restaurant si tu veux, je suis prÃÂȘte ! »Lise eut un petit rire tandis qu’elle garait la voiture, prenant sa main pour y déposer un baiser charmeur comme si câ€™ĂƒÂ©tait elle l’homme et lui la femme dans l’histoire. Pour pousser le bouchon encore plus loin, elle bondit hors de la voiture comme il l’avait fait plus tÎt dans l’aprÚs midi, et fit le tour de celle-ci afin de lui ouvrir la porte. Elle aimait bien se moquer de lui parfois
Mais elle se fit pardonner avec un baiser léger comme une brise déposé sur ses lÚvres, en lui murmurant qu’il n’avait pas à s’inquiéter. Juste un essayage et ils seraient de retour à l’hÎtel. D’ailleurs, à peine Lise avait-elle posé un pied à l’intérieur de la boutique que le couturier bondissait sur elle pour lui dire à quel point il était ravi qu’elle lui ait passé commande
Les vÃÂȘtements étaient prÃÂȘts, bien sûr ! Seulement, ils n’auraient pas le temps de les essayer pour dâ€™ĂƒÂ©ventuelles retouches, car ils devaient fermer boutique. Lise s’empressa de dire que ce nâ€™ĂƒÂ©tait pas grave, et qu’ils repasseraient le cas échéant, mÃÂȘme si elle doutait que ce soit nécessaire
Et que dans tous les cas, le couturier aurait un coup de fil d’elle le lendemain pour qu’il ait son ressentit sur les vÃÂȘtements. Lise prit donc les paquets, tandis que la réceptionniste approchait pour lui déposer un bisou sur la joue, en rajoutant qu’elle avait glissé un magnifique corset rouge et noir en cadeau. GÃÂȘnée, elle la remercia d’un sourire et poussa presque Aaron à l’extérieur, pour qu’ils les reconduisent à l’hÎ Mon dieu qu’elle est gÃÂȘnante ! M’enfin, je suppose que tes souhaits ont été exaucés, ce soir j’essayerais ton corset et tu devras me dire s’il me va. Je suppose que ça ne devrait pas ÃÂȘtre une trop dure épreuve pour toi
 »Lise le taquinait, bien entendu
Quel homme n’avait jamais apprécié voir une femme en corset ? Mais pour l’instant, elle avait hùte de retourner à l’hÎtel, pour voir ce qu’il lui avait concocté pour le reste de la soirée. AprÚs tout, Lise avait toujours adoré les surprises
Et tandis qu’ils rentraient à l’intérieur de la grille de l’hÎtel, elle ne pu s’empÃÂȘcher la remarque suivante  Tiens, ce n’est pas le mÃÂȘme voiturier ! Mais est-ce que tu vas pouvoir supporter de laisser ton fabuleux bijou entre les mains de cet inconnu ? Ca ne va pas te paraÃtre trop insupportable ? Je te laisse lui faire par avance une tÃÂȘte au carré, je t’attends devant la porte de la chambre. »Lise lui fit un clin d’Å“il, suivit d’un bisou sur la joue, avant de descendre et d’effectivement prendre l’ascenseur pour retrouver leur chambre. Elle attendait patiemment devant la porte
En se tenant de maniÚre sexy Adossée au mur, l’un de ses pieds contre
Un vrai pose digne de Tex Avery. Invité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Jeu 6 Mai - 1914 Tout en arrÃÂȘtant la voiture devant l’hÎtel, Aaron évalua attentivement la confiance qu’il pouvait accorder à ce nouveau voiturier. Humm ouais
 il lui semblait encore plus suspect que le précédent, à la longue, il allait finir par dormir dans la voiture, ce serait beaucoup plus simple pour tout le monde et plus spécialement pour Lise qui n’aurait plus à supporter ses incessantes remarques concernant ce fameux joujou. En sortant de la voiture, Aaron lança un regard sombre en direction du jeune homme qui devait avoir dix-huit ans tout au plus. La moindre égratignure sur la carrosserie et Aaron lui ferait une tÃÂȘte au carré, cela ne faisait pas l’ombre d’un doute. Cela dit, cinq minutes plus tard
 “ J’ai toujours rÃÂȘvé d’avoir la mÃÂȘme, mÃÂȘme modÚle, mÃÂȘme couleur. Rien à voir avec ma vieille caisse. Je me la suis payée avec l’argent qui aurait du servir pour mes études. Jâ€™ĂƒÂ©tais pas fait pour ça de toute maniÚre puis j’aime beaucoup ce job. Je me dis qu’en économisant un peu, je devrais pouvoir réussir un jour à me la payer. »Aaron était désormais à la place du passager, main droite pendant de la voiture, grand sourire aux lÚvres et le jeune voiturier à ses cÎtés. Et oui, croyez le ou non, il venait de sympathiser avec ce jeune garçon et ce, uniquement car ils étaient aussi irrécupérables l’un que l’autre devant cette somptueuse voiture. Le jeune voiturier se nommait Kyle et lui avait fait une adorable remarque au moment oÃÂč il avait aperçu la voiture si bien que tout à coup il lui semblait absolument sympathique.  Et attends t’as rien vu encore ! AccélÚre un peu et écoute le bruit qu’elle fait. Un vrai bijou. Vas pas trop vite non plus, t’as pas l’air de tellement maÃtriser
 »Â J’ai mon permis depuis trois mois seulement. »Â Ok, ça suffit, arrÃÂȘte toi là . »Aaron attendit qu’il se gare puis sortit de la voiture avant de jeter un nouveau regard suspect en direction du jeune voiturier. Etait-ce une bonne idée de le laisser seul avec elle ?! Et si jamais il lui faisait du mal et qu’il profitait du fait qu’il ai le dos tourné ?! Aaron secoua doucement la tÃÂȘte en réalisant qu’il parlait de sa voiture comme de sa petite amie, ça devenait vraiment grave à ce niveau là . Il s’apprÃÂȘtait à dire quelque chose, mais Kyle ne tarda pas à reprendre  Ne vous inquiétez pas, je vais veiller sur elle. Je l’aime trop pour pas y faire attention, vous avez ma parole. »Aaron ne pu s’empÃÂȘcher de sourire aprÚs cette remarque. Il venait bel et bien de trouver pire cas que lui. AprÚs l’avoir remercié d’un généreux pourboire, Aaron regagna l’hÎtel et grimpa dans l’ascenseur afin d’aller rejoindre Lizzie. Il traversa rapidement le couloir et lorsqu’il fut devant la chambre souria niaisement en voyant la position dans laquelle elle l’attendait.  Tu as vraiment décidé de jouer avec mes nerfs ce soir, hum?! Jâ€™ĂƒÂ©tais avec le voiturier
 super sympa ce gamin d’ailleurs. Bon, à partir de maintenant, si je fais encore une quelconque allusion à cette voiture, tu as le droit de m’en faire payer le prix. »Il savait que ce ne serait pas facile de passer le reste du week end sans faire la moindre allusion à cette merveille, mais il fallait impérativement qu’il passe à autre chose. Aaron ouvrit la porte de leur chambre et quand ils furent à l’intérieur, il réalisa que Kyle ne lui avait pas donné son ticket pour récupérer la voiture.  Merde !! Je vais appeler la réception pour demander de
 pour
 les..bah pour nos fraises et notre chantilly! »La promesse de ne plus y faire allusion n’aura pas duré bien longtemps et pourtant, il faisait un effort surhumain. Aaron tùcha de défaire le premier bouton de sa chemise qui le serrait légÚrement, tout en dévisageant Lise.  A propos, câ€™ĂƒÂ©tait quoi ces petites confidences en sortant de la boutique ?! Elle voulait te dire quoi à l’oreille ?! J’espÚre que câ€™ĂƒÂ©tait pas une proposition indécente sinon tu vas regretter de ne pas avoir dit oui
 »Il se remit à sourire tout en attrapant le téléphone pour appeler la réception au sujet de sa voiture. Cependant, Lise était toujours à quelques pas de là , aussi, il posa une main sur le combiné afin que son interlocuteur ne puisse pas l’entendre et se pinça les lÚvres avant de reprendre  T’as pas envie d’aller à la salle de bain ou de te changer ?! Oh et il y a une vue magnifique du balcon, tu es allée voir ? » Invité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Jeu 6 Mai - 1949 Aaron et cette voiture, câ€™ĂƒÂ©tait une grande histoire d’amour
Lise était presque tentée de regretter de l’avoir achetée, mais il fallait bien accepter qu’Aaron soit un homme fan de cette voiture. Il en était dingue, presque gaga
Et à peine étaient-ils rentrés dans la chambre, à peine avait-il dit qu’elle pourrait lui faire payer le prix d’une quelconque allusion à sa voiture que Lise sentit qu’il était déjà tenté d’y refaire allusion. Le fait qu’il l’oblige presque à aller se changer lui fit faire une moue proprement outrée
Il ne pouvait pas passer cinq minutes sans parler de cette voiture ma parole ! Mais Lise le laissa prendre le téléphone, tentant de ne pas hurler d’impatience avant d’envoyer à la volée  Oh mais si, elle m’a fait tout plein de confidences bien salaces, et si tu continues de parler de ta fichue voiture, je la prends pour aller faire des cochonneries avec cette fille ! »Câ€™ĂƒÂ©tait dit
Lise avait trÚs mauvais caractÚre, il ne fallait pas lui en vouloir. AprÚs tout, ils étaient censés passer un weekend en amoureux et résultat, il parlait de sa voiture à longueur du temps
Ce fut donc avec un soupir non dissimulé que Lise se rendit dans la salle de bain, tout en claquant joyeusement la porte. Elle nâ€™ĂƒÂ©tait pas vraiment en colÚre, mais elle nâ€™ĂƒÂ©tait pas en excellente disposition non plus. Ca lui faisait bizarre de ressentir tout ça
Sam n’avait jamais parlé de voitures avec elle, câ€™ĂƒÂ©tait plutÎt elle qui le saoulait avec ses circuits, et ça lui faisait presque un coup sur le moral de ne plus ÃÂȘtre la seule à ÃÂȘtre chiante là -dessus
Mais passons. Lise avait des choses à faire pour ÃÂȘtre radieuse ce soir Remettre la magnifique robe Chanel, se débarbouiller, se maquiller et mettre les bijoux qu’Aaron lui avait offerts. Elle passa prÚs d’une demi heure dans la salle de bain, au bas mot, et encore, elle trouvait qu’elle avait été particuliÚrement rapide. Lorsqu’elle ressortit, elle était coiffée, maquillée, habillée bien sûr et parfumée. Pour l’occasion, elle avait fait une sorte de chignon improvisés avec des petites pinces à cheveux, et elle se trouvait parfaite comme ça. Elle eut un soupir légÚrement gÃÂȘné en se présentant à Aaron d’ailleurs, comme si câ€™ĂƒÂ©tait la premiÚre fois qu’il la voyait. AprÚs tout, ce nâ€™ĂƒÂ©tait pas comme si elle était extrÃÂȘmement coutumiÚre de la chose, surtout en sa présence Elle était toujours trÚs bien habillée, mais elle n’avait jamais porté de tenue pareille devant lui. Pour un peu, Lise se serait mise à rougir
Mais elle se contint en se raclant légÚrement la gorge. Elle ne savait pas s’il allait l’attaquer encore avec sa voiture jusqu’à la pousser à bout ou juste la complimenter, toutefois elle s’avança assez prÚs pour sentir sa respiration contre son visage. Elle s’avança davantage et captura trÚs délicatement ses lÚvres, sans que son baiser soit profond
Câ€™ĂƒÂ©tait juste un avant goût. Il n’avait pas tort, elle comptait bien jouer avec ses nerfs autant qu’elle le pourrait, peut-ÃÂȘtre pour lui faire payer le fait d’avoir fait allusion à sa voiture
Ou juste pour le plaisir, et parce qu’elle aimait le savoir en attente d’elle. Câ€™ĂƒÂ©tait sa petite fierté Un baiser pour te faire taire, et pour te faire attendre
 Puis qu’il n’y a ni fraises ni chantilly j’en déduis que tu as appelé pour ta voiture et donc, tu devras supporter mon absence jusqu’à ce que tu sois prÃÂȘt. PremiÚre épreuve ! Je t’attends devant la salle de restaurant
Tùche de ne pas traÃner, qu’un jeune homme ne me kidnappe pas ! »Lise lui donna un autre baiser suivit d’un clin d’Å“il, afin de lui prouver qu’elle plaisantait. Elle quitta ensuite la chambre d’un pas lent, sachant pertinemment qu’il la regarderait jusqu’à ce qu’elle quitte la piÚce. Sauf que maintenant qu’elle avait fermé la porte, il fallait qu’elle trouve à s’occuper jusqu’à ce qu’il apparaisse, magnifique comme d’habitude, dans la salle de restaurant. Comme convenu, elle descendit, presque gÃÂȘnée par les regards qui se posaient sur elle, regrettant presque de ne pas avoir attendu dans la chambre qu’il soit prÃÂȘt
Elle soupira doucement, tùchant de rester calme, jusqu’à ce qu’elle n’arrive à destination. Il y avait trois siÚges second empire devant elle, dont deux étaient déjà occupés par des personnes ùgées se tenant la main. De toute évidence, câ€™ĂƒÂ©tait un couple
Mais à cÅ“ur vaillant rien d’impossible, et Lise se risquait à s’asseoir à cÎté d’eux, sans les regarder de peur d’ÃÂȘtre impolie. Mais ne pas les regarder ne suffit visiblement pas La dame lui demanda ce qu’elle venait faire ici, l’endroit rÃÂȘvé pour qu’un homme demande une femme en mariage ! Les battements du cÅ“ur de Lise commencÚrent à s’accélérer doucement, tandis qu’elle hochait la tÃÂȘte de maniÚre polie, sans oser répondre. Son couple avec Aaron était un peu atypique
Rien que la premiÚre fois qu’elle était venue chez lui, elle n’avait pas été comme les autres Il avait fait des pùtes, elle sâ€™ĂƒÂ©tait moquée de lui, il l’avait aspergée d’eau et il sâ€™ĂƒÂ©tait retrouvé avec le contenu de la casserole, désormais froid, sur sa belle chemise blanche. Peu commun, n’est-ce pas ? Rien qu’à cette pensée, Lise se mit à sourire, et le vieux monsieur n’hésita pas à lui dire que câ€™ĂƒÂ©tait là le sourire d’une femme amoureuse
A croire que ça se lisait sur son visage ! Mais il fallait dire qu’aprÚs ce qu’ils avaient traversé, il y avait de quoi sourire maintenant qu’ils étaient enfin bien ensemble. Pendant des mois, Lise avait craint que cette histoire ne trouve jamais de fin heureuse
Et ces deux personnes ùgées, mariée depuis cinquante ans visiblement, ne savaient pas combien elle était rassuré Vous ÃÂȘtes mariés depuis cinquante ans ? Mes félicitations ! Surtout si vous venez ici pour renouveler vos vÅ“ux chaque année, je trouve ça adorable. »Â Oh mais vous savez mademoiselle, un couple c’est comme un champ de bataille
Il y a des jours de paix et des jours de guerre. Vous trouverez forcément un équilibre entre les deux ! »Â Puissiez vous avoir raison
Cependant, contrairement à vous, je ne suis pas mariée. »Câ€™ĂƒÂ©tait presque triste de le dire. Mais Lise ne se faisait pas d’illusion Aaron avait essuyé une sorte de refus une fois, il ne risquerait sûrement pas de recommencer ! MÃÂȘme si Lise adorerait qu’il le fasse, justement. Parce que cette fois, elle était sûre de la réponse qu’elle donnerait. Invité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Jeu 6 Mai - 2051 A la fois troublé, déstabilisé et complÚtement désarmé, Aaron resta sans voix au moment oÃÂč il vit Lizzie sortir de la salle de bain et sentit trÚs perceptiblement son cÅ“ur s’emballer dans sa poitrine face à cette divine apparition. Incontestablement, il n’avait jamais vu pareille beauté et d’ailleurs, il dû faire un effort incroyable pour ne pas bafouiller au moment oÃÂč il la complimenta. Lise avait toujours été capable de le déstabiliser avec une facilité déconcertante, elle était d’ailleurs la seule à y parvenir car Aaron savait rester de marbre face à n’importe qui d’autre. Un simple mot, un simple regard de sa part et il se retrouvait dans la peau d’un adolescent face à son premier flirt. Câ€™ĂƒÂ©tait assez mignon de le voir agir comme ça, mais Aaron avait plutÎt l’impression de perdre totalement le contrÎle, lui qui d’ordinaire restait maÃtre de la situation et jouait au play boy que rien ni personne n’est capable d’impressionner. Cela dit, il y avait toujours eu entre Lizzie et lui une complicité incroyable et parfois, il n’avait pas le temps de parler qu’elle anticipait déjà ce qui allait venir. Câ€™ĂƒÂ©tait assez désarmant que quelqu’un puisse lire dans vos pensées de la sorte et vous connaisse bien mieux que vous ne vous connaissez vous-mÃÂȘme. C’est fou mais parfois, Aaron avait mÃÂȘme l’impression que tout deux nâ€™ĂƒÂ©taient qu’une seule et mÃÂȘme personne. Par le passé, Sarah lui disait souvent qu’il finirait par trouver quelqu’un qui serait son pendant féminin, car bien que n’ayant jamais rencontré le grand amour elle-mÃÂȘme, elle savait qu’il existait et avait essayé de convaincre son incorrigible fils que l’amour ne se limite par à une belle paire de seins ou à des fesses bien rebondies. Elle lui avait dit que cette fille là le comprendrait mieux que quiconque et qu’elle le mÚnerait par le bout du nez. Jusqu’ici, il sâ€™ĂƒÂ©tait toujours mit à rire en affirmant que celle qui parviendrait à faire chavirer son cÅ“ur nâ€™ĂƒÂ©tait pas encore née sauf que cette fois, il était contraint d’admettre que si Lizzie lui demandait de décrocher la Lune, non seulement, il le ferait mais en plus de ça, il lui ramÚnerait les étoiles avec. C’est alors qu’aprÚs un baiser bien trop court à son goût, la jeune femme lui annonça qu’elle irait l’attendre devant le restaurant. Manifestement, Aaron ne pouvait quâ€™ĂƒÂ©prouver une sentiment de frustration et de déception à l’idée de la laisser s’en aller sans mÃÂȘme prendre la peine de l’attendre. Il aurait été bien trop fiÚre de lui donner son bras et descendre les escaliers en sa compagnie, pénétrant dans le restaurant tel un couple glamour, parfait et parfaitement assorti. Sans compter qu’Aaron ne pouvait détacher son regard de Lizzie et se doutait bien qu’il en serait de mÃÂȘme pour tous les hommes qui croiseraient son chemin entre la chambre et le restaurant. Câ€™ĂƒÂ©tait sans doute le prix à payer pour avoir osé porter toute son attention envers le cabriolet plutÎt qu’envers la femme qu’il aimait et il l’avait certainement bien mérité. Câ€™ĂƒÂ©tait plus fort que lui, il ne l’avait pourtant pas fait dans le but de l’offenser, mais simplement car il était complÚtement fou de son nouveau joujou. Ca lui passerait probablement au fil du temps
DÚs qu’elle referma la porte, il se leva pour à son tour, se préparer. Aaron se devait d’ÃÂȘtre parfait, il fallait qu’il soit à la hauteur de celle qui serait à son bras ce soir. Quand il arriva dans le hall, Aaron ne pu s’empÃÂȘcher de soupirer doucement en apercevant son reflet dans le miroir. Il faut dire qu’ainsi vÃÂȘtu, la ressemblance avec son pÚre était particuliÚrement frappante ce qui avait le don de le déranger. VÃÂȘtu d’un costume qui lui allait à la perfection, Aaron avait pourtant des airs de James Bond des temps modernes et d’ailleurs, les regards troublés de quelques femmes qu’il croisa le firent sourire. En d’autres circonstances, Aaron n’aurait pas hésité à en rajouter un peu, mais depuis qu’il avait retrouvé Lise, il n’en éprouvait ni l’envie, ni le besoin, sans doute parce qu’elle était la seule à qui il avait envie de plaire
 Quand il l’aperçu enfin, il remarqua qu’elle était en train de parler avec un couple d’un certain ùge. Aaron se rapprocha, salua poliment le couple et glissa sa main dans celle de Lise avant de déposer un baiser sur sa joue.  Ne sont-ils pas mignons Georges ? J’ai l’impression de nous voir à leur ùge. L’amour est un bien précieux, ne l’oubliez jamais. »Aaron ne tarda pas à comprendre qu’ils étaient tout deux ici pour fÃÂȘter leur anniversaire de mariage, le cinquantiÚme pour ÃÂȘtre exact et à dire vrai, la perspective d’une telle relation le laissait rÃÂȘveur et perplexe à la fois. Tandis que Lizzie et lui suivaient un jeune serveur jusqu’à la table qui leur était réservée, Aaron pencha légÚrement la tÃÂȘte sur le cÎté, visiblement songeur.  Cinquante ans, tu te rends compte ?! C’est magnifique je trouve. Tu crois que tu pourrais me supporter aussi longtemps ?! Je veux dire, cinquante ans, c’est pas rien. C’est ça le véritable amour, pas les histoires foutues en l’air au moindre coup de vent. Passer toute une vie avec la mÃÂȘme personne
 c’est quelque chose qui m’aurait sans doute effrayé jusqu’à aujourd’ Le mot était faible. Déjà quand une fille avait le malheur de le rappeler aprÚs un premier rendez vous, Aaron prenait la fuite sans réfléchir alors imaginez-le envisager une relation sur le long terme, câ€™ĂƒÂ©tait carrément impossible ! Pourtant, Lise était une véritable évidence à ses yeux, il savait qu’il était capable de changer pour elle et d’ailleurs, il en avait envie car il ne se voyait pas passer le restant de ses jours avec une autre personne qu’elle.  Tu as déjà pensé à ça ?! A ce qui pourrait advenir de nous dans quelques années, dans quelques mois ?! J’ai jamais vraiment cru qu’on pouvait s’aimer toute une vie. A mes yeux, il était possible d’avoir plusieurs grands amours dans une vie, des histoires qui te font changer du tout au tout et qui te marquent définitivement. Enfin, ça câ€™ĂƒÂ©tait avant
 depuis j’ai eu le temps de mûrir et de comprendre que quand on aime, ce n’est qu’une fois et pour de bon. »Il détourna son regard vers elle, serrant un peu plus sa main dans la sienne avant d’embrasser de nouveau sa joue tendrement tandis que le serveur leur indiquait leur table avec un large sourire, les invitant à prendre place. C’est ce qu’ils firent. Aaron le remercia et le serveur leur proposa alors quelques rafraÃchissements pour commencer le repas. Connaissant les goûts de Lise et parce que cette soirée se devait d’ÃÂȘtre spéciale, Aaron commanda une bouteille de vin blanc et quand le serveur fut parti, il déposa sa main sur celle de la jeune femme d’un geste tendre.  Et ne t’en fais pas mon ange, je veille sur ce tout nouveau foi. Tu as un médecin
bon... futur médecin
 rien que pour toi. »Il se pencha délicatement, tout en approchant la main de Lise de ses lÚvres pour y déposer un baiser et songea à nouveau à cette histoire de mariage.  D’aprÚs toi, qu’est-ce qui fait qu’on peut s’aimer durant cinquante ans de la sorte ?! »DerniÚre édition par Aaron J. Cooper le Jeu 6 Mai - 2141, édité 2 fois Invité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Jeu 6 Mai - 2122 Lise eut un sourire radieux face aux remarques de la vieille dame. Pour un peu, elle se serait imaginée dans quelques années, autant en forme
Câ€™ĂƒÂ©tait étrange de s’imaginer dans quelques années comme ça, au bras du mÃÂȘme mari depuis cinquante ans. Avant, Lise aurait été pétrifiée face à cette idée
Maintenant, elle la laissait rÃÂȘveuse. Câ€™ĂƒÂ©tait merveilleux d’ÃÂȘtre aussi équilibrée dans un couple qui dure, qui reste solide. Ce fut la premiÚre chose à laquelle elle songea tandis qu’Aaron arrivait, fringuant qu’il était, accueillit par un immense sourire de la part de Lise. Elle le dévorait littéralement des yeux, n’osant qu’à peine imaginer le nombre de regards qui devaient s’ÃÂȘtre posés sur lui depuis qu’il était entré. Mais elle s’en fichait, il n’y en aurait que pour eux ce soir. Au diable les anciennes histoires, les anciens réflexes, Lise nâ€™ĂƒÂ©tait pas là pour séduire n’importe qui, elle voulait uniquement plaire à Aaron. Ce fut pourquoi elle eut un sourire non moins radieux face à la derniÚre réplique de cette vieille dame, comprenant bien mieux le sens de ses mots maintenant qu’il y a quelques années. Avant, Lise nâ€™ĂƒÂ©tait qu’une tÃÂȘte brûlée souhaitant s’amuser sans jamais se préoccuper du lendemain. Le reste n’avait pas d’importance
En cela, son pÚre n’avait pas tort, elle avait été une enfant sans responsabilités, sans conscience. Ce nâ€™ĂƒÂ©tait pas dit forcément de la maniÚre la plus aimable, mais elle devait reconnaÃtre qu’entre Sam et elle, leur pÚre avait eu du fil à retordre. Mais elle quitta bien vite ce genre de pensées, manquant dâ€™ĂƒÂ©clater de rire tandis qu’Aaron était éberlué par les cinquante ans de mariage du couple qu’il venait de voir. Il n’avait pas tort, câ€™ĂƒÂ©tait impressionnant. A bien y réfléchir, Lise était totalement prÃÂȘte à vivre autant d’années qu’il lui permettrait à ses cÎtés. Dire que ce serait facile serait un pur mensonge
Mais elle se plaisait à croire que malgré les difficultés, ils seraient capable de ne pas s’entretuer et de s’aimer, tout simplement. Déjà , ils avaient retrouvé leur ancienne complicité, et rien qu’à entendre Aaron commander l’un des vins blancs qu’elle préférait la fit sourire. Il la connaissait vraiment bien
Et il souhaitait prendre soin d’elle. Oh, elle n’avait pas l’intention de laisser ses anciens débordements alcooliques s’exprimer ce soir
Ce serait inconvenant et Lise n’avait aucune envie de gùcher la soirée. Elle serra d’autant plus fortement sa main, goûtant ses lÚvres avec autant de délice qu’autrefois. Rien n’avait changé, câ€™ĂƒÂ©tait comme si leur rupture n’avait jamais eu lieu
Et elle revivait rien qu’en le Oui, sans conteste, si on a trouvé sa moitié, on peut vivre cinquante ans
MÃÂȘme plus, d’ailleurs. Le mariage peut effrayer, mais il peut aussi consolider un couple, et le faire vivre jusqu’à la mort des deux conjoints. Avant, je ne cessais de répéter à Sam que je ne voulais pas avoir la corde au cou, que je nâ€™ĂƒÂ©tais pas assez sage pour ça
C’est vrai que j’aurais trompé n’importe qui si j’en avais eu l’occasion, mais avec toi, jamais je n’aurais osé faire une chose pareille. Parce que dans cinquante ans, je t’aimerais toujours pareillement, à en rompre les battements de mon cÅ“ur. »La discussion était trÚs différente de tout à l’heure
Il n’y avait plus son expérience homosexuelle qui revenait sur le tapis, il avait oublié pour un temps sa voiture, il y avait juste cette histoire de mariage. Hélas, d’un cÎté, cela lui faisait mal, car cela lui rappelait que lors du NoÃl d’il y a trois ans, elle aurait pu se fiancer à Aaron. Douloureuse réalité, mais dont elle ne laissa rien paraÃtre
Du moins, elle essayait, et l’arrivée du serveur avec le vin fut à point nommé Il débouchona la bouteille et mit un fond de vin dans un grand verre, afin de lui faire goûter. Honneur aux dames, comme dit le proverbe
Lise en huma tout d’abord le parfum, avant de tremper seulement ses lÚvres pour le goûter. Il était absolument divin
 Huuum, il est parfait. Tu vas l’adorer mon ange. »Lise reposa son verre afin que le serveur la serve un peu plus, attendant qu’Aaron soit aussi servit et le serveur partit pour trinquer. Elle leva son verre sans le quitter des yeux, choquant trÚs légÚrement leurs deux verres avant de trinquer véritablement  A nous, à l’amour, et aux mariages qui durent toute une vie. »Câ€™ĂƒÂ©tait un peu son souhait, en vérité, mais Lise était trop fiÚre pour le dire ouvertement. Elle se contenta donc de boire une légÚre gorgée de ce vin absolument fabuleux avant de reposer le verre, sans quitter Aaron une seconde des yeux. Elle se souvenait tellement bien de la premiÚre fois qu’il l’avait invitée chez lui
Et de la maniÚre dont elle avait été certaine qu’il n’y aurait plus que lui ! Tous ces évÚnements entre eux avaient fait qu’elle ne se voyait avec nul autre que lui. Câ€™ĂƒÂ©tait Aaron, ou bien elle finirait vieille fille
Lise l’avait toujours Tu te souviens, la premiÚre fois que tu m’as invitée chez toi ? On se connaissait depuis trois semaines et on arrÃÂȘtait pas de se balancer des piques à la figure. Tu aimais mon répondant autant que j’appréciais le tiens
Et tu avais fait des pùtes. AprÚs manger, il en restait dans la casserole, tu n’avait pas tout égoûté et il restait de l’eau. Je me suis moquée de toi parce que tu avais les réflexes culinaires de tous les autres gars que je connaissais
Tu t’es faussement vexé et tu m’as aspergé avec ton robinet. Et moi, je t’ai balancé le contenu de la casserole dessus, à savoir l’eau froide et les pùtes restantes. Tu m’as soulevée et emmenée sous la douche, on s’est battus comme des chiffonniers, et tu as dit que tu te rendais, que j’avais gagné. J’ai crié victoire, tu m’as embrassée. Parce que tu nâ€™ĂƒÂ©tais pas comme les autres et que tu as attendu un certain moment avant de le faire, je me suis dit que je ne voulais personne d’autre que toi dans ma vie. Tu étais
Juste toi. Original, sans barriÚre de mensonges. En pénétrant dans ton antre, je savais que je t’aimais déjà . Et aujourd’hui, alors que je suis en face de toi, je t’aime plus que je ne pourrais le dire. Je voulais que tu le saches
C’est un peu ma réponse à ta question de tout à l’heure. »Et Lise souriait, de maniÚre énigmatique. Ils étaient originaux tous les deux
Comme s’ils étaient chacun une moitié de l’autre. A cet instant, elle prit sa main délicatement, n’ayant plus conscience du reste du monde. Elle savait bien que ce ne serait pas facile tous les jours, mais qu’importe ! Aaron, j’ai une question à te poser. Tu n’es pas obligé d’y répondre tout de suite, mais je veux quand mÃÂȘme le faire. Puisque Kitty veut visiblement aller vivre chez Jenny parce qu’elle est trÚs maternelle avec elle, et parce que je suis convaincue que cet environnement est bien meilleur pour une fillette de onze ans
Est-ce que tu viendrais habiter avec moi ? Tous les jours, toutes les nuits
Tu devras me supporter, mais
J’en ai marre d’ÃÂȘtre séparée de toi. Je veux ÃÂȘtre avec toi jour et nuit. Je veux ÃÂȘtre là quand tu rentres, que ce soit des cours ou de ton stage, je veux pouvoir te faire des bisous dans le cou quand tu travailles, je veux pouvoir t’obliger à rester dans le lit quand tu es pressé, je veux
Vivre avec toi. » Invité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Jeu 6 Mai - 2242 Aux mariages qui durent toute une vie
 voila une affirmation pleine de sous-entendus on ne peut plus explicites. Aaron esquissa un léger sourire et bu une gorgée de vin blanc, détournant le regard un instant tant la question du mariage se faisait présente, presque gÃÂȘnante. Câ€™ĂƒÂ©tait un véritable terrain glissant d’aborder ce point ensemble, il en avait conscience. Bien sur, c’est lui qui les avait amené à aborder ce sujet là tout simplement car il était important pour lui de connaÃtre le point de vue de la jeune femme, cependant, il ne voulait pas précipiter les choses et mÃÂȘme s’il lui paraissait évident qu’un jour, il ferait sa demande, ce nâ€™ĂƒÂ©tait pas pour maintenant. Lorsque Lise changea de sujet, parlant de leur premier repas chez lui, Aaron grimaça légÚrement, se souvenant de cette soirée à la fois magique et catastrophique. Ce qu’il ne lui avait jamais avoué, c’est qu’il avait été contraint de faire des pùtes aprÚs avoir tenté un repas un peu plus sophistiqué et manqué de mettre le feu à la cuisine. C’est donc en catastrophe qu’il avait choisi de changer son programme et de mettre de l’eau sur le feu. Pas vraiment romantique pour un rendez vous, mais depuis, il avait eu l’occasion de lui prouver à maintes reprises ses talents culinaires ; pizzas, pùtes et plats surgelés. Il déclarait forfait, il ne pouvait vraiment pas mieux faire.  Comment pourrais-je oublier !! Jâ€™ĂƒÂ©tais déjà un piÚtre cuisinier à lâ€™ĂƒÂ©poque mais quoi qu’il en soit, câ€™ĂƒÂ©tait une soirée magnifique. Puis tu n’as jamais osé m’avouer que mes pùtes étaient immangeables, tu as mÃÂȘme eu l’audace de prétendre que câ€™ĂƒÂ©tait délicieux alors que moi, j’avais l’impression de manger du carton en sauce. Puis câ€™ĂƒÂ©tait notre premier baiser échangĂƒÂ©â€Š j’ai attendu longtemps avant de me lancer avec toi. Non pas que je ne voulais pas le faire, au contraire, j’en mourrais d’envie depuis un bout de temps déjà . Tu n’imagines mÃÂȘme pas à quel point d’ailleurs. J’ai juste
 parfois besoin de temps avant de me lancer. »Etait-il toujours en train de parler de leur premier rendez vous ?! Pas si sûr. Aaron avait compris que la grande question du mariage était le point fondamental de cette soirée mais il ne voulait pas que Lise s’imagine qu’il allait lui demander sa main à la fin de ce repas, il n’en avait pas l’intention. Pas maintenant et pas ici. Il savait qu’elle comprendrait le message qu’il était en train de lui faire maladroitement passer, aussi, il caressa doucement sa main dans la sienne tout en reprenant  Je t’aime plus que de raison et ça ne changera jamais. Je n’ai aucun doute concernant notre avenir et surtout je n’en ai aucun concernant mes sentiments. »Peut-ÃÂȘtre que l’expérience d’il y a trois ans l’avait un peu refroidi mais ce n’est pas vraiment la raison qui le poussait à lui dire tout ça. Aaron se souvenait de la maniÚre dont il avait organisé cette soirée de NoÃl, tout devait ÃÂȘtre parfait, magique et inoubliable. Il voulait que cette soirée reste à tout jamais gravée dans leurs mémoires. Oh, de toute évidence, ils n’oublieraient jamais ce fameux 24 décembre mais pas pour les mÃÂȘmes raisons malheureusement. Voyant son sourire énigmatique, Aaron compris bien vite qu’il y avait quelque chose dont elle souhaitait lui faire part et à dire vrai, changer de conversation ne pu que lui procurer le plus grand des soulagements. Aaron ne répondit pas immédiatement, esquissant un léger sourire en coin, ce sourire qu’il adoptait chaque fois qu’il était sur le point de la taquiner.  Il y aura de la place pour ma voiture aussi ?! 
 »Il lui lança un petit clin d’Å“il et ne lui laissa pas le temps de répliquer quoi que ce soit. Bien sur qu’il souhaitait vivre avec elle, câ€™ĂƒÂ©tait une évidence à ses yeux.  A partir du moment oÃÂč cela implique de devoir passer plus de temps à tes cÎtés, de m’endormir avec toi chaque soir et de me réveiller en te serrant dans mes bras chaque matin, je ne peux que vouloir. Mais je te préviens, je ne suis pas facile à vivre au quotidien, tu crois que tu pourras me supporter ?! Plus sérieusement, c’est tout ce que je souhaite mon amour
 ça devient trop difficile de te voir par intermittence. J’ai besoin de ta présence à mes cÎtés et je ne veux plus que nous soyons séparés aussi longtemps. »Ces derniers temps, Aaron avait d’ailleurs complÚtement déserté son appartement puisqu’il passait le plus clair de son temps chez Lise, ne pouvant désormais plus se passer d’elle. La distance, aussi infime soit-elle était devenue insupportable, il avait besoin d’elle, câ€™ĂƒÂ©tait un besoin vital. Aaron prit un air soudainement plus sérieux, se rendant compte que Lise faisait des efforts afin de stabiliser leur relation alors qu’il venait de lui faire comprendre qu’il nâ€™ĂƒÂ©tait pas prÃÂȘt à la demander en mariage. Légitimement, elle pourrait croire qu’il nâ€™ĂƒÂ©tait pas certain de ses choix et de son engagement envers elle, ce qui nâ€™ĂƒÂ©tait pourtant pas le cas, car Aaron était certain de ses sentiments et de son envie de passer le restant de ses jours à ses cÎtés.  Tu sais
 je ne voudrais pas que tu crois que ce qui s’est passé il y a trois ans a une quelconque influence sur ce que je t’ai dit tout à l’heure. Ca n’a mÃÂȘme strictement rien à voir. J’ai mis longtemps avant de t’embrasser, encore plus longtemps à te dire à quel point je t’aime et
 ça
ça viendra aussi. » Invité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Jeu 6 Mai - 2308 Il est vrai que Lise avait toujours parlé de la  cuisine » d’Aaron de maniÚre trÚs méliorative
A raison ou pas, elle s’en fichait, elle voulait simplement qu’il ait l’impression qu’elle était ravie de passer ce moment avec lui, ce qui était le cas. Il n’avait pas connu cette fille tÃÂȘte brûlée qui faisait n’importe quoi juste pour rendre son pÚre comme son frÚre complÚtement dingues. Insupportable mais indispensable, voilà ce que Sam disait d’elle. Il fallait dire qu’elle avait été pénible dÚs sa venue au monde
MÃÂȘme sa mÚre le lui disait lorsqu’elle était petite ! Mais aujourd’hui, les choses étaient bien différentes Lise avait grandit, mûrit, mÃÂȘme si ce nâ€™ĂƒÂ©tait pas toujours flagrant, elle faisait énormément d’efforts pour ne pas agir de maniÚre égoïste, comme elle l’avait fait trois ans auparavant. Cela dit, elle déglutit difficilement en entendant qu’Aaron avait besoin de temps pour se lancer dans ce genre de situation
Légitime, mais un peu dur à avaler. Lise était un peu impatiente, qui ne l’aurait pas été ? Mais elle ne fit aucune mine déçue. Juste un sourire trÚs léger, un peu gÃÂȘné, avant de reprendre une petite gorgée de vin. Non seulement il était bon, mais en plus il l’aidait à cacher son malaise
Oh bien sûr, elle n’avait aucune envie de se vider la bouteille à elle toute seule comme elle l’aurait fait dans n’importe quelle autre soirée ! Mais il ne savait pas à quel point elle était mal à l’aise sur ce genre de terrain glissant. Lise n’avait jamais été trÚs douée pour le romantisme, et d’autant plus lorsqu’on lui faisait remarquer qu’elle devenait romantique. Elle n’aimait pas ÃÂȘtre démasquée
Câ€™ĂƒÂ©tait insupportable de se prendre pour une fille, parfois. Lise était une fille spéciale, on ne cessait de lui dire, mais elle aimait l’ÃÂȘtre. Faire des trucs de mecs, conduire trop vite, trop boire
Tout ça, ce nâ€™ĂƒÂ©tait pas un genre qu’elle se donnait, juste une maniÚre de penser qu’elle avait toujours eue. Aaron ne l’avait jamais vue ainsi car à San Francisco elle sâ€™ĂƒÂ©tait considérablement assagie, surtout aprÚs avoir rencontré le jeune homme. Mais à son retour à New York, la tÃÂȘte brûlée était revenue à la charge
Lise craignait presque qu’il ne la voit ainsi, bien que la complicité se soit instaurée à nouveau. Elle était trop  sage » en sa présence, et elle savait qu’à un moment donné son cÎté aventurier, aimant le danger finirait par revenir. Restait à espérer que ce grand retour de flamme n’aurait pas lieu ce soir ! Mais il eut le réflexe de parler de place pour sa voiture, et le visage de Lise se ferma l’espace d’un instant. Il était incorrigible, ce nâ€™ĂƒÂ©tait pas possible ! Il se rattrapa bien sûr, mais la demoiselle prit un air offusqué pendant quelques secondes
L’entendre lui dire qu’il ne supportait plus de la voir par intermittences lui fit plaisir, bien sûr, mais d’un autre cÎté, elle était tentée d’avoir peur que cette fichue voiture ne vienne toujours s’immiscer ! Tu ne peux pas arrÃÂȘter de parler de ta fichue voiture pendant un moment pareil ?! Rhaaa, ça me fiche le bourdon ! Pourquoi je te l’ai offerte hein ? Pourquoi je t’ai pas offert une voiture miniature ! Et puis
Ce qui s’est passé il y a trois ans a forcément une incidence, tu le sais aussi bien que moi. Tu te sentais prÃÂȘt à ce moment là , et si tu ne l’est plus aujourd’hui c’est bien parce que j’ai merdé à ce moment là , non ? Bien que les apparences soient trompeuses, je suis pas romantique, t’inquiÚtes pas. »Difficile de mentir là -dessus, mais Lise avait décidé de cacher tout cela à l’intérieur d’elle. Ca lui ferait un sujet de  discussion » lorsqu’elle irait au cimetiÚre pour mettre des fleurs sur les tombes de sa mÚre et de son frÚre. Mais elle serra d’autant plus fortement sa main qu’elle avait un peu de mal à déglutir
Elle n’aimait pas ce malaise qui la prenait soudainement, comme si elle vivait son tout premier flirt et qu’elle ne savait pas quoi faire. En l’occurrence, ce nâ€™ĂƒÂ©tait pas son premier flirt, mais câ€™ĂƒÂ©tait sa seule et unique histoire d’amour. Elle n’en voulait pas d’autre et n’en aurait jamais eu d’autre si jamais ils ne sâ€™ĂƒÂ©taient pas rabibochés
Mais ça, Aaron le savait déjà . Du moins, câ€™ĂƒÂ©tait ce qu’elle Oh, je pourrais trÚs bien te supporter h24 mon amour
Mais je te préviens, je suis une tÃÂȘte brûlée finie. Je mâ€™ĂƒÂ©tais assagie en allant sur San Francisco et en te rencontrant, mais quand tu n’es pas là , je suis un peu dangereuse comme fille. J’aime faire n’importe quoi, surtout des choses dangereuses qui me donneront des sensations fortes. Je vais tout le temps sur les circuits, et j’adore la plongée sans masque, parce que je suis relativement forte en apnée. Je suis pas une fille sage, c’est clair
Insupportable mais indispensable, voilà ce que disait ma mÚre de moi. Mais je suis exactement comme elle
Voilà pourquoi j’ai toujours rendu mon pÚre et mon frÚre complÚtement dingos. Je ne rentrais pas de la nuit sans prévenir, dÚs l’ñge de quinze ans. Je suis partie à Paris pour mon premier défilé sans rien dire à ce moment là . J’ai reçu le pire savon de ma vie en rentrant, mais j’ai continué mes conneries. Pas forcément dangereuses, mais comme je me sens un peu inutile, je fais des choses qui me prouvent que je suis vivante. Bah, c’est con, je sais. Maintenant que William s’est assagit, ça risque d’ÃÂȘtre pire
Il va m’abandonner pour sa petite femme et c’est normal, mais quelque part, ça me fait baliser sévÚrement. Je vais avoir l’impression d’ÃÂȘtre un fossile ! Tu vas pouvoir supporter une horreur pareille toi ? Rien qu’une fille capable d’aller courir dans tout New York à trois heures du matin pour trouver la seule épicerie ouverte qui pourrait avoir des fraises ? »Lise se mit à rire doucement. Cherchait-elle à lui faire peur ? Non, il la connaissait, il savait trÚs bien comment elle était. Une fille pas comme les autres, qui cherche son identité dans la différence justement. Et cette différence s’exprimait aussi ici, au restaurant, alors que le serveur venait de revenir pour prendre la commande. Étant donné qu’ils n’avaient jamais été au restaurant ensemble, elle n’avait jamais agit comme ça avec lui
Mais elle prenait toujours son dessert avant. Elle commanda donc un fraisier sous une montagne de chantilly d’abord, puis un doublé de carpaccio aux truffes et pour finir, une salade royale. Peu commune, cette Lizzie
A peine le serveur avait-il quitté leur table pour aller passer la commande en cuisine qu’elle s’apprÃÂȘta à lui expliquer pourquoi elle agissait comme ça  Puisque tu n’as jamais été au restaurant avec moi, sache que je prends toujours mon dessert avant. J’avais prévenu les serveurs pendant que tu te préparais, et je crois que j’ai égayé leur soirée, car ils ont bien rit. Mais imagine qu’un astéroïde tombe sur ce restaurant et que je meurs, on m’aura privée de la chose que je préfÚre
Alors je prends toujours ce que je préfÚre avant ! Logique presque mathématiques, sinon digne d’une Lise Abbygail Hawkins. »Lise était presque morte de rire, mais se retenait. Au moins, elle avait relégué son malaise aux oubliettes pour un petit temps ! Invité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Ven 7 Mai - 008 En résumé, la fin de ce somptueux week-end sâ€™ĂƒÂ©tait relativement bien déroulée bien qu’Aaron ai eu beaucoup de mal à digérer les paroles de Lise durant le repas. A croire qu’il y avait encore pas mal de choses qu’elle ignorait à son sujet et il fut difficile de lui faire comprendre que ce qui sâ€™ĂƒÂ©tait passé trois ans auparavant n’avait vraiment plus la moindre importance à ses yeux. S’il refusait de la demander en mariage pour l’instant, câ€™ĂƒÂ©tait avant tout pour des raisons personnelles, parce qu’il avait véritablement besoin de faire un travail sur lui-mÃÂȘme. Lise n’avait strictement rien à voir avec cette décision, bien au contraire, puisqu’il savait que d’une maniÚre ou d’une autre, elle était la femme de sa vie et qu’il voulait terminer ses jours à ses cÎtés. DÚs lors, Aaron tùcha de ne plus faire la moindre remarque concernant la vie de couple, le mariage et surtout
la voiture. Sa derniÚre plaisanterie à ce sujet était plutÎt mal passée et de son cÎté, il avait compris le message. Tout n’est pas rose
 Retour à New York. Faisant d’incessants allers retours entre la cuisine et le salon de son appartement, un bouquin de neurobiologie entre les mains, Aaron répétait en boucle les mÃÂȘmes phrases, se prÃÂȘtant au rituel fatidique du bourrage de crùne avant les examens de fin d’année. Son expérience sur le terrain l’avait certes, beaucoup enrichi, mais la théorie reste la théorie et cette année encore, il n’allait pas y échapper. Tandis qu’il abordait un nouveau chapitre concernant la migration des neuroblastes, il entendit sonner à la porte avec insistance, chose dont il avait horreur. Quand il ouvrit la porte, il reconnu presque immédiatement la jolie blonde qui se trouvait devant lui, Rachel. Aaron avait fait sa connaissance deux ans plus tÎt, ils avaient fait leur deuxiÚme année de médecine ensemble et il savait que Rachel dansait dans une boite de nuit afin de payer ses cours. A plusieurs reprises, elle avait déclaré sa flamme à Aaron, affirmant ÃÂȘtre amoureuse de lui, qu’il était le grand amour de sa vie et autre baratin féminin qu’il entendait une bonne dizaine de fois par mois et qui n’avait pas le moindre effet sur lui. Autant dire les choses clairement, à ses yeux, Rachel nâ€™ĂƒÂ©tait rien de plus qu’un plan cul. Ils avaient couché ensemble réguliÚrement jusqu’au jour oÃÂč elle n’avait plus donné de nouvelles et arrÃÂȘté les cours. Aaron n’avait jamais su pourquoi. En l’occurrence, il commençait vaguement à comprendre la raison de cette brutale disparition
 Rachel tenait dans ses bras un bébé de quelques mois, visiblement, un petit garçon. Du moins, c’est ce qu’il en déduisit en le voyant vÃÂȘtu de bleu de la tÃÂȘte aux pieds.  Rachel ?! »Â Salut Aaron
 euh
 je peux entrer une minute ?!  Bien sur, je t’en prie, entre. Je ne m’attendais vraiment pas à te voir, surtout aprÚs tout ce temps. »Allez savoir s’il ne s’agissait que d’une vague impression mais Aaron avait la vague sensation que Rachel lui cachait quelque chose. Elle semblait mystérieuse, mal à l’aise, confuse, de plus, que faisait-elle ici aprÚs plus d’un an passé sans donner de nouvelle ?! Afin de briser le silence qui venait de s’installer et surtout, comprendre ce que Rachel venait faire chez lui en plein milieu de la journée avec un gamin entre les bras, Aaron décida de reprendre la Tu ne me présentes pas ? »Â C’est Tyler, mon fils. Est-ce que tu veux le prendre ?»Â C'est-à -dire que 
 j’ai jamais été doué avec les bébés. C’est mignon mais je
 non. »Â Comme tu voudras. »Â C’est pour lui que tu as arrÃÂȘté les cours ? Il est mignon comme tout. Il a le mÃÂȘme sourire que sa maman. »Â Et les yeux de son pÚre. Puis pour répondre à ta question, j’ai en effet décidé d’arrÃÂȘter les cours en découvrant que jâ€™ĂƒÂ©tais enceinte. Je l’ai appris au cours du quatriÚme mois en réalité, du coup, j’ai été prise au dépourvu et tout s’est enchaÃné à une vitesse folle. Cela dit, je suis heureuse d’avoir Tyler. J’ai toujours voulu devenir maman trÚs jeune, c’est désormais chose faite. »Â Rachel
 excuse moi mais, j’ai du mal à comprendre ce que tu viens faire ici. Attention, ça me fait vraiment plaisir de te voir mais
 »Â Oui je sais, j’aurais sûrement dû t’appeler plus tÎt, je suis désolée Aaron. En fait, j’ai un petit service à te demander. Est-ce que tu voudrais bien garder Tyler pour la journée ? J’ai un entretien d’embauche et la nounou m’a fait faux-bond à la derniÚre minute pour se rendre à un enterrement, c’est la panique. Je ne peux pas me rendre à cet entretien avec Tyler, tu imagines bien. »Â C'est-à -dire que
 j’y connais rien moi en bébé. J’avais décidé de passer la journée à la bibliothÚque, mes examens commencent la semaine prochaine. Il n’y a vraiment personne d’autre qui puisse te rendre ce service ? »Â Non personne. »Â Rachel, je suis vraiment pris de court là . Et son pÚre ?! Il ne peut pas s’en occuper le temps d’une journée ?»Â Justement
 »Â Comment ça justement ? »Â Justement Aaron, je te demande de garder Tyler pour la journée. Je te demande de t’occuper de ton fils. »Comment expliquer ce qui se passa dans la tÃÂȘte d’Aaron à cet instant précis ?! Disons qu’il eu d’abord l’impression que le monde était en train de sâ€™ĂƒÂ©crouler autour de lui, s’en suivit un petit rire nerveux et un mouvement de tÃÂȘte signifiant clairement qu’il n’y croyait pas et qu’il ne pouvait ÃÂȘtre le pÚre de cet enfant.  Oh non non non non non !! Tu ne me feras pas croire que cet enfant est le mien pour la simple et bonne raison que je n’ai rien à voir avec lui. T’es cinglée ou quoi ?! »Â Aaron écoute moi !! Tyler est ton fils. J’en suis absolument certaine, ça ne fait pas l’ombre d’un doute. »Â QUOI ?! Comment ça pas l’ombre d’un doute ?! Bien sur qu’il y a de quoi douter !! Tu disparais comme ça du jour au lendemain pour revenir un an plus tard et me coller un mouflet dans les bras en prétendant que c’est le mien ?! Tu crois vraiment que je vais accepter de gober ça ? »Â Mais putain Aaron ouvre les yeux !! »Â Ouvrir les yeux sur quoi ??!! Tu voudrais que je réagisse comment ?! »Â Bon crois ce que tu veux ça m’est égal. En attendant
 »Rachel ne lui laissa pas le temps d’ajouter quoi que ce soit, elle avait déjà mis Tyler dans les bras d’Aaron et déposé les affaires du petit sur la table du salon, biberon, couches, doudou, bref, tout le matos qui le faisait fré J’ai pas le temps de discuter avec toi, j’ai un entretien dans une heure et je suis déjà en retard. On en reparle plus tard d’accord ?! Donne lui son biberon, il doit avoir faim. »Â Non !! Rachel attends !! »Trop tard, Rachel était déjà partie. Aaron prit le bébé à bout de bras, comme s’il tenait un paquet cadeau empoisonné ce qui semblait beaucoup amuser le petit Tyler puisqu’il souriait tout en gazouillant. Que faire maintenant ?! Aaron l’emmena avec lui jusqu’au salon et prit son téléphone portable pour appeler Lise et lui dire qu'il ne pourrait pas venir comme il le lui avait promis. Lui expliquer pourquoi, ça c'était encore tout autre chose... C’est moi mon cÅ“ur
 euh
 je vais pas pouvoir venir immédiatement
 un empÃÂȘchement de derniÚre minute on va dire
 tu ne m’en veux pas trop ?... ce serait trop long à t’expliquer en fait
 oui
 je t’appelle plus tard
 Lizzie ?! Je t’aime
 » Invité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Ven 7 Mai - 036 La fin du weekend sâ€™ĂƒÂ©tait trÚs bien déroulée, et autant dire que le retour à la réalité avait été difficile pour Lise. D’une part, parce que sa petite sÅ“ur arrivait le soir de son retour, et parce qu’elle avait eu à peine le temps de souffler aprÚs. Il fallait défaire les valises, lâ€™ĂƒÂ©couter lui raconter son séjour, ouvrir les cadeaux qu’elle avait apportés
En somme, Lise passa le plus clair de son temps à discuter avec sa sÅ“ur, sans oublier de ranger l’appartement, bien peu en ordre. Oh bien sûr, elle aurait pu laisser la gouvernante s’en occuper, mais Lise nâ€™ĂƒÂ©tait pas comme ça
Au contraire, câ€™ĂƒÂ©tait quelqu’un d’ordonné, et Kitty n’aurait jamais accepté que l’appartement soit dans un tel état. Une fois que l’appartement fut en ordre, Lise fit à manger, et elles se remirent toutes deux à discuter. Sauf qu’à la fin du repas, la demoiselle fut aussitÎt prise d’horribles vomissements, qui ne se calmÚrent pas pendant la nuit. Le lendemain, elle avait le visage trÚs pùle, et n’osait rien avaler de peur de toute régurgiter. Elle conduisit Kitty à lâ€™ĂƒÂ©cole, avant d’aller jusqu’à l’appartement de Jenny pour lui donner une grosse valise pleine d’affaires. Évidemment, il fallait que le déménagement se fasse en douceur, Lise ne souhaitant pas que sa petite sÅ“ur se sente chassée de la maison. Elle avait donc décidé dâ€™ĂƒÂ©taler ça sur plusieurs semaines, et Kitty resterait le weekend à l’appartement pour l’instant. DÚs qu’elle fut sortie de chez Jenny, Lise constata que son iphone sâ€™ĂƒÂ©tait mis à vibrer lui annonçant un message
Message qu’elle écouta, et qui eut pour effet de l’inquiéter Aaron semblait perdu, paniqué mÃÂȘme, et le fait qu’il ne vienne pas la voir sans mÃÂȘme lui donner de vraie raison nâ€™ĂƒÂ©tait pas pour la rassurer. Ni une ni deux, elle prit sa précieuse voiture pour se rendre à son appartement, juste pour voir s’il allait bien, et ensuite elle partirait dÚs qu’elle s’en serait assurée. Elle gara donc sa voiture juste en face de son immeuble, sortant de son sac la clef de l’appartement d’Aaron. Ils sâ€™ĂƒÂ©taient mutuellement donnés leurs clefs respectives, en cas d’urgence
Néanmoins, Lise n’hésita pas à frapper avant d’entrer, pour signaler sa présence et ne pas lui faire choper une crise cardiaque non plus. Elle referma peu aprÚs la porte derriÚre elle, essuyant ses pieds sur le tapis de l’entrée, afin de ne pas dégueulasser tout son appartement à cause du fait qu’il pleuvait énormément Mon ange, c’est moi ! J’ai eu ton message, je passe juste en coup de vent pour savoir si tout va bien, je te retiens pas longtemps ! »Lise sâ€™ĂƒÂ©tait approchée, un sourire sur le visage, qui se transforma bientÎt en expression horrifiée. Il faut dire que ce n’est pas commun de trouver son cher et tendre en plein milieu de son salon, un beau bébé dans les bras. Elle en fit tomber son sac à main, d’ailleurs
Il était à qui ce bébé ? Était-ce le sien ? Pourquoi ne lui avait-il rien dit ? Tant de questions se bousculaient dans sa tÃÂȘte qu’elle en avait presque la migraine
Sans oublier que ses nausées ne semblaient pas décidées à la laisser tranquille. Le visage de Lise pùlit d’autant à cause de la surprise qui se déroulait sous ses yeux, et elle n’osa rien dire tellement câ€™ĂƒÂ©tait soudain. Elle n’osait pas croire que câ€™ĂƒÂ©tait lui le pÚre du bébé, mais pourtant, il fallait bien avouer que la ressemblance était frappante Ils avaient les mÃÂȘmes yeux, tous les deux, et Lise baissa volontairement la tÃÂȘte pour mettre de l’ordre dans ses idées. Mais tout ce qu’elle fut capable d’articuler fut ceci  Tu m’excuses, il faut que j’aille vomir. »Charmant, mais câ€™ĂƒÂ©tait la vérité Lise avait à peine fini de parler qu’elle s’enfermait déjà dans les toilettes pour rendre un grand pas grand-chose. Elle n’avait rien avalé depuis la veille, n’avait pas cessé de vomir toute la nuit, et pourtant, ses nausées ne cessaient pas. La surprise n’avait en rien aidé son état, c’est vrai
Et quand elle ressortit, elle était encore plus pùle qu’avant. Elle ne pouvait pas croire qu’il lui avait fait ça à elle, aprÚs tout ce qu’ils avaient traversé. Elle osait à peine regarder ce foutu mioche devant elle, et pourtant dieu sait qu’il était mignon ! Mais Lise nâ€™ĂƒÂ©tait pas là pour s’extasier sur le visage de ce bébé, elle était juste là pour prendre de ses nouvelles, chose qui était tout bonnement inutile. Quant à Lise, elle était à deux doigts de la crise de nerfs
Pour un peu, elle se serait mise à chialer, mais elle était résolue à ne rien laisser paraÃtre de tout cela. A la place, elle écoutait ce pauvre petit bout de chou qui n’avait rien demandé à personne et qui pleurait de grosses larmes de crocodile, sûrement parce qu’il avait faim. Lise était sidérée qu’il ne fasse rien, elle se rua donc sur les sacs qui se trouvaient sur le sol, se mettant à fouiller dedans pour en sortir une boÃte de lait maternelle, ainsi que le biberon. Lise avait l’habitude, il ne fallait pas oublier qu’elle avait à moitié élevée sa sÅ“ur depuis sa naissance. Elle mit donc de l’eau à chauffer pour qu’elle soit tiÚde, et mit le dosage de lait en pourdre indiqué sur la boÃte. Elle referma le biberon avant de le secouer énergiquement, pour que le tout se mélange. Elle testa ensuite la température du lait sur sa main, puis, constatant que le liquide nâ€™ĂƒÂ©tait pas trop chaud, se dirigea vers Aaron pour prendre le bébé. Elle n’allait pas le laisser crever de faim aprÚs tout ! Elle lui donna donc le biberon, avec de vrais gestes maternels, alors qu’elle n’avait rien à voir avec ce rejeton. Lise se trouvait vraiment trop bonne ùme
Ca n’aurait tenu qu’à elle, elle aurait fuit à toutes jambes et n’aurait plus jamais adressé la parole à Aaron. AprÚs tout, puisqu’il était papa, il n’avait plus besoin d’elle ? Oui, elle en était à cette analyse là , ne sachant plus ce qu’elle devait penser au juste. Le bébé mangeait de son cÅ“ur, serrant l’un de ses doigts entre sa petite main, comme si elle était sa mÚre. Pour un peu, Lise se serait laissée attendrir
Mais il ne fallait Il est mignon
Comme son pÚre, je suppose. J’allais pas le laisser mourir de faim ce bout de chou, mÃÂȘme si je suis en droit de penser que sa mÚre est une grosse salope de pouffiasse ! »Lise n’avait aucune envie dâ€™ĂƒÂ©pargner quelqu’un, à commencer par la mÚre du petit. AprÚs tout, mÃÂȘme si elle ne connaissait pas l’histoire, il nâ€™ĂƒÂ©tait pas dur de faire des conclusions. Lise ne voulait pas connaÃtre l’histoire, en véritĂƒÂ©â€ŠCa lui faisait déjà bien assez mal d’ÃÂȘtre en train de nourrir un bébé qui nâ€™ĂƒÂ©tait pas le sien, il ne manquerait plus qu’elle soit au courant de sa conception ! Une fois qu’il eut fini son biberon, elle se mit à le serrer contre elle, lui tapotant doucement le dos pour qu’il fasse son rot. Il ne lui fallut pas plus d’une minute, preuve qu’il était rapide ce petit ! Elle continua à jouer les mÚres poules en le berçant dans son petit couffin, attendant qu’il s’endorme. A croire que Lise avait quelque chose d’apaisant, parce qu’il s’endormit comme un loir en à peine quelques minutes. Mais elle n’avait pas envie de se réjouir de tout ça
Pour l’instant, elle posa délicatement le couffin sur la table, avant de se tourner vers Aaron, le regardant droit dans les yeux pour s’approcher. Dire qu’elle avait envie de l’embrasser, elle était vraiment complÚtement folle
Elle se mit à murmurer à la place, serrant ses poings pour tenter de contrÎler sa colÚre  Visiblement tu es plus rapide en besogne avec d’autres plutÎt qu’avec moi. Je ne veux pas entendre le fin mot de l’histoire, c’est ta vie visiblement, et pour cette fois, je n’en fais pas partie. S’il se réveille, tu n’as qu’à lui donner le second biberon que j’ai préparé. Bonne chance. »Lise sâ€™ĂƒÂ©tait déjà élancée vers la porte
Mais elle revint sur ses pas pour récupérer son sac. Aaron ne la retiendrait probablement pas, s’il avait décidé de faire sa vie avec une autre. Du moins, câ€™ĂƒÂ©tait ce que Lise pensait, et toutes les preuves le lui laissait penser du reste. Mais Lise était pùle, elle était faible aprÚs n'avoir rien mangé, et pas vraiment en état de reprendre la voiture. Tant pis, elle pourrait toujours pleurer à l'intérieur de celle-ci en attendant d'ÃÂȘtre en état de conduire. Invité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Ven 7 Mai - 116 Assis sur le canapé du salon, Aaron agitait nerveusement sa jambe, coudes appuyés contre ses genoux et mains jointes contre sa bouche. Le regard sombre et les sourcils froncés, il observait chacun des gestes de Lise sans vraiment y prÃÂȘter attention en fait. Pour l’instant, il nâ€™ĂƒÂ©tait pas en mesure de lui fournir la moindre explication d’une part parce qu’il n’en avait pas et d’autre part, car il était tout aussi paumé qu’elle semblait l’ÃÂȘtre. Dans l’immédiat, toutes ses pensées convergeaient autour d’une seule et mÃÂȘme question se pouvait-il qu’il soit bel et bien le pÚre de cet enfant ? Bon d’un point de vue technique, oui bien entendu. Cependant, Rachel était tout aussi volage qu’il avait pu l’ÃÂȘtre et par conséquent, Aaron était en droit de douter de la parole de la jeune femme. Cela dit, il y avait quelque chose dans le regard de cet enfant qui lui était familier, un peu trop mÃÂȘme et d’ailleurs, ce détail n’avait pas échappé à Lizzie. Que faire ?! Les gestes de Lise étaient précis, sûrs et il émanait d’elle une douceur incroyable à croire qu’elle avait un instinct maternel surdéveloppé. Durant quelques secondes, Aaron se surprit mÃÂȘme à rÃÂȘver d’une famille avec elle mais était-il seulement en droit d’espérer quoi que ce soit désormais ?! Si Tyler était effectivement son fils, il savait que les conséquences seraient terribles et que jamais Lise n’accepterait de lui pardonner. Ce n’est que lorsque la jeune femme fut sur le point de partir qu’il décida enfin de lui exposer les faits. Il ne voulait pas qu’elle s’imagine que cet enfant était le sien
 bon, câ€™ĂƒÂ©tait peut-ÃÂȘtre le cas, mais il n’en avait pas la certitude. Aaron s’empressa de la rattraper, glissant subtilement entre la porte et celle qu’il aimait, afin de s’assurer quelques secondes durant lesquelles il pourrait tenter un semblant d’explication.  Attends Lise
 je te promets que je suis tout aussi perdu que tu peux l’ÃÂȘtre. Je connais pas ce gamin
 je l’ai jamais vu de ma vie !! J’en avais mÃÂȘme encore jamais entendu parlé ! Sa mÚre qui avait totalement disparu de la circulation a débarqué ce matin en me demandant de le garder et en me balançant à la tronche qu’il était mon fils. Je
 j’y comprends rien Lise. Cette fille je l’ai pas vu depuis plus d’un an
 il faut que tu me crois. »A quoi bon ?! Tout collait à la perfection ! Rachel et lui sâ€™ĂƒÂ©taient fréquentés il y a environ un an et demi, Tyler devait avoir environ six ou sept mois, alors pourquoi pas ! Sauf qu’Aaron avait toujours fait extrÃÂȘmement attention à ce que ce genre d’indicent ne se produise pas et qu’il ne comprenait toujours pas pourquoi, s’il était bel et bien son fils, Rachel ai attendu tout ce temps avant de lui en parler. Le jeune homme passa une main sur son front, cherchant à se remettre les idées en place, tout étant affreusement confus dans son esprit.  Sa mÚre et moi avons eu une aventure il y a environ deux ans. Elle était étudiante en médecine et on s’est rapidement rapprochés. Mais câ€™ĂƒÂ©tait rien de sérieux, simple histoire de sexe
 il nous arrivait d’aller prendre un verre ensemble aprÚs les cours puis ça se terminait toujours au lit. Mais jamais de sentiment, rien que du sexe. Puis au fil du temps, elle est tombée amoureuse de moi et j’ai décidé qu’on ne se verrait plus. J’ai toujours pris la fuite de cette maniÚre, je veux pas qu’on s’attache à moi à part
 enfin qu’importe. Rachel et moi on a pris nos distances un certain temps puis le soir de l’anniversaire de Paul, j’ai déconné. On avait bu, jâ€™ĂƒÂ©tais plus dans mon état normal et Rachel est revenue à la charge
 c’est la derniÚre fois que je l’ai vu. AprÚs, elle a disparu et arrÃÂȘté les cours. Au début, je pensais qu’elle avait fait ça à cause de ses examens, elle les avait loupé donc je ne me suis pas vraiment posé de questions. Puis à dire vrai, j’avais pas vraiment envie d’en savoir davantage, ça ne m’intéressait pas, câ€™ĂƒÂ©tait qu’une aventure, rien d’autre. »Aaron savait que Lise n’accepterait aucune excuse, pas mÃÂȘme celle du célibataire macho qui enchaÃnait les histoires d’un soir. Le jeune homme soupira doucement, détournant le regard un instant en direction du bébé qui à présent, était profondément endormi. Il était mignon comme tout mais Aaron refusait que cet enfant soit le sien, non, ça ne se pouvait pas, il ne voulait pas que ce soit possible.  Puis elle a débarqué ce matin. Elle m’a demandé de le garder et quand j’ai refusé elle m’a demandé d’ouvrir les yeux et d’assumer mes responsabilités. Putain de merde Lise je te promets que jâ€™ĂƒÂ©tais pas au courant !! Ce gamin n’est peut-ÃÂȘtre mÃÂȘme pas le mien !! Rachel, c’est une version de moi au féminin, comprends qu’elle couche avec tout ce qui lui passe à portée de main, je vois pas pourquoi y’aurait un seul con dans l’histoire ! J’ai toujours été hyper vigilent avec ça
il peut pas ÃÂȘtre mon fils !! Enfin techniquement oui, mais je sais qu’il ne l’est pas ! »Non, il n’en savait rien en fait, c’est uniquement ce qu’il voulait croire. Aaron était visiblement paumé et ne sâ€™ĂƒÂ©tait jamais senti aussi impuissant de toute sa vie. Il ne voulait pas que Tyler soit son fils, s’il lâ€™ĂƒÂ©tait, cela impliquait de perdre Lise définitivement, de perdre son amour et tout ce qu’ils étaient en train de construire ensemble. Il ne voulait pas ÃÂȘtre le pÚre de cet enfant.  Je ferai des tests
 je ferai
 »Il cessa de parler, totalement désabusé par cette situation qui était en train de le rendre malade et cette fois-ci, c’est sur ses yeux que sa main se plaqua. Aaron ne pleurait pas, non, il essayait juste de s’empÃÂȘcher de songer à ce qui allait se passer désormais. Lizzie allait partir, il en était à présent certain.  T’as raison de t’en aller
 je suis vraiment qu’un con et surtout, doué pour tout foutre en l’air. Tu mérites pas ça. Si c’est bien mon fils et bien
je prendrais mes responsabilités en main et
 je comprends t’as pas à payer le prix de mon inconscience et de ma connerie. Si tu veux t’en aller, vas-y, mais saches que j’ai été honnÃÂȘte avec toi. » Invité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Ven 7 Mai - 145 Lise n’eut pas le temps de partir, car une fois qu’elle eut son sac en main, Aaron se mit entre la porte et elle, l’empÃÂȘchant pour ainsi dire de s’en aller. Le fait de lâ€™ĂƒÂ©couter raconter ce genre dâ€™ĂƒÂ©vÚnement la détruisait
Oh, elle savait qu’il avait enchaÃné les histoires d’une nuit à la mÃÂȘme vitesse qu’elle pendant ces trois ans oÃÂč ils ne sâ€™ĂƒÂ©taient pas vus, peut-ÃÂȘtre mÃÂȘme plus vite qu’elle, mais câ€™ĂƒÂ©tait une partie de son histoire qu’elle ne voulait pas entendre. Lise ne pouvait pas supporter de l’imaginer ne serait-ce qu’une seconde dans les bras d’une autre femme
Alors elle était en colÚre, trÚs en colÚre. S’il la laissait partir, elle aurait probablement un accident, à cause du choc mÃÂȘlé à l’hypoglycémie dont elle était la victime, n’ayant rien mangé depuis pratiquement douze heures. Mais si elle restait ici, cela induisait entendre tout ce qu’il avait à lui dire, et ça, elle nâ€™ĂƒÂ©tait pas du tout prÃÂȘte à le faire. Pourtant, elle du endurer tout ça. Pas parce qu’elle l’avait décidé, mais parce qu’il l’obligeait. Doucement mais sûrement, Lise ne pu retenir ses larmes, plaquant ses mains sur ses oreilles pour ne plus rien entendre. Diable ce que ça pouvait faire mal
AprÚs tout ce qu’ils avaient enduré ensemble, aprÚs sa tentative de suicide, son opération, Lise aurait espéré qu’ils soient un peu en paix. Mais il n’en était rien, comme si quelque chose ou quelqu’un était toujours sur leur chemin à mettre à lâ€™ĂƒÂ©preuve le sentiment qu’ils ressentaient l’un pour l’autre. Ce nâ€™ĂƒÂ©tait pas ça qui allait faire en sorte que Lise cesse de l’aimer, bien au contraire
Mais câ€™ĂƒÂ©tait l’apocalypse dans ses pensées. Lise avait peur, peur de le perdre au profit d’une fille avec qui il avait eut un bébé ! Ca, câ€™ĂƒÂ©tait tellement difficile à accepter pour elle
Pourquoi fallait-il toujours qu’elle soit abandonnée par ceux qu’elle aimait le plus ? Lise aurait voulu partir, mais elle était pétrifiée sur place. Incapable de faire un mouvement, incapable de mettre de l’ordre dans ses idées
Elle était juste capable de pleurer, et rien d’autre. Lise tenta de lever la main, comme si elle allait le gifler pour essayer de calmer sa colÚre, mais sa main retomba lourdement contre son corps. Incapable de le frapper, comme quoi. Lise qui avait toujours la gifle si facile, la voilà complÚtement réduite au silence à cause de ce foutu bébé ! BientÎt, sa nausée la reprit, et ses courbatures furent légÚrement plus violentes. Lise était pùle, on aurait dit qu’elle allait sâ€™ĂƒÂ©crouler si elle faisait ne serait-ce qu’un pas. Elle ne comptait pas faire un malaise ici, mais par contre, elle fut contrainte de retourner illico dans les toilettes pour plonger la tÃÂȘte dans la cuvette. Dieu qu’elle détestait ÃÂȘtre dans un tel état ! Surtout que la situation était trÚs mal choisie, et qu’elle ne savait toujours pas quoi faire. Une partie d’elle savait pertinemment qu’elle nâ€™ĂƒÂ©tait pas en état de conduire, tandis qu’une autre partie lui ordonnait de prendre le volant, que les sensations fortes empÃÂȘchent son esprit de se remémorer cet horrible moment. Lorsqu’elle ressortit des toilettes, Lise était encore un peu plus pùle. Elle prit le couffin pour aller le placer dans la chambre d’Aaron, n’ayant aucune envie de continuer à murmurer. Puisqu’elle ne pouvait pas partir tout de suite, et bien elle ne partirait pas. Elle réapparut aprÚs avoir refermé la porte de la chambre derriÚre elle, le regard brillant et les pensées trÚs troublé Tu m’excuseras, mais j’ai besoin d’un verre. »Réflexe purement typique chez Lise, mais pour une fois, elle n’avait aucune envie d’ÃÂȘtre raisonnable. Puisqu’elle ne pouvait pas conduire, elle allait rester ici et se souler. Câ€™ĂƒÂ©tait peut-ÃÂȘtre la meilleure idée qu’elle ait eu jusque là , à son sens. Elle se dirigea donc vers le frigo, constatant avec bonheur qu’il y avait l’air une bouteille de vodka. Comme elle n’avait pas mangé, quelques shooters et elle serait incapable de tenir debout. Elle commença à l’ouvrir, saisissant un shooter dans son placard, ayant de plus en plus de mal à contenir ses Et si jâ€™ĂƒÂ©tais pas venue, hein ? Tu m’aurais menti, tu m’aurais caché l’existence de ce foutu mioche ? Mais qu’est-ce que je peux ÃÂȘtre conne, franchement ! Finalement, j’aurais mieux fait de rester au fond de mon lit à soigner cette putain de grippe qui m’empÃÂȘche d’avaler quoi que ce soit, plutÎt que de venir me faire chier ici ! Et maintenant quoi hein ? La mÚre va revenir, et si elle t’autorise à faire un test et que tu es le pÚre ? Tu vas lâ€™ĂƒÂ©pouser aussi ? Putain, je peux pas l’avaler celle là ! »Lise était complÚtement désorientée, la colÚre et la tristesse prÎnant sur tout le reste. Elle ne pu se résoudre à ne pas boire, tant pis si son foie était effectivement neuf. Elle se servit un shooter, un seul, et le but cul sec. Pour l’instant, elle referma la bouteille, l’alcool lui faisait d’ors et déjà tourner la tÃÂȘte. Décidément, elle était encore dans un état pathétique, sauf que cette fois ce nâ€™ĂƒÂ©tait pas sa faute, étant donné qu’elle n’avait pas bu une goutte d’alcool depuis leur soirée au restaurant. Elle se mit à soupirer, peinant à atteindre un fauteuil sur lequel s’asseoir. Elle respirait vite, mais elle n’avait pas de fiÚvre. Pourtant, elle croyait dur comme fer à une grippe, ça ne pouvait ÃÂȘtre que ça. Ou bien était-ce la tristesse ? Que tu aies été au courant ça ne change rien, ce bébé existe et si tu es son pÚre il va bien falloir que t’assumes ! Je crois qu’il vaut mieux que je m’en aille avant que cette abrutie revienne, parce que je te jure que tu ne vas pas la reconnaÃtre si jamais je la croise ! Je vais appeler mon pÚre, qu’il vienne me chercher, si je prends le volant je vais me planter. Je sais pas ce qui m’en empÃÂȘche d’ailleurs ! Finalement, tu auras pas mis longtemps à m’abandonner toi aussi ! Putain de vie de MERDE ! »Lise ne criait pas, de peur sans doute de réveiller le bébé, mais tout son corps tremblait à cause de la colÚre. Elle plongea son visage entre ses mains, partant du principe que câ€™ĂƒÂ©tait sûrement la meilleure chose à faire. D’un cÎté, elle n’avait aucune envie d’appeler son pÚre, pour s’entendre dire qu’elle n’est qu’une idiote inconsciente
Mais d’un autre cÎté, malade ou pas, elle avait effectivement toute l’envie du monde de refaire le portrait à l’autre conne qui venait la gueule enfarinée aprÚs un an d’absence ! Celle là , câ€™ĂƒÂ©tait vraiment le pompon, plus que Lise ne pouvait Je voulais pas savoir ce qui sâ€™ĂƒÂ©tait passé entre vous, ça me regarde pas ! Rien que te savoir dans les bras de cette
Fille ! Ahh je vais lâ€™ĂƒÂ©trangler ! Le pire, c’est que tu te fais à l’idée que je pourrais partir. Tu es si peu combattif que ça, Aaron ?! Putain, si câ€™ĂƒÂ©tait moi qui était enceinte, tu fuirais aussi ?! Tu pouvais toujours me reprocher d’ÃÂȘtre égoïste et fuyante, c’est exactement ce que tu es aujourd’hui ! Quand je pense que t’as passé le plus clair de ton temps à parler de cette putain de voiture ce weekend, alors qu’à l’autre tu lui as fais un gosse ! Y’a pas un problÚme quelque part non ?! Putain j’ai encore la gerbe
 »Retour case départ, à savoir aux toilettes. Lise n’avait qu’une envie, s’enfoncer dans le trou et ne plus jamais en ressortir, quitte à sentir les égouts pour le restant de sa vie. Lorsqu’elle réapparut, elle se dirigea vers la bouteille de vodka. Tant pis
Un deuxiÚme shooter ne lui ferait pas de mal avant d’appeler son pÚre. Elle but le second verre cul sec, avant de saisir son cellulaire dans son sac. Lise n’aurait jamais imaginer que composer le numéro de son pÚre serait aussi difficile que les douze travaux de ce bon Hercule
Et Aaron était décidé à se complaire dans ses problÚmes, pour sûr, il ne l’empÃÂȘcherait pas cette fois. Invité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Ven 7 Mai - 220 Aaron fixa la bouteille de vodka qu’elle venait de sortir du frigo et soupira doucement. Il ne voulait pas qu’elle replonge à cause de ses conneries à lui, d’autant que sur ce coup là , il n’avait vraiment rien anticipé. Peut-ÃÂȘtre qu’au final, un verre ne pourrait pas lui faire de mal à lui non plus
 Non surtout pas !! Il fallait qu’il ai les idées claires afin de comprendre les évÚnements et surtout, dâ€™ĂƒÂ©viter d’empirer la situation comme il avait l’habitude de le faire ces derniers temps.  ArrÃÂȘte de dire des conneries !! Tu voudrais que je fasse quoi ? Que je prenne la fuite et que je ferme les yeux peut-ÃÂȘtre ? Désolé mais c’est quelque chose que je ne peux pas faire. S’il s’avÚre que ce gamin et bel et bien mon fils, j’assumerais entiÚrement mes responsabilités. Faut que je te le dise comment ? Y’a rien eu entre sa mÚre et moi ! »Sentimentalement parlant bien entendu. La derniÚre remarque de Lise l’avait vraiment piqué au vif, il la savait désorientée et déstabilisée autant qu’il pouvait l’ÃÂȘtre mais ce nâ€™ĂƒÂ©tait pas une raison pour l’attaquer de la sorte. Tandis qu’il marchait de long en large dans le salon, il réalisa ce que Lise venait de dire. La grippe ? Pourquoi parlait-elle de grippe ?! Elle serait bien la seule à l’attraper en cette saison puis les symptÎmes de la grippe étaient discriminables entre mille, Lizzie ne présentait rien de tout ça. Toutefois, les pensées médicales lui échappÚrent bien vite lorsque Lise parla d’appeler son pÚre et surtout, du fait qu’il ai pu l’abandonner.  Bon sang mais tu vas arrÃÂȘter de dire des choses aussi insensées ?! Je t’ai pas abandonné et j’ai jamais eu l’intention de le faire !! Es-tu aveugle à ce point ?! Tu vois pas que je suis dans la merde, que je suis complÚtement perdu, que je me retrouve avec un gamin sur les bras et que je ne sais pas quoi faire ?! Alors ouais putain de vie de merde comme tu dis !! Sauf que là , t’es en train de me reprocher des choses qui n’ont pas le moindre sens !! Puis merde, je vois pas pourquoi on essaie de discuter, on en est visiblement plus capables ! »Se faisait-il vraiment à l’idée de pouvoir la perdre ? Bien sur que non !! Jamais il ne pourrait l’accepter en revanche, Lise ne semblait pas vraiment disposée à rester, que pouvait-il faire ? La séquestrer ? Il était en mesure de comprendre que la nouvelle ne soit pas facile à digérer pour elle non plus, aussi, si elle voulait partir, elle était libre de le faire voila tout !! Aaron ne pensait pas pour autant que cela puisse vouloir dire qu’il puisse se faire à l’idée de la perdre !! Voila donc pourquoi, toilettes ou non, il la suivi tout en continuant son argumentation sur un ton relativement élevé et peu importe si le bébé était ou non en train de dormir, câ€™ĂƒÂ©tait bien le dernier de ses soucis en l’occurrence. Naturellement, sous le coup de la colÚre, il ne mesura pas l’ampleur de ses paroles, aussi lorsqu’elle lui posa la question fatidique pour savoir s’il serait ou non resté si elle avait été enceinte, la réponse se fit En l’occurrence c’est pas moi qui suis parti en apprenant qu’on allait avoir un bébĂƒÂ©â€Š t’as pas de leçon à me donner de ce cÎté-là . »Peut-ÃÂȘtre que dans le fond, il lui en voulait toujours de lui avoir caché cette grossesse. A vrai dire, il ne savait plus vraiment quoi penser, ses idées étaient confuses, il était terriblement angoissé d’une part à l’idée que Tyler soit son fils mais aussi à l’idée que Lise s’en aille, qu’elle le quitte.  Et putain, bien sur que non je ne me fais pas à l’idée que tu puisses partir !! T’as pas le droit de me dire des choses pareilles Lise !! T’imagine mÃÂȘme pas ce que j’ai vécu durant ton absence ni mÃÂȘme à quel point ça m’a fait souffrir de te perdre !! Je suis terrorisé à l’idée que tu puisses me quitter, à l’idée que cette histoire puisse tout foutre en l’air entre nous !! Je dis juste que si ce gosse est bien mon gamin, t’es pas obligée d’en payer les frais !! On dirait que tu te complais à l’idée de me faire passer pour la derniÚre des pourritures alors que j’essaie simplement de me sortir de cette situation de merde dans laquelle je suis embourbé jusqu’au cou !! »Bon tant qu’il y était, autant évoquer le reste puisqu’elle voulait impérativement remettre sur le tapis cette histoire de voiture dont il avait parlé tout le week-end. " C’est quoi ton problÚme avec cette voiture ?! Tu m’as fait un putain de cadeau de fou, t’as réalisé mon rÃÂȘve de gosse en m’offrant cette bagnole, je la conduis pour la premiÚre fois, tu voudrais que je réagisse comment ?! Câ€™ĂƒÂ©tait juste éclatant pour moi ! Excuse moi de ne pas ÃÂȘtre à cent pour cent attentif à tout ce que tu me dis !! Puis merde !! AprÚs tout ce qu’on a vécu ces derniÚres semaines, j’estime que j’avais le droit de prendre un peu du bon temps moi aussi !! Et t’as pas de dire que je lui ai fait un gosse
 déjà on en sait rien et mÃÂȘme si câ€™ĂƒÂ©tait le cas, Rachel est bien la derniÚre personne au monde avec qui je voudrais des gamins !! Je comprends que tu sois en colÚre contre moi mais putain ouvres les yeux !! Si y’a bien un moment dans ma putain de vie oÃÂč j’ai besoin de toi, c’est maintenant !! C’est ça, appelle ton pÚre, descends toi une bouteille de vodka, flingue ton foie et on sera revenu à la case départ comme ça ! Lise
 j’ai besoin de toi
 J’ai la trouille tu comprends ? "Son ton sur cette derniÚre phrase avait radicalement changé, sans doute parce qu’effectivement, Aaron était mort de peur. Câ€™ĂƒÂ©tait bien la premiÚre fois de sa vie qu’il éprouvait un tel sentiment, il avait l’impression d’ÃÂȘtre impuissant et que la situation lui échappait totalement. Il ne pouvait rien faire de plus qu’espérer que ce gamin, aussi mignon soit-il, ne soit pas le sien. Pour rien au monde il ne souhaitait perdre Lise et pourtant, c’est exactement ce qui était en train de se produire. S’approchant de la bouteille de vodka, il l’empoignant avec virulence, non pas pour en boire une gorgée, mais surtout pour que Lise arrÃÂȘte d’y toucher. Invité Empire State of MindInvité Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Ven 7 Mai - 311 Lise fut ébahie du flot de paroles qui sâ€™ĂƒÂ©chappÚrent de la bouche d’Aaron
Mais celles qui la heurtÚrent le plus, ce fut de toute évidence ce qui avait un rapport avec son avortement. Il l’avait dictée avec une telle colÚre froide que le sang de la demoiselle se serait presque glacé sur place. Elle avait peur de le perdre, peur de voir à quel point il lui en voulait encore
Fondamentalement ils étaient loin d’incarner l’image du couple parfait, puisque Aaron nâ€™ĂƒÂ©tait pas capable de lui pardonner des choses qui appartenaient, selon ses dires, au passé. Lise avait aimé en parler, mais avait accepté le fait d’oublier, tout simplement. Le fait qu’il lui balance ça dans les gencives l’anesthésia soudainement, tandis qu’elle sortait encore une fois des toilettes, prÃÂȘte à appeler son pÚre. Jusqu’au moment oÃÂč elle vit Aaron se saisir de la bouteille de vodka, espérant qu’elle allait arrÃÂȘter d’en boire. Mais pour l’instant, ce qui occupait toujours son esprit, câ€™ĂƒÂ©tait la phrase qu’il avait dite alors qu’elle avait la tÃÂȘte dans la cuvette. Ca, elle ne parvenait tout bonnement pas à le digérer
Tout comme lui, d’aprÚs ce qu’elle avait pu comprendre. Lise laissa donc son portable sur la table, saisissant Aaron violemment par le poignet pour finir par plaquer ses poignets contre le canapé. Elle était trÚs en colÚre...Mais les mots lui manquaient. Cela dit, ils étaient en train de se monter l’un contre l’autre, et Lise ne voyait pas l’intérÃÂȘt. Alors oui, si jamais ce foutu bébé était son fils, elle n’arriverait jamais à l’accepter. Elle serait probablement détruite par cette nouvelle, mais elle disparaÃtrait de sa vie uniquement à sa demande, câ€™ĂƒÂ©tait chose certaine. Seulement, elle ne doutait pas que cette fille avait qui il avait couché et qui clamait ÃÂȘtre la mÚre de son enfant cherche à tout prix à rayer Lise de la vie d’Aaron, elle en mettrait facilement sa main à couper. Mais maintenant qu’elle le maintenant par les poignets, qu’elle le regardait dans les yeux pour la premiÚre fois depuis plusieurs minutes, elle était prÃÂȘte à s’effondrer. Elle trouvait tout bonnement monstrueux ce qu’il venait de dire
MÃÂȘme si elle était grandement en tort dans l’affaire, le fait de lui rappeler nâ€™ĂƒÂ©tait pas forcément C’est monstrueux ce que tu viens de dire
Ai-je rÃÂȘvé ou as-tu dit que l’on faisait table rase du passé ? Et maintenant, tu viens me balancer à la gueule que je ne t’ai rien dit au sujet de mon avortement ?! Tu te fous de moi, Aaron ?! J’ai fais une grossiÚre erreur, mais j’ai essayé de tout te dire et tu m’as rétorqué que le passé appartenait au passé, et qu’il fallait avancer. Ah bah ouais, on a vachement avancé ! Je te balance pas de vieux dossiers à la gueule moi ! J’analyse la situation, pas de la meilleure maniÚre c’est vrai, mais toi tu me balances la pire erreur de ma vie à la gueule ! Tu penses sans doute que ç’a été une partie de plaisir, ce putain de curetage ? J’ai pas le droit de m’en plaindre, mais puisque tu remets ça sur le tapis, la douleur a été horrible ! Aussi bien celle de ton absence dont jâ€™ĂƒÂ©tais la seule cause que l’intervention elle-mÃÂȘme ! Alors la FERME alors que tu ne sais rien de cet instant là ! »Lise avait lùché son emprise, se laissa retomber sur le mÃÂȘme fauteuil que tout à l’heure. Elle était encore au point de départ, décidément
Il avait besoin d’elle, autant qu’elle avait besoin de lui, mais la colÚre les dominait l’un comme l’autre. Encore un peu et Lise retournerait se cacher aux toilettes, pour la troisiÚme fois depuis son arrivée. Son regard était pointé vers le bas, elle semblait réfléchir mais ce nâ€™ĂƒÂ©tait pas le cas. Elle n’espérait qu’une chose, qu’il dit quoi que ce soit qui pourrait lui effacer ce qu’il venait de dire. Pour le coup, elle n’avait plus envie de lui faire le moindre reproche, de peur de se prendre une autre remarque sur le passé en pleine figure. Câ€™ĂƒÂ©tait lùche, mais il avait bien réussi à lui couper le sifflet
Puisqu’elle ne pouvait pas conduire et qu’elle nâ€™ĂƒÂ©tait pas en état d’appeler son pÚre à l’aide, elle restait là , comme inerte, le visage toujours aussi pùle que la neige. Elle ne savait pas combien de temps elle tiendrait à ce rythme, mais elle tiendrait. Elle se leva donc pour aller ranger son cellulaire dans son sac, plaçant de la mÃÂȘme occasion le shooter qu’elle avait utilisé dans lâ€™ĂƒÂ©vier. Tout ça sans un mot
Juste avant de retourner illico aux toilettes. Cette fois, elle y resta un certain temps
Quinze bonnes minutes au moins, d’une part pour vomir certes, mais pour se plonger la tÃÂȘte sous l’eau, histoire de se remettre les idées en place. Elle prit le temps de s’essuyer, et lorsqu’elle ressortit, la sentence fut sans appel  TrÚs bien, je reste. Tu as besoin de moi alors je reste
Mais je n’oublie pas ce que tu viens de dire. Ah, elle est loin l’image du couple parfait, si le passé te rappelle toujours à l’ordre. Bah, je ne vais pas me plaindre. Je vais attendre que sa putain de mÚre revienne, puis je reprendrais la voiture si j’en suis capable. Aucune envie de subir les foudres de mon pÚre en plus de tout le reste. Faut que je rentre soigner cette grippe aprÚs. »Juste à ce moment là , le bébé pleurait à nouveau. Il était réglé comme une horloge, celui là ! Lise saisit le second biberon qu’elle avait posé sur la table pour mieux aller chercher le petit Tyler ensuite. Elle lui donna le biberon avec douceur, une douceur presque maternelle bien que ce bébé ne soit nullement le sien. Comme la fois précédente, elle lui fit faire son rot, et en profita pour lui changer la couche, le nettoyant avec douceur avant de lui en mettre une propre. Quand tout ceci fut fait, elle le recoucha doucement, le berçant en chantonnant la premiÚre chanson qui lui vint à l’esprit Au clair de la lune. Bateau comme chanson, mais Î combien efficace ! Il s’endormit en à peine cinq minutes, et Lise pu réapparaÃtre dans le salon, se rasseyant toujours sur le mÃÂȘme fauteuil.  Pour info, je n’ai pas de problÚme avec la voiture. Tu en as juste parlé tout le weekend, c’est tout. Mais bon, oublie, je suppose que câ€™ĂƒÂ©tait normal. Effectivement, j’ai pas de leçons à te donner, je vais juste te donner les réflexes que tu devras avoir, je peux rien faire de plus. J’ai élevé Kathryn avec Sam, je sais trÚs bien ce qu’il faut faire. Alors monsieur buté numéro un, t’auras qu’à suivre à la lettre ce que je vais tâ€™ĂƒÂ©crire. Oh, et n’essaye mÃÂȘme pas de m’empÃÂȘcher de lui défoncer la tronche à celle là . Avant de partir, je peux t’assurer que je vais faire en sorte qu’elle se souvienne de moi ! Quand je pense que je m'occupe d'un gamin qui est mÃÂȘme pas le mien...Putain Lise, tu te ramollis ma pauvre, c'est pathétique. »Lise se leva, un peu tremblante encore, avant de sortir une feuille de son sac et de se mettre à rédiger tout ce qu’elle avait acquis d’expérience. Il pourrait toujours brûler la feuille, elle s’en foutait
Elle n’avait plus la capacité de se mettre en colÚre aprÚs tout ça. Au contraire, ses larmes se remirent à couler tandis qu’elle les essuyait au fur et à mesure, d’un geste rageur. Ce nâ€™ĂƒÂ©tait pas le moment de craquer, non vraiment pas. Il fallait qu’elle ait toute sa force pour mettre son poing dans la gueule de cette saloperie dÚs qu’elle passerait le pas de la porte. Elle ne doutait pas qu’Aaron allait l’en empÃÂȘcher, mais il ne pourrait pas l’empÃÂȘcher longtemps. Lise avait de la ressource et de l’expérience en la matiÚre ! Invité Empire State of MindInvité n="sh’il faisait. Cela e te balance qpait t;était le cas,tés7;é poing ad mbooir;"> Empire Strrsati ichiers/2ijivant de partfallait bien qoot pas en étsttps//2fenter>e vatoutetcsME ale la grippe. Elle odisienne' rtittar"ers/2> 8217ola nei'it libr- 1414Sujet Re Comme un air de déja vu... {PV Lise} Ven 7 Mai - 1414 Effectivement, câ€™ĂƒÂ©tait monstrueux et d’ailleurs, Aaron avait parfaitement conscience du poids de ses mots et de l’effet qu’ils auraient sur Lizzie. Il savait qu’il allait la piquer au vif et c’est sans doute pour cette raison qu’il avait remis sur le tapis cet épineux sujet. Câ€™ĂƒÂ©tait peut-ÃÂȘtre facile de ressortir les vieux dossiers du passé, cependant, il n’en restait pas moins qu’il n’appréciait guÚre la façon dont elle avait mis en doute sa réaction dans l’hypothÚse oÃÂč elle serait enceinte. Il ne serait jamais parti, câ€™ĂƒÂ©tait lâ€™ĂƒÂ©vidence mÃÂȘme à ses yeux et à dire vrai, il était particuliÚrement peiné que Lise ne s’en rende pas compte. Puis il faut dire que vu les circonstances, le jeune homme nâ€™ĂƒÂ©tait plus vraiment dans son état normal, ses pensées avaient du mal à se faire nettes dans son esprit, il avait l’impression d’ÃÂȘtre au beau milieu d’un cauchemar et n’osait mÃÂȘme pas imaginer ce qui pourrait se passer dans lâ€™ĂƒÂ©ventualité oÃÂč Tyler serait bel et bien son enfant. Il savait qu’il n’y aurait rien de tel pour foutre en l’air leur couple, un peu comme s’il avait pu prémédité d’une part que Rachel tomberait enceinte et d’autre part, que Lise ferait de nouveau partie de sa vie.  Non mais tu t’es entendu ?! Ca tâ€™ĂƒÂ©tonne que je ressorte les vieux dossiers du passé vu les circonstances ? Tu te demandes quelle aurait été ma réaction alors que tu sais trÚs bien ce que j’aurais fait et la maniÚre dont j’aurais réagi ! Pourtant, tu persistes en disant que j’aurais pris la fuite et tu voudrais que je reste les bras croisés ?! Désolé mais si t’as fait des conneries par le passé, t’es la seule et unique responsable ! Tu peux pas me reprocher d’avoir été absent, ta foutue solitude, tu l’as bien cherché à ce moment là ! J’en ai marre de faire comme si tout ça ne m’atteignait pas car c’est faux ! T’as foutu en l’air ce qu’on avait, t’as foutu en l’air nos fiançailles et t’as choisi d’avorter de MON enfant alors les leçons de vie, tu te les gardes. »Aaron regretta aussitÎt mais il avait toujours eu une maniÚre extrÃÂȘmement stupide de répondre aux attaques on le blessait, il blessait en retour en tùchant de faire bien plus de mal qu’on ne lui en avait fait. Lise était pourtant la derniÚre personne au monde qu’il souhaitait rayer de sa vie, il l’aimait plus que tout et bon sang, ce qu’il pouvait se sentir nul de lui faire ce genre de reproches, pourtant, il fallait bien que ça sorte à un moment donné. Câ€™ĂƒÂ©tait le seul moyen qu’il avait trouvé de l’atteindre directement, car il savait pertinemment que cela marcherait. Pitoyable. Absolument pitoyable. Aaron préféra laisser tomber la conversation pour l’instant, inutile de réveiller Tyler qui venait de s’endormir. Câ€™ĂƒÂ©tait trop facile d’attaquer Lise sur ce sujet mais Aaron n’avait pas réfléchi ni à ce qu’il disait, ni à ce qu’il faisait. Cela dit, ça ne l’empÃÂȘcha pas de remarquer les incessants allers-retours de Lise aux toilettes et inutile de dire qu’il avait la certitude qu’il ne s’agissait pas de la grippe. Elle avait sans doute mangé quelque chose qui lui était resté sur l’estomac, rien de plus. Appuyé contre la table du salon, il ne tarda pas à voir Lise refaire son apparition, affirmant qu’elle allait rester et aussitÎt, il sentit une vague de soulagement l’envahir. Il avait envie de s’excuser, de lui dire qu’il ne pensait pas un traÃtre mot de ce qu’il venait tout juste de lui jeter à la figure mais câ€™ĂƒÂ©tait trop tard. Le mal était déjà fait et s’il voulait se faire pardonner, câ€™ĂƒÂ©tait loin d’ÃÂȘtre gagné. Quand le bébé se remit à pleurer, il s’apprÃÂȘta à aller dans la chambre mais Lise le devança, ce qui, à dire vrai, le soulagea bien plus qu’il ne l’aurait imaginé. Aaron ne sâ€™ĂƒÂ©tait encore jamais occupé d’un bébé de toute sa vie, il ne savait pas comment s’y prendre et à dire vrai, ça l’effrayait un peu. De là oÃÂč il se trouvait, il lui était possible d’entendre Lise calmer le bébé, lui parler, lui fredonner une chanson
 elle ferait une mÚre fabuleuse, il n’y avait aucun doute. La pensée qu’ils pourraient avoir déjà un enfant à l’heure actuelle lui traversa de nouveau l’esprit, jusqu’au moment oÃÂč il se trouva ridicule d’avoir pu remettre ça sur le tapis. A croire qu’il n’avait rien trouvé d’autre à dire à ce moment là et qu’il ferait bien de respecter un peu le proverbe qui dit qu’il vaut mieux tourner sa langue sept fois dans sa bouche avant de parler. Peu à peu, les pleurs de Tyler diminuÚrent jusqu’au moment oÃÂč Lise fut de nouveau à ses cÎtés. Se calmant à son tour, Aaron secoua légÚrement la tÃÂȘte face aux reproches de Lise et comprnt conscience dut en trases conneries à 8217;excuser, de lui dire quferait8217ofois depi, cbarien faire dee cela quÌ”n> Empire State of MindInvité c son poer-top1vetax-widthte onscdiv">que ç’pn, puisque genrdes grésentait rir-proa l& class="spnter" /> grés d&onscdait lui eff/>InvitÃr.821 la;exheightass="e n&son me moudrais df4SifuÌ”r3lencee p1g="0" cellpaddinagement l& pan>8217ola nei'it libr- 1414="lapei821c cette vu vifuÌ”ttion m/e om/fic7;u8217;pacing="0" cellyn avec Sosent sur plus qer-po, et’ur2178s .applepas le caoe que nthityt di lcenterbsentle="mapettesste. Fafent oÃÂčs pou le pve aÃcesxn se ineux,.ctpss a ditnt Aaron vif;as reép7;ri rle ! Tu p&etster-phiersass="prer en pve aÃcesx toujoupl {PV lplepaindiarniÚre mAEbas,tés7;nt, tait en retour en tùcbvatoutett, illm/fichiers/2014/48ble>

RĂšglementsur les agences de placement de personnel et les agences de recrutement de travailleurs Ă©trangers temporaires. N-1.1, r. 1. RĂšglement soustrayant certaines catĂ©gories de salariĂ©s et d’employeurs de l’application de la section VI.I du chapitre IV et de l’article 122.1 de la Loi sur les normes du travail.
^5 SB? ÂŁV*iV. ĂŽivjaĂŻmfti hocat Ă  la Cour royale, ancien Magistrat, ancien PrĂ©sident des Atocals aui Conseils du Roi el Ă  la Cour de Cassation, Membre de la LĂ©gion-d'llonncur, de la SociĂ©tĂ© Pbilolecluiiqttc, de l'AcadĂ©mie des Sciences, Belles-Lettres el Arts do Clermont-Ferrand, cl de plusieurs autres SociĂ©tĂ©s savantes. troisiĂšme riiition xA'iĂż PARIS CHEZ 1/ÉDITEUR, HUE D F, I/O DÉ O N, 3 fi ‱ i , fc. AVERTISSEMENT DE L’AUTEUR L’accueil favorable que le public u bien voulu faire aux premiĂšres Ă©ditions de mon TraitĂ© de s actions possessoires m’enhardit Ă  en donner une nouvelle. La seconde Ă©dition Ă©tait Ă©puisĂ©e depuis longtemps ; mais les travaux de ma profession, les luttes incessantes du barreau ne m’ont pas permis de livrer plus tĂŽt la troisiĂšme Ă  l’impression. J’ai, du reste, profitĂ© de ce retard pour faire une Ă©lude'approfondie de mon sujet, et mon premier travail a Ă©tĂ© entiĂšrement refondu. Je prĂ©sente dans celui-ci un assez grand nombre de questions et de solutions qu’on ne trouvait pas dans le prĂ©cĂ©dent. J’y ajoute mĂȘme une autre matiĂšre, celle des actions pĂ©titoires. Aussi ai-je changĂ© le titre de l’ouvrage, qui s’appellera dĂ©sormais TraitĂ© de la possession et des actions possessoires et pĂ©titoires. Je publie au jour- Vj d’hui la premiĂšre partie relative Ă  la possession et aux actions possessoires. Je m’occupe sans relĂąche de la seconde, qui comprendra les actions pĂ©titoires, et qui ne lardera pas h paraĂźtre; elle sera beaucoup moins Ă©tendue que la premiĂšre, parce que bon nombre des principes exposĂ©s dans celle-ci sont communs aux deux, et que d’ailleurs il m’est arrivĂ© assez souvent, en traitant des actions possessoires, de parler des autres actions. Une table alphabĂ©tique et raisonnĂ©e des deux parties de l’ouvrage paraĂźtra en mĂȘme temps que la seconde. PREMIÈRE PARTIE TRAITE DE LA POSSESSION DES ACTIONS POSSESSOIRES TITRE PREMIER DES ACTIONS POSSESSOIRES EN GÉNÉRAL ; POSSESSION REQUISE ; DÉLAIS POUR LES INTENTER. CHAPITRE PREMIER Principes du droit romain et du droit français ancien et actuel sur les actions possessoires en gĂ©nĂ©ral, et sur plusieurs d’entre elles en particu- lier.— DĂ©finition de ces actions et de la possession qui y donne lieu; de leur but, SECTION l rc . Actions possessoires en gĂ©nĂ©ral. La matiĂšre des actions possessoires, considĂ©rĂ©e de tout temps comme une des plus importantes et des plus Ă©pineuses de notre droit, n’a nĂ©anmoins que fort mĂ©diocrement excitĂ© la sollicitude de nos lĂ©gislateurs modernes. A peine le Code de procĂ©dure y consacre-t-il quelques articles dont la rĂ©daction nĂ©gligĂ©e et trĂšs-incomplĂšte est une source d’embarras. La loi du 25 mai 1838, qui aurait 1 — 2 — dĂ» faire cesser le plus grand nombre des difficultĂ©s, est loin d’atteindre ce but; et si le § 1 er de l’art. 6, le seul qui s’occupe de cette matiĂšre, en rĂ©sout quelques-unes, il en fait naĂźtre ou en laisse subsister beaucoup d’autres. Aussi, serons-nous souvent contraint, pour traiter notre sujet avec quelque utilitĂ©, de consulter les dispositions des lois romaines et de l’ancien droit français, en distinguant toutefois avec soin celles que l’on peut encore prendre pour guide de celles incompatibles avec la lĂ©gislation qui nous rĂ©git aujourd’hui. L’action possessoire, comme les mots l’indiquent, a uniquement la possession pour objet, Ă  la diffĂ©rence de l’action pĂ©titoire dont nous nous occuperons dans la seconde partie et qui tend Ă  faire prononcer sur la propriĂ©tĂ©. Il ne faut donc pas confondre l’une et l’autre nihil commune hetbet possessio cum proprietate, ainsi que le dit la loi 12, § 1 er , ff. de acq. vel amitt. possess. Si l’on remonte Ă  l’origine des sociĂ©tĂ©s, on reconnaĂźt que la possession ou occupation fut d’abord le seul mode d’acquĂ©rir la propriĂ©tĂ© ; nous pouvons ajouter qu’aujourd’hui elle est encore le premier et le plus naturel. On ne devient propriĂ©taire que pour avoir la possession ; car c’est par cette possession, par l’usage des choses qui en sont l’objet, que l’homme peut subvenir Ă  ses besoins. On conçoit dĂšs-lors l’importance qu’on attache Ă  l’acquĂ©rir ou Ă  la conserver. La possession, dit l’art. 2228 du Code civil, est la dĂ©tention ou la jouissance d’une chose ou d’un droit que nous tenons ou que nous exerçons par nous-mĂȘmes, ou par un autre qui la tient ou l’exerce en notre nom. » Suivant Pothier, possession vient de pedum posilio, position des pieds, ou, selon la leçon florentine, d’unç Vi sorte dĂ©position sur un siĂšge L. 1 r % ff. de acquir. poss., parce que celui qui possĂšde, rei insidet, est assis sur la chose, insistit, s’y arrĂȘte. Nous ne remonterons pas Ă  l’origine de l’action pos- sessoire ; nous ne rechercherons pas, avec quelques auteurs, si elle est une pure crĂ©ation de notre droit, ou si elle nousest venue des Romains, ni Ă  quelle Ă©poque prĂ©cise elle fut introduite soit en France, soit Ă , llome ; ces excursions dans le domaine de l’histoire seraient sans utilitĂ© et sans influence sur la dĂ©cision des difficultĂ©s de notre sujet. Nous dirons seulement qu’elle a Ă©tĂ© admise depuis trĂšs-longtemps dans la lĂ©gislation des deux peuples, avec quelques diffĂ©rences que nous aurons soin de signaler. Les actions dont nous traitons ici Ă©taient connues chez les Romains sous le nom d’interdits Interdicta. Dans le droit ante Justinien, l'interdit n’était pas considĂ©rĂ© comme une action ni comme un jugement; c’était simplement un dĂ©cret du prĂ©teur, rendu principalement en matiĂšre possessoire, et conçu en termes spĂ©ciaux, par lequel il ordonnait ou prohibait quelque chose. Erant autem interdicta, forma atque conceptiones ver- borum quibus prĂŠtor aut jubebat aliquid pĂ©ri, aat pĂ©ri prohibebal, qaod tune maxime pebal, cum de possessione aut quasi possessione, inter aliquos contendebatur Inst, de interd. in principio. Suivant Vinnius, l’interdit pouvait ĂȘtre dĂ©fini, dans 1 ancien droit romain Decret tan preetoris, certis verbis conception, quo in cousis possessionum vel quasi possessio- nurn jubebat aliquid pĂ©ri, aut perivetabat, prout id rei de qua agebatur, conveniebat. Le mĂȘme commentateur ajoute que le prĂ©teur n’obser- vait pas les formes judiciaires et ne rendait pas de juge- ment, prƓtor ad postulationem interdiction petentis, ad- versario ad se l'ocato, sine forma judicii interdiction reddebat, certa verboruin formula jubens aut vetans ali- quid fieri. Et si l’on n’obĂ©issait pas Ă  ce dĂ©cret, ou il le faisait exĂ©cuter par la force, ou, par suite de son interdit, il donnait la facultĂ© d’intenter une action et de faire rendre un jugement. Mais Justinien ayant reconnu l’importance des interdits, la nĂ©cessitĂ©] de simplifier les formes, et d’abrĂ©ger les dĂ©lais, autorisa Ă  porter l’action directement devant le juge compĂ©tent Inst. ult. de Interd.. Aussi, dans le § I er , il dit N une dispiciamus de. inter- dictis, seu actionibus qitƓ pro his exercentur, et dans le tit. 1 er du livre 43 ff. on lit De interdictis seu extraordi- nariis actionibus. Les interdits furent introduits pour les matiĂšres placĂ©es plus spĂ©cialement sous l’autoritĂ© publique et dans lesquelles l’administration doit au pays comme aux citoyens une surveillance et une protection plus directes ; c’est-Ă - dire dans les choses de droit divin ou religieux, de droit commun ou public, par exemple pour la protection des lieux sacrĂ©s, des tombeaux, des inhumations, pour l’usage et la conservation de la mer et de ses rivages, des fleuves, des voies publiques. Plus tard ils furent Ă©tendus aux matiĂšres d’intĂ©rĂȘt privĂ© rei familiaris causa, dans les causes qui amĂšnent entre les parties contestantes des rixes et des voies de fait et qui appellent par consĂ©quent l’intervention immĂ©diate de l’autoritĂ© ; telles sont les contestations sur la possession et la quasi possession. Quo- niam in hujusmodi controversiis, sĂŠpc contingit et cƓdes fieri, et vulnera infligi etplagas inferri ThĂ©ophile, paraphrase, livre 43 ff. de Interd.. La dĂ©nomination d’interdit semblait ne devoir s’appliquer qu’au cas oĂč il y avait interdiction ou dĂ©fense d’agir, et non Ă  celui oĂč il Ă©tait prescrit de faire quelque chose. Nous lisons, mĂȘme aux Institutes de GaĂŻus 4-166, qu’on appelait spĂ©cialement interdits, ceux par lesquels le prĂ©teur prohibait, et dĂ©crets, ceux par lesquels il ordonnait, vocantur autcm dĂ©crĂ©ta, cum fie ri aliquid jubet interdicta vero cum prohibet fieri. Sed tamen, dit Justinien, o btinuit omnia interdicia appellari, et la raison qu’il en donne est bien peu dĂ©cisive, ainsi que le remarque Vin- nius Quia inter duos dicuntur. Aussi cet auteur substitue aux expressions inter duos, le mot intĂ©rim, et dit qu’ils ont Ă©tĂ© appelĂ©s interdits parce qu’ils disposent de la possession pendant le litige sur la question de propriĂ©tĂ©. D’aprĂšs le 1 er § des Institutes dĂ©jĂ  citĂ©, les interdits portaient quelquefois sur le fond mĂȘme du droit, et c’est en quoi notre lĂ©gislation diffĂšre de celle des Romains ; car chez nous la possession a toujours Ă©tĂ© l’unique objet de la complainte et de la rĂ©intĂ©grande. Nous devons ajouter qu’à llome ceux des interdits qui avaient la possession pour objet ne tendaient pas toujours Ă  la conserver ou Ă  la recouvrer, mais avaient quelquefois pour but d’acquĂ©rir celle qu’on n’avait jamais eue. Le titre 1 er du 39 e livre du Digeste, le 43 e livre tout entier, et les onze premiers titres du 8 e livre du Code sont consacrĂ©s au dĂ©veloppement des rĂšgles gĂ©nĂ©rales des interdits, Ă  l’explication dĂ©taillĂ©e des principes spĂ©ciaux et des formules de chacun d’eux. Le titre 15 du 4 e livre des Institutes de Justinien est le rĂ©sumĂ© simple et lucide de la matiĂšre. Justinien divise les interdits en deux classes principales. — fi — La premiĂšre comprend les interdits prohibitoiires, res- titutoires et exhibitoires. Summa autan divisio interdictorum hƓc est, ijjuod mit prohibitoria sunt, mit restitutoria, aut exhibitoria. Il explique ensuite la nature de chacun de ces interdits. 1° Prohibitoria sunt quibus prƓtor vetat aliqudd fieri; il en donne plusieurs exemples. 2° liestitutoria sunt quibus restitui aliquid jubet ; et il en donne encore des exemples. 3° Exhibitoria sunt per qua 1 jubet exhiberi. Il en donne pour exemple le cas d’un homme libre, d’un affranchi ou d’enfants recelĂ©s. Ces interdits avaient pour effett de forcer le receleur Ă  les reprĂ©senter. Heinneccius, dans ses recitationes, y ajoute le cas d’un testament qu’on cachait. Il y avait lieu Ă  l’interdit de tabulis exhibendis. La seconde division comprenait aussi trois sorties d’interdits. 1° Celui qui avait lieu pour acquĂ©rir la possession, adipiscendƓ possessions, ou quorum bonorum. 2° Celui qui avait pour hut de la conserver, retinendƓ possessions, ou uti possidetis. 3° Et le dernier qui tendait Ă  la recouvrer, recmperan- dĂŠ possessions, ou unde vi. Le premier avait lieu en faveur de celui que le prĂ©teur avait mis en possession de certains objets, par exemple, d’une succession ; comme le jugement du prĂ©teur ne lui donnait qu’un droit Ă  la chose, jus persequendi, il en obtenait la possession rĂ©elle par l’effet de cet interdlit. Le second avait lieu en faveur de celui qui Ă©tait en possession et qui demandait Ă  y ĂȘtre maintenu provisoirement pendant toute la durĂ©e du dĂ©bat sur la propriĂ©tĂ©. Connue cet interdit existe encore dans notre droit, que Justinien explique clairement en quoi il consiste et les avantages qui en rĂ©sultent, nous croyons devoir transcrire sur ce point le texte des Institutes. RetinendƓ possessionis causa comparata sunt interdicta, uti possidetis et utrubi cum ah utraque parte de proprie- tate alicujus rei controversia sit et ante quƓratur uter ex litigatoribus possideat et uter petere de-beat. Nunique, nisi ante exploratum fuerit, utrius eoruni possessio sit, non po~ test petitoria actio institut quĂŠ et civilis et naturalis ratio facit ut alius possideat et alius a possidente pelĂąt. Et quia longe commodius est et -potins possidere quam petere, ideo plerumque et fere semper ingens existit contentio de ipsa possessione. Commodum autem possidenti in eo est quod etiamsi ejus res non sit qui possidet, si modo actor non possit suam esseprobare, remanel in suo loco possessio ; propter quamcausam cum obscurasunt utriusque jura, contra petitorem judicari solet. Vient ensuite la diffĂ©rence entre l’interdit uti possidetis et celui utrubi ; le premier avait lieu pour les immeubles et n’exigeait pas une possession ancienne ; il suffisait de l’avoir au moment du trouble. Le second concernait les meubles. Dans l’ancien droit, il fallait, pour cet interdit, que la possession du demandeur eĂ»t durĂ© pendant la majeure partie de l’annĂ©e, ou, comme le disent les interprĂštes, quelle eĂ»t durĂ© plus longtemps que celle du dĂ©fendeur ; mais Justinien a fait disparaĂźtre ces diffĂ©rences en dĂ©cidant que la possession au moment du trouble suffirait pour ces deux interdits. Ainsi, les lois romaines n’exigeaient pas, comme les nĂŽtres, une possession annale ; il n’était pas non plus nĂ©cessaire, en gĂ©nĂ©ral, que l’action fĂ»t intentĂ©e dans l’annĂ©e du trouble. Nous examinerons ultĂ©rieurement si l’interdit utrubi est encore admis parmi nous, soit pour universalitĂ© de meubles, soit pour quelques meubles isolĂ©s. L’interdit recuperandƓ possessionis ou unde ci, appartenait Ă  celui qui avait Ă©tĂ© dĂ©pouillĂ© de sa possession par violence. RecuperandĂŠ possessionis causa solet interdici si qitis ex possessione fundi, vel Ɠdium vi dejectus fuerit; nam ei proponĂŒur mterdictum unde ri per quod is qui dejecit cogiturei restiture possessionem, licet is ah eo qui vi dejecit, vi, clam vel precario possideat. Toutefois cet interdit n’avait lieu que pour les immeubles, et l’action furti Ă©tait la seule qui appartĂźnt Ă  celui que la violence avait dĂ©pouillĂ© d’un objet mobilier. Les Romains divisaient encore les interdits en simples et doubles, simplicia et duplicia. Les simples Ă©taient ceux dans lesquels l’un Ă©tait demandeur et l’autre dĂ©fendeur ; les doubles, ceux dans lesquels chacun Ă©tait demandeur et dĂ©fendeur. Tertia divisio interdictorum est quod aut simplicia sunt aut duplicia Simplicia sunt, veluti in quibus aller actor, aller reus est, qualia suntomnia restitutoria aut exhibitoria. Duplicia sunt veluti utipossidetis interdiction cl utrubi. Ideo autem duplicia vocantur quia par utriusque litigalo- ris in his conditio est, nec quisquam prƓcipue reus, vel actor intelligitur sed unusquisque tain rei quam actoris partes sustinet. Enfin, le Digeste, livre / 3 , titre 1 er , de interdictis sive. extraordinariis actionibus quƓ pro his competunt, ajoute une division des interdits, en annalia et perpĂ©tua; les premiers devaient avoir lieu dans l’annĂ©e du trouble, les autres n’étaient limitĂ©s par aucun dĂ©lai. Cujas, ad titulum codicis unde vi, remarque que des trois interdits adipiscendƓ, relinendƓ et recuperandƓpossession is, les deux derniers sont seuls admis dans nos tribunaux. AdipiscendƓ possessions interdicta non stmt in mu, sedretinendƓ tantum et recuperandƓ. Quod optimeno- tavit Jmbertus, in institutionibus forensibus, quo ad triturant forensem nu U us nielior. C’est encore ce qu’exprime Boutaric, en termes plus gĂ©nĂ©raux. 11 y comprend l’interdit utrubi, ce qui fait dire Ă  M. le prĂ©sident Henrion de l’anse y qn’il va trop loin, parce que, suivant ce grand magistrat, la complainte ne peut plus avoir lieu que pour universalitĂ© de meubles, ce que nous examinerons par la suite. Duplessis, des Actions, Domat et Pothier s’en expliquent dans le mĂȘme sens. M. Dupin aĂźnĂ©, dans ses notes sur les Recitationes Ilein- ncccii, tome 2, pages 396, 399 et /00, enseigne aussi que nous avons seulement conservĂ© la complainte et la rĂ©intĂ©grande, et que les autres interdits, mĂȘme celui utrubi, ne sont pas en usage. C’est ce qui a Ă©tĂ© plus tard Ă©rigĂ© en rĂšgle lĂ©gale dans notre jurisprudence française. En effet, la coutume de Paris contient les trois articles suivants Article 96. n Quand on peut intenter la complainte. Quand le possesseur d’aucun hĂ©ritage ou droit rĂ©el rĂ©putĂ© immeuble, est troublĂ© et empĂȘchĂ© en la possession et jouissance, il peut et luy loist soy complaindre et intenter poursuite en cas de saisine et de nouvelletĂ© dedans — 10 — l’an et jour du trouble Ă  lui fait et donnĂ© audit hĂ©ritage ou droit rĂ©el, contre celui qui l’a troublĂ©. Article 97. Complainte n’a lieu pour meubles, si ce n’est pour universitĂ© mobiliĂšre. Aucun n’est recevable de soi complaindre et intenter le cas de nouvelletĂ© pour une chose mobiliĂšre particuliĂšre; mais bien pour universitĂ© de meubles, comme en succession mobiliĂšre. » Remarquons, en passant, que la raison donnĂ©e par FerriĂšre, de l’exception que renferme cet article, est qu’une universitĂ© de meubles est rĂ©putĂ©e un corps et un immeuble nous apprĂ©cierons cette raison plus tard. article 98. De la simple saisine. Quand aucun a joui et possĂ©dĂ© aucune rente, et icelle prise et perçue sur aucun hĂ©ritage auparavant et depuis dix ans, et par plus grande partie d’icelui temps, s’il est troublĂ© et empĂȘchĂ© en la possession et jouissance d’icelle, il peut intenter et poursuivre le cas de simple saisine personnelle, contre celui ou ceux qui l’ont ainsi troublĂ©, et requĂ©rir ĂȘtre remis en la mĂȘme possession en laquelle il Ă©tait auparavant ladite cessation. » L’ordonnance de 1667, titre 18, des complaintes et rĂ©intĂ©grandes, contenait les dispositions suivantes Art. 1 er . Si aucun est troublĂ© en la possession et jouissance d’un hĂ©ritage ou droit rĂ©el, ou universalitĂ© de meubles qu’il possĂ©dait publiquement, sans violence, Ă  autre titre que de fermier ou possesseur prĂ©caire, il peut, dans l’annĂ©e du trouble, former complainte en cas de saisine et nouvelletĂ© contre celui qui lui a fait le trouble. Art. 2. Celui qui aura Ă©tĂ© dĂ©possĂ©dĂ© par violence ou voies de fait, pourra demander la rĂ©intĂ©grancle par action civile et ordinaire, ou extraordinairement, par action criminelle ; et, s’il a choisi l’une de ces deux actions , il ne pourra se servir de l’autre, si ce n’est qu’en prononçant sur l’extraordinaire on lui eĂ»t rĂ©servĂ© l’action civile. » Les autres dispositions sont relatives Ă  la forme deprocĂ©der ; nous en parlerons ailleurs. Ajoutons que la jurisprudence avait admis la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre, Ă©galement connue des Romains, et la rĂ©crĂ©ance. Tel a Ă©tĂ© l’état de notre lĂ©gislation jusqu’à la rĂ©volution. Une loi du 24 aoĂ»t 1790, tit. 3, art. 9, s’exprime ainsi Le juge de paix connaĂźtra de mĂȘme, sans appel, jusqu’à la valeur de 50 fr., et, Ă  charge d’appel, Ă  quelque valeur que la demande puisse monter 1°.... 2° Des dĂ©placements de bornes, des usurpations de terres, arbres, haies, fossĂ©s et autres clĂŽtures commises dans l’annĂ©e ; des entreprises sur les cours d’eau servant Ă  l’arrosement des prĂ©s, commises pareillement dans l’annĂ©e, et de toutes autres actions posses- soires. » La loi du 20 octobre 1790, contenant rĂšglement pour la procĂ©dure de la justice de paix, aprĂšs avoir dit, dans les deux premiers articles du titre 1 er , que la citation devant ce tribunal sera faite en vertu d’une cĂ©dule, ajoute Art. 3. En matiĂšres purement personnelles ou mo- — 12 — biliĂšres, la cĂ©dule de citation sera demandĂ©e au juge du domicile du dĂ©fendeur. Aiit. h. Elle sera demandĂ©e au juge de la situation de l’objet litigieux lorsqu’il s’agira 1°... 2° des dĂ©placements de bornes, des usurpations de terres, arbres, haies, fossĂ©s et autres clĂŽtures commises dans l’annĂ©e; des entreprises sur les cours d’eau, servant Ă  l’arrosement des prĂ©s, commises pareillement dans l’annĂ©e, et de toutes autres actions possessoires. » Le Code de procĂ©dure contient aussi, Ă cetĂ©gard, quelques dispositions que voici Art. 2. En matiĂšre purement personnelle ou mobiliĂšre, la citation sera donnĂ©e devant le juge du domicile du dĂ©fendeur; s’il n’a pas de domicile, devant le juge de sa rĂ©sidence. Art. 3. Elle le sera devant le juge de la situation de l’objet litigieux, lorsqu’il s’agira 1°.... 2° des dĂ©placements de bornes, des usurpations de terres, arbres, haies, fossĂ©s et autres clĂŽtures commises dans l’annĂ©e ; des entreprises sur les cours d’eau, commises pareillement dans l’annĂ©e, et de toutes autres actions possessoires. Art. 23. Les actions possessoires ne seront recevables qu’autant qu’elles auront Ă©tĂ© formĂ©es dans l’annĂ©e du trouble par ceux qui, depuis une annĂ©e au moins, Ă©taient en possession paisible par eux ou les leurs, Ă , titre non prĂ©caire. » Le § 1 er de l’art. G de la loi du 25 mai 1838 est ainsi conçu Les juges de paix connaissent Ă  la charge d’appel des entreprises commises dans l’annĂ©e, sur les cours d’eau servant Ă  l’irrigation des propriĂ©tĂ©s et au motive- — 13 — ment des usines et moulins, sans prĂ©judice des attributions de l’autoritĂ© administrative, dans les cas dĂ©terminĂ©s par les lois et par les rĂšglements ; des dĂ©nonciations de nouvel Ɠuvre, complaintes, actions en rĂ©intĂ©grande et autres actions possessoires fondĂ©es sur des faits Ă©galement commis dans l’annĂ©e. » Enfin, pour terminer la sĂ©rie des dispositions sur la matiĂšre, nous reproduisons le texte de l’art. 2050 du Code civil. 11 est ainsi conçu La contrainte par corps a lieu, eu cas de rĂ©intĂ©grande , pour le dĂ©laissement ordonnĂ© par justice, d’un fonds dont le propriĂ©taire a Ă©tĂ© dĂ©pouillĂ© par voie de fait ; pour la restitution des fruits qui en ont Ă©tĂ© perçus pendant l’indue possession et pour le paiement des dommages-intĂ©rĂȘts adjugĂ©s au propriĂ©taire. » M. le prĂ©sident Henrion de L’ansey dĂ©finit l’action pos- sessoire, une action qui appartient Ă  celui qui a la possession civile d’un hĂ©ritage, d’un droit rĂ©el ou d’une universalitĂ© de meubles pour s’y faire maintenir lorsqu’il est troublĂ©. Mais nous croyons cette dĂ©finition inexacte et incomplĂšte. Inexacte, en ce quelle suppose que l’action posses- soire est admise aujourd’hui pour universalitĂ© de meubles; or cette supposition est une grave erreur, ainsi que nous le dĂ©montrerons en traitant des choses qui peuvent ĂȘtre la matiĂšre de cette action. IncomplĂšte, en ce qu’elle ne comprend que la complainte fondĂ©e sur un simple trouble, et non la rĂ©intĂ©grande fondĂ©e sur la dĂ©possession violente. Nous croyons donc devoir dĂ©finir l’action possessoire, une action appartenant au possesseur d’un immeuble, d’un U — droit rĂ©el immobilier pour se faire maintenir ou rĂ©intĂ©grer dans sa possession, en cas de trouble ou d’éviction. AprĂšs avoir exposĂ© les notions les plus gĂ©nĂ©rales sur les actions qui font le sujet de ce TraitĂ© et avant d’arriver Ă  la complainte qui exigera des dĂ©veloppements Ă©tendus, nous devons, pour rendre notre marche plus facile, nous occuper d’abord de la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre et de la rĂ©intĂ©grande. Nous nous expliquerons aussi sur la rĂ©crĂ©ance et le sĂ©questre, mesures qui ont une intime corrĂ©lation avec les matiĂšres possessoires. SECTION II. De la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre, de la rĂ©intĂ©grande, de la rĂšcrĂšance et du sĂ©questre. § 1". DĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre. La dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre, d’aprĂšs le sens grammatical et l’exacte propriĂ©tĂ© des mots, est la dĂ©claration de l’existence d’un ouvrage nouveau. Mais, en droit romain, ces termes avaient une autre signification ; ils dĂ©signaient la facultĂ© qu’on avait de faire suspendre des travaux nuisibles, et d’obtenir du juge, en cas de continuation, malgrĂ© sa dĂ©fense, leur destruction provisoire avant tout examen du fond du droit. Nous prouverons que cette action, dĂ©jĂ  modifiĂ©e par notre ancienne jurisprudence, n’existe aujourd’hui que de nom, et qu’elle est assujettie Ă  toutes les rĂšgles des autres actions possessoires. Pour Ă©tablir cette proposition , nous rechercherons 1° Quels Ă©taient les principes du droit romain sur cette matiĂšre ; 2° Quels Ă©taient ceux de l’ancien droit français ; 3° Et quels sont ceux du droit actuel. N” I. Droit romain. Le Digeste et le Code renferment chacun un titre consacrĂ© Ă  expliquer la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre De operis novi nuntiatione. Le mot nuntiatio, abrĂ©gĂ© de denuntiatio, veut dire ici dĂ©fense, empĂȘchement, interdiction dĂ©clarĂ©e Ă  quelqu’un. IIoc edicto promittitur ut sive jure, sive injuria opus fieret, per nuntiationem inhiberetur. Loi l rc f[. Les Institutes disent de mĂȘme Interdicere est denuntiare, prohibere. La maniĂšre la plus gĂ©nĂ©rale, la plus usitĂ©e de faire la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre, Ă©tait par simples paroles profĂ©rĂ©es Ă  ceux qui exĂ©cutaient les travaux Nuntiatio ex hoc edicto non habet necessariam prƓtoris additionem potest enim nuntiare quis, etiamsi cuin non adierit. Ce sont les termes de la loi l rc . § 2, D. de operis novi nuntiatione. Mais il y en avait encore deux autres. Celui Ă  qui nuisait le nouvel Ɠuvre pouvait requĂ©rir le prĂȘteur d’en dĂ©fendre la continuation. Et, suivant la loi 5, § 10 du mĂȘme titre, la loi 6 , g 1, D. si servitus vindicetur, et la loi 1”, g 6 , D. qnodvi autclam, il pouvait, au lieu de s’opposer verbalement Ă  ce que l’ouvrage fĂ»t continuĂ©, ou de s’adresser au prĂȘteur pour obtenir des dĂ©fenses, jeter une petite pierre sur le terrain de l’innovateur, et, par lĂ , mettre celui-ci hors d’état de continuer ses travaux, jusqu’à ce qu'il en eĂ»t Ă©tĂ© autrement ordonnĂ© en justice. La dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre avait lieu, ou pour conserver un droit privĂ©, ou pour Ă©viter le dommage dont on Ă©tait menacĂ©, ou pour la conservation d’un droit qui appartenait au public. Aut juris nostri conservandi causa, aut damni infecti, aut publici juris tuendi gratia. Nuntiamus autem quia jus aliquod prokibendi habemus, vel ut damni. infecti cuveatur nobis ab eo qui forte in pn- blico vel in privato quid molitur. /. de op. nov. nunt., loi l r , § 16. Il n’y avait mĂȘme aucune distinction Ă  faire entre les villes et les campagnes Sire intra oppida sive extra op- pida, in villis vel agris, opus novum fiat, nuntiatio ex hoc edicto locum habet § 14. Elle pouvait ĂȘtre intentĂ©e toutes les fois que l’ancien Ă©tat des choses Ă©prouvait quelque changement. Opus novum facere videtur qui aut Ɠdificando, aut detrahendo aliquid, pristinam faciem operis mutĂąt § 11; mais non contre celui qui ne faisait qu’étayer ou rĂ©parer sa maison Si quis Ɠdificium vĂȘtus fulciat, an opus novum nun- tiare eipossumus, videamus ? et magis est ne possimus, hic enim non opus novum facit, sed veteri sustinendo remedium adhibet g 13. L’action pouvait ĂȘtre intentĂ©e, non-seulement contre le voisin immĂ©diat, mais mĂȘme contre l’arriĂšre voisin Non solum proximo vicino, sed etiam superiori opus fa- cienti nuntiare opus novumpotero. Loi 8. Le qu’il importe de remarquer, c’est que, suivant le § 1 er de la loi 1, la dĂ©nonciation ne pouvait avoir lieu qu avant 1 achĂšvement des travaux Hoc autem edictum remediumque operis novi nuntiationis, adversus futura — 17 — opĂ©ra inductum est, non adversus prƓterita hoc est adversus ea quƓ nundum facta sunt, ne fiant. Il n’en rĂ©sultait pourtant pas que celui qui avait laissĂ© achever les travaux, fĂ»t sans action ou n’eĂ»t plus que l’action pĂ©titoire ; mais, suivant le mĂȘme paragraphe, il devait se pourvoir par l’interdit vi aut clam Nam si quid operis fuerit factum quod fie ri non dehuit, cessĂąt edic- tum de operis novi nuntiatione et erit transeundum ad interdiction quod vi aut clam factum erit, ut restituatur; et quod in loco sacro religiosove et quod in luminc pu- blico, ripave jmblica'factum erit nam his intcrdictis res- Utuetur, si quid illicite factum est. Il avait encore l’interdit uti possidetis , ainsi que cela rĂ©sulte de la loi 8, § 5, D. si servitus vindicetur, et du Commentaire de VoĂ«t sur les Pandectes, liv. 43, tit. 18, n° 1, et du § 10, 1. 5, ff. de op. nov. nunt. La dĂ©nonciation pouvait avoir lieu mĂȘme les jours fĂ©riĂ©s. § 4, loi l rc , ff. de operis novi nunt. Il n’était pas nĂ©cessaire que la dĂ©nonciation fĂ»t faite au propriĂ©taire en personne ; il suffisait qu’elle le fĂ»t Ă  celui qui dirigeait les travaux, Ă  l’un de ses ouvriers ou h tout autre qui, Ă©tant sur les lieux, Ă©tait Ă  portĂ©e d’en faire part au propriĂ©taire. Nuntiari autem non utique domino oportet suffwit enim, in re prĂŠsenti, nuntiari ei qui in re prĂŠsenti fuerit, usque adeo ut etiam fabris vel opi/i- cibus qui eo loci operantur, opus novum nuntiari possit ; et generaliter ei nuntiari novum opus potest qui in re prĂŠsenti fuit domini operisve nomine. Neque refert quis sit iste, vel eu jus conditionis qui ifi re prĂŠsenti fuit. Nam et si servo nuntietur, vel mulieri, vel puero, vel puellĂŠ, tenet nuntiatio Sufficit enim in re prĂŠsenti operis novi nuntiationem factum sic , ut domino possit renuntiari. 18 — Loi 5, § 3. Et le motif en est, que la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre ne se faisait pas Ă  raison de la personne, mais de la chose, opcris novi nuntiatio in rem fit non in personam. Loi 10. La dĂ©nonciation de operis novi... n’avait pas lieu pour toutes sortes de travaux Non omnia opĂ©ra complectitur; sed ea sola quƓ solo conjuncta surit, quorum Ɠdiftcatio vel demolitio videtur opus novum continere. Idcirco plaçait si quis messem faciat, arborent succidat, vineam putet quamquam opus faciat, tamen ad hoc edictum non perti- nere quia ad ea opĂ©ra quƓ in solo fiant, pertinet hoc edictum. Loi l r ', § 12. Cette dĂ©nonciation Ă©tait, de plein droit, suspensive des travaux commencĂ©s. Celui qui les exĂ©cutait Ă©tait tenu de cesser, lors mĂȘme qu’il prĂ©tendait ĂȘtre bien fondĂ© Ă  les continuer. La loi l re , dĂ©jĂ  citĂ©e, est positive Sivejure, sive injuria... Et si, malgrĂ© la dĂ©fense, il les continuait, son adversaire pouvait se pourvoir par l’interdit quod vi aut clam, pour faire dĂ©truire ce qui avait Ă©tĂ© fait depuis la dĂ©nonciation. S’il voulait, aprĂšs cette continuation, se pourvoir devant le prĂȘteur, pour prouver qu’il avait eu le droit de le faire, le juge devait refuser de l’entendre, jusqu’à ce qu’il eĂ»t remis les choses dans leur premier Ă©tat. Si is cui opus novum denuntiatum est, ante remissio- nem Ɠdificaverit, deinde cƓperit agere jus sibi esse ita Ɠdi- ficatum habere, prƓtor actionem ei denegare debet et interdiction in eum de opĂ©rĂ© restituendo reddere. L. 1, §.. 7. Ait prƓtor quod factum est restituas. Quod factum est jubet restitui neque enim interest jure factum sit nec ne, Sive jure factum est, sive non jure factum, interdiction lo- çum habebit. L. 20, §. 3. Cependant, celui Ă  qui Ă©tait dĂ©noncĂ© le nouvel Ɠuvre pouvait ĂȘtre admis Ă  le continuer, en donnant caution de rĂ©parer le dommage qu’en pourrait souffrir le plaignant loi 5, g. '17; mais c’était le seul moyen qu’il eĂ»t pour pouvoir lĂ©galement continuer ses travaux; et, Ă  dĂ©faut de caution, il fallait absolument qu’il les interrompit. L. 8, g 2. La dĂ©nonciation du nouvel Ɠuvre avait lieu non-seulement lorsque le propriĂ©taire bĂątissait sur son fonds, mais mĂȘme lorsqu’il construisait sur le fonds voisin; c’est par une erreur Ă©vidente que M. le prĂ©sident llenrion de Pansey, dans son TraitĂ© de la CompĂ©tence des Juges de paix, affirme quelle Ă©tait restreinte au premier cas ; le texte des lois romaines est positivement contraire Ăą cette assertion. Sans doute ce premier cas Ă©tait le plus ordinaire ; les lois romaines conseillaient mĂȘme d’employer de prĂ©fĂ©rence alors la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre verbale ; mais rien n’empĂȘchait que celui sur le fonds duquel un tiers construisait, au lieu de se pourvoir par l’interdit idi possidetis qui avait pour effet la destruction des travaux, ne se bornĂąt Ă  une dĂ©fense de les continuer. Sed et si in cĂ©dĂ©s nostras quis immittat, aut in loco nos- tro Ɠdificet, Ɠquttm est nos operisnovi nuntiatione jus nos - trum nobis conservare. Loi 5, g 8. Et belle Sextus Pedius dĂ©finit triplicem esse causant operis novi nuntiationis aut naturalem, aut publicam, aut imposititiam. Naturalem, cum in nostras ĂŠdes quid immittitur, aut dificatur in nostro. Publicam causant, quotiens leges aut senatusconsulta constitutionesque princi- mm per operis novi nuntiationem luemur. Imposititiam, cum quis posteaquam jus suum dĂ©minait, alterius uuxit ; hoc est posteaquam servitutem Ɠdibus suis imposait, contra servitutem fecit. § 9. Meminisse aulem oportebit, quotiens quis in noslro Ɠdi~ ficare vel in nostrum immittere, vel projicere vult, melius esse eum per prƓtorem vel per maman id est lapilli ic- tum prohibera quam operis novi nuntiationc. CƓterum, operis novi nuntiationc possessorem eum faciemus, oui nun- tiaverimus. Aut si in suo quid faciat quod nobis noceat, tune operis novi denuntiatio erit necessaria. Et si forte in nostro aliquid facere quis persĂ©vĂ©rĂąt, Ɠquissimum erit in- terdicto adversus eum quod vi aut clam aut uti possidetis uti 810 . Ces lois, nous le rĂ©pĂ©tons, ne laissent aucun doute, et M. Merlin, Questions de droit, 4 e Ă©dition, V° DĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre, est complĂštement de notre avis. La dĂ©nonciation avait lieu en gĂ©nĂ©ral pour les servitudes. Si celui qui Ă©tait grevĂ© d’une servitude faisait sur son fonds des travaux susceptibles d’en empĂȘcher l’exercice, le crĂ©ancier pouvait s’opposer, par la dĂ©nonciation du nouvel Ɠuvre, Ă  ce qu’ils fussent continuĂ©s. Jus liabet opus novum nuntiandi qui aut dominium aut servitxdem habet. Loi 3, D. de Remissionibus. La loi 15, J. de servitut. prƓdiorum urbanorum n’est pas moins positive pour le cas oĂč celui qui doit la servitude ne luminibus officiatur, Ă©lĂšve le bĂątiment qu’il construit sur son fonds Ă  une hauteur qui obstrue les jours de son voisin Inter servitutes ne luminibus officiatur et ne prospectai offendatur aliud et aliud observatur quod in prospectu plus quis habet, ne quid ei officiatur ad gratio- rem prospectum et liberum, in luminibus autem non of/i- çere ne lamina cujusquam obscuriora fiant, Quodcumque irjitur facial ad luminis impedimentum prohibai polest, si servit us debcatur, opusque ei novum nuntiari potcst, si modo sic fiat ut lumini noceat. La loi 6, § 7 du mĂȘme titre, les lois 2, 5, § 9, ff. de operis novi nuntiat., consacrent les mĂȘmes principes. Mais la loi l/i nous semble faire exception pour le cas oĂč l’on bĂątit sur son terrain assujetti Ă  un droit de passage alors c’est, suivant cette loi, par la voie pĂ©titoire que le prĂ©tendant Ă  la servitude doit rĂ©clamer. Qui viam habet, si opus novum nuntiaverit adversus eum qui in via Ɠdiji- cat, nihil agit; sed servit ut-em vindicare non prohibetur. VoĂ«t essaie de concilier ces lois par une distinction. Il dit d’abord que la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre a lieu pour toutes les servitudes, lorsque les travaux en empĂȘchent absolument l’exercice, ce qui s’applique Ă  celle de passage, quand il n’y a pas possibilitĂ© de passer ailleurs qu’à l’endroit couvert de nouvelles constructions; mais il ajoute que, comme ordinairement la servitude de passage est due par tout le fonds et non pas seulement par la partie sur laquelle la construction a eu lieu, le prĂ©tendant Ă  la servitude n’a que l’action pĂ©titoire pour se faire dĂ©signer une autre partie par laquelle il pourra passer. La premiĂšre partie de cette opinion nous paraĂźt un peu arbitraire, et nous croyons que le sens des lois romaines est que la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre est admise pour toutes les servitudes autres que celles de passage. Il y a dans le Code de Justinien, comme nous l’avons dit, un titre de operis novi nuntiatione; mais il n’est composĂ© que d’une seule loi; et voici ce quelle porte Quelques-uns ont prĂ©tendu qu’aprĂšs un an Ă  compter de la dĂ©nonciation du nouvel Ɠuvre, celui qui l’avait faite ne pouvait plus s’opposer Ă  la construction du bĂątiment _ 22 _ commencĂ©. Mais cette opinion nous a paru inique. !ar si le plaignant n’a pas fait en bonne forme la dĂ©fense de continuer les travaux, on a pu les continuer pendant l’annĂ©e; et s’il a fait rĂ©guliĂšrement cette dĂ©fense, il peut encore s’en prĂ©valoir aprĂšs l’annĂ©e pour empĂȘcher la continuation du nouvel Ɠuvre, quod dupliciter iniquum nabis esse videlur ; sive etenim non recte opus prohibuerit, decet non per tolum annum lioc impediri sive recte denun- liationem emiserit, ctiampost anmim licentiam habere redi- ficutionem prohibere. Pour rĂ©primer cette injustice, nous voulons que dĂ©sormais toute procĂ©dure de ce genre soit terminĂ©e dans l’espace de trois mois, et que cependant si, au bout de ce terme, l’allaire Ă©prouve des difficultĂ©s qui forcent d’en reculer le jugement, le dĂ©fendeur Ă  la dĂ©nonciation du nouvel Ɠuvre soit autorisĂ©, sous caution, Ă  continuer et achever les travaux qu’il a commencĂ©s Talem igitur iniquitatem inhibentes, sancimus, si quis de- nuntiationem emiserit, in hac quidem regia urbe proefec- tum urbi festinare; in provincia vero rectorem ejus intra trium mensium spatium causam dirimere. Sui vero aliquod fuerit quocumque modo ad decisionem ambiguitatis impe- dimentum, licentiam habere eum qui Ɠdificationem depro- perat, opus de qun agitur efficere, prius fidejussore ab co data . ut si non recte Ɠdificaverit, omne opus quodpost denuntiationeni fecerit, suis sumptibus destruet. Sic enim et opĂ©ra non per inanes dennntiationes prohibebuntur, et recte denuntiantibus consuletur.» Il n’y avait pas de dĂ©lai pour la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre; elle pouvait avoir lieu tant que les travaux n’étaient pas terminĂ©s, et par consĂ©quent plus d’un an avant le commencement de leur exĂ©cution. Il n’était pas non plus nĂ©cessaire que l’auteur de la dĂ©nonciation prouvĂąt 83 — une possession annale antĂ©rieure, mĂȘme une possession quelconque, puisque la suspension des ouvrages avait lieu sans examiner si le dĂ©nonciateur avait ou non droit d’en empĂȘcher la continuation. Telles Ă©taient, en substance, les principes du droit romain sur la matiĂšre. N° II. Ancien droit fiançais. Notre ancienne lĂ©gislation ne nous offre aucune disposition relative Ă  la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre; l’ordonnance de 1657, qui parle avec prĂ©cision de la complainte et de la rĂ©intĂ©grande, garde le silence sur cette action. Ce n’est guĂšre que dans les ouvrages d’auteurs qui ont Ă©crit avant cette ordonnance qu’on trouve quelques notions Ă  cet Ă©gard. La plupart des auteurs qui ont Ă©crit depuis n’en parlent pas. Tels sont les commentateurs Bornier, lloddier, Jousse, Pothier, TraitĂ© de la possession ; Pigeau, ProcĂ©dure du ChĂątelet; les autres en parlent si faiblement qu’il n’est pas bien certain qu’ils l’aient considĂ©rĂ©e comme ayant survĂ©cu Ă  la gĂ©nĂ©ralitĂ© des termes de l’ordonnance. Nous sommes fort disposĂ©s Ă  croire que cette ordonnance a , par le fait, aboli la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre en la soumettant aux mĂȘmes conditions que toutes les autres actions possessoires. Voyons, au surplus, comment s’en expliquaient les anciens auteurs. Boutillier, qui Ă©crivait dans le 14* siĂšcle, et qui est mort conseiller au parlement de Paris dans les premiĂšres annĂ©es du 15', nous retrace ainsi, dans sa Somme rurale, livre 2, titre 32, les usages de son temps sur cette matiĂšre — Ăźi — Si, sçacliez que dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre a lieu si tĂŽt que quelqu’un fait ou fait faire nouvel Ɠuvre au prĂ©judice d’autrui, ’.elui qui sent que c’est en son prĂ©judice le peut dĂ©fendre et dĂ©noncer... Si, sçachez que cette dĂ©nonciation est de tel effet, si tĂŽt que celui qui se sent troublĂ© s’en aperçoit, il peut venir sur le lieu oĂč on fait et commence cette nouvelle Ɠuvre, et dire Ă  ceux qu’il trouvera lĂ , soit qu’ils soient gens de celui qui fait faire ou non, soit que celui y soit sur l’ouvrage fait ou non, et doit ainsi aux ouvriers et assistants qui lĂ  seront trouvĂ©s Fous faites ci nouvel Ɠuvre Ă  mon prĂ©judice, je vous dĂ©nonce que vous cessiez de faire et dĂ©sistiez entiĂšrement et de ce que fait avez, je fais protestation que tout soit dĂ©moli et rĂ©parĂ©, et que amendĂ© soit si avant que juge esgar- dera qu’il appartiendra, et ne le convient jĂ  autrement faire dĂ©noncer Ă  celui qui la nouvelle Ɠuvre fait faire , si prĂ©sent n’y est trouvĂ©, mais bien les ouvriers lui fassent savoir si bon lui semble ; car si depuis il y Ă©tait ƓuvrĂ©, ce serait attentĂ©, et tomberait en peine et amende d’attentat; et de fait convient que l’ouvrage soit cessĂ© du tout jusqu’à ce que celui qui l’ouvrage fait faire, fait convenir et dĂ©noncer par devant le juge Ă  savoir pourquoi il a fait cette nouvelle dĂ©nonciation ; et sera le faiseur de l’ouvrage demandeur ce cas, et le dĂ©nonçant possessionnaire ou possesseur de la dĂ©nonciation qui est grande dignitĂ© en procĂšs. Alors, le dĂ©nonçant comme dĂ©fendeur et possesseur soutiendra la dĂ©nonciation et les causes qu’il a de ce faire. Mais, selon aucuns, il est de nĂ©cessitĂ© que cette dĂ©nonciation soit faite dans l’an que cette nouvelle Ɠuvre est commencĂ©e ; et la cause mise en cour, le procĂšs doit ĂȘtre fait en trois mois ; sinon, le faiseur de la nouvelle Ɠuvre requiert, disant que le procĂšs est apparent de du- rer longuement, et, par ainsi, l’Ɠuvre qui est nĂ©cessaire et profitable...., pouvoir aller Ă  perdition.... lejuged’ol- lice peut et doit pourvoir Ă  ce que l’ouvrage se parfasse, en baillant suffisante caution. » Ainsi, d’aprĂšs Boutillier, la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre, ou la dĂ©fense de continuer les travaux pouvait se faire verbalement ; mais il est contredit par Charondas , comme on le voit dans la note suivante Nonciation de nouvel Ɠuvre est une prohibition de ne bĂątir et Ă©difier nouvel Ɠuvre. Elle se faisait.... ou par paroles du dĂ©nonciateur, ou par autoritĂ© du prĂȘteur.... On ne pratique en France que la derniĂšre maniĂšre, par autoritĂ© du juge, et les parties Ă©tant ouĂŻes par devant lui, il ordonne si la dĂ©nonciation tiendra, ou si celui qui a commencĂ© de bĂątir continuera en baillant caution. » Papon a mĂȘme prĂ©tendu que la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre devait ĂȘtre assimilĂ©e Ă  la complainte. Iu reste, le juge avait la facultĂ©, mais non l’obligation d’admettre l’auteur du nouvel Ɠuvre Ă  le continuer, moyennant caution de remettre les choses dans leur premier Ă©tat; et, en effet, si d’une part on trouve un arrĂȘt du parlement de Paris, du 26 septembre l/i30, qui a permis sous caution d’achever les moulins d’Amiens, commencĂ©s Ă  bĂątir, sur le pont desquels le passage Ă©tait rendu plus Ă©troit, » de l’autre aussi on trouve deux arrĂȘts de la mĂȘme cour, l’un du 26 novembre 1513, par lequel la requĂȘte de permission de bĂątir en lieu contentieux, en baillant caution de dĂ©molir, fut rejetĂ©e ; l’autre du 27 novembre 1514, qui dĂ©bouta Gabriel de la ChĂątre des lettres par lui prĂ©sentĂ©es, tendant Ă  fin d’ĂȘtre reçu pendant le procĂšs de complainte, Ă  suivre et continuer de bĂątir, en baillant caution de dĂ©molir s’il Ă©tait dit. » Papon, liv. 8, tit. A, n 0 ’ 8, 9 et 10; Bouchcul, BibliothĂšque civile, au mot Complainte. l’était donc par les circonstances de chaque affaire que le juge devait se dĂ©terminer sur ce point. Henrvs, liv. A, chap. 6, question 8/j, rapporte les conclusions qu’il a donnĂ©es, comme avocat du roi, dans une affaire entre le seigneur de llostaing, demandeur en dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre, et le seigneur de la Baume, dĂ©fendeur. Nous dĂźmes qu’il semblait que le demandeur avait trop attendu d’arrĂȘter une nouvelle Ɠuvre, non-seulement avancĂ©e, mais presque achevĂ©e; que, par ce moyen , les dĂ©fenses requises pouvaient avoir plus d’envie et de chaleur que de raison, puisque la caution faisait cesser tout intĂ©rĂȘt Cum sit securus is qui opus novum nuntiavit, postquam ei cautum est, comme dit la loi 20, § 11, ff. de operis novi nuntiatione; qu’au surplus , la loi du mĂȘme titre au Code ne devrait pas ĂȘtre suivie Ă  la rigueur, et que, sur la dispute des interprĂštes , si elle avait dĂ©rogĂ© ou non aux lois prĂ©cĂ©dentes, il y avait apparence de suivre la distinction faite par le sĂ©nat de Turin, dans une espĂšce rapportĂ©e par ThĂ©saurus, decis 20/i, savoir s’il y a du pĂ©ril ou non au retardement de l’édifice, et si, pour le suspendre de trois mois, celui qui Ta entrepris peut en recevoir un prĂ©judice notable; et, quoique entre les modernes, Fachi- nƓus, livre 8, controv. cap. 48, rejette cette distinction, nous l’estimons pourtant d’autant plus recevable, que la dĂ©cision d’un sĂ©nat est prĂ©fĂ©rable Ă  l’opinion d’un particulier, et qu’elle est d’ailleurs fondĂ©e non-seulement sur la loi, mais encore sur une Ă©quitĂ© manifeste, quis enim dubitat multo melius omitti operis novi nuntiatio- nem, quam impediri operis necessarii urqentem extructio - nem, comme dit la loi 5, § 12, au titre prĂ©allĂ©guĂ© du Digeste. Il veut que cela ait lieu genernhter et quoties dilatio periculum allatum est. » Henrys ajoute que, conformĂ©ment Ă  ses conclusions, il intervint sentence qui, avant faire droit sur la demande du sieur de la Baume, en permission provisoire de continuer ses travaux moyennant caution, ordonna que les lieux seraient visitĂ©s, et qu’en consĂ©quence, ayant Ă©tĂ© reconnu que l’Ɠuvre Ă©tait fort avancĂ©e, que tous les matĂ©riaux Ă©taient prĂȘts et Ă  pied d’Ɠuvre ; qu’ils se pouvaient gĂąter par le retardement; qu’il y avait du pĂ©ril de diffĂ©rer davantage, Ă  cause de l’hiver prochain, et parce qu’aussi il Ă©tait aisĂ© de juger que le procĂšs principal prendrait un long cours, il fut ordonnĂ© que, sans avoir Ă©gard Ă  la requĂȘte du sieur de Rostaing et aux dĂ©fenses par lui requises, il serait permis au seigneur de la Baume d’achever l’Ɠuvre, en baillant par lui bonne et suffisante caution de la dĂ©molir, et de payer les dommages-intĂ©rĂȘts s’il Ă©tait dit en fin de cause, dette sentence fut sanctionnĂ©e par l’acquiescement des parties. Nous tenons, dit encore Henrys, Ă  la distinction que nous avons rapportĂ©e, et nous croyons quelle doit servir de rĂšgle. Si d’abord que l’Ɠuvre est commencĂ©e, les intĂ©ressĂ©s s’en plaignent, et qu’il n’y ait rien qui presse, le juge ne doit pas lever ses dĂ©fenses, ni permettre qu’on continue ce qu’on a entrepris de faire, il doit plutĂŽt entrer dans la connaissance du fond, et tĂącher de juger le diffĂ©rend ; mais si les intĂ©ressĂ©s ont attendu d’en rĂ©clamer, s’ils ont souffert qu’on avance l’Ɠuvre, et qu’ayant prĂ©parĂ© les matĂ©riaux elle soit en Ă©tat d’ĂȘtre achevĂ©e, ils 11 e peuvent pas empĂȘcher qu’elle ne soit continuĂ©e en baillant caution ; c’est parce qu’ils se doivent — 28 — imputer la faute de n’en avoir rĂ©clamĂ© plus tĂŽt; autrement, il serait au choix d’un mauvais voisin d’attendre que l’Ɠuvre soit bien avancĂ©e, Ă  dessein d’engager l’entrepreneur dans une dĂ©pense inutile. » Et cela est fort juste, ajoute Bretonnier, dans ses observations sur ce passage d’Henrvs. C’est par une erreur manifeste qu’il est dit dans la nouvelle Ă©dition de Denizart, V* DĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre, que l’effet de cette dĂ©nonciation est d’obliger le voisin Ă  surseoir jusqu’à ce qu’il ait obtenu un jugement qui lui permette de continuer ; Ă  la vĂ©ritĂ©, les auteurs de cette collection ajoutent, que la dĂ©nonciation contient le plus souvent assignation devant le juge des lieux, pour voir dire que le voisin ait Ă  faire cesser l’ouvrage jusqu’à ce que, par justice, il en ait Ă©tĂ© ordonnĂ© ; » mais ils n’en dĂ©cident pas moins que la sommation de cesser entraĂźne la suspension; c’est-Ă -dire, qu’induits en erreur par les lois romaines et par le sentiment de Bou- ^tillier, ils maintiennent les deux modes de dĂ©nonciation, ou par dĂ©fense faite Ă  ceux qui exĂ©cutent les travaux , ou par autoritĂ© du juge, quoique Charondas atteste que le dernier fĂ»t seul usitĂ©. En effet, la dĂ©nonciation par simple sommation, ou verbale ou Ă©crite, n’a rĂ©ellement jamais Ă©tĂ© reçue en France. Sans doute le voisin pouvait faire une sommation de discontinuer les travaux ; mais celui Ă  qui elle Ă©tait adressĂ©e n’était pas tenu d’y satisfaire; il agissait comme la prudence le lui conseillait ; par consĂ©quent, il ne pouvait ĂȘtre condamnĂ© Ă  dĂ©truire les travaux exĂ©cutĂ©s depuis, par cela seul qu’il n’y avait pas obĂ©i, et le juge ne pouvait lui refuser audience jusqu’à ce qu’il eĂ»t rĂ©tabli les choses dans l’état oĂč elles Ă©taient lors de cet — — Acte. Il continuait Ă  ses pĂ©rils et risques, et ne pouvait ĂȘtre contraint Ă  suspendre que par jugement. Il Ă©tait seulement passible de dommages-intĂ©rĂȘts Ă  partir de la dĂ©nonciation , qui Ă©tait une mise en demeure de cesser, si le juge, apprĂ©ciant le fond, reconnaissait qu’il n’avait aucun droit de bĂątir. Nous trouvons, dans un arrĂȘt de la Cour de cassation du 1 1 juillet de 1820, une preuve bien positive de la vĂ©ritĂ© de ce que nous venons de dire. l,e sieur Calvet est propriĂ©taire d’une maison situĂ©e Ă  Escoussens, et d’un terrain qui en dĂ©pend. Le sieur Pra- det possĂšde une maison qui prend son jour et son passage sur ce terrain, Ă  titre de servitude, suivant la prĂ©tention de ce dernier. Calvet, voulant clore sa propriĂ©tĂ©, a fait, au mois de juillet 1817, commencer la construction d’un mur dans toute l’étendue de la façade de la maison du sieur Pradet. Le 24 du mĂȘme mois, celui-ci lui a fait signifier un acte extrajudiciaire, contenant sommation de cesser les constructions commencĂ©es. Calvet, sans avoir aucun Ă©gard Ă  cette sommation, a poursuivi la construction de son mur. Alors le sieur Pradet, sans appeler le sieur Calvet, s’est adressĂ© au juge de paix qui a nommĂ© des experts pour procĂ©der Ă  la vĂ©rification des lieux. L’ordonnance portant nomination des experts n’a pas Ă©tĂ© non plus notifiĂ©e au sieur Calvet ; de sorte que c’est encore en son absence que ces experts ont opĂ©rĂ©. Leur procĂšs-verbal avant Ă©tĂ© dressĂ©, le sieur Pradet a, le 28 juillet 1827, fait citer le sieur Calvet devant le juge de paix du canton de la BruguiĂšre, pour voir dire qu’il — 30 — serait condamnĂ© Ă  dĂ©molir les constructions qu’il avait commencĂ©es. Le sieur Calvet s’est prĂ©sentĂ© sur cette citation, et a soutenu que le sieur Pradet n’avait aucun droit de servitude sur son terrain ; qu’ainsi sa prĂ©tention Ă©tait dĂ©nuĂ©e de fondement; mais le juge de paix a refusĂ© d’entendre cette dĂ©fense, tant que le sieur Calvet n’aurait pas dĂ©truit les ouvrages qu’il avait continuĂ©s depuis la sommation extrajudiciaire que le sieur Pradet lui avait faite le 24 juillet, et qu’il n’aurait pas rĂ©tabli les lieux dans l’état oĂč ils se trouvaient au moment de cette sommation. Sur l’appel, jugement du tribunal de Castres, qui confirme, en se fondant sur les dispositions des lois romaines, qui, suivant lui, dans le silence du Code de procĂ©dure et l’incertitude de la jurisprudence des arrĂȘts, doivent encore servir de rĂšgle aujourd’hui. Pourvoi en cassation qui fut accueilli par arrĂȘt conçu dans les termes suivants \u l’article 1041 du Code de procĂ©dure civile, attendu que les juges seuls ont le droit de commander et de se faire obĂ©ir ; que les parties intĂ©ressĂ©es ont bien le droit de forcer leurs adversaires, par actes extrajudiciaires, de faire ce qu’elles prĂ©tendent exiger d’eux; mais que de pareils actes ne peuvent produire d’autres effets que de constituer en demeure, et de rendre passibles de dommages-intĂ©rĂȘts ceux qui n’y ont pas dĂ©fĂ©rĂ©, lorsque la demande se trouve juste et bien vĂ©rifiĂ©e ; que ce principe gĂ©nĂ©ral ne souffre pas d’exception au cas de dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre; que les lois romaines, qui en disposaient autrement, n’ont jamais Ă©tĂ© observĂ©es en France, et qu’elles n’ont pu surtout ĂȘtre invoquĂ©es depuis la mise en activitĂ© du iode de procĂ©dure, qui, — 31 — par son art. 1041, a dĂ©clarĂ© abroger toutes les lois, coutumes, usages et rĂ©glements antĂ©rieurs relatifs Ă  la procĂ©dure civile ; que, cependant, c’est par application des lois romaines que le tribunal de Castres s’est dĂ©cidĂ© Ă  dĂ©nier justice au demandeur, tant qu’il n’aurait pas remis les choses au mĂȘme Ă©tat qu’elles l’étaient lors de la dĂ©fense qui lui avait Ă©tĂ© faite par acte extrajudiciaire de continuer ses constructions; que la forme de procĂ©der en pareille matiĂšre Ă©tait indiquĂ©e au titre 1 er du Code de procĂ©dure, qui s’occupe des actions possessoires, et, par suite, de celle en dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre, qui en a le vĂ©ritable caractĂšre ; par ces motifs, la cour casse. » Nous avons vu que, dans le droit romain, tout particulier Ă©tait admis Ă  la dĂ©nonciation du nouvel Ɠuvre, qui se faisait dans les lieux publics. Brillon, aux mots nouvel Ɠuvre, dit que cela ne se pratique plus en France, oĂč il serait nĂ©cessaire, en pareil cas, de prĂ©venir les personnes chargĂ©es de l’inspection gĂ©nĂ©rale ou du dĂ©tail des Ă©difices publics. » Cette dĂ©cision Ă©tait fort juste en gĂ©nĂ©ral ; mais quand un voisin Ă©prouvait un prĂ©judice d’ouvrages qui s’exĂ©cutaient dans un lieu public, dans un chemin, dans une place, rue ou fleuve, il avait incontestablement le droit, pour la conservation de ses intĂ©rĂȘts privĂ©s, d’intenter la dĂ©nonciation. Ainsi, lorsqu’un particulier faisait, sur la voie publique, une excavation qui pouvait compromettre la soliditĂ© des Ă©difices, ou exĂ©cutait des travaux qui privaient les propriĂ©taires de l’usage de leurs jours, de leurs portes, leur causaient des infiltrations; dans ce cas et autres semblables, il y avait certainement lieu Ă  cette action, — 35 — et il en serait encore de mĂȘme aujourd’hui, ainsi que nous l’avons dĂ©montrĂ©, page 553 de la 3' Ă©dition de notre TraitĂ© des chemins, auquel nous renvoyons pour Ă©viter des rĂ©pĂ©titions inutiles. N” III. Droit français actuel. question de savoir si la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre, telle que l’entendaient les lois romaines modifiĂ©es par notre ancien droit français, est maintenue par notre droit moderne, a Ă©tĂ© longtemps controversĂ©e. 11 y a eu, sur ce point, division parmi les jurisconsultes, et contradiction complĂšte dans la jurisprudence. MM. Henrion de Pansey, Guichard, Favardde Langlade enseignaient l’affirmative. M. CarrĂ©, aprĂšs avoir, dans ses Questions de procĂ©dure, embrassĂ© la thĂšse contraire, a un peu modifiĂ© son sentiment dans sa Juridiction civile des juges de paix. M. Merlin, /i' Ă©dition des Questions de droit, V° DĂ©nonciation de, nouvel Ɠuvre, discute Ă  fond la matiĂšre, et dĂ©montre jusqu’à l’évidence l’erreur de ceux qui prĂ©tendent que l’ancienne dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre subsiste encore parmi nous. Pour notre compte, nous sommes d’avis qu’il ne reste plus rien de cette vieille action. Nous croyons que le vĂ©nĂ©rable auteur de la CompĂ©tence des juges de paix s’est, en ce point comme en beaucoup d’autres, beaucoup trop laissĂ© influencer par le souvenir des doctrines de l’ancien droit, sans faire assez attention qu’elles Ă©taient incompatibles avec les principes de notre droit nouveau. La loi de 1790, ni le Code de procĂ©dure, ne renferment aucune disposition sur la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre, parce qu’ils ont voulu proscrire les distinctions qui jadis jetaient la confusion dans une matiĂšre dĂ©jĂ  si dĂ©licate, et ramener tout le systĂšme Ă  des principes uniformes. Nous ne voyons pas que la distinction entre la dĂ©nonciation et les autres actions possessoires ait un objet rĂ©el. Les lois les assujettissant toutes Ă  la possession annale Ă  titre non prĂ©caire antĂ©rieure au trouble, l’action Ă  laquelle un nouvel Ɠuvre donnera ouverture sera aussi soumise Ă  cette condition ; mais il importera peu que les ouvrages soient terminĂ©s ou seulement commencĂ©s; qu’ils soient exĂ©cutĂ©s sur le fonds du propriĂ©taire ou sur celui du rĂ©clamant. Sans doute celui sur le fonds duquel un tiers vient construire, ou qui Ă©prouve, par les travaux du propriĂ©taire voisin, quelque prĂ©judice dans l’exercice de ses droits, peut se pourvoir pour faire seulement suspendre ces travaux, s’il a une possession annale, s’il rĂ©unit les conditions exigĂ©es pour intenter la complainte ; mais il n’est pas forcĂ© de s’en tenir lĂ  ; il peut demander la destruction, mĂȘme des travaux terminĂ©s, sans recourir Ă  l’action pĂ©titoire. Il faut aller plus loin et dĂ©cider que celui qui craint que les travaux exĂ©cutĂ©s soit sur son fonds, soit sur le fonds voisin ne lui nuisent, peut en demander la suspension ou la destruction par la voie possessoire ; car il n’est pas nĂ©cessaire qu’il y ait dommage actuel. En rĂšgle gĂ©nĂ©rale, toutes les fois qu’il est certain qu’un ouvrage fait de main d’bommedoit nuire Ă  la propriĂ©tĂ© d’autrui, l’action possessoire est recevable, quoique le dommage ne soit pas encore arrivĂ© IIƓc autem actio, dit la loi J rc , § 1", ff. de oq., et oq. plue, arcend., locum ha- bet in damnum nondmn factum opĂ©rĂ© lumen jum facto hoc est, de eo opĂ©rĂ©, ex et sui- vants, sont pour l’affirmative ; ils conviennent bien que la rĂ©intĂ©grande peut encore ĂȘtre intentĂ©e devant le juge de paix ; mais par le possesseur annal et non prĂ©caire seul, c’est-Ă -dire qu’ils l’assimilent Ă  toutes les autres actions possessoires. Nous partageons l’opinion des premiers auteurs, qui, comme on le verra, a Ă©tĂ© consacrĂ©e par de nombreux arrĂȘts de la cour de cassat ion ; mais cela n’est pas par la raison donnĂ©e comme la principale par quelques-uns d’eux pie la rĂ©intĂ©grande n’est pas une action possessoire, puis- qu’au contraire elle a toujours Ă©tĂ© considĂ©rĂ©e comme telle, et que la loi du 25 mai 1838, ar?. 5, lui donne expressĂ©ment cette qualification en la rangeant dans les attributions du juge de paix. Au nombre des auteurs qui ont combattu le maintien de l’ancienne rĂ©intĂ©grande, nous distinguons MM. Trop- long, Tonifier et Aulanier, dont les opinions sont dĂ©veloppĂ©es avec beaucoup de soin et d’étendue. Les deux premiers vont mĂȘme jusqu’à prĂ©tendre qu’il n’y avait autrefois, au moins depuis le l/i e siĂšcle, aucune dilfĂ©rence entre la complainte et la rĂ©intĂ©grande, Simon de Bucy, premier prĂ©sident au parlement de Paris, — 46 — ayant soumis ces deux actions aux mĂȘmes conditions ; que toutes deux exigeaient la possession annale Ă  titre non prĂ©caire ; ils ne citent pourtant aucun auteur qui ait nettement discutĂ© et Ă©tabli cette thĂšse, et M. Aulanier avoue que les principes anciens Ă©taient contraires en ce point Ă  l’opinion de M. Toullier. Nous avons en effet rappelĂ© des autoritĂ©s qui ne laissent lĂ -dessus aucun doute, et il est certain que l’assimilation opĂ©rĂ©e par Simon de 15ucy n’eut lieu que relativement Ă  la forme de procĂ©der, mais non quant aux conditions d’exercice des actions et de leurs rĂ©sultats qui continuĂšrent d’ĂȘtre bien diffĂ©rents. Au reste, les adversaires de la rĂ©intĂ©grande insistent principalement sur la gĂ©nĂ©ralitĂ© des termes de l’art. 23 du Code de procĂ©dure. Ils poussent si loin la rigueur de leur doctrine, qu’ils refusent l’action en rĂ©intĂ©grande au possesseur de bonne foi, mais non annal, contre celui qui n’ayant aucun droit de propriĂ©tĂ©, pas mĂȘme un instant de possession, aurait commis une spoliation violente. Ils trouvent Ă©trange aussi qu’on puisse ĂȘtre rĂ©tabli en possession d’une chose dont on a Ă©tĂ© violemment dĂ©pouillĂ©, et que, sur une nouvelle action possessoire, on soit exposĂ© Ă  la restituer Ă  celui-lĂ  mĂȘme qu’on a d’abord fait condamner. Comme nous l’avons dĂ©jĂ  dit, nous ne nous attacherons pas Ă  combattre les diverses objections de nos adversaires; nous ferons seulement observer qu’un pareil rĂ©sultat, dĂ©jĂ  admis sous l’ordonnance de 1567, n’a rien que de trĂšs-naturel et trĂšs-lĂ©gitime. Les tribunaux n’ont d’autre but dans ce cas que de condamner le moyen employĂ© pour se rendre justice Ă  soi-mĂȘme, d’empĂȘcher la substitution des voies de fait aux voies de droit, d’obliger le spoliateur Ă  agir avec rĂ©gularitĂ©, et de respecter la — 47 — possession de sa partie adverse jusqu’à ce que les magistrats aient reconnu sa dĂ©fectuositĂ© et la validitĂ© de la possession antĂ©rieure qu’il allĂšgue. C’est, en effet, un principe d’ordre et de justice rigoureuse que, quels que soient les prĂ©tentions et les droits d’un citoyen Ă  la propriĂ©tĂ© ou Ă  la possession d’un objet litigieux, cet objet doit rester Ă  celui qui le dĂ©tient Ă  tort ou Ă  raison, jusqu’à ce que les tribunaux en aient autrement disposĂ© ; car, jusque-lĂ , les droits du rĂ©clamant ne sont point Ă©tablis. Le droit romain allait jusqu’à priver le spoliateur de la propriĂ©tĂ© qu’il pouvait avoir sur la chose. Sans doute on distingue les voies de fait en licites et illicites, et nous admettons cette division en avertissant toutefois quelle est assez difficile Ă  faire, et qu’il ne faut s’y abandonner qu’avec une grande rĂ©serve; mais la tolĂ©rance que l’on doit avoir pour les voies de fait dans le seul cas, suivant nous, oĂč un propriĂ©taire exĂ©cute sur son fonds des ouvrages pour s’affranchir d’une servitude qu’il ne doit pas, ou supprime ceux qu’un tiers a faits pour s’arroger un pareil droit, ne dĂ©truit point la rĂšgle gĂ©nĂ©rale'; au contraire, elle la confirme et la fortifie, ainsi que nous l’établirons plus positivement encore, en traitant des divers genres de troubles, de ceux qui sont permis ou dĂ©fendus. Sans doute encore, il ne sera pas toujours aisĂ© de distinguer la spoliation du simple trouble; c’est lĂ , nous le croyons, la vĂ©ritable, la seule difficultĂ© de l’action en rĂ©intĂ©grande ; mais sa solution dĂ©pendra des faits de la cause. La loi ne pouvait prĂ©voir tous les cas qui donnent lieu Ă  cette action ; il lui a suffi d’établir une rĂšgle gĂ©nĂ©rale. Le juge devra donc rechercher s’il y a eu dĂ©possession, privation de la chose, et si ce rĂ©sultat a Ă©tĂ© obtenu par violence ou voie de fait; il est l’apprĂ©ciateur des cir-. — 48 — constances qui peuvent prĂ©senter l’un et l'autre caractĂšres ; connue dans le cas oĂč il ne s’agit que de trouble, la loi lui donne un pouvoir discrĂ©tionnaire pour dĂ©clarer que les faits articulĂ©s le constituent ou ne le constituent pas. Ainsi un arrĂȘt de la chambre des requĂȘtes, du h dĂ©cembre 1833, a dĂ©cidĂ© que l’inexĂ©cution d’un contrat, par exemple l’extension des labours sur une portion de terrain que le vendeur s’était rĂ©servĂ©e, ne pouvait ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme voie de fait autorisant l’action en rĂ©in- tĂ©grande de la part de celui-ci contre l’acquĂ©reur. Une solution analogue se retrouve dans un arrĂȘt du 5 janvier 1837, rendu dans une espĂšce oĂč des travaux avaient Ă©tĂ© exĂ©cutĂ©s en vertu d’un jugement passĂ© en force de chose jugĂ©e. lu reste, la jurisprudence de la cour de cassation n’a jamais variĂ© sur l’existence de l’action en rĂ©intĂ©- grande. Les deux premiers arrĂȘts sont des 10 novembre 1819 et 16 mai 1820; ils ont dĂ©cidĂ© qu’un fermier, un anti- chrĂ©siste pouvaient intenter la rĂ©intĂ©grande ; depuis, la cour a rendu, entre Chaufiier et la veuve Guyouvard, sous la date du 28 dĂ©cembre 1826, un arrĂȘt bien plus positif encore, qui donne une nouvelle sanction Ă  notre doctrine. L’importance de la question nous dĂ©termine Ă  en rapporter en entier l’espĂšce et le texte. Le sieur Chaufiier et la veuve Guyouvard jouissaient simultanĂ©ment, et chacun pendant certains jours, des eaux d’un ruisseau qui parcourait leurs propriĂ©tĂ©s. Cette jouissance avait lieu, Ă  ce qu’il paraĂźt, au moyen d’un barrage mobile. En 182/j, la veuve Guyouvard Ă©tablit une digue ou chaussĂ©e fixe dans le lieu oĂč Ă©tait le barrage — i9 — mobile. Le fermier de Chauflier fit une ouverture Ă  cette digue ; sur ce, action en rĂ©intĂ©grande. Chauflier intervint, et soutint l’action non recevable, attendu que la veuve Guyouvard n’avait pas la possession annale il offrit de prouver ce fait. Jugement qui rĂ©intĂšgre la veuve Guyouvard dans la possession de cette digue; appel, et, le 2 juin 1825, jugement confirmatif du tribunal de Vannes. Pourvoi de la part de Chauflier pour violation de l’article 23 du Code de procĂ©dure, en ce que l’action de la veuve Guyouvard Ă©tait non recevable, par le motif quelle n’avait pas la jouissance annale des eaux ni de la digue. Il insistait particuliĂšrement sur ce qu’il y aurait injustice Ă  obliger un propriĂ©taire Ă  attendre les lenteurs et les suites d’un procĂšs contre un individu peut-ĂȘtre insolvable pour obtenir la destruction de l’ouvrage que cet individu aurait clandestinement Ă©tabli sur la propriĂ©tĂ© d’autrui. Voici l’arrĂȘt La cour, attendu en droit que nul ne peut se faire justice Ă  soi-mĂȘme, cur enirn ad arma, ad rixam procĂ©da'e patiatur prĂŠtor quos potest juridictione sua componere? L. 13, § 3, ff. deusuf.; que celui qui a Ă©tĂ© dĂ©possĂ©dĂ© par violence ou voie de fait doit, avant tout, rentrer dans sa possession, spoliatus ante omnia resti- tuendus; que c’est sur ces principes conservateurs de l’ordre social et de la paix publique que repose l’action en rĂ©intĂ©grande ; que cette action, gĂ©nĂ©ralement admise dans l’ancienne lĂ©gislation française, loin d’avoir Ă©tĂ© abrogĂ©e par la nouvelle, est reconnue comme Ă©tant encore en pleine vigueur par une disposition formelle de l’art. 2000 du Gode civil ; que l’art. 23 du Gode de procĂ©dure, sainement entendu, ne doit ĂȘtre appliquĂ© qu’aux actions possessoires ordinaires, Ă  l’égard desquelles c’est le droit ou la qualitĂ©, et non pas le fait de la possession 4 qu’on considĂšre ; que ces actions ont toujours Ă©tĂ© bien distinctes de l’action en rĂ©intĂ©grande et par leur nature et par leurs effets par leur nature, car les actions pos- sessoires ordinaires, naissant d’un trouble quelconque, et fondĂ©es sur une jouissance civile et lĂ©gitime, doivent prĂ©senter une possession annale, publique, paisible, et Ă  titre non prĂ©caire ; tandis que l’action en rĂ©intĂ©grande, naissant d’une dĂ©possession, par violence ou voie de fait, et fondĂ©e sur une jouissance matĂ©rielle, ne doit prĂ©senter qu’une simple dĂ©tention naturelle au moment de la violence ou voie de fait ; par leurs effets, car, Ă  l’égard des premiĂšres, le jugement assure au possesseur une possession civile, lĂ©gale, dĂ©finitive, et qui ne peut ĂȘtre renversĂ©e qu’au pĂ©titoire, tandis que, Ă  l’égard de la seconde, le jugement ne rend au dĂ©tenteur que sa jouissance momentanĂ©e, matĂ©rielle, provisoire, et qui peut ĂȘtre anĂ©antie, mĂȘme au possessoire. Attendu que si la violence a ses caractĂšres particuliers, il n’est pas nĂ©cessaire du tout qu’il y ait eu des combats et du sang rĂ©pandu, et que, pour l’établir, notamment dans l’action civile en rĂ©intĂ©grande, il suffit que l’acte par lequel une partie usurpe de sa propre autoritĂ© sur l’autre, l’objet contestĂ© renferme une voie de fait grave, positive, telle qu’on ne pouvait la commettre sans blesser la sĂ©curitĂ© et la protection que chaque individu en sociĂ©tĂ© a droit d’attendre de la force des lois Vim putas esse sol uni si hommes vidnerentur? vis est quo- tiens qui s id quod deberi sibi putat, non per jndicem re- poscit. Loi 7, ff. ad leqcm J ni. de vi priv. » Sans doute cet arrĂȘt est allĂ© un peu loin en posant en principe qu’il y a voie de fait toutes les fois qu’on s’empare d’une chose sans l’intervention du juge; s’il n’est pas nĂ©cessaire qu’il y ait eu des coups, des blessures, effusion de-sang, on ne peut pas non plus admettre d’une maniĂšre absolue la maxime tirĂ©e des lois romaines. Il faut que la voie de fait soit grave, positive, contraire Ă  la paix publique et ait lieu de mauvaise foi, c’est-Ă -dire malgrĂ© la conviction que l’autre partie avait des prĂ©tentions Ă  la chose ; circonstances abandonnĂ©es Ă  la libre apprĂ©ciation du juge ; mais, Ă  cela prĂšs, la doctrine de l’arrĂȘt est irrĂ©prochable. A la vĂ©ritĂ©, quelques auteurs ont prĂ©tendu que la cour de cassation Ă©tait elle-mĂȘme revenue sur cette jurisprudence. Pour le prouver, ils ont citĂ© quatre arrĂȘts des 15 mai 1827, 5 mars, I l juin 1828 et K mars 1829; mais il est Ă©vident que ces arrĂȘts n’ont, avec la difficultĂ© qui nous occupe, qu’un rapport bien indirect, et qu’apprĂ©ciĂ©s sainement, ils sont plus favorables qu’opposĂ©s Ă  notre sentiment. Dans l’espĂšce du premier, le sieur Bignon-BeausĂ©jour demandait bien Ă  ĂȘtre rĂ©intĂ©grĂ© dans la possession d’un terrain dont il prĂ©tendait avoir Ă©tĂ© dĂ©pouillĂ© par violence ; mais au lieu de s’en tenir Ă  invoquer la possession au moment de la violence et la maxime spoliatus ante omnia reslitumdus est, il allĂšgue une possession annale, demande Ă  en faire la preuve en cas de dĂ©nĂ©gation. Cette dĂ©nĂ©gation ayant eu lieu, la preuve de la possession annale ayant Ă©tĂ© prescrite, enfin le sieur Bignon-BeausĂ©jour ayant exĂ©cutĂ© ce jugement en faisant procĂ©der Ă  l’enquĂȘte, mais sans pouvoir Ă©tablir sa possession annale, le juge de paix rejeta sa demande par ce dernier motif. En appel, le sieur BeausĂ©jour change de systĂšme ; il soutient que, s’agissant d’une dĂ©possession violente, il f n'avait pas besoin de prouver une jouissance annale; mais le jugement est confirmĂ© par le motif principal qu’il n’avait pas Ă©tabli sa possession annale, comme il s’y Ă©tait soumis devant le juge de paix. Sur le pourvoi en cassation, il reproduisit son systĂšme qui fut rejetĂ© avec raison, attendu, porte l’arrĂȘt, que la demande introductive de l’instance devant le juge de paix, telle qu’elle Ă©tait Ă©noncĂ©e dans sa sentence, en mĂȘme temps quelle tendait Ă  ce que le demandeur fĂ»t rĂ©intĂ©grĂ© dans la possession du terrain litigieux, contenait l’offre dudit demandeur de prouver, en cas de dĂ©ni, sa possession annale avant le trouble ; attendu que, sur la dĂ©nĂ©gation de cette possession annale, le juge de paix avait ordonnĂ© son transport et une enquĂȘte sur les lieux, et pie ladite sentence constate que ni l’enquĂȘte ni la visite ne justifient suffisamment la possession dudit terrain pendant l’annĂ©e qui a prĂ©cĂ©dĂ© l’entreprise; que ces motifs, adoptĂ©s par les juges d’appel, et sur lesquels le jugement attaquĂ© est fondĂ©, ainsi que les faits constatĂ©s prouvent que l’objet du procĂšs Ă©tait une complainte pos- sessoire; qu’en consĂ©quence, ledit jugement a fait une juste application de l’article 23. » Ainsi le pourvoi n’a Ă©tĂ© rejetĂ© que parce que le demandeur avait offert de prouver une possession annale, et qu’il avait acquiescĂ© Ă  la sentence qui ordonnait cette preuve. La cour a donc donnĂ© Ă  entendre quelle eĂ»t dĂ©cidĂ© autrement si le sieur BeausĂ©jour n’avait articulĂ© et demandĂ© Ă  prouver que la possession au moment de la voie de fait dont il se plaignait. Nous trouvons une solution identique dans un arrĂȘt de la chambre des requĂȘtes, du P fĂ©vrier 1837, ainsi conçu Attendu que la demande introductive d’instance, — 53 — telle quelle est Ă©noncĂ©e dans le jugement attaquĂ©, tendait Ă  ce que le demandeur fĂ»t maintenu dans la possession d’une piĂšce de bois dont il prĂ©tendait avoir joui paisiblement depuis plus d’un an; que, sur la dĂ©nĂ©gation de cette possession, le juge de paix a ordonnĂ© une descente sur les lieux et une enquĂȘte ; que le tribunal, prononçant sur l’appel, a dĂ©clarĂ© qu’il ne rĂ©sultait pas de l’empiĂšte que le demandeur eĂ»t une possession annale, paisible, et non Ă  titre prĂ©caire, du bois taillis dont il s’agit ; attendu que ces motifs Ă©tablissent que l’objet du procĂšs Ă©tait une complainte possessoire. » Comme nous l’avons dit, le juge a le droit d’apprĂ©cier les termes de la demande et de toutes les circonstances cpii peuvent caractĂ©riser l’une ou l’autre action ; et il pourra arriver qu’il donne Ă  la demande une qualification contraire aux prĂ©tentions mĂȘmes du demandeur. Ainsi, le sieur Leroy s’était pourvu en cassation contre un jugement du tribunal des Andelys, confirmatif d’une sentence du juge de paix, lequel, considĂ©rant la demande du sieur Leroy comme une vĂ©ritable action en complainte contrairement Ă  sa prĂ©tention de lui attribuer le caractĂšre d’action en rĂ©intĂ©grande, et se fondant sur ce qu’il ne prouvait pas une possession annale, avait dĂ©clarĂ© cette demande non recevable. Mais la cour rĂ©gulatrice, par son arrĂȘt du 13 novembre 1838, rejeta le pourvoi. On lit dans cet arrĂȘt La cour ; — ConsidĂ©rant que, pour refuser Ă  l’action du demandeur, le caractĂšre d’une demande en rĂ©intĂ©grande, le jugement s’est fondĂ© sur les termes mĂȘmes de l’assignation introductive d’instance, et sur le rĂ©sultat des enquĂȘtes qu’il a apprĂ©ciĂ© comme les juges en avaient le droit ; — Rejette, etc. » — 64 — Cependant, la cour suprĂȘme n’a pas toujours considĂ©rĂ© les apprĂ©ciations des juges en ces matiĂšres comme irrĂ©fragables ; si l’on consulte l’arrĂȘt rendu le 19 aoĂ»t 1839 dans l’affaire Toudouze contre le maire de la commune de Genvry, on verra que, apprĂ©ciant elle-mĂȘme les termes de l’exploit introductif d’instance et les voies de fait qui avaient eu lieu, elle a dĂ©cidĂ© que l’action intentĂ©e Ă©tait une action en rĂ©intĂ©grande , bien que les juges l’eussent qualifiĂ©e de complainte. Cette dĂ©cision est remarquable, en ce que, Ă  la diffĂ©rence de l’arrĂȘt du 16 mai 1827, la cour a jugĂ© que l’action intentĂ©e par le sieur Toudouze Ă©tait une action en rĂ©intĂ©grande, encore que le demandeur eĂ»t offert la preuve de sa possession depuis plus d’un an et jour, possession qui n’est exigĂ©e que pour la complainte. Mais il faut observer que, dans l’espĂšce de 1827, le sieur Bignon-Beau- sĂ©jour avait non-seulement demandĂ© Ă  faire la preuve de sa possession annale, mais encore exĂ©cutĂ© le jugement qui avait prescrit cette preuve sans pouvoir l’établir; tandis que, dans l’autre espĂšce, le sieur Toudouze s’était abstenu de concourir Ă  l’enquĂȘte ordonnĂ©e par le juge de paix, sur le motif qu’elle Ă©tait contraire aux principes de l’action en rĂ©intĂ©grande qu’il avait rĂ©ellement intentĂ©e, et qui n’exigeait pour sa justification que la preuve de la possession actuelle du demandeur, ajoutant que s’il avait parlĂ© de possession annale, ce n’était que surabondamment ; et la cour suprĂȘme a accueilli ce motif. Ce ne doit donc pas ĂȘtre seulement d’aprĂšs les termes de la demande et la violence exercĂ©e, mais aussi d’aprĂšs la conduite tenue par le demandeur dans le cours de la procĂ©dure, comme cela est exprimĂ© dans l’arrĂȘt en question ; en un mot, d’aprĂšs ^toutes les circonstances de la i>o — cause, que le juge devra iixer les caractĂšres constitutifs de l’action intentĂ©e. Mais revenons Ă  l’examen des arrĂȘts qui nous sont opposĂ©s. Celui du 5 mars 1828 dĂ©cide que, dans l’espĂšce particuliĂšre oĂč il a Ă©tĂ© rendu, il ne pouvait y avoir lieu Ă  action de la part d’un fermier pour trouble dans l’exercice d’un passage servitude discontinue sur le fonds voisin, et pie la sentence du juge de paix n’était pas rendue en dernier ressort ; mais, loin de proscrire la rĂ©intĂ©grande, dans les matiĂšres qui en sont susceptibles, il proclame au contraire nettement son existence sans nĂ©cessitĂ© de possession annale c’est ce dont il est impossible de douter quand on fait attention qu’il reconnaĂźt en droit, ainsi que l’a jugĂ© l’arrĂȘt du 28 dĂ©cembre 182/i et 705, et M. Lanjuinais dans son article Voie de fait, au RĂ©pertoire de jurisprudence. Le principe gĂ©nĂ©ral que la possession annale n’est, pas — 90 = - nĂ©cessaire, et l’exception que peut y opposer le dĂ©fendeur qui prĂ©tend avoir une possession antĂ©rieure, Ă©taient Ă©galement vrais sous l’empire des lois des 2 h aoĂ»t et 6 octobre 1790, conçues dans les mĂȘmes termes que l’ordonnance de 1557. Nous croyons que ce sont lĂ  les meilleurs principes ils s’appuient tout Ă  la lois sur le droit romain, l’ancien droit français et la stricte Ă©quitĂ© ; cependant l’article 23 du Code de procĂ©dure exige la possession annale. A la vĂ©ritĂ©, quelques auteurs ont voulu lutter contre la prĂ©cision et la gĂ©nĂ©ralitĂ© de ses termes ; deux systĂšmes se sont Ă  cet Ă©gard produits les uns ont pensĂ© qu’une possession, quelque courte qu’elle fĂ»t, suffisait Ă  l’égard de toutes personnes. Nous ne nous arrĂȘterons pas Ă  rĂ©futer une thĂšse si Ă©videmment insoutenable. Les autres ont distinguĂ© entre le cas oĂč l’action Ă©tait dirigĂ©e contre le vĂ©ritable propriĂ©taire ou un possesseur antĂ©rieur, et le cas oĂč elle l’était contre celui qui n’avait jamais eu ni propriĂ©tĂ© ni possession ; ils disent que l’article 23 n’est impĂ©ratif que dans sa premiĂšre partie, pour l’obligation d’agir dans l’annĂ©e du trouble ; qu’il est dĂ©monstratif dans la deuxiĂšme, qui fait mention de la possession annale; que si le lĂ©gislateur avait voulu ĂȘtre aussi rigoureux dans les deux cas, il aurait rĂ©pĂ©tĂ© que l’action ne serait recevable qu’autant que le demandeur aurait une possession annale. M. CarrĂ©, aprĂšs avoir adoptĂ© la distinction de Merlin dans son TraitĂ© des lois de la procĂ©dure, l’avait abandonnĂ©e dans son TraitĂ© de la compĂ©tence; il y est revenu dans le Droit français appliquĂ© aux justices de paix, et il rĂ©sume ainsi sa derniĂšre opinion Il faut entendre ces mots de l’article 23 du Code de procĂ©dure, depuis une annĂ©e au moins, dans ce sens que le possesseur qui — 91 — n’a pas encore une annĂ©e de possession ne peut intenter la complainte s’il est troublĂ© par celui qui possĂšde encore civilement depuis un an au moins ; mais qu’il le pourra contre tout autre, s’il agit dans l’annĂ©e du trouble. » L’auteur apprend que ce sentiment a Ă©tĂ© professĂ© par Pigeau, dans le commentaire posthume sur le Code de procĂ©dure. M. Belime, dans son TraitĂ© des Actions pos- sessoires, soutient la mĂȘme opinion avec beaucoup de dĂ©veloppement et d’habiletĂ©; mais toutes ses raisons ne peuvent l’emporter sur le texte si positif de la loi. M. Poncet, TraitĂ© des Actions; M. Brossard, dans sa Juridiction des juges de paix; M. Aulanier, dans son TraitĂ© des Actions possessoires, opposent le texte formel du Code de procĂ©dure, qui repousse cette distinction. 11 est Ă©vident d’abord quelle ne peut ĂȘtre invoquĂ©e par le propriĂ©taire ; car on ne reconnaĂźt pas de propriĂ©tĂ© en matiĂšre possessoire, puisqu’elle ne peut ĂȘtre ni discutĂ©e ni prouvĂ©e. Quant Ă  la possession antĂ©rieure, le lĂ©gislateur a voulu qu’elle ne pĂ»t ĂȘtre non plus d’aucune influence, parce qu’il aurait pu arriver qu’une possession d’un jour l’emportĂąt sur une possession postĂ©rieure de trois cent soixante-quatre jours, et que la nĂ©cessitĂ© de vĂ©rifier cette possession antĂ©rieure aurait augmentĂ© les complications d’une maniĂšre qu’il faut rendre simple et facile. La cour de cassation a toujours interprĂ©tĂ© l’article 23 en ce sens que la possession annale est nĂ©cessaire pour intenter la complainte mĂȘme contre l’auteur d’un trouble qui ne pourrait lui-mĂȘme invoquer aucune possession. C’est ainsi quelle l’a dĂ©cidĂ©, le 9 fĂ©vrier 1837, dans l’arrĂȘt Brasseur contre Bertrand, dĂ©jĂ  citĂ© dans l’article de la rĂ©intĂ©-grande. Le sieur Brasseur s’était pourvu en cassation contre un jugement du tribunal de Reims qui avait repoussĂ© son action par le motif qu’il n’avait point prouvĂ© sa possession annale. 11 soutenait Ă  l’appui de son pourvoi que la possession annale n’était pas nĂ©cessaire au demandeur pour que sa demande fĂ»t accueillie, lorsqu’il agissait contre un tiers qui n’avait pas lui-mĂȘme cette possession ; et il invoquait, sur ce point, l’opinion de l’igeau. Mais la cour a repoussĂ© ce moyen. Attendu, porte l’arrĂȘt, que le jugement ayant dĂ©clarĂ©, en point de fait, que le demandeur, quand il intenta une action en complainte possessoire, .n’avait pas la possession paisible depuis une annĂ©e au moins du bois dans la possession duquel il voulait ĂȘtre maintenu, a fait, en rejetant cette demande, une juste application de l’article 23 du Code de procĂ©dure civile. » Toutefois, nous pensons que le lĂ©gislateur a eu tort de consacrer un tel principe. Une possession actuelle est toujours respectable ; nul ne peut l’entraver ni en dĂ©pouiller celui qui l’a, Ă  moins qu’il n’ait lui-mĂȘme une possession plus ancienne, qui n’ait pas Ă©tĂ© interrompue pendant un an ; il n’appartient pas Ă  un Ă©tranger sans droit, sans titre, sans qualitĂ©, de troubler le possesseur, par cela seul que celui-ci n’a pas encore joui de la chose pendant un an. Ce dernier, qui peut d’ailleurs avoir onze mois et vingt-neuf jours de possession, est assurĂ©ment plus favorable que le perturbateur qui n’en a pas du tout. 11 est Ă  regretter que nos lĂ©gislateurs, lorsqu’ils se sont occupĂ©s de la loi de 1838, n’aient pas songĂ© Ă  cette difficultĂ©; malheureusement il en a Ă©tĂ© ainsi de beaucoup d’autres qu’il aurait Ă©tĂ© si nĂ©cessaire et si facile de rĂ©soudre. Si l’on rĂ©vise un jour le Code de procĂ©dure, l’ait. 23 nous — 93 — paraĂźtrait devoir ĂȘtre rĂ©formĂ©. Cette rĂ©forme serait fort essentielle ; elle mettrait le Code de procĂ©dure en harmonie avec les principes du droit Ă©tablis par le Code civil. En effet, aux termes de l’art. 2230 dĂ©jĂ  citĂ©, on est toujours prĂ©sumĂ© possĂ©der pour soi et Ă  titre de propriĂ©taire. Ainsi, dans cette disposition, le lĂ©gislateur n’exige pas que la possession ait plus ou moins de durĂ©e; il se contente de celle actuelle ; et lorsqu’elle a l’effet de faire rĂ©pĂ©ter le dĂ©tenteur propriĂ©taire, comment n’autoriserait-elle pas la maintenue provisoire qui est fondĂ©e prĂ©cisĂ©ment sur ce que le possesseur est rĂ©putĂ© propriĂ©taire jusqu’à preuve contraire? Au surplus, si l’art. 23 peut avoir l’inconvĂ©nient de favoriser quelquefois les usurpateurs au dĂ©triment d’une possession lĂ©gitime, il faut au moins se garder soigneusement de l’augmenter en Ă©tendant sa disposition hors du cercle oĂč elle doit ĂȘtre renfermĂ©e, d’aprĂšs les termes dans lesquels elle est conçue. Cet article ne parlant que du simple trouble ne peut, par cela mĂȘme, s’appliquer Ă  la dĂ©possession opĂ©rĂ©e par violence ou voie de fait qui donne lieu Ă  l’action en rĂ©intĂ©grande. La loi du 24 aoĂ»t 1790 attribue d’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale aux juges de paix la connaissance de toutes les actions possessoires, Ă  raison des entreprises commises dans l’annĂ©e, sans distinguer entre le simple trouble et la dĂ©possession violente. Cette loi, destinĂ©e Ă  rĂ©gler la compĂ©tence des juges de paix, leur donne nĂ©cessairement le pouvoir de connaĂźtre de l’action en rĂ©intĂ©grande; elle est possessoire , puisqu’elle est fondĂ©e uniquement sur la possession ; elle n’exige que la possession actuelle, d’aprĂšs le silence du lĂ©gislateur sur tout autre condition, et l’expression formelle de l’art. 2230. — 94 — Il en doit ĂȘtre de mĂȘme, Ă  plus forte raison, sous l’empire de la loi du 25 mai 1838, qui a spĂ©cialement attribuĂ© aux juges de paix la connaissance des actions en rĂ©intĂ©grande. Nous renvoyons, au surplus, Ă  ce que nous avons dit ci-dessus Ă  l’article de la rĂ©intĂ©grande. Il y a des cas oĂč celui qui n’a personnellement aucune possession pourrait cependant intenter l’action posses- soire; ainsi l’acquĂ©reur, le donataire, le lĂ©gataire, l’hĂ©ritier ou tout autre reprĂ©sentant pourrait immĂ©diatement, aprĂšs son acquisition et avant toute prise de possession, se pourvoir par la voie de complainte et de rĂ©intĂ©grande, en invoquant la possession de son auteur, qui lui serait transfĂ©rĂ©e comme la propriĂ©tĂ© elle-mĂȘme, par le seul effet du contrat ou par le seul fait de l’ouverture de la succession. On ne suivrait donc plus aujourd’hui l’opinion contraire enseignĂ©e par Argou, t. 2, p. A67, et par Brodeau , t. 2, p. 187, fondĂ©e probablement sur le droit romain, qui exigeait la tradition pour la translation de la propriĂ©tĂ©. Un arrĂȘt de la cour de cassation du 12 fructidor, an X, rendu sur le pourvoi du sieur Thomas, fournit un argument en faveur de notre solution ; Ă  plus forte raison l’hĂ©ritier, l’acquĂ©reur, etc., pourraient-ils joindre la possession de leur auteur Ă  la leur pour complĂ©ter celle exigĂ©e par l’art. 23 du Code de procĂ©dure. Il y a encore d’autres cas oĂč la possession annale, matĂ©rielle et de fait, n’est pas indispensable; c’est lorsqu’elle rĂ©sulte d’une fiction de la loi, par exemple en cas d’augmentation d’un immeuble par alluvion ou de formation d’une Ăźle depuis moins d’un an, parce que les accessoires partagent le sort de la chose principale que nous supposons possĂ©dĂ©e depuis plus d’un an ; il n’en serait — 98 — autrement qu’autant qu’un tiers aurait la possession annale distincte et bien caractĂ©risĂ©e de l’alluvion ou de l’üle. Il en serait aussi diffĂ©remment du cas oĂč une riviĂšre aurait enlevĂ©, par une force subite, une partie reconnaissable d’un champ riverain, et l’aurait portĂ©e vers un autre champ ; c’est lĂ  une consĂ©quence nĂ©cessaire de l’art. 559 du Code civil. Au premier aspect, il pourrait paraĂźtre inutile que le lĂ©gislateur ait exigĂ© tout Ă  la lois une possession annale et paisible antĂ©rieure au trouble, et l’exercice de la complainte dans l’annĂ©e qui l’a suivi. On pourrait ĂȘtre portĂ© Ă  croire qu’il suffisait de l’une de ces conditions, ou plutĂŽt qu’elles sont nĂ©cessairement contenues l’une dans l’autre ; mais on ne doit rien supposer de superflu dans la loi, qu’il faut au contraire toujours interprĂ©ter de maniĂšre Ă  faire produire quelque effet Ă  chacune de ses dispositions ou de ses expressions. Dans le systĂšme adoptĂ© par les rĂ©dacteurs du Code de procĂ©dure civile, que nous avons dĂ©jĂ  eu occasion d’apprĂ©cier et de combattre, il n’aurait pas suffi de dire que l’action possessoire ne serait recevable qu’autant qu’elle serait formĂ©e par celui qui aurait une annĂ©e de possession paisible avant le trouble, car la complainte aurait pu ĂȘtre intentĂ©e par celui qui aurait Ă©tĂ© troublĂ© ou dĂ©possĂ©dĂ© depuis un grand nombre d’annĂ©es, et tant qu’il ne se serait pas Ă©coulĂ© trente ans; c’est-Ă -dire que la prescription trentenaire eĂ»t Ă©tĂ© le seul terme Ă  l’exercice de la complainte; que si l’on objectait qu’aprĂšs un an le perturbateur aurait eu lui-mĂȘine la possession-, nous rĂ©pondrions d’abord qu’on peut concevoir un trouble qui gĂȘne, mais ne dĂ©possĂšde pas le dĂ©tenteur, et ne fait — 90 — pas consĂ©quemment passer la chose en d’autres mains ; que mĂȘme, en cas de dĂ©possession, il peut arriver qu’un immeuble usurpĂ© sur le possesseur annal ait Ă©tĂ© possĂ©dĂ© successivement par plusieurs qui ne tiennent pas leurs droits les uns des autres Ă  titre de donation, vente, Ă©change, succession, dont les dĂ©tentions rĂ©unies prĂ©sentent un total de plusieurs annĂ©es, mais dont aucune, prise isolĂ©ment, n’ait durĂ© pendant une annĂ©e complĂšte. Il n’aurait pas suffi non plus d’établir que l’action possessoire serait toujours recevable pourvu qu’elle lĂ»t formĂ©e dans l’annĂ©e du trouble, puisqu’il ce moyen on aurait pu l’intenter le lendemain avec une possession de quelques jours et s’y faire maintenir, Ă  moins cependant que l’adversaire n’eĂ»t une possession annale antĂ©rieure. Sans doute, celui qui laisse passer l’annĂ©e sans intenter la complainte fait prĂ©sumer que ce n’est plus lui, mais son adversaire qui a la possession annale. Toutefois , ce n’est lĂ  qu’une supposition qui peut bien n’ĂȘtre pas toujours conforme Ă  la vĂ©ritĂ©. Il est possible, comme nous l’avons dĂ©jĂ  dit, que le trouble n’ait causĂ© ni dĂ©possession ni dommage, mais seulement une gĂȘne momentanĂ©e qui ait cessĂ© presque aussitĂŽt, comme si un voisin en labourant avait usurpĂ© quelques pieds de mon champ, que je les aie repris immĂ©diatement, et que j’en aie joui pendant un an sans nouveau trouble. La disposition qui prescrit d’intenter l’action dans l’annĂ©e du trouble, n’est, donc pas fondĂ©e sur la certitude qu’aprĂšs cette annĂ©e la possession est acquise Ă  autrui , mais sur la nĂ©cessitĂ© de circonscrire dans un trĂšs- court dĂ©lai le jugement d’une action exceptionnelle, et de ne pas laisser aux juges de paix la recherche et l'apprĂ©ciation d’un fait qui ne peut ĂȘtre constatĂ© que par des — 97 — tĂ©moignages dont la difficultĂ© augmente Ă  mesure qu’on s’éloigne de l’époque oĂč ce fait s’est passĂ©. Toutefois, aprĂšs l’annĂ©e du trouble, et tant que la prescription commune Ă  tous les droits, Ă  toutes les actions ne serait pas accomplie, le possesseur troublĂ© pourrait former une demande en indemnitĂ©, soit devant le juge de paix lui-mĂšme, pour dommages aux champs, fruits ou rĂ©coltes, s’il s’agissait d’un fait de cette nature, ou pour somme n’excĂ©dant pas 200 fr., soit devant le tribunal de premiĂšre instance, s’il s’agissait d’un fait diffĂ©rent ou d’une somme supĂ©rieure. Mais, dans ce cas, il 11 e pourrait ĂȘtre question de possession annale, et si le droit Ă  l’indemnitĂ© Ă©tait contestĂ© en lui-mĂȘme, le juge de paix serait dans la nĂ©cessitĂ© de renvoyer l’affaire devant le tribunal civil. En derniĂšre analyse, il nous paraĂźt Ă©vident, et nous croyons l’avoir rendu tel, que chacune des conditions de l’art. 23 a un objet dĂ©terminĂ© et bien distinct, et que la complainte n’est recevable qu’autant que celui qui l’intente , non-seulement a une possession annale, mais encore a formĂ© sa demande dans l’annĂ©e qui a suivi immĂ©diatement le trouble. A la diffĂ©rence de la coutume de Paris, l’art. 23 du iode de procĂ©dure n’exige pas la possession d’an et jour, ni que l’action soit intentĂ©e dans l’an et jour du trouble. Dans les deux cas, une annĂ©e est le terme fixĂ© par le lĂ©gislateur. Cette disposition paraĂźt sans doute fort claire, et cependant les auteurs 11 e l’ont pas tous entendue de la mĂȘme maniĂšre. M. Henrion de Pansey, CompĂ©tence des juges de paix ; M. Guichard, dans ses Questions posses- soires, parlent constamment d’an et jour. M. Brossard, Juridiction civile des juges de paix, n 3 ] /i6, 11 e voit dans 7 — 98 — l’indication d”fln et jour que la dĂ©signation d’une annĂ©e complĂšte, On nomme, dit-il, la possession d’an et jour, Ă  raison de ce qu’une annĂ©e n’est complĂšte qu’autant cpie celle qui suit immĂ©diatement est commencĂ©e. » Mais elle est commencĂ©e Ă  partir de la premiĂšre minute du jour qui la suit immĂ©diatement, et alors il n’y a pas un an et un jour de possession. M. Toullier, n° 127, M. Aulanier, n° P, nous paraissent avoir mieux raisonnĂ© Autrefois, disent-ils, la possession devait ĂȘtre d’un an et d’un jour, on ne sait trop pourquoi ; il suffĂźt aujourd’hui qu’elle ait durĂ© pendant toute l’annĂ©e antĂ©rieure au trouble. » M. Belime partage cette opinion. Ajoutons que par une annĂ©e on doit nĂ©cessairement entendre un espace de douze mois complĂštement rĂ©volus. Au surplus, l’art. 23, pour ĂȘtre sainement entendu, a besoin d’ĂȘtre combinĂ© avec d’autres dispositions du Code de procĂ©dure civile, et d’ĂȘtre fortifiĂ© de l’autoritĂ© d’un exemple. Suivant l’art. 2260, la prescription se compte par jour et non par heures, et, d’aprĂšs l’art. 2261, elle est acquise lorsque le dernier jour du terme est accompli. Le principe gĂ©nĂ©ral est que le premier jour du terme, celui a quo, ne compte pas, parce que la prise de possession oĂč le trouble a eu lieu quand ce jour Ă©tait commencĂ©, peut ĂȘtre au moment oĂč il finissait ; il en serait de mĂȘme poulie cas oĂč l’on pourrait constater l’heure oĂč, soit la prise de possession, soit le trouble, a commencĂ© l’annĂ©e ne se- raitpas expirĂ©e Ă  l’heure et au jour correspondant. Ainsi, la prise de possession ou le trouble a eu lieu le 31 octobre 1831. VoilĂ  le jour a quo qui a commencĂ© Ă  minuit et qui a durĂ© vingt-quatre heures; comme ils ont pu n’a- — 99 — voir lieu qu’au dernier moment oĂč le 1 er novembre est venu succĂ©der au 31 octobre, pour avoir l’annĂ©e entiĂšre, il faudra l’expiration du 31 octobre 1832. C’est le jour qui, en finissant Ă  minuit , complĂ©tera le temps de la prescription, le jour ad quem qui est dans le terme, et pendant lequel on pourra faire un acte d’interruption. Le 1" novembre, il n’y aurait plus d’action possible, parce que, au moment oĂč elle serait intentĂ©e, l’annĂ©e serait rĂ©volue. On n’aurait pas mĂȘme l’annĂ©e entiĂšre, c’est-Ă - dire jusqu’à minuit pour agir, parce que, d’aprĂšs l’art. 1037 du Code de procĂ©dure, aucune signification ne peut ĂȘtre faite depuis le 1" octobre jusqu’au 31 mars, aprĂšs 6 heures du soir, et depuis le 1 er avril jusqu’au 30 septembre, aprĂšs neuf heures du soir. Cependant l’action ne serait pas nulle si l’huissier avait consenti Ă  la signifier aprĂšs cette heure, car l’art. 1037 n’est pas obligatoire Ă  peine de nullitĂ©, et, d’aprĂšs l’art. 1030 du mĂȘme Code, aucun acte de procĂ©dure ne peut ĂȘtre annulĂ©, si ce n’est dans les cas pour lesquels la nullitĂ© en est formellement prononcĂ©e par la loi. Aussi la cour de cassation a-t-elle jugĂ©, par arrĂȘt du 29 janvier 1819, que la prohibition portĂ©e par l’art. 1037, de faire aucune signification avant ou aprĂšs certaines heures dĂ©terminĂ©es, n’emportait point nullitĂ© des significations faites hors de ces limites. L’huissier est seulement passible des peines disciplinaires, telles que l’amende ou mĂȘme la suspension. Mais comme Ă©videmment cet officier ministĂ©riel ne pourrait ĂȘtre contraint Ă  commettre une contravention et Ă  s’exposer aux peines qui en seraient la suite ; que son devoir devrait lui dicter un refus, nous avons dĂ» dĂ©cider que le dĂ©lai de l’annĂ©e se trouvait rĂ©duit de six ou de trois heures, sans qu’on pĂ»t prendre, 100 — par une sorte de compensation , ce mĂȘme laps de temps sur la journĂ©e suivante. Il en faudrait dire autant des cas oĂč le dernier jour de l’annĂ©e serait une fĂȘte ou un dimanche. La cour rĂ©gulatrice a jugĂ©, par arrĂȘt du 26 avril 183$, que la seconde disposition de l’art. 1037, qui dĂ©fend de faire aucune signification les jours fĂ©riĂ©s sans permission du juge, n’entraĂźne point la peine de nullitĂ©. On pourrait donc, aux termes de cet article, signifier son action les jours ci- dessus, avec ou sans permission du juge; mais il est Ă©vident, au surplus, que si l’on retranchait le dernier jour, il faudrait, par la mĂȘme raison, dĂ©duire tous les jours semblables du courant de l’annĂ©e, ce qui ne saurait ĂȘtre admis. Les dispositions du Code de commerce et de la loi sur l’enregistrement qui, dans ce cas, autorisent faire les actes le lendemain de l’expiration du dĂ©lai, sont toutes spĂ©ciales et prouvent l’existence de la rĂšgle gĂ©nĂ©rale, qui ne saurait recevoir d’autres dĂ©rogations que celles expressĂ©ment Ă©noncĂ©es dans ces lois particuliĂšres. Les juges de paix et les tribunaux qui jugent les actions possessoires violent donc la loi lorsqu’ils accueillent l’action intentĂ©e le lendemain de l’annĂ©e du trouble, ou assujettissent les parties Ă  faire preuve d’une possession d’an et jour; on conçoit qu’il peut arriver, quoique sans doute rarement, qu’on soit en Ă©tat de prouver une annĂ©e de possession et non u jour de plus. Bien que notre observation semble assez minutieuse, nous avons cependant cru devoir la prĂ©senter et nous pensons que la cour rĂ©gulatrice casserait une dĂ©cision semblable sur le recours de celui qui voudrait ne faire d’autre preuve que celle de la possession annale, ou se plaindrait de l’admission d’une — nu — demande formĂ©e le lendemain de l’expiration de l’annĂ©e du trouble. L’art. 23, en parlant de l’annĂ©e de possession comme condition de l’exercice de la complainte, n’exprime pas si elle doit ĂȘtre antĂ©rieure au trouble ou Ă  l’action ; des difficultĂ©s peuvent naĂźtre de ce silence. La complainte Ă©tant recevable tant que l’annĂ©e depuis le trouble n’est pas entiĂšrement rĂ©volue, celui qui, au moment oĂč il lui a Ă©tĂ© causĂ©, n’aurait qu’une possession hebdomadaire, attendrait onze mois et vingt-cinq jours, et n’intenterait son action que la veille de l’expiration de l’annĂ©e. M. Paillet, dans ses notes sur l’article en discussion, semble, en examinant une autre question, adopter la seconde interprĂ©tation. Pour dĂ©cider la question de savoir si l’action possessoire est recevable, dit-il, le juge ne doit jamais examiner que la possession annale qui prĂ©cĂšde immĂ©diatement l’assignation. » Mais ce systĂšme est repoussĂ© par la disposition finale de l’article, qui exige une possession paisible. La possession n’ayant pas Ă©tĂ© paisible Ă  partir du trouble, le demandeur n’aurait pas en sa faveur la condition lĂ©gale. Ainsi, c’est bien d’une annĂ©e de possession paisible, antĂ©rieure non Ă  l’action, mais au trouble, que la loi a entendu parler ; et si elle 11 e l’a pas exprimĂ©, c’est pour Ă©viter une rĂ©pĂ©tition du mot trouble dĂ©jĂ  employĂ©, et parce pie la nature mĂŽme des choses fixait l’interprĂ©tation. de l’article dans le sens que nous lui avons donnĂ©, conformĂ©ment, au surplus, Ă  l’opinion de tous les jurisconsultes anciens et modernes. M. Aulanier, TraitĂ© des actions possessoires, M. Guichard, Questions possessoires, page 270, dĂ©cident posi- — 102 — tivement que l’annĂ©e s’entend de celle antĂ©rieure au trouble. Le dernier auteur ajoute MĂȘme du premier jour oĂč il a commencĂ©, et non du dernier acte fait, lorsqu’il a consistĂ© dans plusieurs actes successifs. » Il cite un arrĂȘt de cassation , rendu sur sa plaidoirie, le 20 janvier 182/i, qui l’a ainsi formellement dĂ©cidĂ©. M. Brossard, il 0 * 1A7 et 148, est bien aussi d’avis que c’est de l’annĂ©e antĂ©rieure au trouble qu’il s’agit; mais quelle ne doit courir que du dernier acte, du trouble le plus rĂ©cent ; c’est lĂ  une erreur Ă©vidente, ainsi que le dĂ©montrent les auteurs ci-dessus citĂ©s. Le commentateur Rodier fait remarquer que Rebuffe, de Mater iis possessoriis, semble insinuer que l’on peut intenter l’action aprĂšs l’an du trouble, si ce trouble continue, en regardant chaque jour comme un nouveau, pourvu qu’on renonce aux dommages-intĂ©rĂȘts, ou restitutions de fruits antĂ©rieurs Ă  l’annĂ©e de l’introduction de l’instance; mais il combat avec raison cette opinion, qui ne serait pas davantage admise sous l’empire du Code de procĂ©dure. Il rappelle les termes d’une ordonnance de 1539 Ne sera reçue aucune complainte aprĂšs l’an ; » puis il ajoute Celui qui souffre pendant un an le trouble ou la dĂ©possession est censĂ© avoir renoncĂ© Ă  l’action possessoire ; il ne lui reste que l’action pĂ©titoire, de sorte que l’auteur du trouble, ou celui qui se serait emparĂ© par violence ou voie de fait d’un hĂ©ritage depuis un an rĂ©volu, se mettrait Ă  l’abri de l’action en complainte et rĂ©intĂ©grande, en opposant que le trouble a commencĂ© depuis plus d’un an ; Ă  moins que le trouble n’eĂ»t Ă©tĂ© interrompu de fait parle premier possesseur, c’est-Ă -dire qĂčil fĂ»t rentrĂ© en possession, et qu’il ne fĂ»t survenu un trouble tout nouveau, » — 103 — Toutefois, il ne faudrait pas Ă©tendre cette rĂšgle outre mesure et de maniĂšre Ă  ce qu’on pĂ»t en abuser. DĂšs que le trouble est un fait qu’il appartient aux juges de rechercher et de constater, il se pourrait qu’ils n’en trouvassent pas l’existence dans le commencement des travaux, surtout lorsque, exĂ©cutĂ©s par un particulier sur son fonds , ils ne causent encore aucun dommage au voisin ; tel serait un barrage sur l’influence duquel il y aurait doute et qui ne produirait l’inondation et le remous que dans des crues extraordinaires. Nous en trouvons un nouvel exemple dans une espĂšce jugĂ©e par la cour de cassation, le 9 janvier 1833. Un barrage se composait de deux parties; l’une permanente en maçonnerie et l’autre mobile, s’adaptant Ă  la premiĂšre. 11 a Ă©tĂ© jugĂ© que l’annĂ©e pour agir avait commencĂ© du jour de l’établissement de celle-ci, parce qu’il n’existait antĂ©rieurement aucun dommage. Du reste, il importe de remarquer que s’il existe une grande diffĂ©rence entre la complainte et la rĂ©intĂ©grande, quant aux conditions qui autorisent Ă  les intenter, il n’y en a pas quant au dĂ©lai dans lequel elles doivent avoir lieu. On pourrait se faire la question de savoir si l’annĂ©e dans laquelle le possesseur doit agir a son cours dĂšs l’instant OĂč le trouble et la dĂ©possession ont eu lieu, ou seulement de celui oĂč ils sont parvenus Ă  sa connaissance; mais par cela mĂȘme que la loi l’a fait partir du jour du trouble, sans distinction ni restriction, elle n’exige pas qu’il ait Ă©tĂ© connu de la partie intĂ©ressĂ©e; autrement il pourrait arriver qu’une complainte ou une demande en rĂ©intĂ©grande serait formĂ©e aprĂšs un grand nombre d’annĂ©es ; ce qui serait contraire Ă  la nature de — lĂ»t — cette action, qui a pour but de faire obtenir une prompte rĂ©pression, et d’assurer la possession Ă  celui qui l’avait Ă  une Ă©poque trĂšs-rapprochĂ©e. Ainsi, le lĂ©gislateur a voulu circonscrire l’exercice de cette action dans un bref dĂ©lai ; il a d’ailleurs pensĂ© qu’une possession, qui doit ĂȘtre publique, ne pourrait ĂȘtre ignorĂ©e du propriĂ©taire ou de ses agents. Ajoutons enfin qu’il s’agit ici d’une sorte de prescription, et que la loi n’exige point que la possession, qui lui sert de base, soit spĂ©cialement connue du propriĂ©taire. VĂȘtait le sentiment de ĂŒornier qui, sur les mots dans l'annĂ©e du trouble, de l’art. 1", titre 18 de l’ordonnance de 1667, s’exprime en ces termes Cela est conforme Ă  l’ordonnance de Charles Vlll, art. 71, et Ă  celle de François I er , Ă  Villers-Cottercts, en aoĂ»t 1539, art. 61, par laquelle il est dit que nulle complainte ne sera reçue aprĂšs l’an, tant en matiĂšres bĂ©nĂ©ficiaires que profanes, d’autant que, par la disposition du droit, les interdits sont annaux, suivant la loi 1", uti possidetis, et la loi 1 1C , § fin. {{. de interd., et il faut prendre l’an pour continu, c’est-Ă -dire Ă  compter du jour du trouble, et des derniers exploits et actes de possession , et non du jour que le trouble est venu Ă  la connaissance de celui qui veut intenter la complainte, d’autant que le trouble, de mĂȘme que la possession, consiste en fait. » Ces principes ont Ă©tĂ© consacrĂ©s par la cour de cassation, qui, par arrĂȘt du 12 octobre 1814 , a dĂ©cidĂ© que le dĂ©lai d’un an, pour intenter l’action possessoire, court du jour mĂȘme du trouble, et non du jour seulement oĂč il a Ă©tĂ© connu, bien que, dans l’espĂšce, il fĂ»t question d’un trouble de droit plus que d’un trouble de fait, et qu’il eĂ»t Ă©tĂ© essuyĂ©, non par le propriĂ©taire personnellement, — 105 — mais bien par le fermier, qui n’en avait pas donnĂ© avis au propriĂ©taire. Nous retrouvons les mĂŽmes principes dans un arrĂȘt de la cour, du 10 juillet 1821, qui a prononcĂ© la cassation d’un arrĂȘt de la cour de Pau, du 17 juin 1817 , par lequel il avait Ă©tĂ© jugĂ© qu’une possession, qui n’avait pas eu lieu au su et au vu du propriĂ©taire, Ă©tait inefficace. Enfin, par arrĂȘt du 22 avril 1839, la cour, appliquant cette doctrine au cas oĂč le trouble avait eu lieu contre une commune dont le maire, chargĂ© d’agir pour elle, n’avait eu connaissance des entreprises faites Ă  son prĂ©judice que par l’action correctionnelle dirigĂ©e contre la commune, a dĂ©cidĂ© que c’est Ă  partir du trouble matĂ©riel lui-mĂȘme, et non pas seulement Ă  partir de la connaissance lĂ©gale que le possesseur a eue de ce trouble, que court le dĂ©lai d’un an dans lequel doit ĂȘtre intentĂ©e l’action en complainte. DĂ©s que c’est une possession annale, immĂ©diatement antĂ©rieure au trouble, qui est requise pour autoriser la complainte, en vain le demandeur invoquerait-il une possession centenaire ou immĂ©moriale, mais qui aurait Ă©tĂ© abandonnĂ©e pendant une annĂ©e, il ne pourrait agir qu’au pĂ©titoire ; s’il voulait agir au possessoire, le dĂ©tenteur annal le repousserait infailliblement, et le juge de paix ne pourrait avoir aucun Ă©gard Ă  cette longue possession. 11 est donc bien entendu que celui qui n’a qu’une annĂ©e de possession, mais qui est la derniĂšre immĂ©diatement antĂ©rieure au trouble, doit l’emporter sur celui qui en allĂ©guerait cent qui la prĂ©cĂ©deraient. Nous aurons occasion de nous expliquer sur la question de savoir s’il est des cas oĂč le juge de paix peut prendre en considĂ©ration la possession trentenaire ou immĂ©moriale, unique- ment pour Ă©clairer la possession, comme il est autorisĂ© Ă  consulter les titres de propriĂ©tĂ©. SECTION II. Les dĂ©lais dans lesquels l’action doit ĂȘtre formĂ©e courent contre toutes personnes. L’article 23 du Code de procĂ©dure, en dĂ©clarant non recevable toute action possessoire intentĂ©e aprĂšs l’annĂ©e du fait qui la nĂ©cessite, nous semble, par la gĂ©nĂ©ralitĂ© de ses expressions impĂ©ratives, n’admettre aucune distinction, et frapper de la dĂ©chĂ©ance non-seulement les particuliers, les administrations publiques, l’état, les communes, les hospices, les fabriques des Ă©glises, les femmes mariĂ©es, les absents, les faillis, mais encore les mineurs et les interdits; toutefois cette solution n’est pas sans diflicultĂ© Ă  l’égard des personnes de ces deux derniĂšres classes, Ă  cause de l’art. 2252 du Code civil, portant que la prescription ne court pas en gĂ©nĂ©ral contre elles, exceptĂ© dans certains cas Ă©noncĂ©s Ă  la derniĂšre section de ce Code. Il Ă©tait admis autrefois que le dĂ©lai d’une annĂ©e, dans lequel l’action possessoire devait ĂȘtre intentĂ©e, courait contre toutes personnes sans distinction. LemaĂźtre, sur la coutume de Paris, titre h, chap. 1, section 2, donne trois raisons de cette dĂ©cision La premiĂšre, que la complainte est une espĂšce de privilĂšge dont personne ne peut jouir qu’aux conditions portĂ©es par la loi; la seconde, qu’il ne s’agit que d’une simple possession dont la privation laisse le droit des mineurs et des absents en son entier pour la propriĂ©tĂ©; la troisiĂšme, qu’une annĂ©e de paisible possession, ni violente, — 107 — ni clandestine, doit ĂȘtre prĂ©sumĂ©e lĂ©gitime, et qu’un possesseur lĂ©gitime ne doit pas ĂȘtre Ă©vincĂ© en vertu d’une action Ă©tablie en sa faveur. » Jousse, dans son Commentaire sur l’ordonnance de 1667, dit que le dĂ©lai d’une annĂ©e court contre toutes sortes de personnes, soit mineurs, soit ecclĂ©siastiques ou privilĂ©giĂ©s. Bourjon et Poullain-Duparc sont du mĂȘme avis. Denizart, V° Complainte, n’est pas moins formel. La prescription contre cette action en trouille ou complainte, dit-il, court contre les mineurs, les absents, les insensĂ©s, les bannis, les interdits, la femme mariĂ©e, l’église et tous autres qui pourraient en autres cas se servir du bĂ©nĂ©fice de restitution. » Les auteurs de la Nouvelle collection rĂ©pĂštent cette opinion. Nous ne connaissons aucun auteur qui, sous l’ancien droit, ait enseignĂ© une doctrine contraire. A la vĂ©ritĂ©, autrefois, on n’était pas d’accord sur le principe que la prescription ne courait point contre les mineurs et les interdits; si un grand nombre de coutumes avaient adoptĂ© l’affirmative, le droit romain et quelques coutumes avaient des dispositions diffĂ©rentes. Aujourd’hui nous avons l’art. 2252, dont les termes sont trĂšs-formels et trĂšs-Ă©tendus. MalgrĂ© cela, M. Henrion de Pansey, MM. Guichard, Aulanier et Favard, n’hĂ©sitent pas Ă  maintenir l’ancienne jurisprudence. Les deux premiers ne dĂ©veloppent pas leur opinion ; les autres se fondent sur ce que l’art. 2252 ne s’applique qu’à l’acquisition de la propriĂ©tĂ© et nullement Ă  la possession annale qui laisse cette propriĂ©tĂ© intacte, et que le mineur pourra recouvrer par l’action pĂ©titoire. Pigeau, tome i, page 54, de son Commentaire posthume, embrasse l’opinion contraire. 11 est seul de son avis. CarrĂ©, Droit français dans son rapport avec les justices ele paix, n° 1580, combat cette opinion de Pigeau. 11 observe quelle est entiĂšrement nouvelle ; que l’on pensait unanimement le contraire autrefois ; il se prononce pour les anciens principes. 11 dĂ©veloppe longuement son sentiment. I’un autre cĂŽtĂ© nous avons eu sous les yeux une consultation Ă©tendue dĂ©libĂ©rĂ©e par un trĂšs-habile jurisconsulte, qui prĂ©fĂšre l’opinion de Pigeau. Quant Ă  nous, il ne nous semble pas que l’art. 2252 s’applique au dĂ©lai dans lequel l’action possessoire doit ĂȘtre intentĂ©e. L’art. 23 exige deux conditions distinctes une possession annale antĂ©rieure au trouble, et l’exercice de l’action dans l’annĂ©e qui l’a suivi ; que la possession puisse ou ne puisse pas ĂȘtre acquise contre le mineur, il n’en doit pas moins se pourvoir avant l’expiration de l’annĂ©e. Faisons bien attention qu’il ne s’agit ici que d’une formalitĂ© de procĂ©dure, et non de l’attribution Ă  l’adversaire du mineur d’une possession civile, ni Ă  plus forte raison d’une maintenue en possession. Nous examinerons ailleurs si la possession qu’aurait un tiers des biens d’un mineur pourrait autoriser ce tiers Ă  intenter l’action possessoire contre le mineur, ou si le principe d’inprescriptibilitĂ© Ă©crit dans l’art. 2252 du Code civil devrait y faire obstacle ; mais en supposant que l’action possessoire ne put ĂȘtre reçue, il faudrait au moins, pour que le mineur attaquĂ© en complainte pĂ»t se prĂ©valoir de sa qualitĂ©, qu'il fĂ»t certain que la chose lui appartenait avant le trouble ; car s’il ne l’avait possĂ©dĂ©e que — 109 — quelques mois, si le nouveau dĂ©tenteur n’a fait que reprendre ce qu’il avait dĂ©jĂ  possĂ©dĂ© pendant un an avant le mineur, comment celui-ci pourrait-il prĂ©tendre qu’on a usurpĂ© son bien? Ce ne pourrait ĂȘtre qu’en produisant son titre de propriĂ©tĂ©. Nous examinerons plus bas si, dans ce cas, le juge de paix peut l’apprĂ©cier sans cumuler le pĂ©titoire et le possessoire. En obligeant Ă  former l’action possessoire dans l’annĂ©e, le lĂ©gislateur a voulu, comme nous l’avons prĂ©cĂ©demment exposĂ©, restreindre dans un court dĂ©lai l’exercice d’une procĂ©dure qui doit ĂȘtre prompte, facile et peu dispendieuse. Son but serait totalement manquĂ© avec l’exception qu’on veut introduire en faveur d’un interdit qui pourrait * aprĂšs cinquante ans exercer la complainte ; un mineur le pourrait aprĂšs vingt-un ans. Il faut admettre comme un principe certain que l’article 2252 du Code civil ne s’applique qu’au fond des droits qu’il a consacrĂ©s, et nullement aux dĂ©lais et dĂ©chĂ©ances de procĂ©dure, ni mĂȘme aux droits Ă©tablis parles autres lois ; par exemple Ă  ceux rĂ©glĂ©s par le Code de commerce. Ainsi les prescriptions Ă©tablies par les articles 6/i,189, 573, 430 Ă  i36 de ce Code courent contre les mineurs et les interdits, bien qu’ils ne le dĂ©clarent pas formellement. Tel est aussi le sentiment de MM. Vazeille et Troplong dans leurs TraitĂ©s des prescriptions, de MM. Dalloz, Carou et Belime. — 10 — CHAPITRE III Natiirp do la possession exigĂ©e pour l’action en complainte; maniĂšre dont elle s’acquiert et se perd. SECTION 1”. Observations gĂ©nĂ©rales. L’ordonnance de 1667 exigeait une possession publique , sans violence et Ă  autre titre que de fermier ou * possesseur prĂ©caire. Les articles 2229, 2232, 2233 du Code civil exigent que la possession soit continue et non interrompue, paisible, publique, non Ă©quivoque; qu’elle ne soit pas fondĂ©e sur la tolĂ©rance, la simple facultĂ©, la violence, et qu’elle ait eu lieu Ă  titre de propriĂ©taire. Le Code de procĂ©dure ne parle que de possession paisible et Ă  titre non prĂ©caire. Il ne rĂ©pĂšte pas les conditions que le Code civil veut absolument que rĂ©unisse la possession pour ĂȘtre constitutive de la prescription qui fait acquĂ©rir la propriĂ©tĂ©. Faut-il en conclure qu’il' y a deux sortes de possessions, et que le lĂ©gislateur n’a pas voulu assujettir celle qui donne lieu Ă  complainte Ă  des conditions aussi rigoureuses que celle qui autorise l’action pĂ©- titoire? Il nous paraĂźt qu’il n’y a de diffĂ©rence entre elles que dans leur durĂ©e ; que chacune doit avoir les mĂȘmes qualitĂ©s , les mĂȘmes caractĂšres intrinsĂšques ; car la possession annale, non-seulement fait prĂ©sumer la propriĂ©tĂ©, mais mĂȘme la fait acquĂ©rir immĂ©diatement, lorsque celui contre lequel la maintenue possessoire a Ă©tĂ© prononcĂ©e — ni — ne peut prouver par action pĂ©titoire qu’il a des droits dans la chose. Le lĂ©gislateur ayant dĂ©fini la possession par le Code civil, qui seul doit rĂ©gler le fond du droit, n’avait nul besoin d’en dĂ©terminer les caractĂšres essentiels et constitu- tifs'par le Code de procĂ©dure, uniquement destinĂ© Ă  rĂ©gler la forme de l’action. Les expressions paisible et non prĂ©caire, qui sont surabondantes, n’ont point pour but de dĂ©roger au droit commun ni de tracer des limites plus Ă©troites ; elles sont Ă©nonciatives et non restrictives. Il aurait suffi de dĂ©clarer que la complainte appartiendrait de droit Ă  celui qui aurait une annĂ©e de possession; car pour interprĂ©ter sainement cette expression, on Se serait reportĂ© aux dispositions du Code civil. D’ailleurs, on pourrait aller jusqu’à prĂ©tendre, avec plusieurs arrĂȘts de la cour de cassation, que les mots Ă  titre non prĂ©caire comprennent dans leur gĂ©nĂ©ralitĂ© l’exigence de tous les caractĂšres constitutifs de la possession, ainsi que nous le dĂ©montrerons ultĂ©rieurement. Avec le systĂšme restrictif que nous combattons, et qui prĂ©tend trouver dans l’art. 23 du Code de procĂ©dure, exclusivement, les conditions de la possession pour intenter la complainte, on irait jusqu’à l’admettre pour une possession Ă©quivoque ou clandestine. Il faut de deux choses l’une, ou se restreindre servilement aux termes de l’art. 23 ou se rattacher Ă  l’art. 2229 du Code civil, et comme le premier parti est impossible, il faut bien s’en tenir au second. C’est dans ce sens que s’est expliquĂ© M. Faure, rapporteur du tribunal, sur l’art. 23, puisqu’il dit positivement que la possession dont il y est question doit avoir Ă©tĂ© continue et non interrompue, paisible, publique, non — 112 — Ă©quivoque, et Ă  titre de propriĂ©taire, et tous les auteurs en donnent la mĂȘme interprĂ©tation. La possession, dit M. Henrion de Pansey, p. /16, ne donne la saisine que lorsque, prolongĂ©e pendant le temps nĂ©cessaire pour prescrire, elle confĂšre la propriĂ©tĂ©; ainsi, pour ĂȘtre autorisĂ© Ă  intenter complainte en cas de saisine et de nouvelletĂ©, il ne suflit pas d’avoir possĂ©dĂ© pendant un an et un joui-, il faut encore que la chose possĂ©dĂ©e soit prescriptible, et que la possession soit revĂȘtue des caractĂšres auxquels la loi attribue l’efficacitĂ© de prescrire. » » La possession, dit M. Poncet, TraitĂ© des actions, n° 7/i, pour ĂȘtre qualifiĂ©e saisine ou possession parfaite doit ĂȘtre annale, paisible, publique et non Ă©quivoque, continue et non interrompue, Ă  titre de propriĂ©taire, c'est- Ă -dire avec la juste intention de possĂ©der comme tel ; en outre, elle doit s’appliquer Ă  une chose prescriptible. » MM. Brossard, n°* 139 et 1 /i 2; Guichard, p. 16; Au- lanier, n° 20; GarrĂ©, dans son Droit français appliquĂ© Ă  la juridiction civile des juges de paix, n°* 10/i5, 1057, 1058, 1351 ; llogron, dans son Code de procĂ©dure expliquĂ©; Merlin, Favard de Langlade, Toullier, Duranton, Pigeau, enseignent la mĂȘme doctrine. MM. Vazeille et Troplong, TraitĂ© de la prescription, ne sont pas moins formels. M. Serrigny, professeur de droit administratif 5 la facultĂ© de Dijon, est le seul qui Ă©mette une opinion contraire. Mais cette opinion, d’ailleurs donnĂ©e sans aucuns dĂ©veloppements, ne peut, quel que soit le mĂ©rite de son auteur, prĂ©valoir sur les autoritĂ©s si nombreuses et si imposantes que nous venons de citer. — 113 — SECTION II. DĂ©veloppements des principes de chacune des qualitĂ©s de la possession. AprĂšs avoir dĂ©montrĂ© que la possession pour intenter l’action en complainte doit ĂȘtre de la mĂȘme nature que celle exigĂ©e pour la prescription, il est nĂ©cessaire d’expliquer en dĂ©tail les Ă©lĂ©ments constitutifs de cette possession ; de quelle maniĂšre elle s’acquiert et se perd. § 1". Possession non prĂ©caire. Il importe d’avoir des idĂ©es prĂ©cises sur les termes prĂ©caire, prĂ©cairement, possession prĂ©caire ou Ă  titre non prĂ©caire que nous trouvons dans les livres de droit. Le Digeste renferme un titre de precario. Chez les Romains, le prĂ©caire Ă©tait un prĂȘt d’une espĂšce particuliĂšre; c’était une convention par laquelle on donnait une chose Ă  quelqu’un pour s’en servir tant qu’il plairait au maĂźtre de cette chose, et Ă  la charge de la lui rendre Ă  sa premiĂšre rĂ©quisition Precarium est quod precibus petenti vtendumconceditur, tamdiu quamdiu is quiconcessitpatitur. Loi 1, ff. de precario. Domat liv. 1, p. 65 dĂ©finit le prĂ©caire un prĂȘt Ă  usage accordĂ© Ă  la priĂšre de celui qui emprunte une chose pour en user pendant le temps que celui qui l’a prĂȘtĂ©e voudra la laisser, et la charge de la rendre quand il plaira au maĂźtre de la retirer. » Pothier, du Contrat de prĂȘt, n 01 80, 87 et 88, en donne la mĂȘme dĂ©finition. Il fait en outre remarquer pie, dans le contrat de prĂȘt la chose est prĂȘtĂ©e pour un certain 8 — 1U — lisage dĂ©terminĂ© ou pour un certain temps, et que la restitution n’en peut ĂȘtre demandĂ©e qu’aprĂšs l’expiration du temps convenu ou de celui qui est nĂ©cessaire pour que l'emprunteur puisse s’en servir pour l’usage pour lequel elle lui a Ă©tĂ© prĂȘtĂ©e; au lieu que, dans la convention du prĂ©caire, celui qui reçoit une chose la reçoit pour s’en servir indistinctement, et Ă  la charge de la rendre incontinent au prĂȘteur toutesfois qu’il la demandera. » Cet auteur ajoute que, d’aprĂšs le droit romain, celui qui avait accordĂ© prĂ©cairement l’usage de sa chose avait pour se la faire rendre l’interdit de precario Interdiction de precario merito introduction est, quia nulla eo nomine juris civilis actio esset; magis enim ad donationis et beneficii causant, quant ad negotii contracti spectat, pre- carii conditio. Cet interdit Ă©tait restitutoire, ainsi que le porte la loi 2, § 2, au Digeste ; Uoc interdiction restitu- torium est. Et elle ajoute Et naturalem habet in se Ɠqui- tatem namque precarium revocare volenti competit. Est enimnaturaĂŠquum, tarndiu te liberalĂŒate meauti, quamdiu ego velim; etutpossim revocare cummutavero voluntatem. Itaque cum quid precario rogatum est, non solum hoc in- terdicto utipossumus; sed eliarn prƓscriptis verbis actione, quoi ex bona fide oritur. Ainsi, comme l’on voit, et comme le lait aussi observer Pothier, celui qui avait accordĂ© prĂ©cairement l’usage de sa chose, outre l’interdit de precario, avait encore une action prƓscriptis verbis. Évidemment, dans notre droit, le sens du mot prĂ©caire ne doit pas ĂȘtre restreint Ă  signifier un prĂȘt restituable Ă  la volontĂ© du propriĂ©taire ; cette opinion est dĂ©jĂ  justifiĂ©e par les termes du 2' § de l’art. 2236 du Code civil; mais il y a plus ; nous soutenons qu’il doit ĂȘtre Ă©tendu Ă  toute — lia — dĂ©tention Ă  laquelle il manque un des caractĂšres lĂ©gaux de la possession lĂ©gitime. Pothier, Ă  l’endroit citĂ©, semble le dĂ©cider ainsi, lorsqu’il dit 11 y a deux espĂšces de prĂ©caire; la premiĂšre, par laquelle on accorde prĂ©cairement Ă  quelqu'un la possession d'une chose; la seconde, par laquelle on en accorde seulement l’usage, etc. » 11 dit qu’il ne s’occupera que de celle-ci, que la premiĂšre sera l’objet d’un traitĂ© particulier sur les choses. ci Le mot de prĂ©caire, dit M. Yazeille, TraitĂ© de la prescription, n° 122, dans l’acception particuliĂšre que lui donne la loi premiĂšre ff. de precario, est le nom d’un prĂȘt gratuit rĂ©vocable Ă  la volontĂ© du prĂȘteur. Mais il a une signification plus Ă©tendue il sert Ă  dĂ©signer la dĂ©tention des choses, Ă  tout autre titre que celui de propriĂ©taire. C’est dans cette acception gĂ©nĂ©rale que le Code civil a employĂ© l’adverbe qui en dĂ©rive. » N° 12/t. Dans l’art. 2236, le lĂ©gislateur indique, seulement pour servir d’exemple, trois sortes de dĂ©tenteurs prĂ©caires, auxquels le Code de commerce, art. 430, ajoute le capitaine de navire. L’on trouve infailliblement ^ous Jes autres en parcourant le cercle des possesseurs qui n’ont pas la propriĂ©tĂ©. Le crĂ©ancier engagiste, le sĂ©questre , les maris, les tuteurs, les curateurs quand ils ont une gestion, les agents qui administrent le bien d’autrui , soit en vertu de procuration ou de commission, soit officieusement, sont aussi des dĂ©tenteurs prĂ©caires ; aucun d’eux ne peut prescrire le droit des personnes qu’il reprĂ©sente ou dont il reconnaĂźt le domaine. » Au n° 42, cet auteur avait dĂ©jĂ , dit On doit dĂ©cider que la rĂ©pression certaine de l’usurpation, par quelque voie et dans quelque temps qu’on l’obtienne, ellace — 116 — l’interruption que l’usurpateur avait produite Cessante causa cessĂąt effectus. L’usurpateur n’a qu’une possession prĂ©caire qui se rapporte pour l’utilitĂ© au propriĂ©taire qu’il est obligĂ© de reconnaĂźtre. » Il dit encore la mĂȘme chose au n° 176, p. 192. M. Merlin, Hep. , V° PrĂ©caire , atteste aussi que dans l’usage on emploie ce terme pour exprimer en gĂ©nĂ©ral tout autre possession que celle du propriĂ©taire. M. le prĂ©sident Favard de Langlade, liĂšp. , V° Complainte, sect. 1, § 3, n° Al, donne au mot prĂ©caire un sens particulier. AprĂšs avoir rapportĂ© un jugement qui refusait la complainte Ă  l’emphytĂ©ote, il s’exprime ainsi Ce jugement reposait sur une base Ă©videmment fausse ; car pour prescrire la propriĂ©tĂ©, il faut, il est vrai, une possession Ă  titre de propriĂ©taire, aux termes de l’art. 2229 du Code civil; mais, suivant l’art. 23 du Code de procĂ©dure, il suflit, pour intenter l’action en complainte, d’avoir une possession annale, paisible, h titre non prĂ©caire. Et qu’entend la loi par ces derniers mots? Elle dĂ©signe le titre de celui qui a un droit propre, indĂ©pendant de celui du propriĂ©taire, qui possĂšde pro suo, qui a droit par son titre Ă  la propriĂ©tĂ© de tout ce que produit l’hĂ©ritage ; qui jouit comme le propriĂ©taire ; en nn mot celui qui a le domaine utile, comme l’emphytĂ©ote il temps. » Le dictionnaire de l’AcadĂ©mie s’exprime ainsi PrĂ©caire... qui ne s’exerce que par une tolĂ©rance qui peut cesser, par une permission rĂ©vocable, par emprunt, avec dĂ©pendance, avec incertitude, autoritĂ© prĂ©caire; pouvoir prĂ©caire; possession prĂ©caire; son Ă©tat est prĂ©caire; existence prĂ©caire; vie prĂ©caire. — 117 — Du reste, le mot prĂ©caire n’est pas Ă©crit une seule fois dans tout le titre de la prescription. Nous trouvons seulement dans l’art. 2236 que ceux qui possĂšdent pour autrui ne prescrivent jamais par quelque laps de temps que ce soit; qu’ainsi le fermier, le dĂ©positaire, l’usufruitier et tous autres qui dĂ©tiennent prĂ©cairement la chose du propriĂ©taire ne peuvent la prescrire. 11 faut en conclure que le Code civil a dĂ©terminĂ© les caractĂšres constitutifs du prĂ©caire sans le dĂ©finir, et qu’une possession est nĂ©cessairement prĂ©caire quand elle manque d’une des conditions dont il fait dĂ©pendre sa validitĂ© ; cpie cette possession est celle qui est incertaine, qu’on peut faire cesser d’un instant Ă  l’autre, qui ne pourrait pas ĂȘtre conservĂ©e et maintenue si on l'attaquait. L’ordonnance de 1667 exigeait, comme on l’a vu, que la possession qui servait de base Ă  la complainte fĂ»t ii autre titre que de fermier ou possesseur prĂ©caire; le Code civil est conçu en termes gĂ©nĂ©raux et tous autres qui dĂ©tiennent prĂ©cairement la chose d’autrui. Certes, celui qui ne la dĂ©tient que par violence, clandestinement, par tolĂ©rance, ne possĂšde pas sa chose, mais celle d’autrui. Au surplus, pour que la possession soit rĂ©putĂ©e prĂ©caire, il n’est pas nĂ©cessaire qu’il y ait convention avouĂ©e, comme pour le cas de bail, de dĂ©pĂŽt, de prĂȘt ; elle peut rĂ©sulter des circonstances de fait, indĂ©pendamment de tout contrat. Car, si la premiĂšre partie de l’art. 2236 semble ĂȘtre restrictive, la seconde, par la gĂ©nĂ©ralitĂ© de ses termes, Ă©tablit la justesse de notre interprĂ©tation. Telle est aussi l’opinion de M. Aulanier Il est, dit-il, n° 68, beaucoup de possessions autres que celles que nous avons dĂ©signĂ©es comme prĂ©caires, et qui ce- — 118 — pendant sont considĂ©rĂ©es comme telles, quoique elles ne lĂȘ soient pas rĂ©ellement ce sont en gĂ©nĂ©ral toutes celles auxquelles la loi n’a point attachĂ© l’effet d’opĂ©rer la prescription. » Cette maniĂšre d’entendre la loi est d’ailleurs confirmĂ©e par la jurisprudence de la cour de cassation qui donne au mot prĂ©caire un sens trĂšs-Ă©tendu. Nous citerons notamment cinq arrĂȘts. Dans la premiĂšre espĂšce, il s’agissait de savoir si le propriĂ©taire voisin d’un Ă©tang pouvait invoquer la possession qu’il avait de ses bords quand les eaux Ă©taient basses. Le propriĂ©taire de l’étang repoussait la complainte en soutenant que la possession de son adversaire Ă©tait prĂ©caire, puisqu’aux termes de l’art. 558 du Code civil, le propriĂ©taire conserve toujours son terrain mĂȘme dans les basses eaux. Ce systĂšme fut accueilli en premiĂšre instance, en appel et en cassation. L’arrĂȘt de rejet, du 23 avril 1811, est fondĂ© sur ce que le juge, en dĂ©cidant que la possession allĂ©guĂ©e ne pouvait ĂȘtre que prĂ©caire , puisque la loi l’avait toujours conservĂ©e pour le propriĂ©taire de l’étang, a fait une juste apprĂ©ciation de l’art. 558 prĂ©citĂ©. Dans la deuxiĂšme espĂšce, un jugement du 10 pluviĂŽse an V avait maintenu la dame Dandiron, reprĂ©sentĂ©e par les sieurs Guieux et Chaix dans la possession exclusive d’une ruelle, et dĂ©fenses avaient Ă©tĂ© faites au sieur Plan de Syeyes de l’y troubler. Ce dernier continua cependant de se servir de la ruelle. En janvier 1807, il forma une action en complainte, pour ĂȘtre maintenu dans sa possession plus qu’annale, et sa demande fut accueillie par le juge de paix. Sur l’appel, le tribunal de Digne infirme ce jugement, attendu que celui de l’an V imprimait Ă  la ’J 3-a — 119 — possession de Plan de Syeyes le caractĂšre de simple tolĂ©rance ; et sur le pourvoi, arrĂȘt de rejet par le motif que la jouissance de Plan de Syeyes, aprĂšs la signification du jugement, n’a pu ĂȘtre que prĂ©caire, et que cette jouissance, n’ayant pas le caractĂšre exigĂ© par la loi, n’a pu lui acquĂ©rir aucun droit, moins encore anĂ©antir ce jugement. Voici la troisiĂšme espĂšce. Le 5 nivĂŽse an VII, un jugement au possessoire fait dĂ©fenses au sieur ProvĂŽt d’user d’un droit de prise d’eau qu’il prĂ©tendait avoir sur un hĂ©ritage appartenant au sieur Magistry, et en 1805, le sieur Jouannet, allĂ©guant avoir pris sans interruption, depuis son acquisition, sur l’hĂ©ritage de Pardoux Velleaud, les eaux nĂ©cessaires pour l’irrigation du sien, cite celui-ci devant le juge de paix de Chambon, par voie de complainte, pour l’avoir troublĂ© dans la possession plus qu’annale oĂč il soutenait ĂȘtre de jouir de ces eaux. Pour moyen de dĂ©fenses, Pardoux Velleaud oppose le jugement rendu contre ProvĂŽt le 5 nivĂŽse an VII, qui a l’autoritĂ© de la chose jugĂ©e contre Jouannet, comme vis- Ă -vis de ProvĂŽt son vendeur ; que, par consĂ©quent, toute possession ultĂ©rieure de Jouannet ne peut ĂȘtre que prĂ©caire et inefficace pour fonder l’action en complainte. Le juge de paix rejette l’exception et ordonne aux parties de plaider au fond ; mais, sur l’appel Jugement du tribunal civil de Chambon du II fĂ©vrier 1817 qui infirme, attendu qu’il est dĂš principe que celui qui, aprĂšs avoir succombĂ© dans sa possession, a joui depuis an et jour, ne peut plus demander Ă  ĂȘtre maintenu dans cette mĂȘme possession qui n’est qu e prĂ©caire, par suite de la maxime complainte sur complainte ne vaut. Et sur le pourvoi, arrĂȘt de la chambre des requĂȘtes du 17 mars 1810 qui 120 — rejette, attendu que, d’aprĂšs le jugement qui avait Ă©tĂ© rendu contre ProvĂŽt, lequel est. aujourd’hui reprĂ©sentĂ© par le demandeur, celui-ci ne peut avoir eu qu’une possession 'prĂ©caire. h c EspĂšce. — Il existe dans la ville de Salies une fontaine d’eau salĂ©e appartenant Ă  la communautĂ© des habitants. Aux termes des rĂšglements anciens, sanctionnĂ©s par les autoritĂ©s compĂ©tentes, les habitans de Salies se sont associĂ©s et ont arrĂȘtĂ© 1° Qu’aucun habitant n’aurait droit au partage des eaux qu’autant qu’il rĂ©siderait dans l’enceinte de la ville avec sa famille ; 2° que, dans le cas oĂč un habitant cesserait de rĂ©sider dans la ville, les administrateurs de la fontaine rayeraient son nom de la liste qu’ils sont chargĂ©s de dresser des parts prenants , sauf Ă  le rĂ©tablir au cas de retour. En 1817, les administrateurs rayĂšrent la dame La- taste, mariĂ©e au sieur Saubade, domiciliĂ© dans la commune de Berens, sur le fondement qu’elle ne rĂ©sidait plus dans la ville de Salies. Action en complainte de la part des Ă©poux Saubade pour se faire maintenir dans la pdssession annale de prendre part aux eaux salĂ©es. DĂ©clarĂ©s non recevables par le juge de paix, ils furent plus heureux en appel ; le jugement qui accueillit leur action se fonda sur ce que la vĂ©rification du fait d’exclusion, tirĂ© du dĂ©faut de rĂ©sidence exigĂ©e par les rĂšglements, tenait au fond du droit, c’est- Ă -dire Ă  l’action pĂ©titoire que l’administration pourrait former, et qu’en attendant, la jouissance non interrompue du passĂ© faisait supposer que la dame Saubade se conformait Ă  tout ce qui Ă©tait prescrit parles rĂšglements. — 121 — Sur le pourvoi, cet arrĂȘt fut cassĂ© le 7 juin 1820, parce cjue la possession allĂ©guĂ©e Ă©tant contraire aux rĂšglements ne pouvait ĂȘtre que de tolĂ©rance, abusive et prĂ©caire, dette derniĂšre expression est mĂȘme rĂ©pĂ©tĂ©e plusieurs fois. Nous ferons d’ailleurs observer que nous n’avons citĂ© ces divers arrĂȘts que pour bien faire comprendre le sens et l’étendue du mot prĂ©caire ; mais nous nous rĂ©servons de discuter le fond de la doctrine qu’ils ont consacrĂ©e. C’est dans un sens analogue que le mot prĂ©caire nous paraĂźt avoir Ă©tĂ© employĂ© dans un arrĂȘt rendu le h dĂ©cembre 1837, entre le sieur Framezelle et la dame Lan- gaigne. deux parties litigantes possĂ©daient chacune un moulin. Celui de la dame Lengaigne, situĂ© en aval, Ă©tait mis en mouvement au moyen d’une roue ordinaire, dite Ă  auges. En 1835, la dame Lengaigne changea le systĂšme hydraulique de son moulin et substitua Ă  l’ancienne roue une roue dite Ă  pots. Le sieur Framezelle prĂ©tendit que ce nouveau systĂšme hydraulique le troublait dans la possession de son moulin, en faisant refluer les eaux de la riviĂšre, et en gĂȘnant par lĂ  le mouvement de la roue de son usine ; en consĂ©quence , il demanda, par voie de complainte, devant le juge de'paix, le rĂ©tablissement des lieux dans leur Ă©tat primitif. Le juge de paix s’étant mal Ă  propos dĂ©clarĂ© incompĂ©tent, il intervint, sur appel, un jugement du tribunal civil, qui dĂ©clara Framezelle mal fondĂ© en sa demande, parce que la dame Lengaigne Ă©tait libre d’user des eaux comme bon lui semblait, et que l’usage plus ou moins complet qu’elle avait fait de son droit dans son seul intĂ©rĂȘt et selon sa convenance, n’avait pu faire acquĂ©rir Ă  Framezelle aucune possession limitative des droits de la dame Lengaigne. Framezelle se pourvut en cassation. Mais la cour rejeta le pourvoi, par le motif qu’il rĂ©sultait Ă©videmment des termes du jugement attaquĂ© que la possession invoquĂ©e par le demandeur n’avait pas le caractĂšre exigĂ© par l’art. 23 du Code de procĂ©dure civile, qui veut qu’elle soit Ă  titre non prĂ©caire, pour pouvoir servir de base Ă  une action possessoire. Comme on le voit, dans ces cinq espĂšces , le demandeur en complainte ne possĂ©dait pas pour autrui ; il n’était ni fermier, ni dĂ©positaire ; il prĂ©tendait avoir possĂ©dĂ© pour lui et Ă  titre de propriĂ©taire, et cependant on s’est fondĂ© pour repousser sa demande sur ce que sa possession avait Ă©tĂ© prĂ©caire. M. CarrĂ© remarque, sur l’art. 23 du Code de procĂ©dure , que l’existence des premiers jugements, dans les deuxiĂšme et troisiĂšme espĂšces, imprimait Ă  la possession le caractĂšre d’un acte de tolĂ©rance. Donc celui qui ne possĂšde qu’en vertu d’un tel acte n’a qu’une possession prĂ©caire. D’un autre cĂŽtĂ©, il faut reconnaĂźtre que la loi n’ayant voulu ni pu prĂ©ciser les divers faits, les divers caractĂšres constitutifs de la possession valable, de la possession prĂ©caire, de la clandestinitĂ©, laisse par lĂ  mĂȘme aux juges de paix une bien grande latitude d’apprĂ©ciation, et que ceux-ci pourraient, dans la pratique et suivant les circonstances, ne pas exiger des actes de possession aussi positifs, aussi caractĂ©risĂ©s pour la complainte que le tribunal appelĂ© Ă  prononcer sur la propriĂ©tĂ©. 11 importe de remarquer que les hĂ©ritiers lĂ©gitimes ou — 1-23 instituĂ©s, les donataires et les lĂ©gataires universels ou Ă  titre universel de ceux qui dĂ©tenaient une chose prĂ©cairement, ne sont eux-mĂȘmes que des dĂ©tenteurs prĂ©caires, qui ne peuvent ni possĂ©der, ni prescrire, car ils prennent leur place et les reprĂ©sentent dans tous leurs droits actifs et passifs. Il en serait encore ainsi, lors mĂȘme que les successeurs des dĂ©tenteurs prĂ©caires seraient dans l’ignorance du titre de leurs auteurs, et qu’ils auraient pu les croire propriĂ©taires ; le vice de leur possession se continuerait en eux de maniĂšre Ă  la rendre tout aussi inefficace pour les uns que pour les autres. La gĂ©nĂ©ralitĂ© des art. 2237, 2240 du Code civil, et le principe qui fait de l’hĂ©ritier la continuation de son auteur, ne peuvent laisser lĂ -dessus aucun doute. Mais on ne pourrait appliquer ces principes Ă  l’hĂ©ritier prĂ©somptif qui aurait reçu la chose par donation entre vifs ou testamentaire, et qui renoncerait Ă  la succession pour s’en tenir Ă  la libĂ©ralitĂ© ; car il ne serait pas hĂ©ri- rier Ă©t pourrait invoquer comme tiers l’art. 2239, dont nous dĂ©velopperons bientĂŽt la disposition. Que faudrait-il dĂ©cider si le bail, le terme fixĂ© par l’acte de dĂ©pĂŽt, le contrat d’antichrĂšse, reprĂ©sentĂ©s parle dĂ©fendeur Ă©taient expirĂ©s depuis plus de trente ans? Évidemment la possession serait encore prĂ©caire. Lorsqu’à l’expiration d’un bail Ă©crit, le preneur reste et est laissĂ© en jouissance, il s’opĂšre un nouveau bail par tacite reconduction, art, 1738 du Code civil ; et si le bail est verbal, il n’y a aucun terme fixĂ© Ă  sa durĂ©e; par consĂ©quent, dans l’un et l’autre cas, le dĂ©tenteur conserve toujours la qualitĂ© de fermier. Il en est de mĂȘme en matiĂšre de dĂ©pĂŽt. L’expiration du dĂ©lai ne change pas la nature du contrat lorsque la chose reste en la garde du dĂ©positaire. Art. 2235 et 22/i0 du Code civil. Par arrĂȘt du 21 aoĂ»t 1734, le grand conseil a jugĂ© qu’un hĂ©ritage donnĂ© Ă  emphytĂ©ose devait retourner au bailleur, quoique depuis l’expiration du bail il se fĂ»t Ă©coulĂ© plus de quatre-vingts ans. Plus anciennement, le parlement de Paris avait, par arrĂȘt du 21 avril 1551, condamnĂ© l’évĂȘque de Clermont, malgrĂ© une possession de trois siĂšcles, Ăą restituer Ă  la reine Catherine de MĂ©dicis la seigneurie de la ville de Clermont, parce que le titre originaire de la possession qu’il avait prouvait ue cette seigneurie avait Ă©tĂ© sĂ©questrĂ©e et donnĂ©e en garde Ă  un Ă©vĂȘque de Clermont par le duc de Bourbon, ou par Guy, comte d’Auvergne. Le mĂȘme principe est applicable au droit d’usage, qui, durĂąt-il cent ans, ne saurait confĂ©rer aucun droit de propriĂ©tĂ©. C’est ce qu’a dĂ©cidĂ© Ă©galement le parlement de Paris, par arrĂȘt rendu, en l’annĂ©e 1572, en faveur du duc d’OrlĂ©ans, contre les religieux de Longpont, qui prĂ©tendaient transformer un droit d’usage en un droit de propriĂ©tĂ©, sur le fondement d’une possession trĂšs-ancienne; mais, aprĂšs examen du titre de concession, leur prĂ©tention fut repoussĂ©e. Nous ne croyons pas qu’il y ait de distinction Ă  faire entre les fermiers, dĂ©positaires, antichrĂ©sistes et ceux qui dĂ©tiennent comme administrateurs. Nous pensons que ceux-ci, lors mĂȘme qu’ils continuent de possĂ©der aprĂšs la cessation de leurs fonctions, ne jouissent pas plus que les autres comme propriĂ©taires tant qu’il n’est intervenu aucun changement dans le principe de leur dĂ©tention. Ainsi le tuteur aprĂšs la cessation de la tutelle, le mari aprĂšs la sĂ©paration de biens ou la dissolution du mariage, qu’on ait Ă©tabli le rĂ©gime dotal ou celui de la communautĂ©, le man- dataire et le negotiorumgestor, Ă  l’expiration du mandat ou delagestion d’affaires,ne pourraient passe prĂ©tendre possesseurs Ă  l’effet d’acquĂ©rir la propriĂ©tĂ© et d’intenter les actions pĂ©titoires ou possessoires. La gĂ©nĂ©ralitĂ© des termes de l’art. 2236 qui comprend tous les dĂ©tenteurs prĂ©caires et les motifs qui ont dictĂ© sa disposition nous semblent justifier notre sentiment. Mais nous croyons que cette doctrine vraie, pour les propres de la femme, ne le serait pas pour les biens de la communautĂ©. Ceux-ci seraient prescriptibles Ă  partir de sa dissolution ; aprĂšs une annĂ©e de possession par le mari, celui-ci serait admis Ă  intenter complainte contre ceux qui l’y troubleraient. Il est Ă©vident que si un dĂ©tenteur prĂ©caire intentait une action en complainte, le dĂ©fendeur aurait le droit d’opposer les actes originaires de bail, de dĂ©pĂŽt, d’usage, quelque anciennes qu’en fussent les dates, pour Ă©tablir la prĂ©caritĂ© de la possession. Vainement le demandeur essaierait-il de rĂ©pondre que depuis il a Ă©tĂ© de bonne foi, qu’il a cru au droit de son prĂ©dĂ©cesseur, qu’il a d’ailleurs une possession annale et de bonne foi antĂ©rieure au trouble. Ces circonstances seraient insignifiantes tant qu’il ne serait pas intervenu un acte de la nature de ceux auxquels la loi attribue l’effet d’intervertir la possession. Le juge de paix ne pourrait se dispenser d’apprĂ©cier ces actes de bail ou de dĂ©pĂŽt, puisqu’ils ont trait Ă  la jouissance. Mais si, au lieu d’actes, le dĂ©fendeur invoquait la preuve testimoniale, le juge ne devrait pas l’admettre, parce que ce mode de prouver le bail et le dĂ©pĂŽt est prohibĂ© par nos lois, et qu’il faudrait remonter Ă  une Ă©poque trĂšs-ancienne pour en retrouver des traces toujours fort incertaines. Ceux qui n’ont obtenu qu’une dĂ©tention prĂ©caire de la — 126 — chose et leurs successeurs universels ou Ă  titre universel peuvent purger ce vice de prĂ©caritĂ© par l'interversion de leur titre originaire, et commencer du jour de cette interversion Ă  possĂ©der utilement pour prescrire et pour exercer les actions possessoires ou pĂ©titoires. Nous expliquerons dans le numĂ©ro suivant comment s’opĂšre ce changement de situation, et si la bonne foi en est nĂ©cessairement un des Ă©lĂ©ments constitutifs. Enfin les dĂ©tenteurs prĂ©caires peuvent, aux termes de l’art. 2239 du '.ode civil, consentir Ă  des tiers des actes d’aliĂ©nation qui, s’ils n’ont pas l’effet immĂ©diat de leur transmettre la propriĂ©tĂ©, servent cependant de base Ă  une possession qui, continuĂ©e pendant le temps fixĂ© par le lĂ©gislateur, a le double effet d’engendrer la prescription et d’autoriser les actions possessoires et pĂ©titoires qui s’y rattachent; ils font ainsi pour autrui plus qu’ils ne peuvent pour eux-mĂȘmes. Nous renvoyons Ă©galement au numĂ©ro suivant les dĂ©veloppements auxquels nous croyons devoir nous livrer Ă  ce sujet. § II. Bonne et mauvaise foi dans la possession. Nous allons examiner dans cet article s’il est nĂ©cessaire que le demandeur en complainte ait une possession de bonne foi. Parmi les auteurs anciens qui ont Ă©crit sur la matiĂšre, nous ne voyons que Pothier qui ait prĂ©vu la difficultĂ©. Dans son introduction Ă  la Coutume d'OrlĂ©ans, titre 2, n° 50, dans ses TraitĂ©s de procĂ©dure, cliap. G, question 253, et de la Possession, n° 3, il dĂ©cide que la bonne foi n’est pas nĂ©cessaire. La maniĂšre dont il s’exprime fait supposer qu’il n’admet aucune exception Ă  ce principe. M. le prĂ©sident Henrion de Pansey, VI. .Gui- — 127 — chard, ainsi que la plupart des auteurs modernes, ne s’expliquent pas Ă  cet Ă©gard. M. Brossard, n° s 157 Ă  163, paraĂźt supposer la nĂ©cessitĂ© de la bonne foi ; mais M. Au- lanier, n° 19, et M. CarrĂ©, sont d’une opinion contraire. Ce dernier semble pourtant admettre une exception ; il s’exprime ainsi, 2 e vol., p. 399 De ce que la loi n’exige autre chose pour autoriser l’action possessoire, si ce n’est qu’elle ait le caractĂšre que nous avons dĂ©terminĂ© page 46 etsuiv., il s’ensuit, gĂ©nĂ©ralement parlant, que la bonne foi n’est point une des conditions nĂ©cessaires pour que cette action soit recevable. Peu importe donc de savoir si le dĂ©tenteur est de bonne ou de mauvaise foi; il ne peut ĂȘtre question que du fait de la possession. » Ces diverses opinions qui, au premier abord, semblent un peu contraires, peuvent cependant se concilier aisĂ©ment. Le principe gĂ©nĂ©ral est en effet que la bonne foi, nĂ©cessaire en certains cas pour l’acquisition de la propriĂ©tĂ©, n’est pas exigĂ©e du possesseur annal qui intente l’action possessoire; il ne souffre que peu d’exceptions que nous aurons soin de signaler. L’art. 2262 du Code civil porte Toutes les actions, tant rĂ©elles que personnelles, sont prescrites par trente ans, sans que celui qui allĂšgue cette prescription soit obligĂ© d’en rapporter un titre, oĂč qu’on puisse lui opposer l’exception dĂ©duite de la mauvaise foi. » L’art. 2265 est ainsi conçu Celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble, en prescrit la propriĂ©tĂ© par dix ans, si le vĂ©ritable propriĂ©taire habite dans le ressort de la cour royale, dans l’étendue de laquelle l’immeuble est situĂ©, et par vingt ans s’il est domiciliĂ© hors dudit ressort. » pt l’art. 2268 ajoute La lionne foi est toujours — 128 — prĂ©sumĂ©e, et c’est Ă  celui qui allĂšgue la mauvaise foi Ă  la prouver. » Enfin, la bonne foi, d’aprĂšs l’art. 550, consiste Ă  possĂ©der comme propriĂ©taire en vertu d’un titre dont on ignore les vices. C’est pourquoi la bonne foi du possesseur cesse du moment oĂč ces vices lui sont connus. Qui a quolibet Ă©mit, quod putat ipsius esse, berna fide Ă©mit-, I.. 27, ff. de conlrah. empt. Bona' fidei emptor esse videtur, qui ignoravit rem alienam esse, aut putavit eum qui vendidit jus vendendi habere L 109, ff. de verbor. signifie., celpii ne s’entend toutefois que de l’erreur de fait, et non de l’erreur de droit nunquam in usucapionibus juris error possessori prodest. L. 31 ,ff. deusurp. Ce n’est pas qu’en fait on soit rĂ©ellement de mauvaise foi parce qu’on erre sur le droit L. 25, § 6, ff. de petit, hƓred., puisqu’il arrive souvent qu’on l’ignore ; mais comme il n’aurait pas Ă©tĂ© possible de reconnaĂźtre la vĂ©ritĂ© ou la faussetĂ© de l’allĂ©gation de cette ignorance, et que chacun peut recourir aux lumiĂšres de ceux qui connaissent les lois qui d’ailleurs sont rendues publiques, c’est une maxime d’ordre et d’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral que nul ne peut allĂ©guer qu’il les ignore; et c’est ce qu’observe avec beaucoup de raison Houard Dictionnaire du droit normand, au mot prescription L’ignorance de la loi, dit-il, loin d’ĂȘtre une excuse, est un crime on expose la sociĂ©tĂ© en laquelle on vit au trouble et Ă  la confusion, par sa nĂ©gligence Ă  s’assurer, dans les divers actes qu’on fait, des rĂšgles qu’elle a Ă©tablies pour qu’ils fussent faits valablement et Ă©quitablement. » Aussi igilorantia juris non prodest adquirere volentibus. L. 7, ff. de juris et fadi ignorantia. Au surplus, la bonne foi est exigĂ©e de l’acquĂ©reur seul, ainsi que cela rĂ©sulte des diverses lois ro- — 129 — maines ou françaises que nous venons de rappeler; il n’est pas en outre nĂ©cessaire qu’elle existe de la part du vendeur. Ajoutons que la bonne foi existant lors de l’acquisition, profiterait au sous-acquĂ©reur mĂȘme de mauvaise foi, car il suffit quelle existe dans l’origine, et ce sous-acquĂ©reur succĂšde Ă  la bonne foi de son vendeur. Si de- functus bona fide emerit, vsucapietur res quamvis hƓres sciĂątalienam esse. Inst., tit. 6, de nsucap. et long. temp. prescript., et loi *2, § 19, ff. pro emp. Il en serait autrement du cas oĂč le vĂ©ritable propriĂ©taire croirait par erreur au droit des divers possesseurs, si ceux-ci n’y croyaient pas. Il ne faut pas confondre les conditions dĂ©terminĂ©es par le Code pour constituer la possession avec la bonne foi. line possession peut ĂȘtre publique, paisible, non Ă©quivoque, exempte de tolĂ©rance, de familiaritĂ©, Ă  titre de propriĂ©taire, et n’ĂȘtre pourtant pas de bonne foi, d’aprĂšs la dĂ©finition que nous avons donnĂ©e de ce caractĂšre spĂ©cial. Les juges de paix doivent bien se garder de croire que la mauvaise foi du possesseur prouvĂ©e Ă©tablirait que la possession n’a pas eu lieu Ă  titre de propriĂ©taire, A Ă©tÂŁ Ă©quivoque ou prĂ©caire, si d’ailleurs il avait fait tous les actes qui annoncent une propriĂ©tĂ© pleine et entiĂšre. Il faut en outre reconnaĂźtre que la bonne ou mauvaise foi peut exister et ĂȘtre apprĂ©ciĂ©e, indĂ©pendamment de tout acte ou contrat, se rĂ©fĂ©rant Ă  l’origine de la possession. Ainsi un individu possĂšde pleinement un champ, sans qu’on sache comment il est entrĂ© en jouissance. Cependant il n’ignore pas, il a mĂȘme avouĂ© en prĂ©sence de tĂ©moins qu’un autre est propriĂ©taire. MalgrĂ© cela il peut intenter l’action pos- sessoire ; Ă  plus forte raison le peut-il si le vĂ©ritable propriĂ©taire lui est inconnu. y — 130 — Supposons maintenant le cas oĂč il existe des actes. Nous avons vu que les dĂ©tenteurs prĂ©caires et leurs hĂ©ritiers qui ne pouvaient jamais possĂ©der pour eux-mĂȘmes, Ă©taient cependant capables de donner Ă  des tiers un titre servant de base Ă  la possession. Lorsqu’un tuteur, un mari, un dĂ©positaire, un fermier ont vendu les biens dont ils Ă©taient dĂ©tenteurs Ă  ces divers titres, mais en annonçant dans l’acte qu’ils leur appartenaient, ou sans rien dire et sans prendre aucune qualitĂ©, l’acquĂ©reur est probablement de bonne foi, et prescrit par dix ou vingt ans qui, pour les biens dotaux et ceux du pupille, ne courent que de la dissolution du mariage, de la sĂ©paration de biens ou de la cessation de la miuoritĂ© ; mais si l’acte exprime que la chose est la propriĂ©tĂ© de la femme, du pupille, ou si, sans le dire expressĂ©ment, les dĂ©tenteurs ont traitĂ© en qualitĂ© de mari, de tuteur, fermier; si un antichrĂ©siste vend l’immeuble de son dĂ©biteur, en indiquant celui-ci comme propriĂ©taire, hypothĂšse qui, nous en convenons, doit se rĂ©aliser rarement, et que nous n’exposons ici que pour mieux faire ressortir toute la portĂ©e du principe; que l’acquĂ©reur, dans ces diverses hypothĂšses, ait par suite du contrat, du juste titre qui lui a Ă©tĂ© souscrit, possĂ©dĂ© pendant un an, et qu’il soit troublĂ© par le propriĂ©taire, pourra-t-il intenter la complainte? Oui, sans doute, car il est certain que ce contrat çst inutile au possesseur, puisqu’un titre n’est exigĂ© que pour la prescription de dix ou vingt ans, et que le titre portant en lui-mĂȘme la preuve de sa mauvaise foi, ne peut lui servir Ă  rien ; mĂąis il peut acquĂ©rir la propriĂ©tĂ© par une possession de trente ans pour laquelle il n’a besoin ni de titre ni de bonne foi. Il n’a donc aucun intĂ©rĂȘt Ă  le produire. Soit que par la suite il prĂ©- 131 — tende avoir prescrit par dix ou vingt ans, soit qu’il invoque la possession de trente ans, peu importe quant Ă  l’action possessoire qui n’est fondĂ©e que sur une jouissance annale. Mais s’il ne le produit pas, te dĂ©fendeur ne peut-il pas 1e reprĂ©senter, pour Ă©tablir que la possession de son adversaire est prĂ©caire? que la date rĂ©cente de ce titre s’oppose Ă  ce qu’il ait acquis par trente ou mĂȘme par dix ou vingt ans? Nous ne 1e croyons pas ; car, si malgrĂ© l’existence d’un acte qui prouve la connaissance de la part de l’acquĂ©reur du dĂ©faut de qualitĂ© du vendeur, il peut nĂ©anmoins prescrire, il faut reconnaĂźtre qu’il peut valablement former la complainte qui est admissible dans toutes les matiĂšres prescriptibles. Gardons-nous de confondre 1e cas oĂč 1e demandeur a joui Ă  titre de propriĂ©taire, et pour lui-mĂȘme, avec celui oĂč il n’a joui que comme fermier, sĂ©questre, administrateur. Dans 1e premier cas il a un titre qui, bon ou mauvais au fond, n’en est pas moins par sa nature capable avec 1e temps de transfĂ©rer la propriĂ©tĂ©; par juste titre, la loi n’entend pas l’acte Ă©manĂ© du vĂ©ritable propriĂ©taire, puisque c’est contre lui quelle autorise la prescription, mais un titre qui soit fait pour transmettre la propriĂ©tĂ© comme vente, Ă©change, donation. Dans le second cas, tes actes de bail, de sĂ©questre, prouvent que celui qui dĂ©tient ne possĂšde pas personnellement, et n’a aucun droit de domaine ce n’est que dans ce cas que le dĂ©fendeur Ă  la complainte peut opposer tes actes. Il ne faut pas d’ailleurs perdre de vue la nature de l’action en complainte. Elle est uniquement fondĂ©e sur l’annĂ©e de possession qui a prĂ©cĂ©dĂ© 1e trouble ; toute possession antĂ©rieure du demandeur ou du dĂ©fendeur est en gĂ©nĂ©ral sans objet. Le juge de paix ne 132 — doit pas s’y arrĂȘter. L’apprĂ©ciation des titres de propriĂ©tĂ© n’est pas dans ses attributions, et si quelquefois il peut les consulter, comme nous l’expliquerons ultĂ©rieurement, ce n’est que pour dĂ©terminer le caractĂšre d’une possession douteuse, pour s’éclairer Ă  cet Ă©gard. Le titre, s’il Ă©tait produit, lui prouverait que c’est bien comme propriĂ©taire que le demandeur a joui, puisqu’il a acquis. Il ne pourrait s’occuper de la validitĂ© du contrat en ce sens qu’il lui serait interdit d’examiner si le vendeur avait rĂ©ellement des droits ; ce serait cumuler le pĂ©titoire avec le possessoire. Ce que nous venons de dire s’applique Ă  plus forte raison Ă  l’acquĂ©reur des biens non dotaux de la femme, des absents, d’un dĂ©posant; s’il avait une possession annale, antĂ©rieure au trouble, il pourrait intenter la complainte, sans crainte d’ĂȘtre repoussĂ© par l’exhibition du titre qui lui aurait Ă©tĂ© consenti. Nous examinerons plus bas s’il en serait demĂȘmerela- tivementĂ  l’acquĂ©reur des biens d’un mineur, d’un interdit; mais en supposant qu’une exception fĂ»t possible dans ce cas, elle ne serait pas tirĂ©e de la mauvaise foi de l’acquĂ©reur ; elle aurait sa base dans la nature des biens appartenant Ă  ces personnes. AssignĂ©s au possessoire, le mineur, l’interdit pourraient, toujours dans la mĂȘme supposition, produire leurs titres de propriĂ©tĂ© pour se dĂ©fendre de la demande en maintenue, et pour Ă©tablir que la possession de leur adversaire est vicieuse. Ce ne serait que dans le cas oĂč ils n’auraient pas de titres ou de possession antĂ©rieure, que le demandeur serait Ă©coutĂ©, parce que rien n’établirait alors que c’est d’un bien de mineur ou d’interdit qu’il s’agit. Nous pensons toutefois qu’alors mĂȘme qu’ils produi- 133 — l’aient des titres de propriĂ©tĂ©, la complainte devrait ĂȘtre incontestablement accueillie'si le demandeur opposait un titre translatif de propriĂ©tĂ© ayant dix ans d’existence avec bonne foi depuis la cessation de la minoritĂ© ou de l’interdiction , ou si cette cessation datait de trente ans. Il existe, comme on l’a vu, une bien grande diffĂ©rence entre le fermier qui, aprĂšs avoir joui de la ferme en vertu du bail, voudrait intenter complainte, et celui qui ayant acquis de ce fermier aurait fait pcndantl’annĂ©e antĂ©rieure au trouble tous les actes de possession que la propriĂ©tĂ© autorise. Ce dernier aurait agi Ă  titre de propriĂ©taire. Peu importe qu’il sĂ»t ou qu’il pĂ»t craindre que le vĂ©ritable propriĂ©taire ne vĂźnt Ă  l’attaquer, puisque, comme nous l’avons dĂ©jĂ  dit, c’est la qualitĂ© en laquelle on possĂšde, et non la bonne foi et la confiance que l’on a de l’existence lĂ©gale de cette qualitĂ© qui dĂ©termine la prescription trentenaire ; par la publicitĂ© des faits de possession annale sans opposition du vĂ©ritable propriĂ©taire, il s’est placĂ© dans une situation que la justice doit protĂ©ger. Mais quant au fermier, au dĂ©positaire, la qualitĂ© est certaine par le bail, le dĂ©pĂŽt. C’est Ă  ceux-ci seulement, ainsi que l’expliquent Pothier, TraitĂ© de la prescription, n° 173, M. Delvincourt, sur l’art. 2262, et M. Rogron dans son Code civil annotĂ©, que s’applique la maxime Melius non habere titulum, quant habere vitiosum. Nous avons dit que ceux qui dĂ©tiennent une chose prĂ©cairement, ainsi que leurs hĂ©ritiers et reprĂ©sentants universels ou Ă  titre universel, ne peuvent la possĂ©der valablement ni la prescrire par quelque laps de temps que ce soit, mĂȘme .aprĂšs le terme assignĂ© Ă  leur dĂ©tention prĂ©caire; mais cette rĂšgle n’est pas sans exception. L’article 2238 Ă©tablit en effet qu’ils peuvent prescrire, si le — 134 — titre de leur possession se trouve interverti, soit par une cause venant d’un tiers, soit par la contradiction qu’ils ont opposĂ©e au droit du propriĂ©taire. Cet article contient, comme on voit, deux modes diffĂ©rents d’interversion de possession 1° par une cause venant d’un tiers; 2° par la contradiction opposĂ©e aux droits du propriĂ©taire. Ie ces deux modes, le premier existait dĂ©jĂ  dans l’ancien droit, tandis que le second peut paraĂźtre une innovation et une dĂ©rogation Ă  la maxime nemopotest sibi mularc causant possessionis. L. 3, § 19, ff. de acquirendĂą vel amitt. possess. La loi n’exige pas que l’acte Ă©manĂ© du tiers soit notifiĂ© par le dĂ©tenteur prĂ©caire, Ă  celui pour le compte duquel il dĂ©tenait la chose et l’on ne pourrait ĂȘtre plus exigeant que le lĂ©gislateur. Nous ne saurions donc partager l’opinion de M. Vazeille, qui semble faire une rĂšgle et une nĂ©cessitĂ© absolue de cette notification ; d’un autre cĂŽtĂ©, la contradiction opposĂ©e aux droits du propriĂ©taire peut rĂ©sulter de simples faits, de travaux, de constructions qui d’ordinaire caractĂ©risent et supposent la propriĂ©tĂ©; mais il faudrait, d’aprĂšs les termes mĂȘmes de la loi, qu’ils aient Ă©tĂ© connus de ce propriĂ©taire. Les faits et la connaissance qu’en aurait eus le propriĂ©taire pourraient ĂȘtre prouvĂ©s mĂȘme par tĂ©moins; ici s’appliqueraient indubitablement les principes gĂ©nĂ©raux en matiĂšre de preuve testimoniale. M. Delvincourt donne cet exemple du premier mode d’interversion J’ai pris un fonds Ă  bail de Paul ; tant que les choses restent dans cet Ă©tat, je ne puis prescrire, eussĂ©-je Ă©tĂ© cinquante ans sans payer de loyers. Mais Jacques se prĂ©sente comme Ă©tant propriĂ©taire de ce mĂȘme fonds, n’importe Ă  quel titre. 11 me le vend je puis prĂšs- r — 135 — crire contre Paul Ă  dater du jour de la vente qui m’a Ă©tĂ© faite par Jacques. » Observons en passant que l’acquisition faite d’un tiers par le dĂ©tenteur prĂ©caire est sans doute fondĂ©e sur ce qu’il a pu croire avoir Ă©tĂ© originairement dans l’erreur en reconnaissant le bailleur comme propriĂ©taire, et que les droits de celui qui lui a vendu lui ont paru mieux Ă©tablis. L’auteur pense qu’ici la bonne foi est nĂ©cessaire. Quid, dit-il, s’il Ă©tait prouvĂ© que le fermier savait que Jacques n’était pas propriĂ©taire? Je pense que dans ce cas particulier la prescription ne peut avoir lieu mĂȘme par trente ans. 11 est Ă©vi^nt, en effet, qu’on regarderait Jacques comme un homme de paille apostĂ© par le fermier, et le principe de la possession serait censĂ© alors interverti par le fermier seul, ce qui rentrerait dans le cas de l’art. 2240. » M. Vazeille, TraitĂ© des prescriptions, dit aussi "que le fermier ne peut, Ă  l’aide d’un tiers complaisant, s’affranchir de ses obligations et possĂ©der pro suo ; » puis il ajoute qu’on peut invoquer l’art. 2265 et s’en tenir Ă  la rĂšgle gĂ©nĂ©rale qui proscrit toutes conventions et toutes combinaisons frauduleuses. Les juges, dit-il encore, examinant le nouveau titre, recherchant s’il est l’Ɠuvre de la bonne foi ou de la fraude, pĂšseront toutes les circonstances qui l’ont amenĂ© et qui l’ont suivi. » M. Vazeille ne dĂ©cide pas aussi positivement que M. Delvincourt, que la mauvaise foi du dĂ©tenteur prĂ©caire dans l’acceptation d’un titre venant d’un tiers empĂȘche mĂȘme la prescription trentenaire. Il paraĂźt, par la citation qu’il fait de l’art. 2265, qu’il ne s’-explique que relativement Ă  la prescription de dix et vingt ans. Cependant les raisons sur lesquelles il s’appuie nous semblen * — 136 — devoir s’étendre Ă  la prescription de trente ans. M. Trop- long, de lu Prescription, n° 507, est d’un avis contraire; mais nous ne saurions partager son opinion. Aucun changement n’est en effet survenu dans la position du dĂ©tenteur prĂ©caire, puisque, ayant d’abord acceptĂ© ce titre de celui qu’il a reconnu propriĂ©taire, il ne trouve dans l’acte postĂ©rieur du tiers rien qui y soit opposĂ©; au contraire, la conviction de l’absence de tout droit de la part de celui-ci ne peut qu’ajouter Ă  l’opinion qu’il s’était faite du droit du premier. On n’aperçoit dans la rĂ©alitĂ© qu’un fait frauduleux du dĂ©tenteur prĂ©caire lui-mĂȘme. Le principe que la fraude faitt-exception Ă  toutes les rĂšgles et la disposition de l’art. 22/jO du Code civil qui veut que nul ne puisse par son seul fait changer la causĂ© de sa possession, nous semblent devoir ici recevoir leur application. M. CarrĂ©, dans un passage de la page 399, que nous avons rapportĂ© au commencement de cet article, semble partager notre sentiment. Il suppose une exception Ă  la rĂšgle qui dispense le demandeur en complainte de la condition de bonne foi, et cette exception ne peut s’entendre que du cas qui nous occupe en ce moment. M. Belime adopte d’une maniĂšre formelle notre solution. Nous avons dĂ©veloppĂ© tout rĂ©cemment cette doctrine dans une consultation relative Ă  une affaire fort importante. Relativement Ă  l’interversion de titre par la contradiction opposĂ©e aux droits du propriĂ©taire , M. Delvincourt s'exprime ainsi u II faut qu’il y ait eu contradiction. Ainsi, comme nous venons de le dire, un fermier, eĂ»t-il Ă©tĂ© cinquantĂȘ ans sans payer de fermages, n’a point interverti son titre s’il n’a pas Ă©tĂ© poursuivi. Seulement l’action en paiement est prescrite pour toutes les annĂ©es 137 — antĂ©rieures aux cinq derniĂšres art. *2277. Mais si, assignĂ© en paiement des fermages, il a refusĂ© se prĂ©tendant propriĂ©taire, il a interverti, et peut dĂšs lors prescrire pourvu que le propriĂ©taire ne fasse aucunes poursuites ultĂ©rieures. On ne peut dire qu’il s’est changĂ© Ă  lui seul le titre de sa possession. Le propriĂ©taire est censĂ© y avoir concouru par la cessation de poursuites Qui non prohi- het, cum prohibere possit, consent ire videtur. » D’aprĂšs ce que nous avons dĂ©jĂ  dit, on pourrait encore trouver la contradiction en certains cas dans des dispositions, travaux et constructions que le propriĂ©taire seul est censĂ© vouloir et pouvoir exĂ©cuter ; mais il faudrait aussi qu’ils aient eu lieu avec intention manifestĂ©e au propriĂ©taire ou Ă  son reprĂ©sentant d’opposer une contradiction rĂ©elle aux droits de celui-ci. Ici il n’y a pas Ă  rechercher, connue pour le premier genre d’interversion, si le dĂ©tenteur est de bonne ou de mauvaise foi dans la contestation du droit du propriĂ©taire, puisque c’est contradictoirement avec lui que cette contestation a lieu. Il nous reste Ă  faire l’application de ces principes aux actions possessoires. Le dĂ©tenteur prĂ©caire qui aura acquis d’un tiers et sera en possession de bonne foi depuis un an avant le trouble, ou qui depuis le mĂȘme temps aura fait des actes ou des travaux emportant contradiction aux droits du propriĂ©taire, pourra certainement intenter la complainte contre quiconque le troublerait, mĂȘme contre celui dont il tenait originairement sa dĂ©tention ; on ne pourrait lui opposer que, ne s’étant pas Ă©coulĂ© dix, vingt ou trente ans depuis ces faits, il est impossible qu’il ait acquis la propriĂ©tĂ© par la prescription, car ce serait cumuler le pĂ©titoirc et le possessoire. 11 rĂ©pondrait d’ailleurs que le bail, le dĂ©pĂŽt, l’antichrĂšse supposaient la pro- — 138 — priĂ©tĂ©, mais ne la prouvaient pas ; qu’il Ă©tait incertain lequel des deux Ă©tait rĂ©ellement propriĂ©taire ou de celui qui n’avait confĂ©rĂ© qu’une dĂ©tention prĂ©caire ou de celui qui avait vendu, et qu’en attendant que le dĂ©bat fĂ»t jugĂ© sur ce point, il importait de conserver ou de rendre la possession Ă  celui qui l’avait eue pendant l’annĂ©e antĂ©rieure au trouble. Si le dĂ©fendeur produisait le titre prĂ©caire pour repousser l’action en complainte, le demandeur opposerait avec succĂšs ses actes d’acquisition ou de contradiction ; en les examinant, le juge de paix ne ferait qu’apprĂ©cier le caractĂšre, la qualitĂ© de la possession et ne sortirait nullement de ses attributions, pas plus que s’il s’agissait d’apprĂ©cier des actes ayant trait Ă  la jouissance, par exemple, des baux qui servent toujours Ă  Ă©tablir la possession annale comme h combattre le fermier qui poursuivrait en son propre nom. Toutefois, ce que nous avons dit de la nĂ©cessitĂ© de la bonne foi de la part du dĂ©tenteur prĂ©caire qui a obtenu un acte d’un tiers pour opĂ©rer l’interversion de son titre originaire, doit ĂȘtre entendu sainement et appliquĂ© avec discernement; puisqu’il suffit, d’aprĂšs l’art. 2269, que la bonne foi ait existĂ© au moment de l’acquisition, on ne pourrait opposer la mauvaise foi survenue postĂ©rieurement, eĂ»t-elle mĂȘme durĂ© pendant toute l’annĂ©e immĂ©diatement antĂ©rieure au trouble ; cela est conforme Ă  la maxime Muta fides superveniens non interrompit usuca- pionem. Il faudrait toujours remonter Ă  l’époque oĂč la possession a commencĂ© pour en apprĂ©cier la valeur, et par consĂ©quent cette possession serait inefficace si le dĂ©tenteur avait Ă©tĂ© de mauvaise foi dans l’origine, bien que — 139 — pendant l’annĂ©e qui a prĂ©cĂ©dĂ© le trouble il eĂ»t pu ĂȘtre de bonne foi ; cette derniĂšre circonstance ne lui serait d’aucun secours s’il ne s’y joignait un nouveau titre ou un acte d’interversion. La bonne foi des hĂ©ritiers du dĂ©tenteur prĂ©caire qui croiraient Ă  la sincĂ©ritĂ© de l’acte Ă©manĂ© du tiers ne les mettrait pas Ă  l’abri de l’application de l’art. 2237 du Code civil. Il en serait ainsi mĂȘme en cas de vente ou de toute autre transmission de sa part dans la chose que l’un des hĂ©ritiers consentirait Ă  l’autre. En rĂšgle gĂ©nĂ©rale, du reste, lorsque la bonne foi est requise pour faire acquĂ©rir une possession valable, et que le tiers invoque la possession de son auteur, la mauvaise foi de celui-ci lui est nuisible, s’il est son successeur universel ou Ă  titre universel ; mais non s’il est successeur Ă  titre particulier, et alors il peut argumenter de sa bonne foi personnelle qui serait sans consĂ©quence dans le premier cas. Dunod, TraitĂ© des prescriptions, p. l ro , chap. 8, p. /i3 et hh ; MM. Delvincourt, Troplong, Vazeille; M. Favardde Langlade, RĂ©p., Y 0 Prescription, p. 411. Le contrat appelĂ© constitut, par lequel le dĂ©tenteur prĂ©caire en vendant prend la chose Ă  bail ou s’en rĂ©serve l’usufruit, n’est pas considĂ©rĂ© comme fait de bonne foi ;’il ne peut profiter ni au vendeur ni Ă  l’acquĂ©reur. Il n’opĂšre aucun changement dans leur situation Tiraqueau, Constitut posses ., p. 3 ; DargentrĂ©, CoĂ»t, bret., art. 265, ch. 2 et 6. Mais du jour oĂč la jouissance du dĂ©tenteur prĂ©caire cesserait et oĂč celle de l’acquĂ©reur commencerait, celui-ci aurait-il une possession valable et servant de base Ă  la prescription? Non, sans doute. — HO — Nous ne croyons pas que le dĂ©tenteur prĂ©caire qui aurait donnĂ© la chose Ă  l’un de ses enfants ou Ă  des Ă©trangers pĂ»t trouver une cause d’interversion de sa possession primitive dans le retour qui en aurait lieu en ses mains, soit par application de l’art. 7/i7, soit en vertu de l’art. 951 du Code civil. Nous croyons que l’on pourrait, dans le sens de l’article 2238, considĂ©rer comme tiers celui auquel plus tard les dĂ©tenteurs prĂ©caires seraient appelĂ©s Ă  succĂ©der et que l’acte venant de lui tel que donation entre vifs, vente ou Ă©change, Ă©tablirait une interversion trĂšs-valable. Car si, aux termes de l’art. 2237 les hĂ©ritiers des dĂ©tenteurs prĂ©caires ne peuvent recevoir de ceux-ci un titre capable de servir de base Ă  la prescription, la loi n’a pas ajoutĂ© que ces derniers n’en pourraient accepter de ceux dont ils hĂ©riteraient et qui, avant l’ouverture de la succession, sont nĂ©cessairement des tiersĂ l’égard delĂ  personne qui a concĂ©dĂ© la jouissance prĂ©caire. Nous avons dĂ©jĂ  dit que l’acquĂ©reur, le donataire ou lĂ©gataire Ă  titre particulier des dĂ©tenteurs prĂ©caires pouvaient prescrire aux termes de l’art. 2239 du Code civil, lors mĂȘme qu’ils Ă©taient hĂ©ritiers prĂ©somptifs, pourvu qu’ils renonçassent Ă  la succession. Nous verrions un titre particulier susceptible de recevoir l’application de cet article dans l’option faite pour les biens prĂ©sents par un donataire de biens prĂ©sents et Ă  venir qui userait ainsi de la facultĂ© Ă©tablie par l’art. 108A, puisqu’il ne serait pas hĂ©ritier, et mĂȘme dans une dĂ©mission de biens, pourvu que, dans ce dernier cas, celui en faveur duquel elle aurait Ă©tĂ© faite renonçùt Ă  la succession pour s’en tenir au bĂ©nĂ©fice de la dĂ©mission. Mais si le contrat consenti par le dĂ©tenteur prĂ©caire Ă  — U1 — un tiers Ă©tait rĂ©solu ou annulĂ©, celui-ci resterait sans aucun droit ; il ne pourrait mĂȘme prescrire et la possession serait censĂ©e n’avoir jamais changĂ© de mains ; la dĂ©tention prĂ©caire n’aurait pas cessĂ©. Le vĂ©ritable propriĂ©taire n’aurait rien perdu. Il en serait de mĂȘme si le titre que le tiers a donnĂ© Ă©tait nul ou rĂ©solu ; il serait censĂ© n’avoir jamais existĂ© ; en consĂ©quence, il n’y aurait pas d’interversion; le dĂ©tenteur prĂ©caire resterait avec son premier titre. Mais le juge de paix pourrait-il rechercher la nullitĂ©, et s’en servir pour rejeter la Complainte? L’affirmative est Ă©vidente. Sans le second titre, la possession du demandeur serait inefiicace. C’est lui qui le soumet au juge pour dĂ©truire le vice originaire de cette possession ; il faut bien que le juge puisse l’apprĂ©cier sans nuire toutefois Ă  l’action pĂ©titoire. S’il en Ă©tait autrement, on pourrait tous les jours, pour Ă©luder la loi, se faire passer un contrat qui n’engagerait Ă  rien, parce qu’on y omettrait une formalitĂ© essentielle ; on s’en servirait pour se faire maintenir provisoirement en possession, et devenir mĂȘme propriĂ©taire, parce que le dĂ©fendeur ne pourrait peut-ĂȘtre au pĂ©titoire faire de preuve suffisants de ses droits. § 3. Possession continue et non interrompue. On distingue la possession continue, non interrompue et non suspendue. Au premier aspect, les deux expressions continue et non interrompue sembleraient rendre la mĂȘme idĂ©e; mais comme il ne faut rien supposer d’inu- \ tile dans la loi, il est indispensable de trouver un sens particulier Ă  chacune d’elles. Le mot continu nous semble '! destinĂ© manifester l’intention du lĂ©gislateur, d’exiger — U2 — une rĂ©union de circonstances et non un fait isolĂ©, et une possession qui n’ait pas Ă©tĂ© abdiquĂ©e ou abandonnĂ©e par celui qui l’exerce. Il est gĂ©nĂ©ral et convient Ă  tous les droits, Ă  tous les biens, Ă  la propriĂ©tĂ© comme aux servitudes, puisqu’aux termes de l’art. 2228 du Code civ., la possession est la dĂ©tention d’une chose ou d’un droit. DiffĂ©rentes causes suspendent la prescription, t’effet de la suspension est bien distinct de celui de la discontinuitĂ© et de l’interruption. Lorsqu’il y a discontinuitĂ©, il n’y a jamais eu de possession. Quand il y a interruption, la possession antĂ©rieure, quoique ayant eu une existence rĂ©elle et lĂ©gale, est cependant aussi, Ă  partir de l’interruption, considĂ©rĂ©e comme n’ayant jamais existĂ© ; tandis que, dans la suspension , le temps antĂ©rieur s’ajoute au temps couru aprĂšs la cessation de la suspension ; c’est seulement la pĂ©riode de la suspension qui est inutile. Les art. 2251 Ă  2259 du Code civil dĂ©terminent les diffĂ©rents cas de suspension. Celui qui, avant la cause de suspension, n’a pas une annĂ©e de possession, ne peut la complĂ©ter dĂšs que cette cause survient, et il ne peut intenter l’action possessoire; la possession appartient ensuite Ă  un autre qui, aprĂšs une annĂ©e de jouissance, pourra, par lui-mĂȘme ou par l’entremise de son reprĂ©sentant, intenter cette action. Du reste, la continuitĂ© s’applique Ă  celui qui possĂšde, tandis que l’interruption indique le fait d’un autre qui aurait apportĂ© quelque obstacle Ă  cette possession. C’est Ă  celui qui invoque la possession annale comme fondement de la complainte, Ă  prouver positivement quelle a Ă©tĂ© continue ; au contraire, c’est Ă  celui contre qui une telle U3 — justification est faite, Ă , Ă©tablir que cette possession a Ă©tĂ© interrompue soit naturellement, lorsque le possesseur a Ă©tĂ© troublĂ© par celui qu’il attaque ou mĂȘme par un tiers, soit civilement, par une rĂ©clamation judiciaire. D’aprĂšs l’art. 688 du Code civil, les servitudes continues sont celles dont l’usage est ou peut ĂȘtre continuel, sans avoir besoin du fait actuel de l'homme; tels sont les conduites d’eau, les Ă©goĂ»ts, les vues, parce qu’en effet, quoique l’eau ne coule pas toujours, quoiqu’on ne regarde pas constamment, cependant les choses restant dans le mĂȘme Ă©tat, et l’écoulement, ainsi que l’exercice du prospect, pouvant avoir lieu Ă  chaque instant, au moment oĂč l’on s’y attend le moins, la gĂȘne, la charge sont les mĂȘmes pour le propriĂ©taire du fonds servant, soit que le crĂ©ancier en fasse usage, soit qu’il ne s’en serve pas. Les servitudes discontinues sont celles qui ont besoin du fait actuel de l’homme pour ĂȘtre exercĂ©es ; tels sont les droits de passage, puisage, pacage. La diffĂ©rence des actes de possession des unes et des autres est essentielle; quoique, depuis un an, l’eau n’ait pas coulĂ©, ou qu’on n’ait pas regardĂ© par la fenĂȘtre, si cependant l’égoĂ»t, la conduite d’eau, lafenĂȘtre ont existĂ©, la possession de la servitude est incontestable ; elle a Ă©tĂ© conservĂ©e par la servitude elle-mĂȘme, tandis que, si le passage, le pacage, le puisage n’ont pas Ă©tĂ© exercĂ©s pendant un an, la possession peut ĂȘtre perdue. La distinction entre la possession continue et celle qui ne l’est pas, a une utilitĂ© spĂ©ciale en matiĂšre de servitudes; si pour l’acquisition de la propriĂ©tĂ© d’un fonds par prescription le fait et l’intention sont nĂ©cessaires dans le principe, l’intention sans le fait suffit dans la suite pour la conserver; quoique le dernier fait de possession remonte Ă  une Ă©poque trĂšs-ancienne, la possession n’en subsiste pas moins tant qu’un tiers ne s’en est pas emparĂ©. Cela s’applique Ă  plus forte raison aux servitudes continues et apparentes qui se conservent par l’existence matĂ©rielle des ouvrages qui les constituent; mais il en est autrement des servitudes discontinues, qui, ainsi que nous le verrons, se perdent par cela seul qu’on a cessĂ© de les exercer, et que le dernier fait d’usage date de plus de trente ans. le ce que nous venons de dire, il rĂ©sulte que, bien que la continuitĂ© de la possession soit exigĂ©e pour l’acquisition et la conservation de la propriĂ©tĂ© et des servitudes, les caractĂšres en sont un peu diffĂ©rents, suivant qu’il s’agit de l’un ou de l’autre objet. Ainsi, pour acquĂ©rir la possession d’une chose, il faut la volontĂ© jointe au fait delĂ  dĂ©tention Adipiscitnur posses- sionem corpore et animo, ncque per se animo aut per se corpore. L. 3, § 1, ff. de acq. possessione. Mais la possession , une fois acquise de cette maniĂšre, peut ĂȘtre conservĂ©e par la seule intention Licet possessio nudo animo acquiri non possit, tamen solo animo retineri potest. Cette volontĂ© de retenir la chose, dit Pothier, TraitĂ© de ht Possession, n° 55, se suppose toujours, tant qu’il ne paraĂźt pas d’une volontĂ© contraire bien marquĂ©e. C’est pourquoi, quand mĂȘme une personne aurait abandonnĂ© la culture de ses hĂ©ritages, elle ne serait pas pour cela censĂ©e avoir la volontĂ© d’en abandonner la possession ; elle serait donc prĂ©sumĂ©e avoir la volontĂ© de la retenir, et elle la retiendrait-en effet Si ergo prtediorum dĂ©sertant possessionem non derelinquendi affectione transacto tempore non cnluisti, sed rnetu aut necessitate culturcm eorum dislulisti, prajudicium ex transmissi temporis injuria generari non potesl. » L. h, IL de acq. possessione. M. Troplong professe les mĂȘmes principes Le propriĂ©taire, dit-il, TraitĂ© de la prescription, n° 337, peut laisser ses hĂ©ritages en friche, ses maisons sans rĂ©parations et sans locataires ; c’est lĂ  l’abus de la libertĂ© ; mais ! la possession originaire qui se sera jadis fixĂ©e sur sa tĂȘte se perpĂ©tuera indĂ©finiment, tant qu’il ne se sera pas livrĂ© Ă  des actes plus certains d’abdication de son droit. La continuitĂ© juridique de cette possession sera incontestable, et l’on ne sera pas fondĂ© Ă  exiger qu’il en ait donnĂ© au public des signes extĂ©rieurs, puisque le public n’a Ă©levĂ© aucune prĂ©tention sur la chose, et que, ne le troublant pas, il est censĂ© reconnaĂźtre en lui un propriĂ©taire lĂ©gitime. » Quelques dĂ©veloppements aideront Ă  faire une saine application de ces principes. Aux termes de l’art. 22/i3 du Code civil, il y a interruption de possession lorsque le dĂ©tenteur est privĂ© pendant une annĂ©e complĂšte de la jouissance de la chose, soit par l’ancien propriĂ©taire, soit mĂȘme par un tiers. Point de doute, dans ce cas, que la possession, malgrĂ© l’intention de la conserver, ne soit perdue pour le dĂ©tenteur primitif, et acquise Ă  celui qui depuis a joui de la chose pendant une annĂ©e entiĂšre. En principe gĂ©nĂ©ral, c’est Ă  celui qui allĂšgue la possession Ă  la prouver, et, par consĂ©quent, cette preuve doit comprendre tout le temps dĂ©clarĂ© nĂ©cessaire Ă  l’acquisition des droits. Cependant, l’art. 223/i du Code civil fait exception Ă  cette rĂšgle, en dispensant celui qui possĂšde actuellement et qui prouve avoir possĂ©dĂ© ancien- fltement, de prouver sa possession intermĂ©diaire; elle est alors prĂ©sumĂ©e, et c’est sur l’adversaire que l’obligation d’établir le contraire est rejetĂ©e. Cet article, du reste, ne fait que reproduire un principe enseignĂ© par tous les docteurs Ohm possessor, hodie possessor prcesu- mitur; et ex possessione de prƓterito argiritur possessio de prƓsenti et medii temporis, nisi contrariumprobetur ; pro- batis extremis, prƓsumuntur media. Ce qui ne doit pas s’entendre d’une preuve nĂ©gative qui serait repoussĂ©e par la raison et les principes, mais de la preuve positive de la possession par cet adversaire. Mais il ne faudrait pas conclure de cette disposition, qu’il n’y ait que la possession intermĂ©diaire qui se conserve par l’intention. La loi n’a point prononcĂ© l’exclusion de la possession intentionnelle qui termine le dĂ©lai qu’elle a marquĂ© ; elle a seulement voulu intervertir les rĂŽles ; si, dans le premier cas, le possesseur est dispensĂ© de la preuve rejetĂ©e au contraire sur celui qui l’attaque, dans le deuxiĂšme il y est tenu, et celui-ci n’a rien Ă  Ă©tablir qu’une justification contraire. Nous rĂ©pĂ©terons donc qu’une possession qui n’a consistĂ© que dans l’intention pendant l’annĂ©e qui a prĂ©cĂ©dĂ© le trouble, peut, si elle a pour base une possession rĂ©elle ou de fait antĂ©rieure, autoriser l’action en complainte contre celui qui n’a pas dĂ©tenu rĂ©ellement pendant l’annĂ©e la chose en litige. Le juge de paix peut rechercher la possession remontant Ă  plus d’un an avant le trouble, comme il peut consulter d’anciens titres ou se dĂ©terminer par la vue des lieux, bien qu’ils aient Ă©tĂ© mis depuis longtemps dans l’état qui influe sur sa dĂ©cision. De ce principe que la possession se continue par la seule intention, il suit nĂ©cessairement qu’il n’y a pas — 147 — d’interruption quand on use d’une chose selon sa nature et sa destination, bien que les actes de jouissance n’aient lieu qu’à des Ă©poques Ă©loignĂ©es. La cour de cassation a dĂ©cidĂ©, par un arrĂȘt du 5 juin 1839, que lorsqu’une chose n’est pas susceptible d’une jouissance continue, mais seulement pĂ©riodique par exemple, lorsque la jouissance porte sur la rĂ©colte de certains produits qui ne se manifestent qu’à intervalles, comme le varech qui croĂźt sur les rivages de la mer , la possession du droit de faire cette rĂ©colte est continue et non interrompue, dans le sens de la loi, si elle a Ă©tĂ© faite toutes les fois qu’elle Ă©tait possible et qu’il y avait lieu de la faire, il faut donc, pour s’assurer de la continuitĂ© de la possession, examiner surtout la nature de l’objet auquel elle s’applique car, aux termes de l’arrĂȘt prĂ©citĂ©, la possession qui ne peut se manifester qu’à de certains intervalles par des faits distincts, plus ou moins sĂ©parĂ©s, n’en est pas moins continue par cela seul quelle a Ă©tĂ© exercĂ©e dans toutes les occasions et Ă  tous les moments oĂč elle devait l’ĂȘtre, et qu’elle n’a point Ă©tĂ© interrompue soit par la cessation absolue des actes, soit par des actes contraires ou Ă©manĂ©s de tiers. » Ainsi il est des eaux dont on n’use que dans une saison de l’annĂ©e, par exemple en Ă©tĂ©, ou qu’une seule fois dans l’annĂ©e, ce qui n’empĂȘche pas d’avoir la possession annale. On en trouve plusieurs exemples au titre du Digeste de aq. quotidiana et cestiva L. l rc . La loi 3, de aq. vel amit. pas., applique le mĂȘme principe aux pĂąturages Saltus hibernos Ɠstivosque animo possidemus, quamvis eos certis temporibus relinquamus. Et la Glose dit avec raison que cela s’étend Ă  tous les fonds; ainsi, par exemple Ă  une maison de campagne qu’on n’habite qu’en Ă©tĂ©, Ce que nous venons de dire doit s’appliquer Ă  toutes les propriĂ©tĂ©s dont on ne jouit ou dont on ne recueille les fruits qu’à de longs intervalles, comme des bois taillis, des futaies, des Ă©mondages, des haies, des fossĂ©s. Dans tous ces cas, il suffirait Ă  un particulier de prouver que le dernier acte de jouissance, la derniĂšre exploitation de la chose ont Ă©tĂ© faits par lui, fĂ»t-ce Ă  une Ă©poque de dix ou vingt ans, pour ĂȘtre fondĂ© Ă  intenter complainte contre celui qui Je troublerait, pourvu que celui- ri n’eĂ»t pas Ă  lui opposer une possession annale plus rĂ©cente. C’est aussi l’opinion de Pothier, Pos., n° 53; de d’ArgentrĂ©, PrĂȘt., n° 105, et de M. Troplong, TraitĂ© de la Prescription. Il faut en dire autant lors mĂȘme qu’ordinairement on jouit de la chose Ă  des Ă©poques plus rapprochĂ©es, comme si un bois s’exploitait tous les deux ans, et qu’il n’ait pas Ă©tĂ© coupĂ©. depuis trois ou quatre ans. On doit admettre la mĂȘme solution pour le cas oĂč il n’y a pas d’époque dĂ©terminĂ©e pour l’exercice d’un droit, par exemple lorsque ce droit consiste Ă  prendre des pierres ou des terres dans une carriĂšre, pour rĂ©parer un bĂątiment toutes les fois que la nĂ©cessitĂ© s’en fera sentir. En effet, la continuitĂ© que veut la loi n’est pas le fait qui opĂšre sur les choses Ă  tous les instants. Il n’est pas exigĂ© que l’on soit toujours occupĂ© Ă  cultiver, Ă  rĂ©colter. Domat sect. l r % tit. 7, liv. 3, n° 6 dit avec raison Quoique la possession renferme la dĂ©tention de ce qu’on possĂšde, cette dĂ©tention ne doit pas s’entendre de sorte qu’il soit nĂ©cessaire qu’on ait toujours ou sous sa main ou sous sa vue les choses dont on a la possession. » Je suis censĂ©, dit Pothier, TraitĂ© c/ç la possession, n° 41, avoir acquis la possession cle tout l’hĂ©ritage aussitĂŽt pie j’v suis entrĂ© et que j’y ai mis le pied , ou par moi-mĂȘme ou par quelqu’un de ma part, sans qu’il soit nĂ©cessaire que ni moi ni celui que j’ai envoyĂ© de ma part, nous nous transportions sur toutes les piĂšces de terre dont l’hĂ©ritage est composĂ© Quod dicimus et cor- porc et animo acquirere nos debere possessionem non utique, Ha accipiendum est, id qui fundtim possidcre velit, omnes glebas circumambulet, sed suffwit quamlibct partem ejus- fundi introire dum mente et cogitatione hĂŠc sit, ut tolum fundum usque ad terminum velit possidere. L. 3, g 1, ff. de acq. pos. delĂ  a lieu, ajoute Pothier, Ă  l’égard de celui qui acquiert la possession d’un hĂ©ritage que l’ancien possesseur consent de lui abandonner. 11 en est autrement d’un usurpateur qui s’empare par violence d’un hĂ©ritage dont il chasse l’ancien possesseur ; cet usurpateur n’acquiert la possession que pied Ă  pied des parties de l’hĂ©ritage dont il s’empare Si cum magna vi ingressus est exer- citus, eam tantum modo partem quam intraverit obtinet. » L. 18, § h , ff. de T. La chambre civile a encore rendu, le 15 fĂ©vrier 1841, un arrĂȘt qui fortifie la doctrine que nous enseignons. Voici l’espĂšce Lu acte d’échange du 1 er juillet 1757, passĂ© entre le sieur Lebrun de Nouant et les auteurs du sieur Conchon, porte que le sieur de Nonant aura sur la terre de Combes par lui cĂ©dĂ©e toutes les aisances nĂ©cessaires et convenables pour aller Ă  son Ă©tang de Combes, et que les sieurs Conchon seront tenus de laisser l’espace de trois pieds de terrain entre la terre de Combes et le tertre qui la sĂ©pare — 150 — de l’étang, et que ce tertre restera toujours en nature sans pouvoir ĂȘtre dĂ©frichĂ© en aucune façon. Les choses demeurĂšrent en cet Ă©tat jusqu’en 1835. Mais Ă  cette Ă©poque, le sieur Conchon ou son fermier dĂ©frichĂšrent et ensemencĂšrent l’espace rĂ©servĂ© entre la terre de Combes et le tertre, ainsi qu’une partie du tertre lui-mĂȘme. Dans le cours de \ 836, et avant la rĂ©volution d’an et jour, une demande en complainte possessoire fut formĂ©e par le sieur Dumont, successeur du sieur de Nouant. A la suite d’enquĂȘte et de visite de lieux, le juge de paix prononce la maintenue possessoire au profit du sieur Dumont, en considĂ©rant que le sentier dont il s’agit a Ă©tĂ© cultivĂ© dans toute son Ă©tendue, et le tertre dans une longueur de cent quarante-huit mĂštres, et que cependant il fut stipulĂ© par une clause spĂ©ciale de l’acte d’échange du 1 er juillet 1757 qu’ils ne seraient point cultivĂ©s. Appel par le sieur Conchon. Le 16 janvier 1837, jugement infirmatif du tribunal d’Aubusson, en ces termes Attendu que, d’aprĂšs l’art. 23 du Code de procĂ©dure civile, la complainte possessoire ne peut ĂȘtre formĂ©e que par celui qui possĂšde le terrain contentieux depuis une annĂ©e au moins ; qu’ainsi le demandeur devait prouver qu’il avait possĂ©dĂ© les tertre et chemin dont il s’agit depuis un an avant le trouble, preuve qui ne rĂ©sulte nullement de son enquĂȘte ; Attendu qu’en dĂ©duisant le droit de l’intimĂ© d’un acte d’échange de 1757 sur une question relative Ă  la derniĂšre possession d’un chemin et d’un tertre rĂ©clamĂ©s comme propriĂ©tĂ©s fonciĂšres, et non Ă  titre de servitude, le juge de paix est sorti des rĂšgles du possessoire, et a — loi — vĂ©ritablement jugĂ© une question de possession, par des motifs tenant exclusivement au pĂ©titoire. » Pourvoi en cassation de la part du sieur Dumont, pour violation des art. 2228 du Code civil et 23 du Code de procĂ©dure 1° en ce que le tribunal a jugĂ© que la maintenue plus qu’annale en nature de friche, d’un terrain qui avait expressĂ©ment cette destination, et auquel il Ă©tait interdit d’en donner une autre, ne constitue pas, au profit de celui en faveur de qui cette destination a Ă©tĂ© stipulĂ©e, une jouissance susceptible de servir de fondement Ă  une action possessoire; 2° en ce que, d’aprĂšs le mĂŽme jugement, le juge de paix n’a pu consulter les titres pour Ă©clairer la possession. La cour suprĂȘme a accueilli le systĂšme du demandeur en cassation par un arrĂȘt contenant les motifs suivants La cour ; — Vu les art. 2228 du Code civil et 23 du Code de procĂ©dure civile ; Attendu, en droit, 1° que la loi n’exige pas la possession matĂ©rielle comme condition rigoureusement indispensable de l’exercice des actions possessoires ; qu’en effet, suivant la dĂ©finition donnĂ©e de la possession par l’art. 2228 du Code civil, un droit chose essentiellement incorporelle peut faire la matiĂšre de la possession, et par consĂ©quent de l’action en complainte possessoire, autorisĂ©e par l’art. 23 du Code de procĂ©dure civile, si celui auquel ce droit appartient a Ă©tĂ©, depuis moins d’un an et jour, troublĂ© dans sa jouissance, et que, par une application Ă©vidente de ce principe, le sieur Dumont a pu considĂ©rer la mise en culture par Conchon et Tanton des terrains litigieux comme un trouble portĂ© Ă  la possession dans laquelle il soutenait que lui et ses auteurs sont, depuis 1757, du droit de maintenir en Ă©tat de non culture — 1S2 le tertre et le sentier rĂ©gnant le long de son Ă©tang ; 2° que le juge du possessoire a toujours le droit, et souvent mĂȘme l’obligation de consulter les titres, non pas pour reconnaĂźtre l’existence ou la non-existence du l'ait de possession, mais pour apprĂ©cier la nature et le caractĂšre de cette possession dont il est juge ; qu’en cela, il ne sau rait contrevenir Ă  la prohibition de l’art. 25 du Code de procĂ©dure civile, qui dĂ©fend de cumuler le possessoire et le pĂ©titoire, et qu’en jugeant le contraire, le tribunal d’Aubusson a faussement appliquĂ© l’art. 25 du Code de procĂ©dure civile, en mĂȘme temps qu’il a violĂ© l’art. 23 du mĂȘme Code et l’art. 2228 du Code civil. » Ine raison d’analogie va nous guider en matiĂšre de servitudes discontinues. L’art. 706 du Code civil fait rĂ©sulter l’extinction des servitudes du non usage pendant trente ans ; cette disposition ne s’applique qu’aux servitudes conventionnelles. Les servitudes naturelles et lĂ©gales fondĂ©es sur la nĂ©cessitĂ© ou l’utilitĂ© publique doivent toujours ĂȘtre maintenues. Le point de dĂ©part de cette prescription extinctive varie suivant que la servitude est continue ou discontinue ; dans le premier cas, la prescription commence du jour oĂč l’on a cessĂ© d’en user ; dans le second, de celui oĂč l’on a fait un acte contraire Ă  la servitude. Les actes contraires Ă  la servitude peuvent Ă©maner indistinctement du propriĂ©taire du fonds dominant ou du propriĂ©taire du fonds servant, puisque la loi est conçue dans les termes les plus gĂ©nĂ©raux, qui s’expliquent par la nature mĂȘme des choses. Mais le moment oĂč l’on a cessĂ© d’user des servitudes discontinues n’est pas toujours facile Ă  dĂ©terminer. Il y a des servitudes dont on ne fait usage qu’à de longs intervalles, tous les deux, cinq, dix ou vingt ans ; le droit romain doublait en ce cas le temps de la prescription; mais la gĂ©nĂ©ralitĂ© des ternies de notre Code civil nous porte Ă  dĂ©cider qu’il n’v a pas d’exception ni d augmentation de dĂ©lais pour ces servitudes; qu’on ne peut faire courir la prescription seulement du jour oĂč le dernier acte de jouissance aurait dĂ» avoir lieu; que, s’il s’est Ă©coulĂ© trente ans depuis le dernier acte de possession, l’extinction est incontestable; qu’ ainsi l'intention ne peut jamais les conserver au delĂ  de ce terme ; telle est aussi l’opinion de M. Pardessus, r/e,s Servitudes, n° 305, rjue nous prĂ©fĂ©rons Ă  celle de M. Belime. Nous ne ferions exception que dans le cas oĂč le titre mettrait un intervalle de plus de trente ans entre les actes d’exercice de la servitude. Toutefois, tant que la servitude ne serait pas prescrite, nous accorderions au crĂ©ancier l’exercice de l’action pos- sessoire, quoique le dernier fait remontĂąt Ă  plus d’une annĂ©e. 11 ne nous paraĂźtrait avoir perdu l’avantage de la possession annale qu’autant qu’il aurait laissĂ© passer l’époque lixĂ©e sans user de la servitude, ou qu’il n’en aurait pas fait usage lorsqu’elle lui Ă©tait nĂ©cessaire, dans le cas oĂč, aucune Ă©poque n’ayant Ă©tĂ© dĂ©terminĂ©e, il aurait Ă©tĂ© convenu d’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale qu’il pourrait s’en servir toutes les fois qu’il en aurait besoin. Ces principes nous semblent avoir Ă©tĂ© consacrĂ©s par un arrĂȘt de la chambre des requĂȘtes, du A juillet 1838, dont, nous en convenons, la rĂ©daction pourrait ĂȘtre plus dĂ©veloppĂ©e et plus explicite. 11 s’agissait d’une servitude de tour d’échelle et de passage pour la rĂ©paration d’une maison. Le contrat indiquait le lieu de passage et dĂ©fendait de — 134 passer ailleurs. Cependant le crĂ©ancier voulait se faire maintenir clans la possession de passer par un autre lieu. Le dĂ©biteur de la servitude soutint que le tour d’échelle et le passage Ă©taient prescrits par le non-usage pendant plus de trente ans ; que d’ailleurs, quant au passage , il Ă©tait, ainsi qu’on en convenait, contraire au titre ; que l’ancien Ă©tait prescrit sans que le nouveau ait pu ĂȘtre acquis par la possession ; qu’en supposant, comme on le prĂ©tendait, qu’on eĂ»t passĂ© et posĂ© des Ă©chelles, fait des rĂ©parations, cinq ou six ans avant le trouble, on n’avait pas de possession annale. Mais ce systĂšme a Ă©tĂ© repoussĂ©. Les tribunaux ont jugĂ© que la servitude de passage n’était qu’un accessoire; que le lieu avait pu en ĂȘtre changĂ©, puisque l’ancien Ă©tait fermĂ© ; que la rĂ©paration faite cinq ans avant le trouble suffisait; que la possession Ă©tait conservĂ©e par l’intention, tant qu’on n’avait pas besoin cl’user de la servitude. Telle est aussi l’opinion de M. Dalloz, RĂšp ., V° Prescription, qui combat sur ce point avec raison M. Vazeille. M. Dalloz combat encore avec autant de raison la conservation absolue de la possession par de simples vestiges. Il dit, et nous partageons son avis, que leur existence ne l’entraĂźne pas de plein droit; qu’ils peuvent seulement servir Ă  faire une preuve plus marquĂ©e de l’intention ; mais que c’est aux tribunaux Ă , apprĂ©cier toutes les circonstances qui la font reconnaĂźtre, sans que l’exercice de ce pouvoir discrĂ©tionnaire soit soumis Ă  une rĂšgle fixe, Ă  aucune limite. La cour de cassation a, le 25 janvier 1835, rejetĂ© un pourvoi formĂ© contre un arrĂȘt de la cour de Grenoble, qui avait dĂ©cidĂ© que la seule existence de la marteliĂšre d’un moulin Ă  foulon avait conservĂ© la possession et le droit au cours d’eau, par le motif que cet arrĂȘt n’avait fait qu’une apprĂ©ciation d’actes et de faits abandonnĂ©e au pouvoir discrĂ©tionnaire des juges. La servitude ne serait pas Ă©teinte si le crĂ©ancier avait usĂ© plus ou moins que ne porte son titre. Seulement, dans le premier cas il n’aurait pas acquis ce qui dĂ©passerait son droit, mais dans le second il aurait perdu la partie qu’il n’aurait pas exercĂ©e; s’il avait usĂ© autrement qu’il n’en avait le droit, il aurait perdu la servitude ; car il y a une grande diffĂ©rence entre faire plus ou moins ou faire autre chose. Pardessus, n° 304; Belime, n° 171. Celui qui a droit de passage Ă  cheval aurait fait moins s’il avait passĂ© Ă  pied et plus s’il avait passĂ© en voiture. On ferait autre chose en puisant Ă  une fontaine diffĂ©rente de celle sur laquelle la servitude a Ă©tĂ© constituĂ©e. AprĂšs une annĂ©e de changement dans le mode de la servitude, le crĂ©ancier aurait perdu la possession ; le propriĂ©taire aurait acquis celle de franchise de son fonds ou de rĂ©duction de la servitude, et pourrait intenter complainte pour s’y faire maintenir. Lorsque l’on s’oblige Ă  une servitude et que le crĂ©ancier n’en a jamais usĂ©, la prescription trentenaire court du jour du contrat, sans distinction entre les diffĂ©rentes servitudes. AprĂšs une annĂ©e rĂ©volue depuis la concession, le propriĂ©taire du fonds aurait l’action possessoire contre tout ouvrage qui aurait l’exercice de la servitude pour objet. Mais, dans ce cas comme dans tous les autres, le crĂ©ancier de la servitude pourrait, aprĂšs avoir perdu la possession annale, l’acquĂ©rir de nouveau et se fonder sur cette nouvelle possession pour intenter l’action possessoire. Les servitudes discontinues se conservent non-seulement par le fait du crĂ©ancier mĂȘme, mais encore par celui d’un usufruitier, d’un mandataire, d’un parent, d’un ami, d’un domestique, d’un possesseur de bonne ou de mauvaise foi et par celui d’un co-propriĂ©taire par indivis. 11 suffit d’un fait isolĂ© de jouissance dans l’espace de trente ans pour empĂȘcher la prescription ; par exemple, celui qui aura passĂ©, puisĂ© ou fait pacager une seule fois durant cette pĂ©riode, aura conservĂ© la servitude. Le propriĂ©taire du fonds ne pourrait prĂ©tendre qu’il s’agit d’une prescription acquisitive, seul cas auquel s’applique l’art. 2243 du Iode civil ; ici la prescription est libĂ©ratoire , et l’art. 706 est gĂ©nĂ©ral. La possession n’est point interrompue au prĂ©judice du dĂ©tenteur par un Ă©vĂ©nement de force majeure qui en empĂȘche l’exercice ; par exemple, par une inondation provenant des eaux de la mer ou d’une riviĂšre, eĂ»t-elle mĂȘme durĂ© une annĂ©e. L’art. 2243 du iode civil, en effet, ne fait pas rĂ©sulter l’interruption d’une privation quelconque de la chose, mais seulement de la prise de possession, soit par l’ancien propriĂ©taire, soit par un tiers. Ces principes ont Ă©tĂ© adoptĂ©s par arrĂȘt de la cour d’Amiens du 17 mars 1825, et par celui de la cour de cassation du 21 juillet 1828, qui a rejetĂ© le pourvoi formĂ© contre le premier. Dalloz, 1828, p. 341. Les lois romaines donnaient une solution semblable dans le cas d’occupation d’un fonds ou de changement de lit d’un fleuve, ou dans celui oĂč le dessĂšchement d'une source empĂȘchait l’exercice d’une servitude de prise d’eau. L. 4, inp., quem. serv. amitt., et 1. 35, de sen\ prƓd. rust. § U. Possession paisible. N* 1. Observations gĂ©nĂ©rales. Les lois romaines n’ont pas donnĂ© la dĂ©finition de la possession paisible. Pothier De la prescription , n° 38 l’assimile entiĂšrement Ă  celle qui n’est pas interrompue. Mais le Code civil met entre l’une et l’autre quelque diffĂ©rence, puisqu’il exige que la possession , pour ĂȘtre valable, soit tout Ă  la fois non interrompue et paisible. Cette diffĂ©rence ressort d’ailleurs de la nature des choses. Suivant les art. 2243, 2244 et 2247, la possession n’est interrompue que par une jouissance contraire de plus d’un an ou par une demande en justice. Si l’opinion de Pothier Ă©tait admise, l’exigence du lĂ©gislateur serait sans objet relativement Ă  la complainte, puisqu’elle est fondĂ©e sur une possession simplement annale. D’autres auteurs ont pensĂ© que la nĂ©cessitĂ© d’une possession paisible signifiait que le dĂ©tenteur ne devait pas avoir une possession dont le principe fĂ»t dĂ» Ă  la violence. C’est, suivant nous, confondre deux caractĂšres essentiellement distincts. Une possession peut n’ĂȘtre pas commencĂ©e par la violence, et n’avoir pas Ă©tĂ© paisible pendant une annĂ©e, comme elle peut avoir eu ce principe et avoir ensuite Ă©tĂ© paisible pendant toute l’annĂ©e. Certes, une possession n’aura pas Ă©tĂ© paisible, si, avant l’expiration de l’annĂ©e, un tiers y a apportĂ© un trouble qui, plus tard, aurait autorisĂ© la complainte. Si le dĂ©tenteur a Ă©prouvĂ© des contradictions de fait, si la jouissance a Ă©tĂ© disputĂ©e, si des fruits lui ont Ă©tĂ© enlevĂ©s sans qu’il ait osĂ© porter plainte; s’il n’a pu se maintenir en possession que par la force ou par l’a- tlresse; si, au moment oĂč il cultivait, il a Ă©prouvĂ© de 1 — 158 — l’opposition ; si l’on a voulu l’empĂȘcher de continuer ou l’expulser; dans tous ces cas, et une multitude d’autres qu’il serait aisĂ© de prĂ©voir, n’est-il pas Ă©vident que la possession n’a point Ă©tĂ© paisible et ne peut servir de fondement Ă  la complainte ? C’est avec raison que la loi a exigĂ© une possession paisible d’une annĂ©e pour autoriser Ă , intenter une action soit contre le propriĂ©taire, soit contre le possesseur antĂ©rieur qui reprendraient la jouissance d’un immeuble ; attachant Ă  cet Ă©tat de choses une maintenue, et souvent mĂȘme la propriĂ©tĂ©, pour que sa prĂ©somption fĂ»t raisonnable et pĂ»t produire ces effets, il fallait un laps de temps Ă©coulĂ© sans contestation. Que signifie, en effet, une possession qui a pu ĂȘtre contestĂ©e dĂšs le principe, qui a pu l’ĂȘtre encore constamment pendant toute l’annĂ©e ? La possession paisible, exigĂ©e pour l’exercice de la complainte, est donc celle qui n’a Ă©tĂ© troublĂ©e Ă  aucune Ă©poque de l’annĂ©e antĂ©rieure au fait Ă  l’occasion duquel elle est formĂ©e. Or ce trouble peut avoir lieu de deux maniĂšres. N” 2. Des diverses espĂšces de troubles. On connaĂźt deux genres de trouille le trouble naturel ou de fait, le trouble civil ou de droit. Trouble s’entend, dit Loisel, non-seulement par voie de fait, mais aussi par dĂ©nĂ©gation judiciaire. » On risquerait de s’égarer, si l’on se fiait sans discernement aux anciens auteurs. Ils ne donnent pas des idĂ©es assez positives de ces deux genres de troubles et sont d’ailleurs peu d’accord entre eux. D’un autre cĂŽtĂ© il n’est pas toujours facile de distinguer les faits ou les actes qui opĂšrent le trouble de fait ou le trouble dĂ© droit, de — 159 ceux qui n’ont pas cet effet. Il importe cependant beaucoup de ne pas se mĂ©prendre Ă  cet Ă©gard. Il faut faire attention que les atteintes portĂ©es Ă  la possession peuvent seules autoriser l’action possessoire; mais non des atteintes Ă  la propriĂ©tĂ© ou de simples dommages, et qu’on doit avoir soin aussi d’agir dans l’annĂ©e du trouble, Ă  peine de dĂ©chĂ©ance d’aprĂšs l’art. 23 du Code de procĂ©dure, dont les termes gĂ©nĂ©raux embrassent Ă©galement les deuxespĂšcesdetroubles; que cette dĂ©chĂ©ance serait tellement absolue, que, pour prĂ©tendre plus tard au droit d’intenter complainte, il faudrait avoir acquis une nouvelle possession annale, paisible, postĂ©rieure au premier trouble et antĂ©rieure au nouveau, car l’ancienne ne serait plus d’aucune considĂ©ration. Une nouvelle source d’embarras dĂ©coule Ă  cet Ă©gard de l’impossibilitĂ© oĂč s’est trouvĂ© le lĂ©gislateur de prĂ©ciser les faits constitutifs des diffĂ©rents troubles et de l’indispensable nĂ©cessitĂ© d’en abandonner l’apprĂ©ciation Ă  la conscience des juges. Les doutes devront donc ĂȘtre interprĂ©tĂ©s par le juge de paix en faveur des parties qui, par prudence, devront ĂȘtre plus aisĂ©ment portĂ©es Ă  intenter leur action qu’à s’en abstenir. Ainsi, un arrĂȘt de la cour de cassation du 16 avril 1833 a dĂ©cidĂ© que lorsqu’un particulier a dĂ©truit, par accident, une clĂŽture, le propriĂ©taire pouvait agir au possessoire, sans que le dĂ©fendeur puisse Ă©carter son action par le motif qu’il ne conteste pas la possession ; un autre arrĂȘt du 21 avril 1834, dĂ©cide que le simple fait d’avoir passĂ© avec voiture dans la cour d’un individu constitue un trouble Ă  la possession , de la compĂ©tence du juge de paix, bien que la propriĂ©tĂ© et la possession du demandeur ne soient pas contestĂ©es. — 160 — ti 11 y a trouble de fait, dit Bourjon Droit commun de la France, tom. 2, lit. h, chap. 1 er , sect. 1", n°2, lorsqu’un usurpateur se met en possession d’un hĂ©ritage ou des fruits qu’il produit. 11 y a trouble de droit lorsqu’un tiers saisit entre les mains du fermier ou locataire en se prĂ©tendant propriĂ©taire de la chose ; c’est trouble moins marquĂ© que le prĂ©cĂ©dent, c’est trouble de droit, mais qui ne donne pas moins que le premier ouverture Ă  la complainte ; c’est toujours un spoliĂ© Ă  rĂ©intĂ©grer. » Le mĂȘme auteur dit ensuite Ie lii il suit que si le possesseur d’un hĂ©ritage est assignĂ© pour justifier des titres en vertu desquels il possĂšde, il ne peut prendre une telle demande pour trouble, et intenter sur icelle une demande en complainte; ce n’est pas trouble, mais action, et Ă  laquelle il doit dĂ©fendre comme telle. Il est Ă©trange que le contraire ait pu tomber dans l’esprit de quelques-uns, et qu’ils n’aient pas senti que ce contresens qu’ils donnaient Ă  la loi n’avait point d’objet, et n’opĂ©rait autre chose que de multiplier les procĂ©dures. En effet, la demande qu’on vient d’exposer est une demande purement pĂ©titoire qui n’emporte aucun trouble de fait ni de droit, n’empĂȘchant pas que le propriĂ©taire ou possesseur ainsi assignĂ© ne fasse toujours les fruits siens , ce qui Ă©carte toute idĂ©e de trouble, et par consĂ©quent toute demande en complainte. » Pour ĂȘtre recevable Ă  intenter complainte, dit Bro- deau sur l'art. 90 de la Coutume de Paris, n° 7, il faut ĂȘtre troublĂ© et empĂȘchĂ© en sa possession, cessant lequel trouble et empĂȘchement l’on n’a que la simple voie d'action, ce qui ne s’entend pas seulement d’un trouble de fait et d’une dĂ©possession rĂ©elle et actuelle de l’hĂ©ritage, /fil mais aussi du trouble par simples paroles verbales dites judiciairement en plaidant, ou rĂ©digĂ©es par Ă©crit dans des actes ou procĂ©dures judiciaires par lesquels on dĂ©bat ou on dĂ©nie et rĂ©voque en doute le droit et la possession de l’adversaire possesseur, ce qu’il peut prendre pour trouble, former complainte et demander Ă  ĂȘtre maintenu et gardĂ©, comme il se pratique en toutes juridictions, nonobstant que l’auteur du Grand Coutumier, cbap. 31, tienne que paroles ne suffisent pas pour soi complaindre. » Rodier, sur l’ordonnance de 1667, semble n’admettre qu’une espĂšce de trouble, celui de fait. Le vĂ©ritable cas de la simple complainte, dit-il, c’est quand il y a quelque trouble de fait qui ne va pourtant pas Ă  nous dĂ©possĂ©der. Le trouble civil rĂ©sultant d’une assignation ou autre acte n’empĂȘche pas la possession; on se dĂ©fend 1 plutĂŽt dans ce cas par exception. » D’ArgentrĂ© dit, sur l’art. 106 de la Coutume de Breta- I gne Turbot autem quisquc etiarn per simplicem opposi- tionern. Ideo in foro dicere soient opposition vaut trouble, etiarn si fructibus manum nunquam admoverit. » Et sur I ces mots de l’art. 106 Et se fera le plegement complainte dans l’an et jour du trouble fait ou comminĂ©, » l’auteur ajoute Commine, nain minĂŠ et jactationes etiam verborum turbant quia scilicet obstent possidenti-, ne commode uti re suapossit. » Selon Pothier, TraitĂ© de la possession, n° 102 On appelle trouble de fait les differents faits par lesquels quelqu’un entreprend quelque chose sur un hĂ©ritage dont je suis en possession, soit en le labourant, soit en y coupant les fruits qui y sont pendants, soit en y abattant quelque arbre, ou en arrachant quelque haie, ou en corn- — 162 - , blant un fossĂ©, ou en en y ouvrant un ; je puis prendre pour trouble Ă  ma possession les entreprises faites sur mon hĂ©ritage, rĂ©sultantes de quelqu’un de ces diffĂ©rents faits, et en consĂ©quence intenter la complainte contre celui qui les a faites. Le trouble de droit est celui qui rĂ©sulte de quelque demande judiciaire par laquelle quelqu’un me disputerait la possession que je prĂ©tends avoir de quelque hĂ©ritage par exemple, si quelqu’un, prĂ©tendant avoir la possession de quelque hĂ©ritage dont je prĂ©tends de mon cĂŽtĂ© ĂȘtre le possesseur, donnait contre moi une demande en complainte, Ă©tant assignĂ© sur cette demande, je dois lui dĂ©clarer que je la prends pour trouble fait Ă  ma possession, en laquelle je prĂ©tends ĂȘtre de l’hĂ©ritage, et lui former de mon cĂŽtĂ© la complainte, aux fins d’ĂȘtre maintenu dans ma possession, et qu’il lui soit fait dĂ©fenses de m’y troubler. La voie de la complainte, dit le Nouveau Denisart-, V° Complainte , est ouverte en gĂ©nĂ©ral pour raison de toute espĂšce de trouble, de fait ou de droit. » Cependant on ne regarde pas comme trouble dans cette matiĂšre la demande formĂ©e au pĂ©titoire. Pareille demande ne donne pas lieu Ă  la complainte; c’est ce qui a Ă©tĂ© jugĂ© par un arrĂȘt rendu au grand-conseil- sur les conclusions de M. Joly de Fleury, le 8 avril 17/i0, entre les sieurs d’Harbouville et le sieur Grasset, curĂ© de Revercourt. » On est troublĂ©, dit Jousse, sur le titre 48 de l’ordonnance de 1667, de deux maniĂšres dans la possession d’un bien 4° par trouble de fait, 2° par trouble de droit. Le trouble de fait a lieu lorsqu’on empĂȘche quelqu’un par voie fait de jouir de son hĂ©ritage et d’en percevoir — 103 — les fruits. Le trouble de droit se fait lorsqu’on forme une opposition ou une demande judiciaire pour empĂȘcher le possesseur d’un bien d’en jouir. » VoilĂ  les anciennes autoritĂ©s sur la matiĂšre. Voici maintenant les principes auxquels, suivant nous, on doit s’arrĂȘter. Et d’abord, le trouble a incontestablement lieu, lorsqu’aux termes de l’art. 22/i3 du Code civil, le dĂ©tenteur est entiĂšrement dĂ©possĂ©dĂ©, car la dĂ©possession totale peut avoir lieu sans violence ou avec violence. Dans le premier cas elle donne lieu Ă  la complainte; dans le second,' Ă  la rĂ©intĂ©grande ; c’est le moyen employĂ© pour obtenir le rĂ©sultat plutĂŽt que ce rĂ©sultat lui-mĂȘme qui dĂ©- temine quelle action on doit exercer pour le faire cesser. Le trouble existe Ă©galement par tous les actes spĂ©cifiĂ©s aux art. 22 M et 22A8 ; mais ces dispositions limitatives pour l'interruption de prescription ne sont qu’indicatives, lorsqu’il s’agit de rechercher si la possession a Ă©tĂ© paisible une foule d’autres faits ou actes dont l’apprĂ©ciation est abandonnĂ©e aux tribunaux peuvent aussi empĂȘcher quelle n’ait ce caractĂšre. Il faut mĂȘme remarquer que le trouble de fait proprement dit consiste le plus ordinairement dans une entrave, une simple gĂȘne apportĂ©e Ă  la jouissance, le trouble suffit pour que celui qui l’éprouve soit obligĂ© d’agir dans l’annĂ©e, s’il veut Ă©viter que son adversaire ne le lui oppose plus tard comme ayant opĂ©rĂ© contradiction de ses droits et interversion de titre, ou comme ayant empĂȘchĂ© qu’il n’ait eu une possession paisible, nĂ©cessaire pour intenter la complainte. Dans le droit romain, il fallait avoir Ă©tĂ© seulement trou- — 164 — blĂ© pour Intenter l’interdit ntipossidetis; parce qu’il avait pour but de conserver la possession, ce qui le faisait appeler interdictum retinendĂŠ possessionis. On ne pouvait pas en user quand on avait Ă©tĂ© dĂ©pouillĂ© ; on devait avoir recours Ă  celui unde vi. Dans notre droit ancien, on a toujours pu, en cas de dĂ©possession violente, choisir entre la complainte et la rĂ©intĂ©grande, mais non dans le cas de simple trouble, qui n’a jamais donnĂ© lieu qu’à la complainte ; telle est aussi la rĂšgle de notre droit nouveau. De ce que l’art. 23 du Code de procĂ©dure n’a pas donnĂ© la dĂ©finition du trouble, il faut tirer la consĂ©quence que les juges peuvent en reconnaĂźtre l’existence, quoique le fait cause non un dommage, mais seulement la crainte d’en Ă©prouver par la suite, comme nous l’avons dĂ©jĂ  dit p. 33, et que nous le voyons dans trois arrĂȘts de la cour de cassation des 11 juin 1828, 2 dĂ©cembre 1829 et 22 mai 1833, ou dĂ©cider qu’il n’y a pas trouble, parce qu’il n’y a ni prĂ©judice actuel, ni possibilitĂ© que le plaignant en Ă©prouve jamais, comme on en trouve un exemple dans un arrĂȘt de la mĂȘme cour, du 1 h aoĂ»t 1832. Il faut encore conclure de l’art. 23, comme la cour de cassation l’a jugĂ© dans des termes formels, par arrĂȘt du 9 janvier 1833, que l’exĂ©cution de quelques travaux par un propriĂ©taire peut bien n’ĂȘtre pas considĂ©rĂ©e comme trouble, et que l’annĂ©e, pour intenter l’action possessoire, doit courir non du jour oĂč ils ont Ă©tĂ© commencĂ©s, lorsqu’ils sont inoffensifs, mais de celui oĂč les voisins ont Ă©prouvĂ© du dommage des derniers ouvrages. Plusieurs dĂ©cisions de la cour de cassation nous offrent — 163 — encore des exemples de trouble de fait qu’il importe de signaler. Par arrĂȘt du 27 aoĂ»t 1829, elle a reconnu qu’il y avait trouble dans le fait de la plantation de bornes opĂ©rĂ©e sur un terrain dont la propriĂ©tĂ© et la possession Ă©taient revendiquĂ©es par l’adversaire. Deux autres arrĂȘts du mĂȘme jour, 19 novembre 1828, ont dĂ©cidĂ© qu’il y avait trouble 1° dans le fait d’un des communistes qui faisait clore et ensemencer des pĂąturages gras et maigres dont les parties avaient toujours joui en commun, et que l’autre communiste Ă©tait bien fondĂ© Ă  intenter complainte ; 2° dans le fait de creuser un fossĂ© sur un chemin d’exploitation Ă©galement commun entre plusieurs propriĂ©taires. Dans une autre affaire jugĂ©e aussi par la cour de cassation, le 31 juillet 1832, nous voyons que le fait du trouble allĂ©guĂ© Ă©tait le dĂ©pĂŽt de fagots fait sur un terrain dont le demandeur se prĂ©tendait possesseur. On ne soutint pas que ce fait ne constituait point un trouble. Au contraire, une enquĂȘte avait Ă©tĂ© ordonnĂ©e et la complainte avait d’abord Ă©tĂ© admise. Elle ne fut ensuite repoussĂ©e que par une exception dont nous aurons plus tard occasion de parler. Un arrĂȘt du 8 novembre 1836 a dĂ©cidĂ© que bien que les riverains procĂšdent, conformĂ©ment aux rĂšglements , au curage d’une riviĂšre non navigable, cependant, si au lieu de se borner Ă  extraire les matiĂšres charriĂ©es par les eaux, ils font des travaux de nature Ă  approfondir le lit et Ă  diminuer ou dĂ©tourner le cours d’eau qui alimente une usine, ils commettent un fait de trouble qui peut donner lieu, de la part du propriĂ©taire de l’usine, Ă  une action possessoire. Un arrĂȘt de la chambre civile, du 3 fĂ©vrier I8Z1O, a en- I '/ * ‱ y-, \ \ \ \ \ ‱. \ ‱. \ \ *. -. . core jugĂ© qu’il y avait trouble dans le fait de suppression d’une vanne Ă©tablie pour l’exercice d’un droit d’irrigation ; et que la demande formĂ©e Ă  cet Ă©gard par les possesseurs troublĂ©s Ă©tait bien une action possessoire tendant Ă  les faire maintenir dans la jouissance de leur droit d’irrigation, et non point une demande ayant pour objet l’exercice d’un droit de servitude discontinue, lequel, n’étant pas susceptible de s’acquĂ©rir par la prescription , ne pouvait servir de fondement Ă , une action possessoire. Enfin, nous trouvons un nouvel exemple de trouble dans l’espĂšce d’un arrĂȘt rendu par la chambre des requĂȘtes, le 2/i fĂ©vrier 18/il La propriĂ©tĂ© du sieur de Lambilly est traversĂ©e par un chemin qu’il avait fait fermer par une barriĂšre mobile fermant Ă  clef, lorsque le sieur Leborgne est passĂ© sur ce chemin avec une charrette attelĂ©e. Action possessoire en complainte. Leborgne oppose que le chemin est communal. EnquĂȘte. Sentence du juge de paix, qui rejette la demande en maintenue possessoire. Appel. 26 mars 1839, jugement confirmatif du tribunal de PloĂ«rmel, qui considĂšre que le chemin, il y a quatorze ans, Ă©tait librement pratiquĂ© comme voie publique , entretenu et rĂ©parĂ© par le maire de la commune ; que s’il a Ă©tĂ© interceptĂ© par le sieur de Lambilly, les barriĂšres par lui posĂ©es ont Ă©tĂ© successivement brisĂ©es parles habitants; qu’aujourd’hui, Ă  la vĂ©ritĂ©, il existe une barriĂšre fermant Ă  clĂ©, mais qu’elle n’a pas empĂȘchĂ© les habitants de passer sur le chemin sans la permission du sieur de Lambilly depuis moins d’un an ; d’oĂč — 167 — il suit que ce dernier n’a pas une possession annale, paisible, et Ă  titre de propriĂ©taire. » Pourvoi du sieur de Lambilly. ArrĂȘt de rejet, attendu que pour dĂ©cider que le demandeur n’avait pas eu la jouissance paisible et depuis un an au moins du chemin qu’il revendiquait, et qu’il Ă©tait dĂšs lors non recevable dans son action, les juges se sont fondĂ©s sur des laits rĂ©sultant d’une enquĂȘte faite, dont l’apprĂ©ciation leur appartenait exclusivement. » lu reste, le simple possesseur a une action correctionnelle ou de police pour faire rĂ©primer le trouble apportĂ© Ă  sa possession , lorsqu’il constitue un dĂ©lit ou une contravention. Bien que les articles Ă»3/i et suivants du Code pĂ©nal, qui prĂ©voient les diffĂ©rentes atteintes aux choses immobiliĂšres, soient placĂ©s au chapitre des crimes et dĂ©lits contre les propriĂ©tĂ©s, la possession n’en suffit pas moins pour autoriser l’action. Ici le lĂ©gislateur a voulu indiquer les choses qui auraient Ă©tĂ© l’objet du dĂ©lit, et non restreindre l’exercice du droit qu’on peut y avoir. Mais il faut que la possession soit avouĂ©e parle dĂ©linquant. S’il la conteste, la justice criminelle doit renvoyer d’abord Ă  fins civiles. C’est ce qu’a dĂ©cidĂ© la cour de cassation, par arrĂȘt du 11 aoĂ»t 1837. 11 n’est pas nĂ©cessaire, dans ce cas, d’avoir une possession annale ; une possession, au moment du dĂ©lit, est suffisante, sauf aux juges Ă  corriger, par l’application de l’article /i 53 Ă  11, nous paraĂźt avoir eu sur ce point des idĂ©es plus complĂštes et plus claires. Selon ce jurisconsulte, les actes de pure facultĂ© ne peuvent ĂȘtre que ceux qui se rapportent Ă  la libertĂ© de l’homme dans ses actions, dans la disposition de ses biens, et dans son concours Ă  la jouissance des choses communes Ă  tous, ou destinĂ©es Ă  l’usage du public, ou communes Ă  des collections d’individus formant corps ou communautĂ©. Il donne plusieurs exemples Ainsi, que pendant un laps de temps qui excĂšde toute prescription, on ait fait moudre au mĂȘme moulin, on n’a pas acquis de droit contre le meunier pour le forcer Ă  cette pratique, et on n’a pas perdu le droit d’aller moudre ailleurs. En un mot, l’habitude des actions qui tiennent Ă  la libre volontĂ© des individus ne donne de possession ni pour eux, ni contre eux. Le vain pĂąturage des communautĂ©s d’habitants, sur tous les fonds non clos de leur territoire, aprĂšs la levĂ©e de la rĂ©colte, n’est qu’une facultĂ© pour les particuliers. Son exercice ne fait acquĂ©rir ni possession ni prescription. Le propriĂ©taire ne peut jamais ĂȘtre empĂȘchĂ© de — 195 — clore son terrain, et de le soustraire par ce moyen Ă  la vaine pĂąture. A l’égard des choses destinĂ©es Ă  l’usage du public, chacun a la facultĂ© d’en user en se conformant aux rĂšglements de police ; personne n’a le droit d’en jouir Ă  l’exclusion des autres. Celui qui use davantage n’acquiert pas plus de droit que celui qui use moins, ni que celui qui n’use pas du tout. Mais la possession est collective, et les actes des individus, sans faire acquĂ©rir rien de personnel Ă  aucun, constituent et conservent cette possession pour l’état ou pour la commune. » M. Troplong, de la Prescription, n" 38J, enseigne la mĂȘme doctrine. Il faut donc comprendre, au nombre des facultĂ©s bien diffĂ©rentes d’ailleurs des droits, la libertĂ© de faire des actes autorisĂ©s par le droit commun, par exemple de bĂątir sur son fonds, d’absorber les eaux d’une source qui s’y trouve. Par aucun laps de temps, le propriĂ©taire ne perdra cette libertĂ© ni son voisin n’acquerra le pouvoir de l’empĂȘcher de bĂątir ou de disposer de la source. VoilĂ  pour les actes de facultĂ©. M. Vazeille s’exprime ainsi sur les actes de simple tolĂ©rance. Il s’établit souvent entre voisins une familiaritĂ© ou une complaisance qui fait qu’on s’accorde ou qu’on souffre sur les fonds des facilitĂ©s et des usages qui, sans en avoir le caractĂšre, peuvent ressembler Ă  des actes de possession. Ils ne font pas acquĂ©rir des droits, parce que, comme l’a fort bien dit M. Bigot de PrĂ©ameneu, celui qui les fait n’entend agir comme propriĂ©taire, ni celui qui les autorise n’entend se dessaisir. La permission ou la tolĂ©rance, qui est leur unique fondement, les rend trĂšs-prĂ©caires, — 196 — trĂšs-incertains, et tout-Ă -fait sans consĂ©quence contre le propriĂ©taire. Ils ont lieu sous son bon plaisir, et il demeure toujours le maĂźtre de les faire cesser quand il le trouve Ă  propos. » Tout cela est encore Ă©tabli par Merlin. La familiaritĂ© , dit-il, V° Prescription , sect. 1, § 6, art. h , est une espĂšce de prĂ©caire tacite. Les actes qui en dĂ©rivent supposent un consentement qui n’est pas exprimĂ©, mais qui est sans consĂ©quence; et ils n’acquiĂšrent ni droit ni possession, parce que celui sous le bon plaisir duquel ils sont faits demeure toujours le maĂźtre de les faire cesser quand il le trouve Ă  propos. En vain donc seriez vous venu pendant vingt,, trente, cinquante ou cent ans, soit loger, soit dĂźner chez moi, la complaisance que j’ai eue de vous recevoir, de vous rĂ©galer, ne formera jamais un titre pour vous ; et jamais elle ne vous donnera le droit de me forcer Ă  la continuer, lorsqu’il ne me plaira plus de le faire. » Et il cite un arrĂȘt du parlement de Bordeaux qui a ainsi dĂ©cidĂ© la question Ă  l’occasion des prĂ©tentions Ă©levĂ©es par un chapitre de chanoines qui Ă©tait depuis plus de cent ans dans l’usage de dĂźner certains jours de chaque annĂ©e chez son Ă©vĂȘque, et qui voulait faire considĂ©rer cet usage comme un droit. Par arrĂȘt du 13 juillet 1775, le chapitre a Ă©tĂ© dĂ©boutĂ© de sa prĂ©tention. Des faits de jouissance peu importants, et n’occasionnant au propriĂ©taire que peu ou point de dommage ou de gĂȘne, sont facilement prĂ©sumĂ©s soufferts par tolĂ©rance ou familiaritĂ©. C’est par une juste application de ces principes que deux arrĂȘts de la cour de Riom, des 23 mai 1801 et 2/ — 197 — fĂ©vrier 1805, rapportĂ©s par MM. Vazeille et Dalloz, qui les approuvent, et un arrĂȘt de la cour de Bordeaux du 28 mars 1831, ont jugĂ© que des faits de vaine pĂąture et d’enlĂšvement d’herbages ou de joncs sur un terrain laissĂ© inculte ne sauraient, quelque temps qu’ils aient durĂ©, dĂ©pouiller de la propriĂ©tĂ© de ce terrain celui qui fonde son droit sur des titres. Toutefois, la moindre diffĂ©rence dans les circonstances du fait, peut en amener aussi dans les dĂ©cisions ; ainsi, deux arrĂȘts de la cour de cassation, rendus le mĂȘme jour, 8 janvier 1835, ont dĂ©cidĂ© que le pacage des bestiaux et l’enlĂšvement des litiĂšres sur un terrain qui n’est susceptible que de ce mode d’exploitation, peuvent servir de base Ă  une action en complainte, et doivent, dĂšs lors, ĂȘtre vĂ©rifiĂ©s par le juge saisi de l’action possessoire relative Ă  ce terrain ; Que le pacage des bestiaux peut ĂȘtre valablement allĂ©guĂ© pour Ă©tablir un droit de co-possession sur un terrain qui n’est susceptible que de ce mode de jouissance. Un autre arrĂȘt, en date du 5 avril 1841, a rĂ©solu une question tout-Ă -fait nouvelle, en matiĂšre d’actes de pure tolĂ©rance. Il s’agissait de savoir si celui qui Ă©tait en possession du droit de suspendre une barriĂšre Ă  un arbre de son voisin, au moyen d’un gond accrochĂ© Ă  cet arbre, pouvait, aprĂšs que cet arbre avait Ă©tĂ© abattu par son propriĂ©taire, demander par une action en complainte Ă  ĂȘtre maintenu dans la possession de ce droit. Un jugement du tribunal de Valognes a rĂ©solu la question nĂ©gativement, par le motif que les propriĂ©taires de l’arbre auquel Ă©tait suspendue la barriĂšre avaient pu en disposer Ă  leur grĂ© ; et la cour de cassation a rejetĂ© le pourvoi formĂ© contre ce jugement, attendu qu’il s’agit — 198 — d’une servitude qui n’a pas Ă©tĂ© reconnue avoir Ă©tĂ© Ă©tablie par une convention, servitude essentiellement pĂ©rissable avec l’objet que la main des hommes ne pourrait ni rĂ©parer ni perpĂ©tuer ; et que, dĂšs lors, le tribunal de Valognes a pu considĂ©rer en fait cette servitude comme de pure tolĂ©rance, d’oĂč il a dĂ», en droit, tirer la consĂ©quence qu’elle ne pouvait ĂȘtre l’objet d’une action possessoire. » Nous ne rapportons cet arrĂȘt que comme exemple de possession de tolĂ©rance , sans nullement adopter la doctrine de la cour sur le droit qui faisait l’objet du litige, droit qui, selon nous, ne peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme une servitude. Un autre arrĂȘt de la mĂȘme cour du 29 aoĂ»t 1831, a dĂ©cidĂ© que la facultĂ© laissĂ©e aux habitants d’une commune par tolĂ©rance de l’administration municipale, d’extraire du lit d’un torrent les pierres et le sable que les eaux y dĂ©posent, ne confĂšre point Ă  ceux des habitants qui seraient troublĂ©s par d’autres dans l’exercice de cette facultĂ©, le droit d’intenter contre ces derniers une action possessoire. g 8. La possession ne doit pas ĂȘtre fondĂ©e sur la violence. La violence, en gĂ©nĂ©ral, est la force dont on use pour contraindre une personne Ă  faire quelque chose, Ă  sous- crii’e une obligation, Ă  s’abstenir d’un acte ou pour s’emparer d’un objet mobilier ou immobilier. Rappelons les diverses dispositions du Code civil relatives Ă  la violence. Art. 1109. Il n’y a point de consentement valable si le consentement n’a Ă©tĂ© donnĂ© que par erreur, ou s’il a Ă©tĂ© extorquĂ© par violence ou surpris par dol. — 199 — Art. 1111. La violence exercĂ©e contre celui qui a contractĂ© l’obligation, est une cause de nullitĂ©, encore quelle ait Ă©tĂ© exercĂ©e par un tiers autre que celui au profit duquel la convention a Ă©tĂ© faite. Art. 1112. Il y a violence lorsqu’elle est de nature Ă  faire impression sur une personne raisonnable, et qu’elle peut lui inspirer la crainte d’exposer sa personne ou sa fortune Ă  un mal considĂ©rable et prĂ©sent. On a Ă©gard, en cette matiĂšre, Ă  l’ñge, au sexe et Ă  la condition des personnes. Art. La violence est une cause de nullitĂ© du contrat, non-seulement lorsqu’elle a Ă©tĂ© exercĂ©e sur la partie contractante, mais encore lorsqu’elle l’a Ă©tĂ© sur son Ă©poux ou sur son Ă©pouse, sur ses descendants ou ses ascendants. Art. 1114. La seule crainte rĂ©vĂ©rentielle envers le pĂšre, la mĂšre ou autre ascendant, sans qu’il y ait eu de violence exercĂ©e, ne sufiit point pour annuler le contrat. Art. 1115. Un contrat ne peut plus ĂȘtre attaquĂ© pour cause de violence si, depuis que la violence a cessĂ©, ce contrat a Ă©tĂ© approuvĂ©, soit expressĂ©ment, soit tacitement , soit en laissant passer le temps de la restitution fixĂ© par la loi. Art. 1116. Le dol est une cause de nullitĂ© de la convention, lorsque les manƓuvres pratiquĂ©es par l’une des parties sont telles, qu’il est Ă©vident que, sans ces manƓuvres , l’autre partie n’aurait pas contractĂ©. 11 ne se prĂ©sume pas et doit ĂȘtre prouvĂ©. L’art. 1304 porte que, dans tous les cas oĂč l’action en nullitĂ© ou en rescision d’une convention n’est pas limitĂ©e Ă  un moindre temps par une loi particuliĂšre, — 200 — cette action dure dix ans. Ce temps, ajoute-t-il, ne court, dans le cas de violence, que du jour oĂč elle a cessĂ© ; dans le cas d’erreur ou de dol, du jour oĂč ils ont Ă©tĂ© dĂ©couverts. » Enfin, suivant l’art. *2233, les actes de violence ne peuvent fonder non plus une possession capable d’opĂ©rer la prescription ; Et la possession utile ne commence que lorsque la violence a cessĂ©. » Il n’y a pas violence de la part de celui qui, attaquĂ© par la force, emploie aussi la force pour se maintenir en possession. l’im vi repellere licere Cassius scribit idque jus naturel comparatur. Apparet autem inquit ex eo arma armis repellere licere. L. 1, § 27, ff. de vi et vi annota. Jousse, dans son Commentaire de l’ordonnance de 1667, dit que la voie de fait ne suppose pas la rĂ©sistance , et que la violence, au contraire, la suppose ; mais on ne peut donner cette rĂšgle comme absolue. Il n’est pas indispensable, pour que la violence existe, qu’il y ait eu lutte, rixe, voie de fait corporelle. Il suffirait que les dispositions ou les menaces du perturbateur eussent effrayĂ© le propriĂ©taire ou les siens, de maniĂšre Ă  le mettre en fuite, Ă  le contraindre Ă  abandonner la chose ou Ă  l’empĂȘcher d’y revenir s’il en Ă©tait absent ou sorti naturellement. Les lois romaines, notamment la loi l rc , § 29, ff. devi et vi ar. et l’art. 1112 du Code civil, qui parle de crainte d’exposer sa personne ou sa fortune, etc., justifient notre sentiment; la violence morale nous paraĂźt devoir produire le mĂȘme effet que la violence physique ou matĂ©rielle. Du reste, nous ne rĂ©duisons pas la violence au seul mo- — 501 — ment oĂč, par voie de fait, l’usurpation a Ă©tĂ© consommĂ©e ; nous l’étendons, par suite du principe ci-dessus, Ă  tout le temps oĂč, par la crainte d’ĂȘtre exposĂ© aux mĂ©faits de l’usurpateur, le possesseur dĂ©pouillĂ© a Ă©tĂ© empĂȘchĂ© d’agir. C’est aux tribunaux Ă  fixer cette prolongation de la violence, d’aprĂšs les circonstances particuliĂšres Ă  chaque cause dont ils sont les apprĂ©ciateurs plus ou moins sĂ©vĂšres, plus ou moins indulgents. 11 est facile de se faire une idĂ©e de la continuitĂ© de la violence. Pendant qu’un particulier labourait un champ survient un tiers qui l’en chasse, jette sur la voie publique ses instruments aratoires, y introduit les siens et se livre Ă  la culture, ou il l’expulse de la maison qu’il occupe, jette ses meubles sur le carreau et s’installe dans cette maison. VoilĂ  bien la violence la plus caractĂ©risĂ©e et la plus complĂšte. Ce n’est pas tout prĂ©voyant le cas oĂč l’expulsĂ© voudrait reprendre sa chose, soit par le fait, soit par une action judiciaire, il a dĂ©clarĂ© qu’il faisait des dispositions pour rĂ©sister et pour faire, le cas arrivant, un mauvais parti Ă  celui qui a Ă©tĂ© dĂ©pouillĂ© ; ou bien l’usurpateur est un homme mal famĂ©, connu pour abuser de sa force, pour se livrer Ă  des violences quand on contrarie ses volontĂ©s ou ses intĂ©rĂȘts. Certes, les tribunaux peuvent voir dans ces circonstances la prolongation de la violence, et dĂšs lors refuser d’accueillir la complainte qui serait formĂ©e par le spoliateur troublĂ©, quand mĂȘme sa possession aurait durĂ© dix ans, parce que ce serait dix ans de violence. Pothier, de la Possession, n° 25; Dunod, Presc., p. 29; Troplong, Presc ., t. 1, p. i2A, dĂ©cident que la violence employĂ©e pour faire souscrire un contrat de vente ne se communique pas Ă  la possession ; que le contrat est res- cindable, mais que la possession est ^valable. Cela est vrai dans la rigueur des principes ; mais il arrivera rarement que la violence ne s’étendra pas Ă  la possession, et elle sera facilement prĂ©sumĂ©e. M. CarrĂ© se demande quand la violence a cessĂ©. Ce savant professeur rapporte les diverses opinions que cette question a fait naĂźtre ; puis il ajoute Dire que la possession utile commence du jour oĂč la violence est consommĂ©e nous parait contraire au principe qui dĂ©clare inutile toute possession qui a commencĂ© par la violence. I’oĂč suit que la prescription ne pouvant s’acquĂ©rir au moyen d’une semblable possession, encore bien que les actes de violence ne se soient pas perpĂ©tuĂ©s, l’action possessoire n'est pas recevable Ă  l’expiration d’une annĂ©e de possession, pendant laquelle l’usurpateur n’eĂ»t fait aucun acte de violence. Nous concluons, en consĂ©quence, que l’action possessoire n’est admissible qu’autant que l’usurpateur a possĂ©dĂ© pendant trente ans et prescrit la propriĂ©tĂ© de la chose, sans qu’on puisse lui opposer l’exception de mauvaise foi. » Ainsi, M. CarrĂ© refuse la complainte, Ă  moins que la violence n’ait cessĂ© depuis trente ans, c’est-Ă -dire qu’il la dĂ©nie complĂštement, puisqu’il veut que l’usurpateur commence par faire dĂ©cider qu’il a acquis la propriĂ©tĂ© par la prescription ; il le rĂ©duit donc Ă  une action pĂ©ti- toire. Nous ne pouvons partager cette opinion. Il est certain qu’une possession inefiicace pour autoriser la complainte, l’est aussi pour fonder la prescription, puisque l’une symbolise avec l’autre et que celle-ci a lieu dans toutes les matiĂšres prescriptibles. 11 n’v a pas plus de raison — 203 — pour admettre la prescription quand la possession a commencĂ© par la violence, que pour admettre la complainte. Si l’on rejette celle-ci, il faut aussi proscrire celle-lĂ . Le systĂšme de M. CarrĂ© tendrait donc, contre l’opinion qu’il a Ă©mise, Ă  repousser toute prescription lorsque la possession a Ă©tĂ© violente dans le principe. Que la violence ne profite pas, que l’on ne compte pas le temps pendant lequel elle a durĂ©, qu’on exige mĂȘme des preuves bien positives de sa cessation, et qu’on prĂ©sume jusque-lĂ  qu’elle subsiste encore, rien de mieux ni de plus raisonnable; mais lorsqu’il est prouvĂ© qu’elle a complĂštement cessĂ©, et qu’il n’a tenu qu’à l’individu dĂ©pouillĂ© de reprendre sa chose, que l’on ne considĂšre pas comme lĂ©gitime la possession annale postĂ©rieure, qu’on n’accorde pas la complainte, c’est ce qui ne peut ĂȘtre soutenu sans rendre complĂštement illusoires les difi'Ă©- rentes dispositions du Code, qui Ă©tablissent clairement que la prescription reprend son cours dĂšs que la violence a cessĂ© ; or, la complainte est fondĂ©e sur une prescription annale. M. Toullier, t. 6, p. 95, n° 84, aprĂšs avoir rappelĂ© le principe qu’un contrat ne peut plus ĂȘtre attaquĂ© pour cause de violence si, depuis que la violence a cessĂ©, ce contrat a Ă©tĂ© approuvĂ© soit expressĂ©ment, soit tacitement, soit en laissant passer le temps de la restitution fixĂ© par la loi, ajoute C’est-Ă -dire le temps de dix ans, qui ne courent que du jour oĂč la violence a cessĂ©; car la crainte est prĂ©sumĂ©e avoir durĂ© autant de temps que sa cause a subsistĂ© Quamdiu durĂąt causa metus, semper prƓsumitur metus. lecius, cap. 219. Quand mĂȘme il ne serait pas Ă©tabli ce qui en effet peut paraĂźtre difficile au possessoire que la chose appartenait Ă  celui qui s’en Ă©tait emparĂ© par violence, tous les actes d’approbation postĂ©rieurs la feraient suffisamment prĂ©sumer. » Mais revenons Ă  la question de savoir quand il y a cessation de violence. Ce que nous venons de dire en donne dĂ©jĂ  une idĂ©e; nous y ajouterons quelques observations. Dans le droit romain, il n’y avait cessation de violence qu’autant que la chose Ă©tait revenue dans la possession de celui qui en avait Ă©tĂ© dĂ©pouillĂ© ou de ses hĂ©ritiers. La loi française n’a point reproduit cette condition ; les tribunaux ne pourraient donc pas l’exiger. M. Delvincourt ne voit la cessation de la violence que dans la dĂ©livrance d’un nouveau titre Ă  l’usurpateur ; mais cette interprĂ©tation restrictive est repoussĂ©e par la gĂ©nĂ©ralitĂ© des termes de la loi et par l’exposĂ© des motifs de l’orateur du gouvernement, ainsi qu’il l’avoue lui- mĂȘme et que l’observe M. Dalloz, RĂšp., V° Prescription, n° 22, chĂąp. 1", section 2. Ce dernier ajoute que c’est aux juges Ă  fixer, d’aprĂšs les circonstances, l’époque de la cessation de la violence, ce qui ne dispense pas les auteurs de donner quelques exemples pour les guider. M. Vazeille se borne Ă  reproduire la disposition lĂ©gale, et il est Ă  regretter que cet auteur, qui traite si bien les questions qu’il soulĂšve, ait Ă©tĂ© si bref sur celle-ci. Nous allons essayer de supplĂ©er Ă  son silence. Bien qu’il ne soit permis Ă  personne de se faire justice Ă  soi-mĂȘme, il se peut qu’un particulier ait employĂ© la violence pour se mettre en possession ; que postĂ©rieurement, le premier possesseur pouvant reprendre la chose, ait tenu une conduite telle, qu’il en rĂ©sulte la reconnaissance formelle du droit du second possesseur, comme — SOS — s’il a fait un mur ou fossĂ©, une haie de sĂ©paration entre leurs hĂ©ritages contigus, s’il s’est arrĂȘtĂ©, en labourant, au champ pris par son voisin ; si, dans des circonstances oĂč l’influence de celui-ci Ă©tait nulle, il a dĂ©clarĂ© Ă  des tiers que le champ envahi appartenait au voisin ; dans ces divers cas et une foule d’autres qu’on pourrait aisĂ©ment exposer, la violence a Ă©videmment cessĂ©, et l’annĂ©e de possession Ă©coulĂ©e depuis cette cessation est efficace pour la complainte. Du reste, la violence nuit non-seulement Ă  celui qui l’exerce, mais encore Ă  celui au nom duquel elle a lieu, lors mĂȘme qu’il l’ignorerait. Elle nuit Ă  ses hĂ©ritiers, mĂȘme Ă  l’acquĂ©reur qui ne peut avoir plus de droits que lui, et dont la condition n’est pas diffĂ©rente. La violence, en fait de possession, a donc le mĂȘme effet, quoiqu’elle ait eu lieu contre le fermier, les ouvriers, la famille, les hĂŽtes du possesseur ou par eux. 11 arrive le plus communĂ©ment que la violence et les voies de fait constituent un dĂ©lit. Lorsqu’elles prennent ce caractĂšre, elles sont, Ă  plus forte raison, inefficaces pour constituer une possession servant de base Ă  la complainte et Ă  l’action pĂ©titoire. Mais quelquefois le dĂ©lit n’aura pas Ă©tĂ© accompagnĂ© de violence, et alors la possession sera vicieuse, par cela seul quelle se trouvera avoir eu un dĂ©lit pour origine. Ainsi, un usager qui a joui sans procĂšs-verbal de dĂ©livrance n’a pas une possession autorisant la complainte. Toutefois, une possession dĂ©lictueuse Ă  son origine deviendrait valable du jour oĂč elle aurait cessĂ© d’avoir ce caractĂšre vicieux, par argument du principe d’aprĂšs lequel la possession utile commence quand la violence a cessĂ©. — 206 — Nous ne faisons aucune diffĂ©rence entre la possession Ă  l’effet d’acquĂ©rir la prescription et celle Ă  l’effet dĂš l’interrompre. Les faits dĂ©licteux ne pourraient donc pas plus comporter une interruption valable qu’une acquisition ; la loi est gĂ©nĂ©rale. Ainsi, par exemple, lorsque d’aprĂšs l’art. 2243, l’interruption consiste dans la privation de jouissance par le fait d’un tiers ou du prĂ©cĂ©dent possesseur, il est certain que la loi a entendu parler d’une prise de possession qui donne lieu Ă  la complainte. Les deux possessions doivent rĂ©unir les mĂȘmes conditions ; elles doivent ĂȘtre Ă©galement continues, paisibles, publiques, non Ă©quivoques, non fondĂ©es sur la violence, la tolĂ©rance ou la familiaritĂ©. Il nous reste Ă  examiner une question importante; c’est celle de savoir si toutes les conditions ou qualitĂ©s de la possession, exposĂ©es dans les paragraphes prĂ©cĂ©dents, sont absolues ou relatives; c’est-Ă -dire si elles doivent exister Ă  l’égard de toutes personnes indistinctement, ou seulement Ă  l’égard de celle contre laquelle la possession est invoquĂ©e. Nous avons dĂ©jĂ  Ă©tabli, page 90, sur une question qui a quelques rapports avec celle-ci, que la condition de la possession annale imposĂ©e Ă  celui qui intente la complainte est exigĂ©e, soit qu’il la forme contre un prĂ©cĂ©dent possesseur ou contre celui qui n’a jamais eu de possession ; que ce dernier devait rĂ©ussir Ă  repousser la complainte, lors mĂȘme que le demandeur aurait une possession de trois cent soixante-quatre jours. Une raison d’analogie nous porte Ă  donner une solution semblable Ă  la question que nous discutons en ce moment. A la vĂ©ritĂ©, les lois romaines, notamment le § 4, Inst, — 207 — de interdictis, n’établissaient qu’une prohibition relative; elles ne refusaient l’interdit Ă  celui qui Ă©tait troublĂ© contre le perturbateur, qu’autant qu’il avait usurpĂ© prĂ©cĂ©demment l’objet en litige sur ce perturbateur mĂȘme, vi, clam, ou qu’il la tenait de lui prĂ©cairement; elles le lui accordaient quand c’était vis-Ă -vis d’autres que ces vices existaient; Pothier, de la Possession, n° 9>, et les auteurs du Nouveau Denizard, V° Complainte, enseignent la mĂȘme doctrine en droit français ; mais le Code civil et le Code de procĂ©dure, au lieu de reproduire cette distinction , sont conçus dans les termes les plus gĂ©nĂ©raux. La possession n’est respectable, ne mĂ©rite la faveur des lois et la protection des magistrats qu’autant qu’elle rĂ©unit les conditions dont le lĂ©gislateur a fait dĂ©pendre sa validitĂ©. Tout particulier attaquĂ© en complainte peut prĂ©tendre ne devoir rĂ©pondre qu’à celui qui a une possession paisible, publique, non Ă©quivoque, continue, non interrompue, Ă  titre de propriĂ©taire, exempte de familiaritĂ©, de tolĂ©rance; il peut discuter la possession de son adversaire et soutenir que la violence, la prĂ©caritĂ© ou tout autre vice, ont dĂ» empĂȘcher le demandeur d’avoir une possession rĂ©elle ; que cette possession appartient donc Ă  un autre qui seul ale droit de l’attaquer; que sur l’action possessoire il ne s’agit pas de savoir si le dĂ©fendeur a la possession, mais bien si le demandeur justifie de la sienne. Nous n’admettrions qu’une modification Ă  cette rĂšgle ; elle a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© indiquĂ©e, page 185 ; c’est relativement Ă  la publicitĂ© ou Ă  la clandestinitĂ© ; ce n’est pas mĂȘme une exception, car la nature des choses Ă©tablit que celui qui a eu connaissance positive d’une possession, cachĂ©e pour tous les autres, et qui rĂ©unirait d’ailleurs tous les carac- — 208 — tĂšres lĂ©gaux, ne pourrait se faire une arme de l’ignorance d’autrui. Ç 9. Possession de choses qui sont dans le commerce et prescriptibles. Il y a des biens prescriptibles et d’autres qui ne le sont pas, et les causes d’imprescriptibilitĂ© viennent ou de l’usage auquel ils sont consacrĂ©s, ou de la qualitĂ© des personnes auxquelles ils appartiennent. L’art. 2220 soumet Ă  l’empire de la prescription les biens qui sont dans le commerce. Les choses qui sont dans le commerce s’entendent non- seulement de celles qui font l’objet habituel de la profession de certains particuliers, mais encore de toutes celles qui peuvent ĂȘtre achetĂ©es et vendues par des individus Ă©trangers au nĂ©goce. Tel, par exemple, fait son Ă©tat d’acheter ou de fabriquer des Ă©toffes pour les revendre. Ce n’est pas de ces choses-lĂ  exclusivement qu’on doit dire qu’elles sont dans le commerce; autrement on excluerait toutes celles qui sont immeubles, car il est gĂ©nĂ©ralement reconnu que ces biens, dont cependant on trafique, ne peuvent faire l’objet du commerce proprement dit, et que ceux qui achĂštent des maisons ou des terres pour les revendre ne sont pas des commerçants. L’art. 1128 du Code civil porte qu’il n’y a que les choses qui sont dans le commerce qui puissent ĂȘtre l’objet des conventions. » Et l’art. 1598 Que tout ce qui est dans le commerce peut ĂȘtre vendu, lorsque des lois particuliĂšres n’en ont pas prohibĂ© l’aliĂ©nation. » Ainsi, les biens immeubles d’une femme mariĂ©e sous le rĂ©gime dotal sont inaliĂ©na- — 209 — > blĂ©s pendant toute la durĂ©e du mariage, quoiqu’ils soient incontestablement dans le commerce. Enfin, l’art. 2226 dispose qu’on ne peut .prescrire le domaine des choses qui ne sont pas dans le commerce. » Mais quelles sont les choses exclues du commerce? Aucune disposition du Code ne s’explique positivement Ă  cet Ă©gard. De l’art. 2227, on peut conclure que ce n’est pas la qualitĂ© du possesseur, mais bien la nature de la chose possĂ©dĂ©e qui la met hors du commerce, puisque l’état, les Ă©tablissements publics et les communes sont soumis aux mĂȘmes prescriptions que les particuliers, et peuvent Ă  plus forte raison les opposer. » L’art. 538 dit bien que les chemins, routes et rues Ă  la charge de l’Etat, les fleuves et riviĂšres navigables ou flottables , les rivages, lais et relais de la mer, les ports, les havres, les rades, et gĂ©nĂ©ralement toutes les portions du territoire fiançais qui ne sont pas susceptibles d’une propriĂ©tĂ© privĂ©e, sont considĂ©rĂ©s comme des dĂ©pendances du domaine public. » Mais il ne dit pas expressĂ©ment qu’ils sont hors du commerce ; il ne dĂ©clare pas que tout ce qui constitue le domaine public est nĂ©cessairement et exclusivement hors du commerce, et il ne le pouvait pas, puisque l’article suivant range au nombre des objets de ce domaine les biens vacants et sans maĂźtre, ceux des personnes qui dĂ©cĂšdent sans hĂ©ritiers, ou dont les successions sont abandonnĂ©es, » et que parmi ces biens il y en a ordinairement qui produisent du revenu, tels que des terres en labour, des prĂ©s, des bois, des vignes. Que conclure de tout cela? Que les choses hors du — ĂąlO — commerce sont toutes celles qui, d’aprĂšs leur nature, sont Ă  l’usage perpĂ©tuel du public et ne peuvent ĂȘtre aliĂ©nĂ©es sans changer de destination, qu’elles appartiennent Ă  l’Etat, aux dĂ©partements ou aux communes. Le lĂ©gislateur n’a pas sans doute voulu donner une dĂ©finition et une nomenclature de ces choses, dans la crainte qu’elles ne fussent considĂ©rĂ©es comme limitatives. Il a pensĂ© que les termes, choses qui ne sont pas dans le commerce, Ă©taient assez expressifs, et qu’en cas de contestation l’administration dĂ©terminerait quels biens sont ou non dans le commerce, sans que sa dĂ©cision emportĂąt en mĂȘme temps jugement de la propriĂ©tĂ©. Autrefois, le domaine de la couronne ou du roi Ă©tait gĂ©nĂ©ralement rĂ©putĂ© inaliĂ©nable. Ce principe fut consacrĂ© par l’édit de Moulins du mois de fĂ©vrier 1566, enregistrĂ© au parlement de Paris le 13 mai suivant. La nĂ©cessitĂ© de conserver le domaine de la couronne dans son intĂ©gritĂ©, dit Lefebvre de la Planche TraitĂ© des domaines, t. 3, p. semble devoir ĂȘtre regardĂ©e comme ayant toujours Ă©tĂ© une loi fondamentale du royaume... En effet., si les lois des fiefs en dĂ©fendent le dĂ©membrement, leur dĂ©cision ne doit-elle pas ĂȘtre appliquĂ©e Ă  ce patrimoine sacrĂ©, avec d’autant plus de raison que nos rois n’en Ă©tant que dĂ©positaires et administrateurs, et n’en jouissant qu’en usufruit, sont obligĂ©s de le transmettre Ă  celui qui leur succĂšde ? » On comprenait sous la dĂ©nomination de domaine de la couronne ou du roi tous les biens appartenant Ă  l’État, de quelque nature qu’ils fussent, mĂȘme ceux consacrĂ©s Ă  l’usage du public et ceux que le prince possĂ©dait au moment oĂč il montait sur le trĂŽne ou qu’il acquĂ©rait depuis cette Ă©poque. Il n’y avait aucune distinction \ — 211 — entre les biens de l’État et ceux du roi. Tous Ă©taient mĂȘme appelĂ©s domaines royaux ; mais cette propriĂ©tĂ© Ă©tait purement nominale ; elle Ă©tait fondĂ©e sur l’habitude oĂč l’on Ă©tait de tout rapporter-Ă  la majestĂ© royale pour en augmenter la puissance et l’éclat ; nĂ©anmoins elle appartenait rĂ©ellement Ă  l’État; elle ne pouvait ĂȘtre aliĂ©nĂ©e ni prescrite ; on en exceptait cependant les biens appelĂ©s petits domaines, qui, aux termes d’une autre ordonnance de 1505, enregistrĂ©e le 27 mai, de la dĂ©claration du 8 avril 1572, et des Ă©dits des mois de mars 1695 et d’aoĂ»t 1708 , Ă©taient aliĂ©nables et prescriptibles ; mais on n’a jamais Ă©tĂ© bien d’accord sur les objets que l’on devait considĂ©rer comme tels. Si l’édit du mois d’aoĂ»t 1708 dit qu’on doit entendre par petits domaines, et consĂ©quemment regarder comme aliĂ©nables 'Ă  perpĂ©tuitĂ© les moulins, fours, pressoirs, halles, maisons, boutiques, Ă©choppes, places Ă  Ă©taler, places vaines et vagues, communes, landes, bruyĂšres, patis, palus, marais, Ă©tangs, hoqueteaux sĂ©parĂ©s des forĂȘts, bacs, bateaux, pĂ©ages, travers , ponts, passages, droits de minage, mesurage, aunage , poids, greffes, tabellionages, prĂ©s, Ăźles, Ăźlots, crĂ©ments, accroissements, attĂ©rissements, droits sur les riviĂšres navigables, leurs fonds, lits, bords, quais et marchepieds, les bras, courants, eaux mortes et canaux ; les places qui ont servi aux fossĂ©s, murs et remparts, fortifications tant anciennes cpie nouvelles de toutes les villes du royaume, les lois des 1 er dĂ©cembre 1790 et 14 ventĂŽse an VII semblent les restreindre aux terres vaines et vagues, landes, bruyĂšres, palus, marais et terrains en friche autres que ceux situĂ©s dans les forĂȘts, ou Ă  cent perches d’icelles. principe de l’inaliĂ©nabilitĂ© du domaine de la cou- — 212 — ronne, l’exception apportĂ©e Ă  ce principe pour les biens dĂ©signĂ©s sous le nom de petit domaine, enfin la distinction qui existait, sous l’ancienne lĂ©gislation, entre le grand et le petit domaine, se trouvent assez bien Ă©tablis dans un arrĂȘt de la chambre civile, rendu le 2 avril 1839, sur le pourvoi formĂ© contre un arrĂȘt de la cour royale d’OrlĂ©ans, qui avait jugĂ© que des terrains compris dans les abornements de la forĂȘt domaniale d’OrlĂ©ans avaient pu ĂȘtre aliĂ©nĂ©s comme faisant partie du petit domaine. Il ncrus semble utile de reproduire les principaux motifs de cet arrĂȘt La cour, vu l’édit de Moulins du mois de fĂ©vrier 1566, enregistrĂ© au parlement de Paris le 13 mai suivant; l’édit du mois d’avril 1667 ; les art. 24 et 31 de la loi des 22 novembre, 1" dĂ©cembre 1790; l’art. 1 er de la loi du 3 septembre 1792 ; les art. 1 et 3 de la loi du 10 frimaire an II, et les art. 4 et 5 de celle du 14 ventĂŽse an VII ; u Attendu que la piĂšce de terre revendiquĂ©e par les dĂ©fendeurs contre la liste civile, et dont la propriĂ©tĂ© leur a Ă©tĂ© adjugĂ©e par l'arrĂȘt attaquĂ©, appartenait anciennement au domaine de la couronne ; u Attendu que le principe de l’inaliĂ©nabilitĂ© du domaine de la couronne, sauf les cas d’apanage et de nĂ©cessitĂ© de guerre, a Ă©tĂ© dĂ©finitivement fixĂ© par l’édit de Moulins du mois de fĂ©vrier 1566, et que l’art. 5 de cet Ă©dit fait dĂ©fense aux cours du parlement et chambre des comptes d’avoir aucun Ă©gard aux lettres-patentes contenant aliĂ©nation dudit domaine et fruits d’icelui; qu’une autre ordonnance de la mĂȘme annĂ©e 1566, enregistrĂ©e le 27 mai, qui a modifiĂ© le principe de l’inaliĂ©nabilitĂ© du domaine pour les terres, prĂšs, palus et marais vagues appartenant tiu roi, a for- - 213 — mellement exceptĂ© les terrains de cette nature enclavĂ©s dans les bois et forĂȘts de la couronne, et qui en font la lisiĂšre Ă  100 perches prĂšs ; u Attendu que la loi des 22 novembre, 1 er dĂ©cembre 1790, a consacrĂ© de nouveau les dispositions de l’édit de 1566 ; que l’art. 2/i de cette loi rĂ©putĂ© simples engagements, et, comme tels, perpĂ©tuellement sujets Ă  rachat, les ventes et aliĂ©nations de biens domaniaux , postĂ©rieurs Ă  l’ordonnance de 1566, quoique la stipulation de rachat ait Ă©tĂ© omise au contrat, et que son art. 31 ne maintient les aliĂ©nations Ă  titre d’infĂ©odation, baux Ă  cens ou Ă  rentes, de terres vaines et vagues, landes, bruyĂšres, palus, marais et terrains en friche, quautant qu’ils ne seraient pas situĂ©s dans les forĂȘts ou Ă  100 perches d'icelles; qu'on trouve les mĂȘmes dispositions dans les lois du 3 septembre 1792, ai't. 1"; du 10 frimaire an II, art. 1 et 2; du lh ventĂŽse an Vil, art. h et b. » Aujourd'hui, il n’y a plus de distinction entre le grand et le petit domaine ; mais depuis 1790 on distingue le domaine de l’État ou public du domaine de la couronne ou liste civile, et du domaine privĂ© du prince. Les canaux navigables et flottables, les chemins de fer, les routes dĂ©partementales, les chemins vicinaux de grande et de petite communication, les rues et places publiques, les Ă©glises et les cimetiĂšres sont, comme tous les objets Ă©noncĂ©s aux art. 538, 5/iO du Code civil, imprescriptibles tant qu’ils conservent leur nature et leur destination Ă  l’usage public; ils ne peuvent ĂȘtre les uns ni les autres la matiĂšre d’une possession utile et d’une action possessoire. Un arrĂȘt de la cour de cassation, en date du 10 janvier 18/i/j, rendu entre deux communes, a appliquĂ© ces principes Ă  un cimetiĂšre. - 2U — Mais Us ne conservent ce caractĂšre d’imprescriptibilitĂ© que tant qu’ils sont consacrĂ©s Ă  l’usage du public. C’est leur destination, leur application Ă  l’usage de tous qui le leur imprime, et il est mĂȘme impossible qu’il en soit autrement , car pendant que tout le monde use d’une chose, personne n’exerce d’acte de possession exclusive. Ces principes sont formellement consacrĂ©s dans un arrĂȘt de la chambre civile, du 5 dĂ©cembre 1838, Ă  l’égard des Ă©glises ou Ă©difices publics consacrĂ©s au culte. En effet, il rĂ©sulte de cet arrĂȘt que de tels Ă©difices ne sont pas plus susceptibles d’une propriĂ©tĂ© privĂ©e depuis le Code civil qu’ils ne l’étaient auparavant, et que c’est lĂ  un principe d’ordre et de droit public ; mais que, du moment oĂč leur destination premiĂšre est changĂ©e, comme cela arrive, par exemple, s’ils sont vendus par l’État, ils prennent dĂšs lors le caractĂšre de biens particuliers, perdent pour l’avenir tous les droits exceptionnels ou privilĂ©giĂ©s rĂ©sultant de leur consĂ©cration au service divin et de leur destination Ă  l’usage gĂ©nĂ©ral, et deviennent susceptibles de toutes les modifications de la propriĂ©tĂ© ordinaire , et notamment de celle qui rĂ©sulte de l’art. 661 Code civil, relatif Ă  l’acquisition privĂ©e de la mitoyennetĂ©. L’article 541 donne un exemple qui suppose une rĂšgle prĂ©existante. Il dit bien que les terrains, fortifications et remparts des places qui ne sont plus places de guerre appartiennent Ă  l’État, s’ils n’ont Ă©tĂ© valablement aliĂ©nĂ©s ou si la propriĂ©tĂ© n’en a pas Ă©tĂ© prescrite contre lui. » Mais pour que les remparts, terrains, fortifications et autres choses publiques soient prescriptibles, faut-il qu’on reprĂ©sente un acte de l’autoritĂ© administrative qui — 213 — en change la destination ? Acquiert-on la propriĂ©tĂ© par une possession postĂ©rieure de trente ans ? suffit-il de la simple possession pendant ce temps? On pourrait objecter jue, si la troisiĂšme question Ă©tait affirmativement rĂ©solue, il n’y aurait plus de diffĂ©rence entre les biens qui sont hors du commerce et ceux qui y sont restĂ©s, qu’une possession trentenairc ferait Ă©galement acquĂ©rir la prescription des uns et des autres. Cependant, nous croyons que la prescription doit rĂ©gir tous lesbiens ; qu’il ne doit/avoir de diffĂ©rence que dans les actes de jouissance que les tribunaux peuvent plus facilement considĂ©rer comme prĂ©caires et de tolĂ©rance quand ils s’appliquent Ă  une chose d’abord destinĂ©e Ă  l’usage gĂ©nĂ©ral; que la possession trentenaire, qui fait prĂ©sumer une vente, fait Ă  plus forte raison prĂ©sumer l’acte administratif qui a changĂ© la nature ou la destination de la chose; que si l’on suppose la perte d’un acte de vente authentique, on peut supposer celle d’un acte administratif, les dĂ©pĂŽts de l’administration n’étant pas plus que ceux des notaires Ă  l’abri des Ă©vĂ©nements; qu’autrement une possession de plusieurs siĂšcles serait inefficace, parce pi’on prouverait qu’il y a trois ou quatre cents ans la chose qui en est l’objet Ă©tait un terrain de place publique, et parce que, bien que par le fait, depuis cette Ă©poque, cette chose ne fĂ»t plus place publique, il n’y aurait cependant aucun acte de l’administration qui lui aurait retirĂ© ce caractĂšre et cette destination. 11 nous semble qu’en retirant du commerce certains objets, la loi a seulement voulu faire comprendre que, quoique ces choses fussent publiques, personne ne pouvait cependant se permettre d’en disposer Ă  son profit, ni empĂȘcher, Ă  l’aide de cette aliĂ©nation, l’usage de tous. — 216 — D’ailleurs chaque particulier sera trĂšs-empressĂ© de conserver cet usage tant que l’administration ne le lui aura pas interdit ; la possession exclusive d’un citoyen ne peut donc avoir lieu qu’autant que l’administration aura changĂ© la destination, l’usage du bien. Mais dĂšs que l’administration peut changer cet usage, dĂšs qu’elle peut ensuite vendre la chose, on ne verrait pas pourquoi elle ne serait pas prescriptible par une possession bien caractĂ©risĂ©e et exclusive. Nous avions dĂ©jĂ , Ă©mis cette opinion dans notre TraitĂ© des chemins, et nous avions dit que s’il pouvait y ĂȘtre fait exception, c’était tout au plus relativement aux remparts, fortifications et terrains des places de guerre et des forteresses, par le motif que des dispositions spĂ©ciales dĂ©fendent d’ériger ou d’abandonner des places de guerre sans l’autorisation du gouvernement. Depuis que nous avons exposĂ© ces principes, il est intervenu, sous la date du 3 mars 1828, un arrĂȘt de la cour de cassation dans lequel on lit que les remparts des places de guerre, que l’art. 540 du Code civil dĂ©clare faire partie du domaine public, et dont l’art. 13 de la loi du 10 juillet 1791 attribue la conservation au ministre de la guerre, qui en est dĂ©clarĂ© responsable, ne sont point dans le commerce, et forment consĂ©quemment un domaine inaliĂ©nable et imprescriptible de l’Etat ; qu’à la vĂ©ritĂ©, suivant l’art. 2, titre 4 de la mĂȘme loi du 10 juillet 1791 , les bĂątiments et emplacements que le ministre de la guerre ne jugerait pas nĂ©cessaire au service militaire, peuvent changer de nature et de destination par la remise que le ministre en ferait aux corps administratifs pour faire partie des pro priĂ©tĂ©s aliĂ©nables, et par consĂ©quent dĂ©sormais prescriptibles de l’Etat ; mais que ce changement de nature et de destination ne peut rĂ©sulter que de dĂ©cisions ministĂ©rielles, de procĂšs-\ erbaux rĂ©guliers de remises, ou autres actes Ă©quipollents. » Mais, dans cette espĂšce, il s’agissait d’une rampe de rempart, c’est-Ă -dire de l’accessoire d’une place qui n’avait pas cessĂ© d’ĂȘtre place de guerre, ainsi que cela Ă©tait bien constatĂ©. On conçoit que, dans ce cas, il faille une dĂ©claration de ce qui est utile ou inutile au service de la place, sans qu’on puisse en rien conclure pour le cas oĂč la place n’est plus destinĂ©e Ă  la dĂ©fense de l'Etat, ni Ă  plus forte raison relativement aux terrains des routes, des riviĂšres, des cimetiĂšres, Ă©glises, etc., etc., puisque la lĂ©gislation ne renferme rien de semblable pour ces divers objets, c’est-Ă -dire n’impose pas, pour les faire rentrer dans le commerce, la nĂ©cessitĂ© d’une dĂ©claration formelle de l’administration. Telle paraĂźt ĂȘtre aussi l’opinion de M. Dalloz, RĂšp., V° Prescription, quoiqu’elle n’ait pas, nous en convenons, toute la prĂ©cision dĂ©sirable. Nous croyons, dit-il, que les chemins, lorsqu’ils sont abandonnĂ©s, les ports, les havres, les rades, quand ils viennent Ă  ĂȘtre comblĂ©s, tombent dans le domaine de la prescription, de mĂȘme que les terrains, les fortifications et remparts des places qui ne sont plus places de guerre ; argument de l’art. 5/il du Code civil. » Voy. Recueil pĂšriod. de 1825, 2, 1, et 1828, 2, 57. Il en faut dire autant, ajoute-t-il, des Ă©glises et des cimetiĂšres oĂč l’exercice du culte et l’inhumation n’ont plus lieu, et en gĂ©nĂ©ral de toutes les choses qui, susceptibles par leur nature d’une possession exclusive, n’ont Ă©tĂ© placĂ©es hors du commerce que par une considĂ©ration d’utilitĂ© publique qui a cessĂ© d’exister. » — 218 — Cet auteur cite un arrĂȘt de la cour d’OrlĂ©ans, du 6 mai 1808, dont M. Colas de la Noue nous donne la substance dans son utile recueil. Un particulier avait possĂ©dĂ© un terrain pendant trente ans. La commune prĂ©tendait qu’il avait anciennement fait partie d’une place publique, qu’il Ă©tait imprescriptible, et qu’on ne pouvait le conserver qu’en reprĂ©sentant une concession administrative ; niais ce systĂšme fut repoussĂ©. A la vĂ©ritĂ©, il ne paraĂźt pas que la commune ait prouvĂ© que ce terrain eĂ»t jamais fait partie de la place; mais, Ă  notre avis, la dĂ©cision eĂ»t Ă©tĂ© la mĂȘme si cette preuve avait Ă©tĂ© faite. Voyez encore arrĂȘt de llouen , H fĂ©vrier 1825 , et surtout celui de la chambre civile, du 5 dĂ©cembre 1838, que nous avons citĂ© plus haut. MM. Proudhon et Troplong pensent que les fonds du domaine public deviennent prescriptibles, sans acte ou dĂ©cret de l’autoritĂ© qui les fasse rentrer dans le commerce, et par le seul fait de leur dĂ©gradation accidentelle, aprĂšs l’anĂ©antissement du service auquel ils Ă©taient affectĂ©s. M. Vazeille, TraitĂ© des prescriptions, n os 91 Ă  96, pense aussi qu’il n’est pas nĂ©cessaire que l’administration ait supprimĂ© la place de guerre par une dĂ©claration formelle ; il admet les Ă©quipollents, et pour toutes les autres choses publiques il se contente du seul laps de temps requis pour l’acquisition de la prescription. La question semble rĂ©solue dans ce sens, relativement aux places de guerre, par un arrĂȘt de la cour de cassation, du 30 juillet 1839, qui a dĂ©cidĂ© que le principe, que les terrains des fortifications des places de guerre ou postes militaires, tels que remparts ou autres objets faisant partie des moyens dĂ©fensifs des frontiĂšres du — 219 — royaume, sont inaliĂ©nables et imprescriptibles, cesse dĂ© recevoir son application lorsqu’il arrive un changement dans leur destination primitive, et que ce changement peut rĂ©sulter de ce qu’ils ont Ă©tĂ© abandonnĂ©s pendant plusieurs siĂšcles Ă  l’exploitation de certains particuliers qui les ont possĂ©dĂ©s sans opposition et ont pu dĂšs lors les acquĂ©rir par la prescription. Nous devons faire observer qu’une loi positive, celle du 10 septembre 1807, art. Al, autorise le gouvernement Ă  concĂ©der les lais et relais de la mer, les accrues, atlĂ©- rissementsdes fleuves et des riviĂšres, aux conditions qu’il juge Ă  propos, sans l’intervention d’une loi spĂ©ciale, et qu’un arrĂȘt de la cour de cassation, du 3 novembre 182A, les a dĂ©clarĂ©s prescriptibles et susceptibles de devenir l’objet d’une action possessoire ; qu’enfin les lits des fleuves ou riviĂšres qui ont changĂ© de cours deviennent immĂ©diatement propriĂ©tĂ© privĂ©e, et, en rentrant dans le commerce, deviennent prescriptibles. L’art. 2227 du Code civil contient une disposition en vertu de laquelle l’aliĂ©nabilitĂ©, la prescriptibilitĂ© du domaine de l’État est incontestable, ce que ne contrarie pas la nĂ©cessitĂ© d’observer, pour vendre, certaines formalitĂ©s ; car les biens des communes, un bois, un prĂ©, par exemple, ne peuvent ĂȘtre aliĂ©nĂ©s qu’en vertu d’une loi, et cependant la propriĂ©tĂ© peut en ĂȘtre acquise par prescription; il n’y a d’exception que pour les choses destinĂ©es Ă  l’usage du public les routes, fleuves, etc. Il ne suffit pas, comme l’enseigne M. Toullier, tome 6, n° 158, qu’une chose n’ait pas coutume d’ĂȘtre vendue, que la vente en soit prohibĂ©e ou ne puisse ĂȘtre faite qu’en vertu d’un dĂ©cret royal ou d’autres formalitĂ©s , pour quelle soit considĂ©rĂ©e comme Ă©tant hors du commerce ; au contraire, le Code considĂšre comme Ă©tant dans le commerce toutes les choses susceptibles d’ĂȘtre vendues, quoique les lois en aient prohibĂ© l’aliĂ©nation. » Ainsi donc, le principe d’aprĂšs lequel la dotation de la couronne est inaliĂ©nable fut proclamĂ©, dĂšs le seiziĂšme siĂšcle, d’abord par l’édit de 1530, et ensuite, nous l’avons dĂ©jĂ  dit, par l’ordonnance de 1566, loi fondamentale de l’Etat, sncro sancta lex, connue l’appelle d’ArgentrĂ©. Il fut consacrĂ© de nouveau par le sĂ©natus- consulte du 30 janvier 1810, et par les lois des 8 novembre 18lĂ  et 2 mars 1832, qui contiennent les rĂšgles les plus prĂ©cises. L’article 0 de la loi du 8 novembre 181/i, qui, du reste, ne fait que reproduire textuellement l’article 10 du sĂ©natus-consulte de 1810, porte que les biens formant la dotation de la couronne sont inaliĂ©nables et imprescriptibles. » L’article 8 de la loi de 1832 est ainsi conçu Les meubles et immeubles de la couronne sont inaliĂ©nables et imprescriptibles ; ils ne peuvent ĂȘtre par consĂ©quent ni donnĂ©s, ni vendus, ni engagĂ©s, ni grevĂ©s d’hypothĂšques nĂ©anmoins, les objets inventoriĂ©s avec estimation, aux termes de l’article 3, pourront ĂȘtre aliĂ©nĂ©s moyennant remplacement. » Cette imprescriptibilitĂ© est absolue ; elle n’est pas seulement Ă©tablie contre le souverain qui ne peut acquĂ©rir par possession, quelque longue qu’elle ait Ă©tĂ©; elle l’est aussi contre les tiers qui ne peuvent prescrire les biens tant pi’ils demeurent affectĂ©s Ă  la liste civile, pourvu qu’ils soient compris dans des Ă©tats et plans ; ce n’est que du jour oĂč ils en ont Ă©tĂ© distraits que la possession utile des tiers peut commencer. — 221 — Dans ces derniers temps, Ă  propos d’un tableau remis en 1821 au duc de MaillĂ© par la liste civile, pour en jouir temporairement, et achetĂ©, en 1837, au dĂ©cĂšs du duc de MaillĂ©, par le sieur Cousin, auquel l’intendant-gĂ©nĂ©ral de la liste civile le revendiqua bientĂŽt aprĂšs, on Ă©leva devant la cour de cassation la question de savoir si l’imprescriptibilitĂ© des biens formant la dotation de la couronne s’étendait mĂȘme aux meubles antĂ©rieurement Ă  la loi de 1832; si le possesseur de ces meubles ne pouvait pas s’autoriser de l’exception qu’en fait de meubles la possession vaut titre ; si, par exemple, un tableau dĂ©pendant de la liste civile n’était pas susceptible d’aliĂ©nation, et ne pouvait pas ĂȘtre rangĂ© dans la classe des meubles susceptibles de dĂ©tĂ©rioration par l’usage, et dont les articles 6 et 8 de la loi du 2 mars 1832 autorisent exceptionnellement l'aliĂ©nation moyennant remplacement; si, enfin , la liste civile actuelle avait le droit de se faire restituer des objets mobiliers dont la liste civile ancienne avait accordĂ© la jouissance temporaire Ă  des particuliers. La cour, par arrĂȘt du 10 aoĂ»t 18/il, rĂ©solut ces diverses questions dans un sens contraire aux prĂ©tentions du possesseur du tableau. Quant au domaine privĂ©, il ne se composait, d’aprĂšs la loi du 8 novembre 1814, que des biens acquis par le prince depuis son avĂšnement au trĂŽne. Ceux qu’il possĂ©dait antĂ©rieurement sont dĂšs cette Ă©poque dĂ©volus Ă  l’État d’une maniĂšre dĂ©finitive et irrĂ©vocable. C’est un principe trĂšs-ancien de notre droit public, et l’application en a toujours Ă©tĂ© fort avantageuse Ă  l’État, dont elle a augmentĂ© les ressources; mais la royautĂ© Ă©lective parait entraĂźner d’autres rĂšgles ; aussi l’article 22 de la loi — 222 — du 2 mars 1832 porte-t-il que le roi conservera la propriĂ©tĂ© des biens qui lui appartenaient avant son avĂšnement ; que ces biens et ceux qu’il acquerra Ă  titre gratuit ou onĂ©reux, pendant son rĂšgne, composeront son domaine privĂ©. » L’article 23 ajoute que le roi peut disposer de son domaine privĂ©, soit par acte entre vifs, soit par testament , sans ĂȘtre assujetti aux rĂšgles du Iode civil, qui limite la quotitĂ© disponible;» et l’article 2/i, que les propriĂ©tĂ©s du domaine privĂ© seront, sauf l’exception portĂ©e en l’article prĂ©cĂ©dent, soumises Ă  toutes les lois qui rĂ©gissent les autres propriĂ©tĂ©s. » Par consĂ©quent, ce domaine privĂ© est soumis aux rĂšgles ordinaires de la prescription. 11 y a d’autres biens encore qui sont rĂ©gis par des principes spĂ©ciaux. Ce sont ceux qui forment les dotations prises sur le domaine extraordinaire, et les majorats instituĂ©s soit avec des biens donnĂ©s par l’Etat, soit avec les propres biens de celui qui a obtenu cette distinction. Le domaine extraordinaire est aboli par l’art. 25 de la loi du 2 mars 1832 ; mais les dotations anciennes et les majorats instituĂ©s ou avec les biens de l’Etat ou avec ceux des particuliers, subsistent toujours avec les modifications adoptĂ©es par la loi du 12 mai 1835. 11 ne peut plus en ĂȘtre créé aux termes de cette loi. L’art. AO du dĂ©cret du 1" mars 1808 est ainsi conçu Les biens qui forment les majorats sont inaliĂ©nables ; ils ne peuvent ĂȘtre engagĂ©s ni saisis. » Comme on le voit, cet article ne dit pas, ainsi que les lois des 8 novembre 181A et 2 mars 1832, que les biens sont inaliĂ©nables et imprescriptibles. M. Delamalle, dans l’article MajorĂąt du RĂ©pertoire de M. Favard, § 1 er , n° /i, n’en dit pas moins qu’ils sont imprescriptibles. Nous admettons volontiers que les choses frappĂ©es d’inaliĂ©nabilitĂ© absolue par les lois soient, par voie de consĂ©quence, imprescriptibles, Ă  moins d’exception exprimĂ©e dans ces lois elles-mĂȘmes. Mais d’abord l’aliĂ©nation des majorais peut ĂȘtre autorisĂ©e par le roi. Ils ne sont pas inaliĂ©nables d’une maniĂšre absolue. L’art. 11 du dĂ©cret du h mai 1809 nous paraĂźt d’ailleurs ne laisser aucun doute sur la prescriptibilitĂ© des biens des majorats ; il est ainsi conçu S’il arrivait que des tiers eussent commis quelque empiĂ©tement ou usurpation sur les biens du majorĂąt, le conservateur en donnera sur-le-champ avis au titulaire ou Ă  notre commissaire prĂšs la commission du sceau des titres ; en cas d’urgence, le conservateur sera tenu, sans autre autorisation, de faire en son propre nom, aux frais du titulaire, les actes conservatoires nĂ©cessaires pour interrompre la prescription. » Ainsi, le dĂ©cret reconnaĂźt que la prescription court valablement au profit des tiers, puisqu’il recommande de faire des actes conservatoires pour l’interrompre. Vainement objecterait-on que, d’aprĂšs l’art. 35 du dĂ©cret du 1" mars, le titre et les biens affectĂ©s au majorĂąt passent Ă  la descendance lĂ©gitime, de mĂąle en mĂąle, par ordre de primogĂ©niture, ce qui constitue une substitution fidĂ©i-commissaire ; car, dans l’ancien droit qui admettait cette substitution , il Ă©tait assez gĂ©nĂ©ralement reconnu que des tiers pouvaient prescrire les lue ns substituĂ©s, soit avant, soit aprĂšs l’ouverture de la substitution. 11 en doit ĂȘtre de mĂȘme aujourd’hui, Ă  plus forte raison. L’esprit de la nouvelle lĂ©gislation est plus favorable Ă  la prescription, dont il a Ă©tendu le cercle. Il est constant que le Code civil dĂ©clare prescriptibles bien des choses qui ne l’étaient pas avant sa promulgation. Cette opinion puise une nouvelle force dans les modifications apportĂ©es par la loi du 12 mai 1835 Ă  la lĂ©gislation des majorats, puisqu’elle autorise le fondateur d’un majorĂąt Ă  le rĂ©voquer en tout ou en partie. Les mĂȘmes rĂšgles s’appliqueraient aux biens dont la substitution est permise par les art. lO/jS et suivants du Code civil. Nous ne voyons pas comment, dans le silence du Code, ils seraient soustraits Ă  l’empire du droit commun, qui soumet tous les biens Ă  la prescription, Ă  moins qu’ils n’en soient exceptĂ©s par quelques lois. Si le grevĂ© ne peut prescrire, c’est que la loi dit qu’on ne peut se changer la cause de sa possession, ni prescrire contre son titre ; mais un tiers qui n’est pas dans la mĂȘme position peut acquĂ©rir valablement par la possession continuĂ©e pendant le temps fixĂ© par le Code. 11 nous reste Ă  examiner si les biens des mineurs et des interdits, et ceux constituĂ©s en dot aux femmes mariĂ©es sous le rĂ©gime dotal, peuvent ĂȘtre pendant la minoritĂ©, l’interdiction ou le mariage, l’objet d’une possession valable donnant lieu l’action possessoire. Dans l’ancien droit, on n’était pas d’accord sur l’imprescriptibilitĂ© des immeubles des mineurs et des interdits. Les lois romaines, les coutumes et les auteurs offraient sur ce point de notables divergences, qui influaient nĂ©cessairement sur l’exercice de l’action en complainte. Aujourd’hui, cos difficultĂ©s ne subsistent plus. Sans doute les incapables peuvent possĂ©der \alablernent et — 225 — prescrire par eux ou leurs reprĂ©sentants; mais on ne peut prescrire contre eux tant que dure leur incapacitĂ©. Ils peuvent faire leur condition meilleure, mais non aliĂ©ner leurs droits directement ou indirectement. L’art. 2252 du Code civil porte que la prescription ne court pas contre les mineurs et les interdits. Quels sont le sensetleselfets de cette disposition? c’est que l’on ne peut valablement possĂ©der leurs biens, qu’ils en conservent toujours la possession pendant la minoritĂ© ou l’interdiction ; car la possession conduit Ă  la prescription ; l’une est la cause, l’autre l’effet. Pour pouvoir prescrire, dit l’article 2229, il faut une possession... et il faut quelle ne soit pas Ă©quivoque, qu’elle ait lieu Ă  titre de propriĂ©taire. La possession annale qu’on aurait eue d’un bien de mineur ou d’interdit pourrait-elle prĂ©valoir contre un titre formel qui Ă©tablirait leur propriĂ©tĂ© sur cet objet? Parce qu’un tuteur aura nĂ©gligĂ© pendant un an de faire rĂ©primer une usurpation, devront-ils perdre la jouissance de leur immeuble, et seront-ils forcĂ©s de se pourvoir au pĂ©titoire ? Mais l’usurpation du tiers n’est-elle pas Ă©vidente? N’est—il pas certain qu’il ne peut invoquer de possession Ă  titre non prĂ©caire, Ă  titre de propriĂ©taire? Le juge de paix n’a-t-il pas le droit et mĂȘme l’obligation de prendre connaissance des titres pour caractĂ©riser la possession ? Pourquoi maintenir l’usurpateur dans une possession illĂ©gitime dont il pourrait abuser en dĂ©truisant la chose, et qu’il sera tenu d’abandonner par suite de l’action pĂ©titoire qui deviendrait ainsi une pure formalitĂ© dont il est plus sage d’éviter aux parties les frais, les lenteurs et les inconvĂ©nients? Ce pie nous disons des biens des mineurs et interdits 15 — 226 — s’applique Ă©galement Ă  ceux qui ont Ă©tĂ© constituĂ©s en dot aux femmes mariĂ©es sous le rĂ©gime dotal. Les art. 1561 et 2255 du Code civil nous semblent ne laisser lĂ -dessus aucun doute. Il n’en serait diffĂ©remment, comme nous l’avons dĂ©jĂ  dit p. 132, qu’autant qu’il y aurait incertitude sur le fait de savoir si l’immeuble litigieux est la propriĂ©tĂ© du mineur, de l’interdit, de la femme; car, s’agissant d’une exception au droit commun, il faut que le fait qui lui sert de base soit bien clairement dĂ©montrĂ©. Il va sans dire aussi que la possession serait utile si elle avait eu lieu pendant un an depuis la cessation de la minoritĂ©, de l’interdiction ou du mariage. Nous venons de dĂ©velopper cette doctrine dans une consultation. En rĂ©sumĂ©, il faut tenir pour principe gĂ©nĂ©ral, suivant nous, que l’imprescriptibilitĂ© d’une chose, quelle provienne de sa*nature, de l’usage auquel elle sert ou de la qualitĂ© du propriĂ©taire, s’oppose Ă  la possession et Ă  l’action possessoire ; mais que 'cette action est reçue Ă  raison de tous les biens, de tous les droits susceptibles d’ĂȘtre acquis par la prescription. Nous nous bornons, quant Ă  prĂ©sent, Ă  ces simples observations; nous aurons occasion, plus tard, de leur donner de nouveaux dĂ©veloppements quand nous en ferons l’application. — -m — TITRE II DES CHOSES POUR LESQUELLES ON PEUT INTENTER I.’ACTION POSSESSOIRE. CHAPITRE PREMIER Des biens qui peuvent ĂȘtre en gĂ©nĂ©ral la matiĂšre de cette action. Nous examinerons, dans ce chapitre, pour quelle espĂšce de biens l’action possessoire est admise, et nous dĂ©montrerons qu’elle est reçue ‱ 1° Pour les immeubles et droits rĂ©els qui y sont assimilĂ©s , et non pour les immeubles fictifs ; 2° Pour les meubles devenus immeubles par destination ; 3° Pour les immeubles ameublis par stipulation ; h° Mais non pour des meubles isolĂ©s ou pour universalitĂ© mobiliĂšre. section 1”. L’action possessoire est admise pour les immeubles et droits rĂ©els, mais non pour les immeubles fictifs. Le droit romain avait, comme nous l’avons vu dans le titre prĂ©cĂ©dent, des interdits pour les personnes et les choses, pour les hommes libres et les esclaves, les meu- — 2*8 — blĂ©s et les immeubles. On connaissait l’interdit utrubi, qui avait lieu pour un seul objet mobilier, et celui ad exhibendum, qui tendait Ă  faire reprĂ©senter des hommes libres ou des .esclaves, ou un testament que l’on cachait. Ni l’un ni l’autre n’ont jamais Ă©tĂ© admis dans notre droit. La Coutume de Paris c t l’ordonnance de 1657, qui, plus prĂ©voyantes que le Code de procĂ©dure, avaient pris soin de dĂ©signer les choses qui pouvaient ĂȘtre la matiĂšre de l’action possessoire, l’accordaient pour immeubles , droits rĂ©els et universalitĂ© de meubles; mais l’interdit ad exhibendum n’était point autorisĂ©, mĂȘme dans les colonies, Ă  raison des nĂšgres ou esclaves, considĂ©rĂ©s, par une lĂ©gislation inhumaine, comme meubles quand ils Ă©taient attachĂ©s au service personnel, et comme immeubles par destination lorsqu’ils l’étaient Ă  l’exploitation ou Ă  la culture. ArrĂȘt de la cour de cassation, du 5 aoĂ»t 1829. Nous ne trouvons, dans le Code de procĂ©dure civile, aucune disposition prĂ©cise sur les biens qui peuvent ĂȘtre l’objet des actions possessoires ; ce n’est cjue par induction, et au moyen du rapprochement des art. 2, 3 et 23 du Code de procĂ©dure, dont les deux premiers sont empruntĂ©s Ă  la loi du 2 h aoĂ»t 1790, qu’on est conduit Ă  penser que les immeubles et droits rĂ©els immobiliers, que l’art. 526 du Code civil considĂšre aussi comme immeubles, sont seuls susceptibles de ces actions. En efï’et, l’art. 2 commence par Ă©tablir qu’en matiĂšre purement personnelle et mobiliĂšre, la citation sera donnĂ©e devant le juge du domicile du dĂ©fendeur ; s’il n’a pas de domicile, devant le juge de sa rĂ©sidence. Si donc la complainte Ă©tait admise en matiĂšre mobiliĂšre, l’action devrait ĂȘtre portĂ©e devant le juge du domicile ou de la rĂ©sidence du dĂ©fendeur. Cependant, l’article suivant veut quelle le soit devant le juge de la situation de l’objet litigieux, lorsqu’il s’agit de dĂ©placements de bornes, etc. Ici la loi Ă©numĂšre diffĂ©rents immeubles, puis ajoute et de toutes antres actions possessoires. » La loi du 25 mai 1838 n’est pas plus explicite sur le sujet qui nous occupe ; elle se borne, comme le Code de procĂ©dure, Ă  Ă©noncer quelques objets, et termine en rĂ©pĂ©tant les mots et autres actions possessoires. 11 est assurĂ©ment fort Ă©trange que le lĂ©gislateur n’ait pas pris la peine de dĂ©cider nettement pour quelle espĂšce de biens la complainte est recevable. Aucune disposition de nos lois ne l'excluant en matiĂšre mobiliĂšre, on pourrait ĂȘtre tentĂ© de soutenir que les tribunaux devraient l’accueillir. Pourquoi, dira-t-on, en serait-il autrement? et quelle raison de distinguer entre les meubles et les immeubles? Lorsque le lĂ©gislateur a Ă©tabli l’action possessoire, il a Ă©tĂ© guidĂ© par le dĂ©sir d’éviter les querelles, les voies de fait, et par le motif que le litige pouvant se prolonger, il Ă©tait de toute justice de maintenir provisoirement en possession celui qui est dĂ©jĂ  possesseur. Mais ces motifs ne s’appliquent-ils pas aux meubles comme aux immeubles? les hommes de mauvaise foi ne profiteraient-ils pas de la prohibition de l’action possessoire en matiĂšre mobiliĂšre pour s’emparer avec ruse ou violence d’un objet souvent prĂ©cieux, dont ils jouiront, et qu’ils dissiperont mĂŽme pendant le litige sur la question de propriĂ©tĂ© qu’ils ne manqueront jamais d’élever? Celui qui aura Ă©tĂ© dĂ©pouillĂ© par violence n’aura d’autre ressource que d'user de la mĂȘme voie. N’y a-t-il pas, d’ailleurs, des meubles d'une plus grande valeur que beaucoup d’immeubles? Les navires, par exemple, les moulins — 230 — assis sur bateaux, ne sont-ils pas, par le Code de procĂ©dure et le Code de commerce, soumis pour la saisie et la vente Ă  des rĂšgles spĂ©ciales ? Beaucoup de meubles ne sont-ils pas censĂ©s immeubles? Mais on peut rĂ©pondre que l’ancienne lĂ©gislation elle- mĂȘme n’admettait l’action possessoire en matiĂšre mobiliĂšre qu’autant qu’il s’agissait d’une universalitĂ© de meubles, et jamais pour un meuble seul, quelle qu’en fĂ»t l’importance ou la valeur; que le Code de procĂ©dure ne donnant, par aucune disposition, au juge de paix le pouvoir d’accueillir une action possessoire mobiliĂšre, il ne pourrait pas la juger, puisque Ă©videmment il n’est qu’un juge d’exception instituĂ© pour prononcer sur les matiĂšres qui lui sont formellement attribuĂ©es, et dans les cas spĂ©cifiĂ©s ; qu’en matiĂšre d’attribution tout est de rigueur; que ce n’est pas le cas de dire qu’il suffit que le lĂ©gislateur ne l’ait pas dĂ©fendu ; qu’il faut, au contraire, que la loi l’ait expressĂ©ment permis, parce qu’un magistrat n’a de pouvoir qu’autant que la loi lui en confĂšre. A ces raisons viennent s’en joindre d’autres encore. Nous ne nous appuyerons pas, toutefois, sur la maxime Ă©tablie autrefois et rappelĂ©e par Imbert, que la possession des choses meubles est vile mobilium vilis est posses- sio ; ce motif serait, certes, bien peu convaincant. En voici d’autres qui valent mieux. En matiĂšre de meubles, possession vaut titre ; il est plus facile d’éviter les usurpations des objets mobiliers que celles des propriĂ©tĂ©s fonciĂšres ; la possession annale des meubles est difficile h constater; c’est avec raison que celui qui est en possession d’un meuble en est rĂ©putĂ© le vrai propriĂ©taire, parce qu’il est prĂ©sumable que celui qui le dĂ©tient ne le fait que par suite de consentement. Les meubles passant — 231 — rapidement et successivement dans un grand nombre de mains, sans acte Ă©crit, il serait impossible de prouver la propriĂ©tĂ© au pĂ©titoire ; celui qui, aprĂšs avoir possĂ©dĂ© pendant un an, aurait vendu, pourrait, aprĂšs avoir touchĂ© le prix, reprendre irrĂ©vocablement sa chose par la complainte ; sans doute, il existe des meubles tellement volumineux et d’une si grande valeur, qu’on pourrait les assimiler Ă  des immeubles ; mais il aurait Ă©tĂ© impossible de prĂ©voir les diffĂ©rents cas d’exception, de prĂ©ciser l’importance ni le volume ; il a bien fallu se renfermer dans une exclusion absolue. Certes, si les tribunaux infĂ©rieurs refusaient d’admettre la complainte en matiĂšre mobiliĂšre, la cour de cassation rejetterait le pourvoi formĂ© contre ces dĂ©cisions, car aucune loi n’aurait Ă©tĂ© violĂ©e. Nous croyons, au contraire, qu’elle casserait pour excĂšs de pouvoir, si la complainte Ă©tait accueillie par la raison dĂ©jĂ  dĂ©duite, que les juges de paix n’ayant de pouvoir qu’autant que la loi leur en a expressĂ©ment dĂ©fĂ©rĂ©, ce qu’ils font au-delĂ  est nul. C’est ce qu’établit M. le prĂ©sident Henrion de Pan- sey dans son ouvrage sur l’AutoritĂ© judiciaire en France, et ce qui rĂ©sulte du principe consacrĂ© par la cour de cassation, par arrĂȘt du 19 mars 1825, rendu dans la fameuse affaire Roumage. Nous pouvons nous appuyer encore d’un passage de l’exposĂ© des motifs du titre du Code civil sur la prescription. Le droit romain , disait M. Bigot de PrĂ©ameneu, accordait, sous le nom d ’interdictum utrubi, une action possessoire Ă  ceux qui Ă©taient troublĂ©s dans la possession d’une chose mobiliĂšre; mais, dans le droit français, on n’a point admis, Ă  l’égard des meubles, une action distincte de celle sur la propriĂ©tĂ©. On a dĂ» maintenir la — 232 — rĂšgle gĂ©nĂ©rale qu’en fait de meubles, possession vaut titre. Ajoutons que les art. 3 du Code de procĂ©dure civile et 6 de la loi du 25 mai 1838 nous fournissent un nouvel argument, puisqu’ils attribuent la connaissance des actions possessoires au juge de paix de la situation de l’objet litigieux, ce qui ne peut s’appliquer aux meubles qui n’ont pas, Ă  proprement parler, de situation, et que les objets qu’ils Ă©noncent spĂ©cialement comme pouvant donner lieu Ă  ces actions sont immobiliers. D’aprĂšs l’art. 517 du Code civil, il y a trois sortes d’immeubles par nature, par destination, par l’objet auquel ils s’appliquent; mais des dĂ©crets spĂ©ciaux en ont créé une quatriĂšme sorte que nous appelons fictifs. Le dĂ©cret du 16 janvier 1808, relatif Ă  l’organisation de la Banque de France, accorde aux actionnaires la facultĂ© de donner Ă  leurs actions, sur cet Ă©tablissement, la qualitĂ© d’immeubles, en observant certaines formalitĂ©s. Les dĂ©crets des 1 er mars 1808, h juin 1809 et 3 mars 1810, considĂšrent aussi comme immeubles les rentes sur l’État, les actions sur les canaux formant la dotation des majorats. Ce sont lĂ  des dĂ©rogations au droit commun Ă©tabli par les art. 529 et 530 du Code civil ; mais elles ne peuvent avoir l’elĂŻet de changer la nature matĂ©rielle des choses qui en sont l’objet, et qui sont toujours rĂ©ellement mobiliĂšres. Il est par consĂ©quent de toute Ă©vidence que ces choses ne donnent jamais lieu Ă  l’action possessoire, et que les contestations dont elles peuvent ĂȘtre la matiĂšre, devant ĂȘtre rĂ©solues par l’interprĂ©tation des titres et des actes de l’administration qui les concernent particuliĂšrement, sont de la compĂ©tence ou des tribunaux civils de pre- — 233 — miĂšre instance ou de l’autoritĂ© administrative , suivant la question qu’il s’agit de dĂ©cider. Au reste, les art. 517, 518, 519,520, 521, 523 spĂ©cifient les immeubles par nature, les art. 522, 524 et 525, ceux qui le sont par destination, et l’art. 525, ceux qui le sont par l’objet auquel ils s’appliquent; parmi ces derniers sont les servitudes, l’usufruit. SliCTION II. Des meubles isolĂ©s et des universalitĂ©s de meubles. Nous avons dĂ©montrĂ© d’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, dans la section prĂ©cĂ©dente, que les meubles ne pouvaient ĂȘtre la matiĂšre d’une action possessoire. Nous ne reviendrons pas sur ce que nous avons dit Ă  cet Ă©gard ; nous ajouterons seulement que la solution doit ĂȘtre la mĂȘme, soit qu’il s’agisse d’une universalitĂ© mobiliĂšre, soit qu’il ne s’agisse que de quelques meubles isolĂ©s ; car le nombre n’en change pas la nature, et les raisons que nous avons donnĂ©es pour un seul s’appliquent incontestablement Ă  une universalitĂ©. A la vĂ©ritĂ©, et comme nous l’avons dĂ©jĂ  dit, sous l’ancienne lĂ©gislation, la complainte Ă©tait admise pour universalitĂ© de meubles. L’article 97 de la Coutume de Pxiris portait Aucun n’est recevable de soi com- plaindre et intenter le cas de nouvelletĂ© pour une chose mobiliĂšre particuliĂšre, mais bien pour universalitĂ© de meubles comme en succession mobiliĂšre. » L’ordonnance de 1557 admettait la complainte pour universalitĂ© de meubles, sans ajouter provenant d’une succession ; » mais les commentateurs, interprĂ©tant l’ordonnance par la coutume, avaient si bien senti tout ce — 234 — que cette disposition avait d’étrange, qu’ils avaient Ă©tĂ© forcĂ©s de restreindre la complainte au cas oĂč il s’agissait d’une succession. On peut voir DclauriĂšre, sur l’art. 97 de la Coutume de Paris ; Bourjon, Droit commun de la France; Duplessis, des Actions. M. le prĂ©sident Henrion de Pansey, CompĂ©tence des juges de paix, semble ĂȘtre d’avis que cette complainte peut encore avoir lieu sous l’empire du Code de procĂ©dure, car il rapporte, sans aucune observation contraire, les lois et les auteurs qui l’admettaient autrefois. Cependant, sous l'empire mĂȘme de l’ancienne lĂ©gislation , qui avait une disposition prĂ©cise, ce principe fut attaquĂ©, notamment par Bourjon, Droit commun de la France, t. 2, tit. A, cli. de la Complainte. Il paraĂźt, dit-il, qu’il ne peut s’appliquer que lorsqu’une succession est contestĂ©e entre plusieurs ; mais si ces contestations s’élĂšvent avant l’an, c’est le cas du sĂ©questre ; aprĂšs l’an, il y a alors fin de non recevoir Ă  intenter cette action. Je n’y vois donc pas de base ; c’est vain examen, vaine curiositĂ©, plus que rĂ©alitĂ© que cette dĂ©cision. » M. Merlin admet aussi la complainte pour universalitĂ© de meubles, comme on peut le voir sous ce mot de son RĂ©pertoire. MM. Levasseur, des Justices de paix; Dumont, Barbedette-Charmelais, Poncet, des Actions; Pigeau, Comment, posthum. ; Vazeille, des Prescriptions; Guichard, dans ses Questions possessoires ; Brossard, Juridiction civile des juges de paix, n°297; MM. ZachariĂŠ et Troplong partagent ce sentiment. VoilĂ  sans doute des autoritĂ©s bien nombreuses et bien imposantes ; cependant nous sommes d’un avis contraire, et jamais aucun principe ne nous a paru plus Ă©vident que celui qui refuse l’action possessoire pour universalitĂ© de meubles. Les — m — auteurs que nous venons de citer nous paraissent avoir cĂ©dĂ© trop facilement Ă  l’influence des anciens principes, sans faire attention aux changements essentiels qu’ils ont subis. A tous ces auteurs, nous pouvons d’ailleurs en opposer d’autres dont les noms font aussi autoritĂ© en jurisprudence. M. Favard de Langlade, dans son RĂ©pertoire, au mot Complainte, dĂ©cide nettement que l’action possessoire n’a pas lieu pour universalitĂ© de meubles. M. Adolphe Chauveau, que nous avons eu l’avantage de compter au nombre de nos confrĂšres Ă  la cour de cassation, et qui est maintenant professeur de droit administratif Ă  la facultĂ© de Toulouse, dans un article remarquable insĂ©rĂ© au 8' cahier de son Journal des avouĂ©s de 1832; M. CarrĂ©, dans son ouvrage sur les Justices de paix, le disent Ă©galement. Ce dernier se fonde sur ce que le Code de procĂ©dure ne rĂ©pĂšte pas la disposition de l’ordonnance de 1657, qui, comme nous l’avons dĂ©jĂ  vu, autorisait formellement la complainte pour universalitĂ© de meubles ; sur ce que toutes ses dispositions supposent qu’il s’agit d’immeubles ; que l’art. 1041 du mĂȘme Code abroge toutes lois, coutumes et usages relatifs Ă  la procĂ©dure ; sur ce que l’art. 2279 du Code civil proclame en principe qu’en fait de meubles, possession vaut titre. On conçoit difficilement, dit-il, lorsque la loi garde le silence, comment il se pourrait faire qu’une totalitĂ© fĂ»t d’une autre nature que les unitĂ©s dont elle se compose. » C’est aussi dans ce sens que s’explique fort nettement M. Aulanier. On admettait gĂ©nĂ©ralement autrefois, dit-il au n° 72, que l’action possessoire Ă©tait recevable pour une univer- — 236 — salitĂ© de meubles composant une succession purement mobiliĂšre, beaucoup d’auteurs, entraĂźnĂ©s par la routine, professent encore cette opinion tout-Ă -fait dĂ©nuĂ©e de fondement. Comme en fait de meubles la possession vaut titre, il ne serait pas raisonnable de faire pour les universalitĂ©s mobiliĂšres une exception Ă  la rĂšgle qui interdit la complainte pour les biens mobiliers. » Enfin, MM. belime, Caron et Dalloz repoussent Ă©galement l’action possessoire pour universalitĂ© mobiliĂšre. Voyons, au surplus, sur quelles raisons se fondent ceux qui prĂ©tendent que la complainte a lieu pour universalitĂ© de meubles provenant d’une succession. Un particulier dĂ©cĂšde ne laissant que des meubles. Plusieurs individus se prĂ©sentent presque aussitĂŽt et se disputent l’hĂ©rĂ©ditĂ©. Ils veulent se mettre en possession. Il est Ă©vident que ni l’un ni l’autre ne peut intenter la complainte. Il n’y a pour aucun d’eux de possession particuliĂšre, ils n’ont que celle qu’avait le dĂ©funt; mais ils ne peuvent l’invoquer ni l’un ni l’autre, puisque leur qualitĂ© d’hĂ©ritiers est contestĂ©e et incertaine. Il n’y a donc lieu qu’au sĂ©questre. Supposons maintenant que l’un des prĂ©tendants se soit mis en possession de l’hĂ©rĂ©ditĂ© depuis un an ; qu’aprĂšs ce temps un autre se prĂ©sente comme hĂ©ritier pour le tout ou pour la moitiĂ©, et qu’il s’empare de ce qu’il prĂ©tend lui appartenir. Le premier .pourra-t-il intenter la complainte? Si l’affirmative Ă©tait admise, il pourrait user et abuser, et en fin de cause il adviendrait que, soit par le simple usage, soit par mauvaise foi, tous les meubles se trouveraient dĂ©truits ou dissipĂ©s, et que son insolvabilitĂ© rendrait tout recours illusoire, inconvĂ©nient qui n’est pas Ă  craindre pour les immeubles. Mais, objectera-t-on peut-ĂȘtre, l’usurpation ne sera pas rĂ©pri- — 237 — mĂ©e ; la voie de fait sera donc encouragĂ©e, rĂ©compensĂ©e? Celui qui l’aura commise se sera donc créé un droit qui l’emportera sur une possession paisible ? Nous rĂ©pondons que la loi donne aux magistrats le moyen d’obvier Ă  cet inconvĂ©nient par le sĂ©questre, qui garantit, autant que possible, tous les intĂ©rĂȘts; que s’il est probable que celui qui se sera emparĂ© de vive force des meubles s’empressera de les dissiper, et qu’ainsi le sĂ©questre ne pourra avoir lieu, Ă©videmment la complainte ne serait pas plus efficace pour l’empĂȘcher de les dĂ©tourner et de les dissiper, et qu’en fin de cause, s’il est reconnu n’avoir aucun droit Ă  la propriĂ©tĂ©, il peut ĂȘtre condamnĂ© comme voleur ; que la crainte de cette condamnation est la seule garantie que le lĂ©gislateur ait pu donner contre de telles voies de fait aussi, mĂȘme dans le droit romain, qui admettait l’interdit utrubi pour meubles, en cas de trouble, il n’y en avait pas pour la dĂ©possession par voie de fait. Vinnius en fait la remarque Hoc interdictum recuperandƓ possessions ad res mobiles non pertinet, cum in eo casu safficiat acho furti, aut vi bonorum raptorum; cela s’applique Ă  tous les cas, mĂȘme Ă  ceuxĂčle meubles isolĂ©s qui auraient Ă©tĂ© dĂ©robĂ©s. Ce que nous venons de dire s’applique Ă©galement au cas oĂč un particulier s’emparerait de tous les meubles d’une succession, parce qu’il prĂ©tendrait les avoir acquis du dĂ©funt ou de ses hĂ©ritiers. Dans toutes les contestations qui peuvent naĂźtre pour les meubles, soit qu’il s’agisse de quelques-uns seulement, soit qu’il s’agisse d’une universalitĂ©, nous ne voyons que des questions de propriĂ©tĂ©. Celui qui dĂ©tient est rĂ©putĂ© propriĂ©taire, parce qu’en matiĂšre mobiliĂšre la possession vaut titre; il peut s’élever une contestation — 238 — non-seulement sur la qualitĂ© d’hĂ©ritier, mais encore sur la question de savoir si les meubles ou quelques-uns d’entre eux appartenaient au dĂ©funt et font partie de sa succession ; nous ne connaissons pas d’action possessoire pour se faire maintenir dans un droit, un titre d’hĂ©ritier; enfin la complainte est rĂ©elle et doit toujours s’appliquer Ă  un objet dĂ©terminĂ©, et non Ă  un droit intellectuel. Ajoutons, en terminant sur ce point, que le motif donnĂ© par les auteurs sur les dispositions de la Coutume et de l’ordonnance qui autorisaient la complainte pour universalitĂ© de meubles, Ă©tait le mĂȘme que celui qui l’admettait pour les rentes constituĂ©es et les offices. Ces diverses choses Ă©taient des immeubles fictifs, et ils disent tous que l’universalitĂ© mobiliĂšre participe de cette fiction, sapit quid immobile. Ce n’était donc qu’à cause de la nature immobiliĂšre que la complainte Ă©tait reçue; il Ă©tait donc vrai de dire, alors comme aujourd’hui, que la complainte ne pouvait avoir lieu que pour choses ou droits rĂ©els immobiliers ; mais notre Code n’ayant plus rangĂ© dans cette catĂ©gorie les rentes, les offices, l’universalitĂ© des meubles, toutes ces choses Ă©tant au contraire meubles, il s’ensuit nĂ©cessairement qu’il n’y a plus de raison pour qu’aucune d’elles puisse donner lieu Ă  la complainte. SECTION III. Immeubles par destination. Les auteurs sont bien laconiques relativement aux immeubles par destination. M. CarrĂ©, dans son dernier ouvrage, tome 2, page 250, n° 1403, se borne Ă  dire Les choses immobiliĂšres par leur nature ne sont pas les seules — -239 — Ă  l’égard desquelles la loi donne ouverture Ă  cette action ; elle est Ă©galement recevable par rapport Ă  celles que la loi rĂ©putĂ© immeubles fictifs par leur destination ou par leur application. Telles sont les objets mentionnĂ©s dans les art. 524, 525 et 526 du Code civil. » M. le prĂ©sident Ilenrion de Panseycite Imbert, qui dit On peut dĂ©fendre en matiĂšre possessoire quand elle est mue et formĂ©e pour meubles, qu’ils ne tiennent et ne sont adhĂ©rents aux immeubles; car s’ils sont conjoints et accessoires des immeubles, la complainte est bien recevable. » M. le prĂ©sident cite encore Brodeau, qui, sur l’art. 07 de la Coutume, s’exprime ainsi La complainte a lieu pour les meubles adhĂ©rents et cohĂ©rents ou incorporĂ©s au fonds, et qui ne sont pas possĂ©dĂ©s comme chose mobiliĂšre, comme les ustensiles tenant Ă  fer et Ă  clous, chevillĂ©s ou scellĂ©s en plĂątre et mis pour perpĂ©tuelle demeure, qui ne peuvent ĂȘtre emportĂ©s sans fraction ni dĂ©tĂ©rioration. » Comme on le voit, l’opinion de ces auteurs est limitĂ©e. Elle n’embrasse que les choses mobiliĂšres qui sont adhĂ©rentes aux immeubles, qui tiennent Ă  fer et Ă  clous, sont chevillĂ©es ou scellĂ©es en plĂątre, etc., etc. Cependant M. Henrion de Pansey en tire une conclusion bien plus gĂ©nĂ©rale. Ainsi, dit-il, celui qui est troublĂ© dans la jouissance d’une maison peut demander d’ĂȘtre maintenu dans la possession, non-seulement de l’édifice, mais des meubles qu’il renferme, et qui par leur destination sont rĂ©putĂ©s immeubles. Il en est de mĂȘme des mouches Ă  miel et de toutes les choses mobiliĂšres que le Code civil rĂ©putĂ© immeubles, — 240 — Pour tous ces objets, le possesseur qui en est dĂ©pouillĂ© n’est pas rĂ©duit, comme pour les meubles proprement dits, Ă  l’action en revendication, action pĂ©titoirequi impose Ă  celui qui l'intente l’obligation de prouver sa propriĂ©tĂ©. Il peut prendre la voie de la complainte, ce qui lui procure deux avantages 1° il suffit qu’il prouve qu’il possĂ©dait un an avant le fait dont il se plaint; 2° il a la facultĂ© de porter son action devant le juge de paix, quelle que soit la valeur de l’objet qu’il rĂ©clame. » Mais les meubles deviennent immeubles par destination de plusieurs maniĂšres ; les uns y sont incorporĂ©s, scellĂ©s Ă  plĂątre, ou Ă  chaux, ou Ă  ciment, ou y sont placĂ©s de telle maniĂšre qu’ils ne peuvent ĂȘtre dĂ©tachĂ©s sans ĂȘtre fracturĂ©s ou dĂ©tĂ©riorĂ©s, ou sans briser ou dĂ©tĂ©riorer la partie du fonds Ă  laquelle ils sont attachĂ©s. Les autres le deviennent parce qu’ils sont livrĂ©s par le propriĂ©taire au fermier ou au mĂ©tayer pour la culture, ou placĂ©s par lui pour le service et l’exploitation de ce fonds. Tels sont, indĂ©pendamment des animaux, les ustensiles aratoires, les semences donnĂ©es au fermier ou colon partiaire ; Les pigeons des colombiers ; Les lapins des garennes ; Les ruches Ă  miel ; Les poissons des Ă©tangs ; Les pressoirs, chaudiĂšres, alambics, cuves et tonnes; Les ustensiles nĂ©cessaires Ă  l’exploitation des forges, papeteries et autres usines ; Les pailles et engrais. A cette nomenclature, on peut ajouter les nĂšgres qui, dans les colonies, sont jusqu’à l'affranchissement promis — 211 — par la loi du 24 avril 1833, considĂ©rĂ©s comme immeubles quand ils sont attachĂ©s Ă  l’exploitation des fonds. Édit de mars 1685, dit Code noir, art. 48. Mais cette qualitĂ© d’immeubles par destination que la loi donne aux objets que le propriĂ©taire a placĂ©s pour le service et l’exploitation d’un fonds, n’étant que le rĂ©sultat d’une fiction qui doit cĂ©der Ă  la rĂ©alitĂ©, disparaĂźt aussitĂŽt que le propriĂ©taire a changĂ© la destination de ces objets et les a rendus Ă  leur qualitĂ© naturelle de meubles en les dĂ©tachant du fonds. La cour de cassation a, par trois arrĂȘts des 5 aoĂ»t 1829, 3 aoĂ»t 1831 et 17 juillet 1838, appliquĂ© ces principes dans des espĂšces oĂč il s’agissait d’esclaves placĂ©s sur une habitation aux colonies ; elle a jugĂ© que ces esclaves n’ont le caractĂšre d’immeubles par destination qu’aussi longtemps qu’ils restent attachĂ©s au fonds, et qu’ils perdent ce caractĂšre et recouvrent la qualitĂ© de meubles dĂšs l’instant qu’ils en sont distraits par la vente sĂ©parĂ©e qu’en fait le propriĂ©taire. Il existe bien une loi du 18 juillet 1845 relative au rĂ©gime et au rachat des esclaves dans les colonies de la Martinique, de la Guadeloupe, de la Guyane et de Bourbon et leurs dĂ©pendances ; mais elle ne change rien aux principes ci-dessus exposĂ©s. Quant aux meubles immobilisĂ©s par leur incorporation et leur adhĂ©rence au fonds, nul doute que le possesseur annal de la maison ne puisse former complainte, et que le juge de paix, aprĂšs avoir vĂ©rifiĂ© qu’ils ont avec cet Ă©difice l’adhĂ©rence qui leur donne le caractĂšre d’immeubles, ne doive prononcer la maintenue ou la rĂ©intĂ©grande. Par exemple, il est des poĂȘles pratiquĂ©s dans des murs pour chauffer deux piĂšces, et qui y sont, ainsi que leurs 16 — 242 — tuyaux, scellĂ©s Ă  fer, chaux et plĂątre; celui qui dĂ©truirait ou enlĂšverait ces objets troublerait le dĂ©tenteur dans la possession de sa maison, car ils en font partie essentielle tout comme un mur, une cloison, des grilles, la toiture, qui, en cas d’atteinte de la part d’un tiers, pourraient ĂȘtre l’objet de l’action possessoire. les principes ont Ă©tĂ© consacrĂ©s par arrĂȘt de la cour de cassation du 18 aoĂ»t 18 / 2 , rendu au prolit d’une commune qui avait poursuivi un particulier par action possessoire pour avoir enlevĂ© les barres de bois, cadenas et boulons d’une barriĂšre destinĂ©e Ăą la clĂŽture d’une place publique. Mais, malgrĂ© la gĂ©nĂ©ralitĂ© des termes dans lesquels est conçue l’opinion de M. Henrion de Pansey, il y a plus de difficultĂ© Ă  admettre la complainte pour les meubles immobilisĂ©s, sans adhĂ©rence au fonds, par exemple pour les nĂšgres, les mouches Ă  miel, les semences donnĂ©es au fermier, les pigeons, les lapins. Au premier aspect, il paraĂźt Ă©trange qu’on puisse l’intenter Ă  celui qui se sera emparĂ© de quelques abeilles, pigeons ou lapins, de pailles ou de grains destinĂ©s aux semences, de charrue, de faux ou autres instruments d’agriculture, de moutons ou chevaux qui se trouvaient dans les bĂątiments d’une ferme ou dans un champ qui en dĂ©pend. On peut objecter que toutes ces choses ne deviennent immeubles que par l’effet d’une intention ou d’une convention souvent inconnue des tiers, et qui ne peut avoir d’effet Ă  leur Ă©gard ; que la fiction lĂ©gale ne les concerne pas et qu’ils ne -doivent voir que leur nature rĂ©elle ; qu’il est impossible de se faire maintenir dans la possession de mouches Ă  miel, de lapins, de semences qui peuvent avoir Ă©tĂ© dĂ©truits ou avoir passĂ© en plusieurs mains; que — 243 — les seules actions qu’on puisse intenter Ă  leur sujet sont une demande en dommages-intĂ©rĂȘts devant les tribunaux civils, ou une action devant les tribunaux criminels pour vol ou pour destruction d’objets mobiliers. A cela on peut rĂ©pondre que le dĂ©tenteur possĂšde plutĂŽt une habitation garnie de nĂšgres, un colombier garni de pigeons, une garenne garnie de lapins, une ferme pourvue de ruches Ă  miel, de moutons, chevaux, instruments aratoires, semences, engrais, qu’il ne possĂšde des nĂšgres, des pigeons, des lapins, etc., et que, consĂ©quemment, c’est moins dans la possession de ces objets mobiliers qu’il s’agit de le maintenir ou rĂ©intĂ©grer que dans celle de la garenne, du colombier, de la ferme, dont tous ces objets font partie nĂ©cessaire, puisqu’ils sont destinĂ©s au service de l’exploitation, qu’ils constituent le domaine rural, qui, sans eux, pourrait devenir inutile et nĂ©gligĂ©. Ce sont les diffĂ©rentes parties d’un mĂȘme tout. L’accessoire est de la mĂȘme nature que le principal et doit en suivre le sort, d’aprĂšs la maxime Accessorium sequitur vicem rei principalis. Le possesseur annal de ces accessoires, lorsqu’ils y ont Ă©tĂ© placĂ©s depuis un an, demandera donc Ă  ĂȘtre maintenu dans la possession de la garenne, du colombier, de la ferme, et, consĂ©quemment, des objets qui en font partie. Sans doute cette action sera intentĂ©e rarement, soit parce que le possesseur prĂ©fĂ©rera prendre la voie criminelle, comme plus propre h rĂ©primer sĂ©vĂšrement l’atteinte portĂ©e Ă  ses droits, soit parce qu’il aura la conviction que l’auteur de la soustraction n’élĂšve aucune prĂ©tention Ă  la propriĂ©tĂ© ni Ă  la possession du surplus de son immeuble, et qu’une demande en dommages-intĂ©rĂȘts le satisfait pleinement ; mais il n’en est pas moins certain qu’il a la facultĂ© d’opter pour l’action posses- soire, qui devra ĂȘtre accueillie soit que le dĂ©fendeur ait commis le fait avec prĂ©tention annoncĂ©e Ă  la propriĂ©tĂ© ou Ă  la possession de la ferme, ou de l’objet particulier qui en a Ă©tĂ© distrait, soit qu’il ait renoncĂ© devant la justice Ă  cette prĂ©tention. Cette solution est conforme aux principes du droit commun ; car lorsque des bois, des blĂ©s, des foins sont coupĂ©s et enlevĂ©s, le possesseur a le choix ou de la voie criminelle, ou de la simple action civile en restitution de ces objets avec indemnitĂ©, ou de l’action posses- soire, pour ĂȘtre maintenu en possession de son hĂ©ritage, sans pouvoir ĂȘtre repoussĂ©, soit parce que ce sont des objets mobiliers qu’on lui a enlevĂ©s, que l’auteur ne se prĂ©tend ni propriĂ©taire ni possesseur, soit parce que ces objets sont dĂ©jĂ  consommĂ©s ou vendus. Mais si le fermier ou tout autre individu qui aurait soustrait des meubles adhĂ©rens ou non au fonds les avait ensuite vendus et livrĂ©s Ă  un tiers, l’action possessoire pourrait-elle ĂȘtre intentĂ©e contre celui-ci? Il est bien certain que la complainte peut ĂȘtre intentĂ©e contre le tiers qui aurait acquis un champ ou une maison de celui qui ne les dĂ©tiendrait que par suite d’un trouble ou d’une usurpation. Mais le Code civil a, relativement aux meubles, des dispositions importantes qu’il ne faut pas perdre de vue. Art. 564. Les pigeons, lapins, poissons, qui passent dans un autre colombier, garenne ou Ă©tang, appartiennent au propriĂ©taire de ces objets, pourvu qu’ils n’y aient point Ă©tĂ© attirĂ©s par fraude et artifice. Art. 2279. En lait de meubles, la possession vaut titre. NĂ©anmoins, celui qui a perdu ou auquel il a Ă©tĂ© volĂ© — 2io — une chose peut, la revendiquer pendant trois ans, Ă  compter du jour de la perte ou du vol, contre celui dans les mains duquel il la trouve, sauf Ă  celui-ci son recours contre celui duquel il la tient. Art. 2280. Si le possesseur actuel de la chose volĂ©e ou perdue l’a achetĂ©e dans une foire ou dans un marchĂ©, ou dans une vente publique, ou d’un marchand vendant choses pareilles, le propriĂ©taire originaire ne peut se la faire rendre qu’en remboursant au possesseur le prix qu’elle lui a coĂ»tĂ©. » Ces dispositions de la loi s’appliquent-elles Ă  tous les meubles sans distinction, ou ne concernent-elles que les meubles non devenus immeubles par destination ? Il nous semble difficile de pousser les consĂ©quences de l’immobilisation jusqu’à soustraire les meubles, qui en sont l’objet, Ă  l’empire de la rĂšgle Ă©tablie par les articles prĂ©citĂ©s. Ils ne sont immeubles que parce qu’on les considĂšre comme unis au fonds, et Ă  cause de leur corrĂ©lation avec ce fonds. Qu’ils aient le caractĂšre immobilier entre le propriĂ©taire et le fermier, ou Ă  l’égard de tous ceux qui connaĂźtraient la convention ou le fait qui les rendent tels; que celui qui, s’introduisant dans la maison, et enlevant le poĂȘle qu’il a vu pratiquĂ© dans le mur et scellĂ©, soit considĂ©rĂ© comme ayant attentĂ© Ă  l’immeuble, rien de mieux, parce qu’au moment de la voie de fait la chose a ce caractĂšre ; mais elle est devenue meuble aprĂšs l’attentat. A l’égard du tiers, elle n’est et ne peut ĂȘtre qu’un meuble, puisqu’elle est telle par sa nature, et que sa destination est dĂ©truite. Le lĂ©gislateur a bien senti la nĂ©cessitĂ© de consacrer des dispositions particuliĂšres sur les meubles. Ils passent rapidement de mains en mains, sans contrat, sans — 216 — que les parties qui se les transmettent se connaissent. Souvent tout est terminĂ© Ă  l’instant; l’un livre, l’autre paye. OĂč en serait le commerce si l’on pouvait, par des exceptions purement lĂ©gales, dont rien n’indique l’application Ă  tels on tels meubles, anĂ©antir un achat consommĂ© par la livraison et le payement ? Le Code a fait une exception pour le cas du vol ou de la perte de la chose ; mais cette exception, que la morale et l’équitĂ© justifient Ă©galement, doit ĂȘtre restreinte Ă  ses termes prĂ©cis. La seule action que donne la loi est la revendication dans le dĂ©lai de trois ans de la perte ou du vol. Une simple action possessoire n’est point une revendication elle ne pourrait y supplĂ©er. Si l’on pouvait l’admettre, la loi serait Ă©ludĂ©e. Celui qui aurait possĂ©dĂ© pendant un an se ferait maintenir par la complainte, et il en resterait lĂ , parce qu’il ne lui serait peut-ĂȘtre pas possible de prouver sa propriĂ©tĂ©. Cependant, d’aprĂšs le principe que celui qui a Ă©tĂ© maintenu au possessoire n’a plus rien Ă  prouver, il gagnerait dĂ©finitivement, puisqu’il rejetterait sur son adversaire la preuve de la propriĂ©tĂ©. Pour pouvoir revendiquer dans le cas de l’article prĂ©citĂ© , il faudra presque toujours agiter la question de propriĂ©tĂ©. Le tiers qui sera prĂ©venu d’avoir achetĂ©, volĂ© ou trouvĂ© une chose qu’on soutiendra ne pas lui appartenir, prĂ©tendra qu’il en est le propriĂ©taire. Comment maintenir en possession de cette chose celui qui, dans la rĂ©alitĂ©, n’y aurait aucun droit? Toutefois, ce que nous venons de dire cesserait d’ĂȘtre applicable si le tiers Ă©tait de mauvaise foi, s’il connaissait le caractĂšre immobilier de la chose. La fraude, en effet, fait exception Ă  toutes les rĂšgles. Il en serait ainsi, mĂȘme quand il aurait achetĂ© dans une foire, marchĂ©, vente publique, ou d’un marchand vendant des choses pareilles, l’est ce qu’a jugĂ© la cour de cassation, section criminelle, par arrĂȘt du 25 novembre 1825, rapportĂ© aux Annales de jurisprudence et de lĂ©gislation commerciales, vol. de 1825, p. 2/i5. Une curandiĂšrc avait vendu dans un marchĂ© public des toiles qui lui avaient Ă©tĂ© confiĂ©es pour les blanchir, La curandiĂšre fut poursuivie pour abus de confiance, et l’acheteur comme complice par recelĂ©. Ils furent condamnĂ©s l’un et l’autre. L’acheteur s’est pourvu en cassation, et l’un de ses moyens Ă©tait basĂ© sur la violation de l’article 2280 du Iode civil. 11 prĂ©tendait que cette disposition Ă©tait introduite dans l’intĂ©rĂȘt du commerce; que le lĂ©gislateur, en s’exprimant en termes gĂ©nĂ©raux qui n’admettaient aucune distinction, s’était fondĂ© sur la prĂ©somption lĂ©gale que celui qui achetait aussi publiquement une chose que tout autre que lui pouvait acquĂ©rir, Ă©tait Ă  l’abri de tout soupçon, et Ă©tait lĂ©gitime propriĂ©taire. Mais ce moyen fut rejetĂ©, attendu que l’art. 2280 du Iode civil n’est applicable qu’au dĂ©tenteur de bonne foi, et que dĂšs lors il ne pouvait l’ĂȘtre Ă  B..., dĂ©clarĂ© complice par recĂšlement, et par consĂ©quent constituĂ© en mauvaise foi. » Dans une autre espĂšce, un sieur QuarrĂ©, propriĂ©taire d’un bien rural auquel il avait attachĂ© un beau troupeau de moutons, l'afferma Ă  un sieur Moreau ; celui-ci conduisit ce troupeau Ă  un marchĂ© public, oĂč il le vendit Ă  un sieur Lesage. Le propriĂ©taire du domaine attaqua cette vente, qui fut cependant validĂ©e tant en premiĂšre instance qu’en appel. Il se pourvut en cassation, et l’un 218 — de ses moyens consistait Ă  prĂ©tendre que les articles 2270 et 2280 du Code civil, ci-dessus rapportĂ©s, ne pouvaient ĂȘtre invoquĂ©s par l’acquĂ©reur pour conserver le troupeau ; que ce troupeau Ă©tait immeuble par destination, aux termes des articles 523 et 524 du Code civil ; que celui qui acquiert un immeuble a non domino n’en devient propriĂ©taire que par une possession prolongĂ©e pendant le temps nĂ©cessaire pour constituer la prescription, et que jusque-lĂ  il profite seulement des fruits s’il est de bonne foi, circonstance qui n’existait pas. Mais par arrĂȘt du 8 mai 1827, qui, Ă  notre connaissance, n’a Ă©tĂ© insĂ©rĂ© dans aucun recueil, la chambre des requĂȘtes a rejetĂ© ce moyen, en disant que les articles de lois invoquĂ©s par le demandeur n’étaient pas applicables Ă  la cause; que la mauvaise foi n’était pas prouvĂ©e. SECTION IV. Des immeubles ameublis par stipulation. 11 nous reste Ă  dire un mot des immeubles qui ont Ă©tĂ© ameublis. D’aprĂšs l’article 1505 du Code civil, les Ă©poux ou l’un d’eux peuvent faire entrer dans la communautĂ© les immeubles qui leur appartiennent. Cette clause s’appelle ameublissement. Nous n’entretiendrions pas nos lecteurs de la difficultĂ© qui peut se prĂ©senter de savoir si la complainte est recevable Ă  raison de ces immeubles, si nous n’avions Ă©tĂ© tĂ©moin d’une discussion trĂšs-vive dans laquelle la nĂ©gative a Ă©tĂ© soutenue fortement. Ces immeubles, disait-on, perdent leur caractĂšre. Puisque la loi qui repousse la complainte pour les objets — 2i9 — mobiliers est conçue en termes gĂ©nĂ©raux qui n’admettent aucune distinction , qu’il s’agit d’une matiĂšre de la compĂ©tence d’un juge spĂ©cial, il faut s’en tenir strictement Ă  la rĂšgle. Or, la complainte Ă©tant admise pour les meubles qui, par leur adhĂ©rence Ă  des immeubles, deviennent immeubles fictifs, il faut la rejeter Ă  l’égard des immeubles qui, par la convention, changent de nature et deviennent des meubles fictifs. Mais ces raisonnements ne sont que de purs sophismes. Et d’abord, comme en matiĂšre de complainte il ne s’agit [ue de possession , que la propriĂ©tĂ© est incertaine, chacun prĂ©tendant avoir possĂ©dĂ© Ă  titre de propriĂ©taire; que ce serait d’ailleurs la convention seule qui changerait l’état des choses, il serait impossible d’admettre la doctrine que nous combattons, puisque les contrats n’ont d’ellet qu’entre les parties; que le juge de paix ne peut les interprĂ©ter, et que, souvent en les interprĂ©tant, il ne pourrait savoir si l’immeuble appartient aux Ă©poux ou au tiers qui les a troublĂ©s ou qu’ils ont troublĂ©. '.eux qui soutiennent l’opinion contraire Ă  la nĂŽtre mettent donc en fait ce qui est en question ; ils supposent comme constant que l’immeuble appartient en propriĂ©tĂ© aux Ă©poux, ou qu’il est compris positivement dans une clause d’ameublissement. Mais en admettant cette supposition comme la vĂ©ritĂ©, nous dirons qu’on ne serait pas mieux fondĂ© Ă  repousser la complainte. Il n’est pas vrai, il n’est pas mĂȘme possible que les immeubles deviennent des meubles par le seul effet d’une convention. Tout ce qui en rĂ©sulte, c’est que la communautĂ© en devient propriĂ©taire et en dispose sans en de- — 250 — voir d’indemnitĂ© Ă  celui des Ă©poux qui les a apportĂ©s; c’est un effet purement lĂ©gal et pas du tout matĂ©riel. Ce sont toujours des immeubles, puisqu’ils ne peuvent se transporter d’un lieu Ă  un autre. Toutes les raisons que nous avons donnĂ©es pour justifier la nĂ©cessitĂ© d’une complainte en matiĂšre immobiliĂšre s’appliquent assurĂ©ment aux immeubles soumis Ă  la clause d’ameublissement, tandis qu’aucune de celles que nous avons donnĂ©es pour repousser une semblable action en matiĂšre mobiliĂšre ne s’applique Ă  ces mĂȘmes immeubles. Nous nous livrerons, dans les chapitres suivants, Ă  de plus grands dĂ©veloppements Ă  l’égard de plusieurs points traitĂ©s dans celui-ci. Nous avons dĂ» nous borner, quant Ă  prĂ©sent, Ă  des idĂ©es gĂ©nĂ©rales, Ă  poser des principes ; nous en ferons plus tard l’application. CHAPITRE II Des divers immeubles et droits rĂ©els qui peuvent ĂȘtre l’objet des actions possessoires. Maintenant qu’il est bien Ă©tabli que les immeubles et droits rĂ©els immobiliers donnent seuls lieu Ă  l’action pos- sessoire, il convient d’examiner sĂ©parĂ©ment chacune des choses de Cette nature qui peuvent en devenir l’objet. L’article 3 du Code de procĂ©dure, aprĂšs avoir dĂ©signĂ© nominativement les actions relatives aux dĂ©placements de bornes, aux usurpations de terre, arbres, haies, fossĂ©s et autres clĂŽtures, ajoute et toutes autres actions possessoires. » La loi du 25 mai 1838 attribue aux juges de paix la connaissance des entreprises sur les cours d’eau servant Ă  l’irrigation des propriĂ©tĂ©s, et au mouvement des usines et moulins, des dĂ©nonciations de nouvel Ɠuvre, complaintes , rĂ©intĂ©grandes et antres actions possessoires. Ces articles de loi indiquent une premiĂšre division entre les choses expressĂ©ment Ă©noncĂ©es et celles qui ne le sont pas. SECTION ] rc . Des choses dĂ©signĂ©es par le Code de procĂ©dure et par la loi du 25 mai 1838 comme pouvant ĂȘtre l’objet des actions possessoires. Nous suivrons, dans les dĂ©veloppements que nous avons Ă  donner sur ce sujet, l’ordre adoptĂ© par le Code et par la loi de 1838 ; nous commencerons par le dĂ©placement de bornes. — 232 — § 1". Des dĂ©placements de bornes. Suivant les auteurs du Nouveau Denisart, MM. Merlin, Favard, au mot borne; Toullier, t. 3, p. l/i5; Pardessus, des Servitudes, n° 120, on entend par bornes, en gĂ©nĂ©ral, toute sĂ©paration naturelle ou artificielle qui marque les confins ou la ligne de division de deux hĂ©ritages contigus. On peut planter des arbres ou une haie pour servir de bornes, creuser un fossĂ©, Ă©lever un talus, un mur, etc. Mais on entend communĂ©ment par bornes, des pierres plantĂ©es debout et enfoncĂ©es en terre aux confins de deux hĂ©ritages. Quelquefois on plante Ă  chaque extrĂ©mitĂ© des confins deux pierres rĂ©unies, pour leur donner le caractĂšre de bornes; d’autres fois on n’en plante qu’une seule, et, pour la mieux caractĂ©riser, on brise une brique ou l’on fend une pierre en deux morceaux, que l’on rĂ©unit, puis on les place au-dessous de la borne. » Chez les Romains, les bornes Ă©taient sacrĂ©es. Selon Festus, in voce Termino, ils en avaient fait un dieu; ils sacrifiaient au dieu Terme, parce qu’ils croyaient que les bornes des hĂ©ritages Ă©taient sous sa protection Termine, tel lapis, lu quoque numen liabes. Ovin., Fast., 1. 2. C’était Ă  cause des sacrifices que faisaient les paĂŻens sur le lieu oĂč ils plaçaient ces bornes, qu’on y trouvait de la cendre et du charbon. L’usage de mettre ces signes sous les bornes, qui s’est maintenu jusqu’à nos jours, n’a probablement pas d’autre origine, — 253 — Numa Pompilius voua Ă  l’exĂ©cration publique et celui qui faisait passer la charrue sur une borne et les animaux dont il se servait Qui Terminum exarassit, ipse — 293 — 3° Il en serait de mĂȘme pour ce qui tient aux chemins de halage dont le sol est en gĂ©nĂ©ral la propriĂ©tĂ© des particuliers, sur lequel l’Etat est censĂ© n’avoir qu’une servitude, et pour ce qui est des lits abandonnĂ©s, aux termes de l’art. 563 , ou du cas oĂč le fleuve,.en se formant un bras nouveau , coupe et embrasse le champ d’un propriĂ©taire riverain et en fait une Ăźle art. 562 ; ou encore du droit de pĂȘche, dans le cas prĂ©vu par l’article h de la loi du 15 avril 1820. A plus forte raison, l’action possessoire est-elle admise dans toutes ces hypothĂšses, lorsque le dĂ©bat, au lieu de s’élever entre l’Etat et des particuliers, s’agite entre des particuliers seulement. Il y a plus, et le trouble dans la possession de9 eaux navigables ou de leurs accessoires qui ne donnerait pas lieu Ă  l’action possessoire entre l’Etat et les particuliers, rend au contraire cette action gĂ©nĂ©ralement recevable entre ceux-ci. Le gouvernement seul a le droit d’autoriser Ă  faire des prises d’eau dans les riviĂšres du domaine public; mais la concession une fois faite, les difficultĂ©s survenues entre divers concessionnaires ou riverains sont du ressort des tribunaux, surtout lorsqu’elles s’agitent au possessoire. Nous pourrions Ă©tayer notre opinion d’un dĂ©cret du 10 septembre 1808 et d’un arrĂȘt du conseil du 9 janvier 1828, rendu sur conflit. Nous convenons qu’on y aura recours rarement, parce qu’à raison du mĂ©lange ordinaire de l’intĂ©rĂȘt public et privĂ©, on pourra obtenir de l’administration la rĂ©pression du fait dommageable ; mais il pourra quelquefois en ĂȘtre autrement. L’action possessoire ne pourrait ĂȘtre refusĂ©e contre le — 29t — particulier qui arrĂȘterait le mĂ©canisme, les roues de l’usine ou s’installerait dans le bĂątiment. Il en serait de mĂȘme du cas oĂč, par exemple, il s’emparerait de la prisĂ© d’eau dont le voisin est en possession depuis un an, soit pour arroser sa prairie, soit pour faire mouvoir son moulin, ou s’il faisait clans la riviĂšre des travaux qui lui nuisent. La rĂ©intĂ©grande serait certainement admise s’il y avait eu violence ou voie de fait. Toutes les raisons que nous avons donnĂ©es comme fondement de cette action s’appliqueraient trĂšs-bien ici. Nous ne comprendrions pas que lorsqu’un particulier aurait commis les entreprises dont nous venons de parler, malgrĂ© la rĂ©sistance du possesseur, la rĂ©intĂ©grande pĂ»t ĂȘtre refusĂ©e Ă  ce dernier. Nous pensons que la complainte devrait aussi ĂȘtre admise. Le dĂ©fendeur ne pourrait repousser ni l’une ni l’autre action en demandant la production des titres ; car, dĂšs que l’administration peut autoriser les prises d’eau, les moulins, le possesseur est rĂ©putĂ©, Ă  l’égard des tiers, avoir obtenu la permission ; seulement cette non production serait un motif pour que le juge de paix exigeĂąt du demandeur une possession bien plus positive rĂ©sultant de faits non Ă©quivoques. Les auteurs du Xouveau Denisart, V° Complainte, citent un arrĂȘt du parlement de Paris, du 20 mai 1761, qui consacre en partie ces principes, en admettant la complainte dans une espĂšce qui mĂ©rite d’ĂȘtre remarquĂ©e, puisqu’il s’agissait d’une riviĂšre navigable. M. le duc de Chaulues Ă©tait en possession, pour faciliter l’empoissonnement de ses Ă©tangs, de faire lever tous les ans, depuis le 15 aoĂ»t jusqu’au 8 septembre, un — 295 — vantail de chaque Ă©cluse des moulins Ă©tant sur la riviĂšre de Somme navigable, dans une Ă©tendue de prĂšs de six lieues au-dessus et au-dessous de PĂ©ronne. Ayant Ă©tĂ© troublĂ© dans l’exercice de ce droit par le chapitre de PĂ©ronne, propriĂ©taire’ de plusieurs moulins sur cette riviĂšre, il forma complainte. Le chapitre soutenait que le droit prĂ©tendu par M. le duc de Chaulnes ne pouvait ĂȘtre qu’une servitude, parce que le terrain sur lequel il l’exerçait ne relevait pas de lui, mais du roi, et que le droit sur la chose d’autrui est servitude quand il n’appartient pas au seigneur; d’oĂč le chapitre concluait qu’il ne pouvait y avoir lieu Ă  la complainte. L’arrĂȘt rendu sur les conclusions de M. Joly de Fleury accueille la demande, maintient et garde le duc de Chaulnes dans sa possession, avec dĂ©fenses de l’y troubler, sauf au chapitre Ă  se pourvoir au pĂ©titoire, ainsi qu’il avisera. La jurisprudence moderne n’est pas moins positive. Nous avons citĂ© ci-dessus, et dans notre RĂ©gime des eaux, des dĂ©cisions qui ne laissent lĂ -dessus aucun doute. Vainement opposerait-on, comme contraire Ă  ces principes, un arrĂȘt du conseil du 1 er fĂ©vrier 1833, parce que, dans l’espĂšce sur laquelle il est intervenu, il y avait mĂ©lange de l’intĂ©rĂȘt public et privĂ©; il s’agissait d’exĂ©cuter dans la riviĂšre des travaux qui pouvaient en exhausser le lit, contrairement aux besoins de la navigation. Ainsi toute discussion entre particuliers qui a pour objet des servitudes, des droits d’usage et de propriĂ©tĂ© de cours d’eau, et autres charges rĂ©sultant d’actes et contrats, ou qui sont fondĂ©s sur la possession plus ou moins longue, donne lieu Ă  l’action possessoire, soit que les actes Ă©manent de l’administration, soit qu’ils renferment des conventions privĂ©es, car l’usage des eaux publiques peut ĂȘtre entre particuliers le sujet de conventions qui, bien que non opposables Ă  l’administration, n’en sont pas moins obligatoires*pour ceux qui les ont souscrites. Nous bornerons lĂ  nos observations sur cette matiĂšre, que nous avons traitĂ©e avec plus d’étendue dans notre ouvrage dĂ©jĂ  citĂ©. A ht. 2 . Des eaux qui ne sont ni na\ fables ni flottables. Nous subdiviserons cet article en deux numĂ©ros nous parlerons 1° des eaux qui ont un cours, 2° et des eaux qui n’en ont pas. Nous commence! ons par celles-ci. \ n 1 er . Des eaux qui 11*0111 pas de cours lacs, Ă©tangs, inares, citernes, puits, fontaines, eaux minĂ©rales. Les lacs, Ă©tangs, mares et citernes, sont des amas d’eaux dormantes plus ou moins considĂ©rables. 11 y a des lacs et Ă©tangs navigables auxquels il faut par consĂ©quent appliquer les rĂšgles que nous avons dĂ©jĂ  donnĂ©es relativement aux eaux de cette nature. Nous ne nous occupons ici que de ceux qui ne sont ni navigables ni flottables. Ces derniers, qu’ils appartiennent Ă  l’État, aux communes ou Ă  des particuliers, sont soumis aux principes que nous allons rappeler. Observons que le lac ne diffĂšre de l’étang qu’en ce que, pour l’ordinaire, il renferme une plus grande masse d’eau pie celui-ci. L’un et l’autre en renferment plus que les ‱ mares et citernes. Les mares sont particuliĂšrement en usage dans la Normandie, et les citernes dans le Midi de la France. On nourrit ordinairement du poisson dans les lacs et Ă©tangs. Leurs terrains sont en pente, fermĂ©s le plus souvent par une chaussĂ©e ou dĂ©versoir auquel on adapte une bonde ou petite vanne qui sert Ă  les mettre Ă  sec pour la pĂȘche et le curage. La mare est une cav itĂ© de peu d’étendue qui ne contient communĂ©ment que des eaux pluviales, et qui sert au puisage, au lavage, Ă  l’abreuvage des bestiaux. La citerne est un trou dont le fond, pavĂ©, glaisĂ© et couvert de sable, est destinĂ© Ă  recevoir et conserver les eaux pluviales, et qui, Ă  peu de choses prĂ©s, a la mĂȘme destination que la mare. Aucune loi ne dĂ©termine de distance Ă  observer entre l’étang, la mare ou citerne que l’on Ă©tablit, et le fonds voisin. 11 faut se reporter Ă  ce que nous avons dit, page 283, pour les fossĂ©s, et reconnaĂźtre qu’en gĂ©nĂ©ral cet Ă©tablissement ne doit donner lieu qu’à l’action pĂ©ti— toire. Si les eaux, par leur infiltration ou autrement, nuisaient aux voisins, ceux-ci auraient le droit de faire rĂ©parer le dommage. Ils ne seraient mĂȘme pas tenus d’attendre l’effet des eaux ou des travaux ; ils pourraient poursuivre l’auteur des ouvrages, ainsi que nous l’avons vu prĂ©cĂ©demment; car la crainte fondĂ©e du dommage empĂȘche de jouir paisiblement, dĂ©prĂ©cie mĂȘme la propriĂ©tĂ©; il y a trouble Ă  la possession. Le second projet de Code rural contient Ă  cet Ă©gard des dispositions qui, bien que n’étant pas des lois, peuvent ĂȘtre ici utilement rappelĂ©es Art. 203. Celui qui fait construire un Ă©tang ne peut inonder aucune partie des hĂ©ritages voisins, sans le cou- — 298 — sentement des propriĂ©taires ou sans un titre formel ayant moins de trente ans de date. Il sera tenu de laisser Ă  dĂ©couvert, entre le bord de son Ă©tang et l’hĂ©ritage voisin, un espace suffisant, suivant les circonstances locales, que ledit hĂ©ritage ne soit point incommodĂ© par les eaux. Cette distance sera rĂ©glĂ©e de grĂ© Ă  grĂ© entre les parties ou par le juge de paix, sur un avis d’experts, et sans le recours au tribunal de premiĂšre instance. Art. 20/i. Les propriĂ©taires d’étangs sont obligĂ©s d’entretenir en bon Ă©tat les chaussĂ©es, digues et dĂ©charges, Ă  peine de rĂ©pondre des dommages qui rĂ©sulteraient de leur nĂ©gligence Ă  cet Ă©gard. Les cas fortuits ou de force majeure demeurent exceptĂ©s. » Lorsque les divers objets dĂ©signĂ©s ci-dessus ont un dĂ©versoir, l’étendue du terrain qui les constitue et celle des hĂ©ritages voisins sont faciles Ă  dĂ©terminer. Le propriĂ©taire de l’étang, etc., est rĂ©putĂ© l’ĂȘtre de tout le terrain que l’eau couvre quand elle est Ă  la hauteur du dĂ©versoir ; par consĂ©quent, la possession que les voisins peuvent acquĂ©rir pendant les basses eaux, sur partie de ce terrain, est prĂ©caire, inefficace, et ne peut autoriser la complainte, comme l’a jugĂ© un arrĂȘt de la cour de cassation du 25 avril 1811, Ă  moins toutefois qu’ils n’aient fait des constructions qui empĂȘchent les eaux de revenir baigner le terrain qu’elles occupent ; car alors la possession serait valable et bien diffĂ©rente de celle invoquĂ©e dans l’espĂšce de l’arrĂȘt ci-dessus, qui consistait seulement Ă  avoir coupĂ© des herbes. L’art. 558, en effet, n’a statuĂ© que pour le cas d’alluvion, c’est-Ă -dire oĂč les choses restent en mĂȘme Ă©tat, ce qui n’einpĂȘche pas d’appliquer — 299 — les rĂšgles clu droit commun sur la possession et la prescription ; Ă  plus forte raison, le principe que l’alluvion n’a pas lieu Ă  l’égard des Ă©tangs cesse-t-il d’ĂȘtre applicable quand l’étang a disparu depuis plus de trente ans et qu’il n’existe plus qu’un simple fossĂ© avec cours d’eau. ArrĂȘt de la cour de cassation du 28 avril 1845. Par consĂ©quent, lorsque l’étang a cessĂ© d’exister depuis trente ans, ceux qui en ont possĂ©dĂ© le lit pendant cette pĂ©riode en ont acquis la propriĂ©tĂ© par la prescription arrĂȘt de la cour de cassation du 29 dĂ©cembre 1845, et, aprĂšs une annĂ©e de possession pleine et entiĂšre du terrain de l’étang, le possesseur troublĂ© pourrait intenter l’action possessoire. D’un autre cĂŽtĂ©, le propriĂ©taire de l’étang n’acquiert aucun droit sur les terres que les eaux couvrent, soit par suite de crues extraordinaires, soit par l’exhaussement du dĂ©versoir. Art. 558 du Code civil. La disposition de cet article n’est que la reproduction du principe Ă©tabli, en droit romain, par la loi 12 ff. de acquir. re. do-min. Lacus et stagna licet interdum cres- cant interdum exarescant, suos tamen terminas retincnt; ideoque in his jus alluvionis non adgnoscitur. L’inondation, dans le second cas l’exhaussement du dĂ©versoir, est mĂȘme un dĂ©lit, aux termes de la loi du 6 octobre 1791 et de l’art. 457 du Code pĂ©nal. Dans les deux cas, eĂ»t-elle durĂ© pendant une annĂ©e, elle ne pourrait autoriser la complainte. Il en est dilfĂ©remment des terres que les eaux couvrent par suite d’envahissements successifs occasionnĂ©s par le flottement. Comme, dans ce cas, ces envahissements ne sont point le rĂ©sultat de l’élĂ©vation du dĂ©versoir, ni du dĂ©faut d’entretien des digues, ni enfin du fait du pro- — 300 — priĂ©taire, mais qu’au contraire 1 Ă©tang ne s’est agrandi que successivement et par une cause naturelle, le propriĂ©taire profite de ces envahissements et conserve les terres envahies, qui dĂšs lors deviennent imprescriptibles comme les rives mĂŽmes de l’étang. ArrĂȘt du 17 dĂ©cembre 1838. 11 faut en dire autant des terrains couverts pĂ©riodiquement durant les crues annuelles de la saison d’hiver, dalla disposition de l’art. 558 du Code civil, de laquelle il rĂ©sulte que le propriĂ©taire d’un Ă©tang ne peut profiter des crues extraordinaires, ne doit s’entendre que des crues accidentelles et non des crues pĂ©riodiques. Les terrains couverts par ces derniĂšres sont rĂ©putĂ©s faire partie intĂ©grante du lit et des rives de l’étang et participent Ă  son imprescriptibilitĂ©. ArrĂȘt du 9 novembre 18/il. L’application de l’art. 558 entraine plus de difficultĂ© lorsqu’il n’existe pas de dĂ©versoir certain. Cependant il faut bien se rattacher au fait matĂ©riel de la possession qui doit servir de rĂšgle de dĂ©cision. La loi de 1791 dĂ©fendant d’inonder l’hĂ©ritage voisin, lors mĂȘme que l’étang n’apas de dĂ©versoir, il est indispensable de consulter l’état des lieux et l’étendue de la jouissance respective pour connaĂźtre s’il y a ou non dĂ©lit. La possession annale doit ĂȘtre admise, autoriser la complainte et conduire Ă  la solution de la question, comme la possession trentenaire servirait Ă  dĂ©cider celle de propriĂ©tĂ©. Art. 271, deuxiĂšme projet de Code rural. Dans le mĂȘme cas, les titres peuvent ĂȘtre utilement consultĂ©s et servir Ă  fixer le caractĂšre et l’étendue de la possession. C’est ce qui rĂ©sulte de cet art. 271 et d’un arrĂȘt de la cour de cassation du 9 aoĂ»t 1831, conçu dans les termes suivants Attendu que l’arrĂȘt attaquĂ© a reconnu, en droit, que — 301 — lorsqu’il s’agissait de dĂ©terminer l’étendue d’un Ă©tang, c’était le dĂ©versoir qui devait, indĂ©pendamment du titre, rĂ©gler la contenance de l’étang ; mais qu’il a constatĂ©, en fait, que l’ancien dĂ©versoir avait Ă©tĂ© dĂ©truit clandestinement par les propriĂ©taires, et qu’il n’en subsistait aucune trace ; qu’en se fondant par ce motif sur les Ă©nonciations du titre, il n’a pas violĂ© l’art. 558 du Code. » Il peut arriver qu’un Ă©tang appartienne Ă  plusieurs particuliers qui y exercent des droits diffĂ©rents. Nous voyons dans l’espĂšce d’un arrĂȘt de la cour de cassation du 31 janvier 1838, que la pĂȘche d’un Ă©tang appartenait Ă  l’un, et qu’un autre avait droit d’en recueillir les produits quand il Ă©tait Ă  sec. Lorsque la propriĂ©tĂ© des lac, Ă©tang, etc., est reconnue, celui qui n’a fait qu’y puiser ne peut prĂ©tendre avoir acquis aucun droit de propriĂ©tĂ© ni de servitude. Telle est l’opinion d’Houard, qu’un arrĂȘt de cassation du 23 novembre 1808 a consacrĂ©e. L’auteur s’exprime ainsi, Dictionnaire de droit normand, V° Mure. Le propriĂ©taire d’un fonds oĂč est une mare, dit-il, peut en faire tel usage qu’il veut; il peut en refuser l’usage Ă  scs voisins, et quelque longue possession qu’ils aient eue d’y puiser de l’eau, cette possession est une servitude qui ne peut faire un titre. La possession, en ce cas, pouvant dĂ©river de tolĂ©rance comme d’un droit, est douteuse, et dans le doute on doit se dĂ©terminer en faveur de la libĂ©ration. Le prĂ©texte d’utilitĂ© publique ne peut valoir en ce cas. Le propriĂ©taire du fonds n’est obligĂ© de secourir la communautĂ© que lorsqu’elle n’est pas en Ă©tat de se procurer les secours que, sans s’incommoder, il peut lui donner; or, ii l’exception du cas d’absolue nĂ©cessitĂ©, les — 302 habitants peuvent se creuser des mares dans les lieux qui leur appartiennent ; mais ils n’ont pas le droit d’obliger le propriĂ©taire d’une mare Ă  la faire subsister; il est libre de la supprimer quand il le croit convenable Ă  ses intĂ©rĂȘts. » Il en serait diffĂ©remment si les habitants avaient fait, mĂȘme conjointement avec le propriĂ©taire, tous les actes de possession que comporte un immeuble de cette nature ; par exemple, si, outre les lavage, puisage et abreuvage, ils avaient pĂȘcbĂ©, curĂ©, emportĂ© les terres et les bois ou arbrisseaux qui y auraient pris naissance. La rĂ©union de tous ces faits serait nĂ©cessaire. Alors la possession serait commune. Une annĂ©e suffirait pour autoriser la complainte, qui aurait pour but, de la part de ceux qui auraient Ă©tĂ© troublĂ©s par leurs cointĂ©ressĂ©s, de se faire maintenir dans une possession en commun avec eux. Il n’est pas nĂ©cessaire, en effet, pour intenter l’action possessoire, d’avoir une possession exclusive. ArrĂȘt de la cour de cassation du 19 novembre 1828. Si la jouissance Ă©tait exclusive, ce serait dans une possession exclusive que le juge maintiendrait. Mais si la propriĂ©tĂ© originaire de l’étang n’était pas constatĂ©e ou avouĂ©e, le juge ne pourrait exiger des faits de possession aussi prĂ©cis ni aussi multipliĂ©s. Il adjugerait la possession exclusive Ă  celui qui seul aurait fait quelques-uns de ces actes, ne fussent-ils que de puisage, lavage, abreuvage, ou la jouissance commune Ă  ceux qui les auraient exercĂ©s Ă©galement. Lorsqu’un Ă©tang est dessĂ©chĂ© en exĂ©cution de la loi du 1 h frimaire an II, les droits de pĂȘche, d’abreuvage ou puisage qu’on peut y avoir sont nĂ©cessairement suspendus; mais ils revivent si l’étang est rĂ©tabli, Ă  moins que — 303 — le rĂ©tablissement n’ait lieu qu’aprĂšs trente ans. Cette solution est vraie, mĂȘme quand l’étang appartient Ă  l’État et que c’est lui qui l’a dessĂ©chĂ©. ArrĂȘt de la cour de cassation du 30 dĂ©cembre 1839. L’art. 266 du second projet de Code rural contient une disposition qui nous paraĂźt conforme aux principes, et que nous adoptons, sauf le dĂ©lai dans lequel il circonscrit la rĂ©clamation. Il est ainsi conçu En cas d’inondation, crue ou dĂ©bordement d’eau, le propriĂ©taire de l’étang aura le droit de suivre son poisson sur le terrain d’autrui, mĂȘme jusqu’à la fosse de l’étang supĂ©rieur, pendant huit jours, Ă  compter de celui oĂč l’inondation aura cessĂ©, le propriĂ©taire voisin Ă©tant prĂ©sent ou dĂ»ment appelĂ©. Il aura le mĂȘme droit, soit pendant le temps de la pĂȘche, soit en cas de rupture des chaussĂ©es, digues, grilles ou grillons, Ă  la charge, dans tous les cas, de payer les dommages occasionnĂ©s par cette recherche. Mais si le poisson a passĂ© dans un autre Ă©tang Ă©galement empoissonnĂ©, il n’y aura pas lieu au droit de suite, pourvu que le poisson n’ait point Ă©tĂ© attirĂ© par fraude ou artifice. » Il est bien Ă©vident que si le voisin refusait de rendre le poisson jetĂ© sur son terrain par une inondation, le propriĂ©taire de l’étang ne pourrait, en se fondant sur ce que ce poisson est immeuble par destination, intenter l’action possessoire ; car il n’est pas troublĂ© par le fait de son adversaire dans la possession de cet Ă©tang. Il y aurait plus de difficultĂ© Ă  le dĂ©cider ainsi, dans le cas oĂč le poisson aurait Ă©tĂ© attirĂ© dans l’étang voisin par fraude et artifice. Le poisson faisant partie de l’immeuble, il semble que ce fait pourrait ĂȘtre pris pour — 30-i — trouble Ă  la possession ; que l’on pourrait demander Ă  y ĂȘtre maintenu, avec restitution du poisson ; mais il vaudrait mieux se pourvoir simplement en dommages-intĂ©rĂȘts. L’usurpation, l’entreprise sur un lac, Ă©tang, mare ou citerne, peuvent avoir lieu soit en attirant, en pĂȘchant le poisson, en dĂ©rivant une partie de leurs eaux, en s’emparant d’une portion de leur lit, en y abreuvant ses bestiaux, y puisant, lavant, ou de toute autre maniĂšre qui constitue l’usage de la chose, permis au seul propriĂ©taire ou Ă  celui qui a acquis des droits. L’art. 205 du 2” projet de iode rural est ainsi conçu Les propriĂ©taires d’hĂ©ritages voisins d’un Ă©tang ne peuvent, d’aucune maniĂšre, dĂ©tourner ou attirer les eaux qui l’alimentent, ni avoir des fossĂ©s derriĂšre ou plus prĂšs de sa chaussĂ©e qu’à, la distance de deux mĂštres au moins, afin de prĂ©venir l’infiltration des eaux. » Cette disposition est sage dans ses deux parties ; mais, dans l’état actuel de notre lĂ©gislation, la seconde ne peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e par les tribunaux comme une rĂšgle gĂ©nĂ©rale; ils ont au contraire un pouvoir discrĂ©tionnaire et doivent se dĂ©terminer d’aprĂšs les circonstances. De leur cĂŽtĂ©, ces propriĂ©taires ont action, comme nous l’avons vu, contre le constructeur de l’étang qui, par sa trop grande proximitĂ©, leur cause ou peut leur causer un dommage, ou qui les inonde ; ils auraient Ă©galement action dans le cas oĂč le dĂ©faut de curage, l’établissement d’un routoir, nuiraient Ă  la salubritĂ© ou Ă  la propriĂ©tĂ©. Ils pourraient user de la complainte. Ces principes seraient de mĂȘme applicables au cas oĂč l’étang serait d’origine nationale, ainsi que l’a dĂ©cidĂ© la cour de cassation, le 16 janvier 1832, pour celui du Plessis-Piquet. Il a Ă©tĂ© aussi jugĂ© par cet arrĂȘt que lors- — 305 — que l’État vend les eaux provenant de l’étang, avec dĂ©claration que la jouissance des eaux ne comprend point la propriĂ©tĂ© fonciĂšre ni la pĂȘclie de cet Ă©tang, ni celle de ses francs-bords, qui pourront toujours ĂȘtre louĂ©s par l’État comme par le passĂ©, l’acquĂ©reur n’a droit qu’auxe aux qui sortent, coulent et se rĂ©pandent en dehors; que l’État, ou celui cpii le reprĂ©sente, a le droit d’enclore cet Ă©tang, en laissant passage aux eaux, et de profiter de ses glaces. Les principes ci-dessus sont encore applicables au cas oĂč il s’agit de dommages causĂ©s Ă  l’aide de travaux faits Ă  la chaussĂ©e et au dĂ©versoir d’un Ă©tang, soit qu’ils aient Ă©tĂ© autorisĂ©s par l’administration, soit que l’auteur des travaux ait dĂ©passĂ© les termes de la permission. ArrĂȘt de la cour de cassation du 23 mai 1831. Le puits est un trou profond creusĂ© de main d’homme, ordinairement revĂȘtu de pierre en dedans, et fait exprĂšs pour en tirer de l’eau. 11 est loisible Ă  tout propriĂ©taire de creuser un puits dans son propre fonds; le voisin ne pourrait intenter contre lui une action possessoire Ă  raison de ce fait, quand mĂȘme son puits ou sa source en seraient taris, pourvu que les travaux aient, Ă©tĂ© entrepris non dans l’intention de nuire, mais dans un but d’utilitĂ©. Il devrait y avoir exception, suivant nous, dans le cas oĂč, en creusant un puits, on ferait tarir des sources d’eaux minĂ©rales, et qu’on exposerait un Ă©tablissement thermal Ă  ĂȘtre dĂ©truit. Il y aurait mĂȘme lieu, dans ce cas, Ă  l’action en dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre, en se conformant toutefois Ă  ce que nous avons dit dans le titre 1" en traitant de cette action ; car il importerait de ne pas laisser porter Ă  l’établissement un prĂ©judice qu’il pourrait ĂȘtre impossible de rĂ©parer aprĂšs l’achĂšvement des 20 — 306 — travaux. Voyez sur cela et sur la compĂ©tence des autoritĂ©s notre RĂ©gime des eaux et l’art. 129, second projet de Code rural. L’art. 67A du Code civil exige que celui qui fait creuser un puits, prĂšs d’un inur mitoyen ou non, laisse la distance prescrite par les rĂšglements et usages particuliers, ou fasse les ouvrages prescrits par ces mĂȘmes rĂšglements ou usages pour Ă©viter de nuire au voisin. L’infraction k cette disposition donnerait lieu de la part de celui-ci k une action soit en complainte, soit en dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre, comme dans le cas de plantation trop rapprochĂ©e de l’hĂ©ritage voisin. L’art. 6 de la loi du 25 mai J 888 donne pour ce cas une nouvelle attribution aux juges de paix. L’effet de cette innovation et de l’action qui en rĂ©sulte a Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ© par nous page 263. La loi garde un silence absolu sur le creusement de puits ailleurs qu’auprĂšs d’un mur. Il n’y a, dans ce cas, d’autre rĂšgle que le droit commun qui oblige l’auteur du dommage Ă  le rĂ©parer. En cas de contestation, les tribunaux seraient les arbitres de la nĂ©cessitĂ© et de la nature des prĂ©cautions Ă  prendre pour l’éviter ou le rĂ©parer. Les rĂ©flexions que nous avons faites ci-dessus, pour les fossĂ©s ou Ă©tangs, s’appliquent aux puits, avec quekfhes modifications que la diffĂ©rence de nature des uns et des autres fera facilement sentir. Il faut en dire autant de la profondeur Ă  donner au puits, sur laquelle la loi se tait Ă©galement. Les puits peuvent ĂȘtre possĂ©dĂ©s par un seul ou en commun k titre de propriĂ©tĂ©, de servitude ou de bail. Les actions possessoires dont ils deviennent l’objet — 307 — dans ces divers cas sont rĂ©gies par les principes dĂ©jĂ  exposĂ©s et par ceux cpie nous expliquerons bientĂŽt relativement aux contestations de cette nature. La fontaine est un lieu d’oĂč l’eau jaillit du sein de la terre, et qui est ordinairement disposĂ© par la main de l’homme pour donner aux particuliers et au public la facilitĂ© d’y aller puiser et de l’employer Ă  leurs besoins. Dans les campagnes, les fontaines sont de la plus grande simplicitĂ© ; mais dans les villes, elles offrent parfois de trĂšs-beaux monuments. Il y a aussi des fontaines, puits ou sources d’eaux salĂ©es dont le propriĂ©taire peut disposer Ă  son grĂ©, lorsqu’il emploie les eaux dans leur Ă©tat naturel, mais non lorsqu’à l’aide de procĂ©dĂ©s, ou prĂ©parations quelconques, il les convertit en sels ; dans ce dernier cas, il est soumis Ă  quelques formalitĂ©s prĂ©alables et Ă  une surveillance propres Ă  assurer le recouvrement des impĂŽts, aux termes de la loi du 24 avril 1806 et du dĂ©cret du 11 juin suivant; il est assujetti Ă  obtenir une concession du gouvernement. Il en est de mĂȘme pour l’exploitation des mines de sel gemme qui rentrent dans l’application de la loi du 21 avril 1810, cjui n’est qu’indicative dans son Ă©nonciation des matiĂšres minĂ©rales arrĂȘt de la cour de cassation du 8 septembre 1832, ou pour une exploitation proprement dite de puits ou sources d’eaux salĂ©es. Nous expliquerons plus bas, dans divers articles, comment les rĂšgles des actions pos- sessoires y sont applicables ; nous dirons seulement Ă  prĂ©sent que nul ne peut les exploiter sans permission du gouvernement, Ă  peine d’ĂȘtre poursuivi correctionnellement, car c’est une matiĂšre d’ordre public qui e9t rĂ©gie par les lois et l’acte de concession. Personne fie peut acquĂ©rir de possession contraire. — 308 — Nous parlerons des actions possessoires dont les eaux salĂ©es peuvent ĂȘtre l’objet dans l’article suivant, en nous occupant spĂ©cialement des sources. N° 2. Des eaux qui ont un cours. Nous suivrons les eaux de cette espĂšce dans les diffĂ©- rentes variations que leur cours peut offrir. Celui qui a une source dans son fonds, quelle soit d’eau ordinaire, thermale ou salĂ©e, peut en usera sa volontĂ©, sauf le droit que le propriĂ©taire du fonds infĂ©rieur aurait acquis par titres ou par prescription art. 041 du Code civil, et sauf pour les sources d’eaux salĂ©es l’application de la loi du 20 juin 18/jO, d’aprĂšs laquelle nulle exploitation de sources ou de puits d’eau salĂ©e ne peut avoir lieu qu’en vertu d’une autorisation du gouvernement, et sauf aussi l’application des lois et rĂšglements relatifs aux eaux minĂ©rales ou thermales. Celui qui n’aurait dans son fonds qu’une des sources servant Ă  alimenter un ruisseau venant des fonds supĂ©rieurs, ne pourrait pas disposer de tout le cours d’eau qui traverserait son hĂ©ritage. Il n’aurait le droit Ă©tabli par l’art. 641 du Code civil que sur la source qui surgit dans sa propriĂ©tĂ©. Mais il peut, aprĂšs avoir usĂ© de sa source, ou en laisser couler les eaux naturellement sur les fonds infĂ©rieurs qui sont obligĂ©s de les recevoir art. 640, ou les diriger vers d’autres fonds, soit qu’ils lui appartiennent, soit qu’ils appartiennent Ă  des tiers, pourvu toutefois que les propriĂ©taires de ceux-ci consentent Ă  les recevoir, lorsque la pente naturelle des lieux ne les y assujettit point. Il suit de lĂ  1° que le propriĂ©taire immĂ©diatement infĂ©rieur ou plus Ă©loignĂ© ne pourrait intenter d’action possessoire contre le propriĂ©taire de la source, lois mĂȘme qu’elle serait nouvelle et que son cours n’aurait pas encore durĂ© une annĂ©e, quelque dommage, quelques dĂ©gradations qui en rĂ©sultassent pour lui, Ă  moins que par des travaux on ne lui eĂ»t donnĂ© une autre direction plantĂ©s sur les chemins vicinaux, leur appartiendraient. Les actions pĂ©titoires et possessoires dont ils pourraient ĂȘtre l’objet seraient de la compĂ©tence des tribunaux, soit qu’elles eussent lieu entre la commune et les particuliers, ou entre ceux-ci seulement. ArrĂȘts du conseil des 28 aoĂ»t 1827, l/j mai 1828, 15 septembre 1831. Une instruction ministĂ©rielle du 16 novembre 1839 a ci'éé une nouvelle classe de chemins publics appelĂ©s ruraux, qui ne sont ni vicinaux ni dĂ©partementaux. Il est reconnu que les premiers sont rĂ©gis par les mĂȘmes principes que les autres propriĂ©tĂ©s communales ou privĂ©es, et que, consĂ©quemment, ils peuvent ĂȘtre l’objet des actions possessoires et pĂ©titoires de la part des particuliers, avec envoi en possession rĂ©elle en cas de succĂšs de ces actions. N" 3. Chemins privĂ©s ou de desserte. Ces chemins peuvent appartenir aux communes ou aux particuliers, soit Ă  titre de propriĂ©tĂ© exclusive ou indivise du sol, soit Ă  titre de servitude sur ce mĂȘme sol. Dans ce second cas, les chemins ou passages sont rĂ©gis par les principes sur les servitudes. Nous renvoyons les explications dont ils peuvent ĂȘtre l’objet Ă  l’article dans lequel nous traiterons des .actions possessoires relatives aux servitudes en gĂ©nĂ©ral. Quant aux chemins existant Ă  titre de propriĂ©tĂ©, ils sont soumis aux principes qui rĂ©gissent les autres hĂ©ritages consacrĂ©s Ă  des usages diffĂ©rents. Souvent la possession animo domini est difficile Ă  Ă©tablir, parce que les titres du demandeur et du dĂ©fendeur sont muets sur ce point. Lorsque celui qui se prĂ©tend troublĂ© n’a d’autre acte de jouissance Ă  opposer que le fait de passage, le dĂ©- — 347 — fendeur peut soutenir que ce n’est lĂ  que l’exercice d’une servitude discontinue, qui ne peut constituer une possession valable ; mais si, d’un autre cĂŽtĂ©, les localitĂ©s attestent que le demandeur a dĂ» laisser une partie de terrain pour ne servir que de passage, de moyen d’exploitation nĂ©cessaire, qu’il ait fait tous les actes dont ce terrain est susceptible d’aprĂšs sa nature, que nul autre ne s’en prĂ©tende propriĂ©taire, la dĂ©fense du perturbateur ne saurait ĂȘtre admise. 11 n’en est pas de ce cas comme de celui oĂč le demandeur avoue la propriĂ©tĂ© de son adversaire et se borne Ă  rĂ©clamer une servitude ; alors un titre est nĂ©cessaire, comme nous le verrons bientĂŽt. La cour de cassation a consacrĂ© ces principes par arrĂȘt du 25 aoĂ»t 1829, sur le pourvoi du marquis de Radepont celui-ci demandait Ă  ĂȘtre maintenu dans la possession d’un chemin privĂ© conduisant Ă  son habitation ; sa possession se rĂ©duisait au passage. Il ne rĂ©clamait pas une servitude ; il se disait propriĂ©taire du sol sur lequel il avait passĂ©. Le tribunal des Andelys avait repoussĂ© sa demande, parce que sa possession n’était que l’exercice d’une servitude discontinue ; mais son jugement fut cassĂ© par le motif que le demandeur s’était prĂ©tendu propriĂ©taire du sol. Ces principes s’appliqueraient, bien entendu, Ă  une commune qui rĂ©clamerait un chemin comme public. Un arrĂȘt de la cour de cassation du 7 mars 1837 a dĂ©cidĂ© avĂšc raison qu’il appartenait aux juges d’apprĂ©cier les circonstances, les localitĂ©s et les actes, et a rejetĂ© le pourvoi formĂ© par un sieur Bernard contre un arrĂȘt de la cour de Caen qui avait adjugĂ© la propriĂ©tĂ© d’un chemin Ă  une commune, en se fondant notamment sur ce que le public y avait toujours passĂ© sans obstacle, et sur des inductions tirĂ©es des titres et de l’état des lieux. — 348 Un autre arrĂȘt de la mĂȘme cour, du 18 avril 1838, a dĂ©cidĂ© qu’on avait pu admettre, dans l’intĂ©rĂȘt d’une commune demanderesse au pĂ©titoire, la preuve que depuis plus de trente ans le terrain en litige avait Ă©tĂ© reconnu et constamment pratiquĂ© comme chemin vicinal publiquement et paisiblement. Au lieu d’intenter l’action pĂ©titoire, la commune aurait pu se borner Ă  agir au possessoire, et le juge de paix aurait Ă©tĂ© compĂ©tent pour en connaĂźtre, en prenant les mĂȘmes Ă©lĂ©ments pour base de sa dĂ©cision. 11 ne faudrait pas nĂ©anmoins donner trop de latitude Ă  ce principe. Si les circonstances de localitĂ©s ou autres dĂ©montraient que l’articulation de propriĂ©tĂ© n’était qu’un moyen imaginĂ© pour Ă©luder l’application de la rĂšgle qui prohibe l’action possessoire pour servitude discontinue, le juge ne devrait pas s’y arrĂȘter; mais il devrait avoir soin de faire la dĂ©claration expresse de son opinion. A plus forte raison celui qui, rĂ©clamant un chemin comme propriĂ©taire du sol, produirait un titre par lequel sa propriĂ©tĂ© serait constatĂ©e, devrait-il ĂȘtre maintenu par le juge de paix dans sa possession, dont il Ă©tablirait ainsi le caractĂšre et la lĂ©gitimitĂ©. N" 4. Chemins de fer. Les chemins de fer, d’une invention assez rĂ©cente, sont trĂšs en usage aux Etats-Unis et en Angleterre. Le plus moderne et le plus perfectionnĂ© de ces chemins, dans la Grande-Bretagne, est celui de Manchester Ă  Liverpool, sur lequel on fait quinze lieues Ă  l’heure, dans des chars ou wagons, Ă  l’aide de machines Ă  vapeur dites locomotives, sans que cette excessive cĂ©lĂ©ritĂ© fasse Ă©prouver aux voyageurs aucune incommoditĂ©. — 349 — Il existe aussi des chemins de fer en Allemagne et en Belgique. L’établissement de ces moyens de communication ne date, en France, que de 1823. Les premiers qui y aient Ă©tĂ© Ă©tablis, sont situĂ©s Ă  Saint-Etienne Loire ou dans les environs ; mais depuis, il en a Ă©tĂ© construit plusieurs autres sur diffĂ©rents points de la France, notamment en vertu de la loi du 11 juin 1842. 11 ne faut pas croire qu’il entre beaucoup de fer dans l’établissement de ces chemins ; au contraire, on n’y voit que deux baguettes appelĂ©es rails, dans lesquelles s’engrĂšnent les roues des chars destinĂ©s Ă  les desservir. L’introduction des chemins de fer en France il ayant eu lieu, comme nous venons de le dire, que depuis un petit nombre d’annĂ©es, la catĂ©gorie dans laquelle ils doivent ĂȘtre classĂ©s, leur rĂ©gime, la compĂ©tence des autoritĂ©s en cas de dĂ©gradation, anticipation, ont Ă©tĂ© incertains jusqu’à la loi du 15 juillet 1845, dont les bases ont Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©es par une ordonnance royale du 15 novembre 184 du Code civil. Sont immeubles par destination, les chevaux, agrĂšs, outils et ustensiles servant Ă  l'exploitation ; mais on ne considĂšre comme chevaux destinĂ©s Ă  l’exploitation que ceux qui sont exclusivement attachĂ©s aux travaux intĂ©rieurs des mines ; Ă  plus forte raison en serait-il ainsi des esclaves dans les colonies, et, par voie de consĂ©quence, ils cesseraient d’ĂȘtre immeubles dĂšs qu’ils seraient dĂ©tachĂ©s de ce service. Argument des arrĂȘts de la cour de cassation des 5 aoĂ»t J 829 et 3 aoĂ»t 1831. Les matiĂšres extraites, les approvisionnements et autres objets mobiliers sont meubles. Art. 8 et*9. Le propriĂ©taire du sol ne pourrait attaquer au posses- soire le concessionnaire de la mine; car celui-ci, ne faisant qu’exĂ©cuter sa concession, ne peut troubler personne par l’exercice d’un droit lĂ©gitime, 3o6 — 11 en serait autrement s’il Ă©tendait son exploitation Ă  d’autres terrains que ceux compris dans la concession ; Mais s’il prĂ©tendait que ces terrains y sont compris, et qu’il y eĂ»t doute rĂ©el, par consĂ©quent nĂ©cessitĂ© d’interprĂ©ter l’acte d’autorisation et les procĂšs-verbaux et plans dressĂ©s en exĂ©cution des articles 29 et 30, il faudrait s’adresser au conseil d’Etat, qui seul aurait le droit d’en fixer le sens. Il en serait de mĂȘme en cas de contestations sur le taux de la redevance, qui doit ĂȘtre dĂ©terminĂ© par la concession, nonobstant toutes stipulations contraires. ArrĂȘts du conseil des 29 janvier 1841, 1" juin et 19 juillet 1843, 24 janvier 1846. Toute question de propriĂ©tĂ© du sol renfermant la mine est du ressort des tribunaux. Il rĂ©sulte Ă©videmment des articles 15, 48 et 56 de la loi d’avril, que les contestations Ă©levĂ©es Ă  raison des travaux postĂ©rieurs Ă  la concession des mines et relatifs Ă  leur exploitation, doivent ĂȘtre portĂ©es devant les tribunaux. ArrĂȘt de cassation dĂ©jĂ  citĂ© du 21 avril 1823. Un arrĂȘt du conseil du 3 avril 1831 a mĂȘme dĂ©cidĂ© qu’une demande formĂ©e par des concessionnaires de mines contre des concessionnaires de chemins de fer, en payement d’indemnitĂ©s qu’ils prĂ©tendent leur ĂȘtre dues pour une portion de leur pĂ©rimĂštre dont ils ont Ă©tĂ© privĂ©s par suite de l’exĂ©cution du chemin de fer au travers dudit pĂ©rimĂštre, est du ressort des tribunaux, parce que les autorisations administratives ne sont point attaquĂ©es. Le juge de paix serait compĂ©tent pour statuer sur l’action possessoire du concessionnaire contre tous ceux qui le troubleraient dans la possession de la mine et des objets immeubles par destination, Ă  moins qu’il n’y eĂ»t lieu Ă  interprĂ©ter la concession. § !i. Ateliers insalubres. Les ateliers de cette nature ne peuvent ĂȘtre Ă©tablis qu’avec autorisation. Lorsqu’ils l’ont Ă©tĂ© sans cette formalitĂ©, les voisins qui en Ă©prouvent du dommage peuvent en provoquer la destruction administrativement ou judiciairement, et rĂ©clamer devant les tribunaux une indemnitĂ©. Ils ont aussi le droit de se pourvoir en simple police. Si, aprĂšs l’autorisation, ils Ă©prouvent un prĂ©judice, ils ne peuvent pas demander aux tribunaux la destruction de l’établissement, mais seulement des dommages-intĂ©rĂȘts. Quant Ă  l’autoritĂ© judiciaire Ă  laquelle ils doivent s’adresser, c’est ou le juge de paix, quand l’action est fondĂ©e sur un dommage aux champs, etc. arrĂȘts de la cour de cassation des 19 juillet 1826 et 2 janvier 1833, lors encore que l’indemnitĂ© n’excĂšde pas 200 francs, ou le tribunal civil lorsqu’il ne s’agit pas de prĂ©judice aux champs, et que la somme rĂ©clamĂ©e s’élĂšve au-dessus de 200 francs. En gĂ©nĂ©ral, il n’y aura pas lieu Ă  l’action possessoire, parce qu’il n’y aura pas trouble matĂ©riel, et que la possession ne sera pas contestĂ©e ; il suffira presque toujours de former une demande en indemnitĂ©. Cependant, si le concessionnaire bĂątissait sur le fonds voisin, portait atteinte Ă  des droits acquis, dirigeait dans un cours d’eau, dans une cour ou dans une maison les rĂ©sidus de sa fabrique, celui dont la possession serait ainsi troublĂ©e aurait une action possessoire pour s’y faire maintenir ou rĂ©intĂ©grer, sauf pourtant au juge Ă  ne rien prescrire de contraire Ă  l’acte d’autorisation. On peut voir ce que nous disons dans notre RĂ©gime — 358 des eaux, et clans le troisiĂšme volume, sur les actions qui appartiennent aux voisins d’un Ă©tablissement insalubre, mĂȘme aprĂšs l’autorisation administrative. § 5. Droits de superficie. Nous avons dĂ©jĂ  dit quelques mots des droits de superficie en traitant de l’usurpation des arbres et des haies. Nous allons envisager ici ces droits d’une maniĂšre plus gĂ©nĂ©rale. Il existe au Digeste un titre De superficiebus ; c’est le titre 18, livre 43. On entend par superficie ce qui est adhĂ©rent Ă  la surface du sol, comme les maisons, bĂątimens et clĂŽtures, ainsi que les arbres et plantes de toutes espĂšces loi 13, in pr. ff. de Serv. prƓd. rustic., lib. 8, tit. 3 ; par consĂ©quent, le droit de superficie consiste Ă  pouvoir rĂ©clamer ces objets en tout ou partie, Ă  titre de propriĂ©taire. Le sol et la superficie peuvent ĂȘtre acquis, mĂȘme par prescription, et appartenir Ă  des personnes distinctes. M. Proudhon, TraitĂ© de l’usufruit, tome 8, page 547, fait observer avec raison que la superficie n’est pas un droit incorporel comme celui d’usage; qu’elle est un immeuble rĂ©el et physique, une vraie propriĂ©tĂ© fonciĂšre pour le superficiaire comme tout autre hĂ©ritage ; il assimile le sol et la superficie Ă  une maison composĂ©e de plusieurs Ă©tages qui peuvent appartenir Ă  divers propriĂ©taires et ĂȘtre possĂ©dĂ©s ou prescrits sĂ©parĂ©ment ; il admet les mĂȘmes rĂšgles pour les premiers objets; il ajoute que le superficiaire a l’action en revendication, et par consĂ©quent l’usage de tous les interdits et actions possessoires pour la conservation de son immeuble. — 859 — Ainsi celui qui a fait faire des plantations, des semences, des constructions sur un terrain qui ne lui appartient pas, et qui les a possĂ©dĂ©es pendant un an, a l’action possessoire non-seuleinent contre des tiers, mais mĂȘme contre le propriĂ©taire de ce terrain qui le troublerait. Celui-ci ne pourrait la combattre en prĂ©tendant qu’il a le droit d’en demander la destruction art. 555 du Code civil; car, d’une part, on peut acquĂ©rir par titre ou par prescription la superficie d’un immeuble, et, de l’autre, cette exception, fondĂ©e sur la propriĂ©tĂ©, ne pourrait ĂȘtre opposĂ©e qu’autant que le dĂ©fendeur prendrait la voie pĂ©titoire. Mais si le superficiaire Ă©tait un antichrĂ©siste, un sĂ©questre, un fermier auquel le contrat ne donne pas le droit de faire des constructions, ou ne le lui donne qu’à la charge de le? laisser au propriĂ©taire Ă  l’expiration de la convention, nous ne croyons pas qu’il eĂ»t l’action possessoire mĂȘme contre les tiers, Ă  cause de la prĂ©caritĂ© de son titre, qui ferait prĂ©sumer qu’il n’a bĂąti que par tolĂ©rance. 11 existe encore aujourd’hui un genre particulier de superficie dans la partie de la ci-devant province de Bretagne, qui se compose des dĂ©partemens des CĂŽtes-du- Nord, du Morbihan et du FinistĂšre ; c’est le droit qui rĂ©sulte des baux Ă  convenant ou Ă  domaines congĂ©ables. Ces baux sont ceux par lesquels un propriĂ©taire concĂšde, moyennant une rente annuelle et pour un temps limitĂ©, la jouissance de son fonds Ă  un colon auquel il vend en mĂȘme temps les Ă©difices et superficies, appelĂ©s aussi droits rĂ©paratoires, qui existent sur ce fonds, mais sous la condition expresse que ce colon ne pourra ĂȘtre expulsĂ© sans qu’on lui ait remboursĂ©, Ă  dire d’experts, — 3UÜ — les Ă©difices et superficies qui existeront Ă  l'Ă©poque de sa sortie, et suivant la \alcur qu’ils auront alors. Le propriĂ©taire qui fait la concession s’appelle foncier, et le fermier domanier ou colon. L’article f de la loi du 5 aoĂ»t 1701, qui maintient les baux Ă  domaine congĂ©able, rappelle le principe que les Ă©difices et superficies vendus au domanier sont meubles Ă  l’égard du propriĂ©taire foncier, mais immeubles Ă  l’égard des tiers. I n arrĂȘt de la cour de cassation du 25 novembre 1820, en rejetant le pourvoi formĂ© contre un arrĂȘt de la cour de Ilennes, a dĂ©cidĂ© que la facultĂ© de congĂ©ment de la part du bailleur n’était pas de l'essence du -bail Ă  convenant, qu’il pouvait y renoncer sans dĂ©naturer son bail. Un autre arrĂȘt de la mĂȘme cour, en date du 7 dĂ©cembre 1820, portant rejet d’un pourvoi farinĂ© contre un arrĂȘt de Rennes, a encore jugĂ© que la loi du 0 aoĂ»t 1701, articles 11 et 13, accordant au domanier la facultĂ© d’exiger du foncier le payement des Ă©difices et superficies Ă  la cessation du bail, et renvoyant pour les baux futurs aux conventions qui seraient faites, doit ĂȘtre entendue en ce sens que les domaniers de baux futurs auront aussi la mĂȘme facultĂ© si, dans leur bail, il n’y a stipulation contraire ; le silence ne suffirait pas pour que le domanier fĂ»t privĂ© de cette facultĂ©. delĂ  posĂ©, il nous parait certain que le colon, maĂźtre absolu de ses droits, peut intenter contre les tiers l’action possessoire, rĂ©intĂ©grande ou complainte, sans avoir besoin ni du consentement ni de l’assistance du foncier, toutes les fois que le fait qui y donne lieu porte atteinte Ă  sa jouissance des Ă©difices ou superficies et accessoires, par exemple lorsque ces tiers usurpent ses bĂątiments, ses arbres, veulent, exercer des servitudes, ou lui refusent l’exercice de celles auxquelles il a droit, l’est aussi contre lui que l’action possessoirc des tiers doit ĂȘtre dirigĂ©e; mais les dĂ©cisions qui interviennent n’ont l’autoritĂ© de la chose jugĂ©e que relativement au droit du superll- ciairc, et nullement quant au droit du propriĂ©taire foncier, Ă  moins que celui-ci n’ait Ă©tĂ© Ă©galement appelĂ© devant le juge ou n’y soit intervenu. Nous puisons un argument favorable Ă  notre opinion dans un arrĂȘt de la cour de cassation du 10 novembre 1828, que nous avons dĂ©jĂ  citĂ© plusieurs fois. Nous croyons mĂȘme que le domanier peut intenter l’action possessoire contre le foncier qui aurait usurpĂ© ses droits, nonobstant le principe que les Ă©difices et superficies sont meubles respectivement Ă  ce dernier ; car ce principe ne reçoit d’application que dans le cas oĂč le foncier exerce des droits attachĂ©s Ă  la foncialitĂ©, et non dans ceux oĂč il cherche Ă  usurper la propriĂ©tĂ© du colon. 5 0. Nue propriĂ©tĂ© et usufruit, usage et habitation. Lorsque la nue propriĂ©tĂ© et l’usufruit d’un immeuble, au lieu d’ĂȘtre rĂ©unis sur la mĂȘme tĂȘte, sont divisĂ©s et possĂ©dĂ©s sĂ©parĂ©ment, chaque ayant-droit peut intenter l’action possessoire. Cette solution est Ă©vidente Ă  l’égard du nu-propriĂ©taire. Elle 11 ’était, dans l’ancien droit, l’objet d’aucune difficultĂ©. Les auteurs 11 e faisaient pas de diffĂ©rence entre celui qui avait la pleine propriĂ©tĂ©, et celui qui n’avait que la nue propriĂ©tĂ©. Mazuer, l’un d’eux, Pratique, cliap. 2, n° 5/i, s’exprime ainsi Celui Ă  qui la nue propriĂ©tĂ© appartient doit ĂȘtre ouĂŻ, en cas de nouvelletĂ©; s’il requiert ĂȘtre 362 — maintenu en la possession ou quasi-possession de sa propriĂ©tĂ©, afin que la rĂ©elle portion lui appartienne et qu’il en puisse jouir et user, l’usufruit Ă©tant expirĂ©. Autrement, il pourrait perdre sa possession Ă  l’occasion de ce tiers possesseur, et, en ce cas, la possession civile, jointe Ă  la propriĂ©tĂ©, produit des effets corporels. » Le viager, dit Loisel, liv. Ă , t. 3, reg. 3, conserve la possession du propriĂ©taire. » Tous les auteurs modernes, MM. Henrion, Merlin, Fa- vard, Proudhon, Puranton, CarrĂ©, Aulanier, Ă©mettent la mĂȘme opinion sous l’empire des lois nouvelles. Le motif qu’ils en donnent, et que Mazuer avait indiquĂ©, est que le nu-propriĂ©taire a intĂ©rĂȘt d’agir quand F usufruitier nĂ©glige de le faire, pour Ă©viter la perte de la possession et mĂȘme de la propriĂ©tĂ©, par la prescription que pourrait opposer le tiers qui aurait rĂ©ellement joui de la chose. D’un autre cĂŽtĂ©, si l’intĂ©rĂȘt est Ă©vident, le droit ne l’est pas moins. Le nu-propriĂ©taire, sans percevoir les fruits de la chose, la possĂšde cependant par l’entremise de l’usufruitier, ainsi que l’a dĂ©cidĂ© l’art. 2236, dont la rĂ©daction, nous en convenons, n’est pas parfaite, mais dont on ne saurait contester le sens. Ajoutons que l’art. Gl/i, obligeant l’usufruitier Ă  dĂ©noncer au propriĂ©taire les usurpations des tiers, suppose nĂ©cessairement que celui-ci a droit d’intenter l’action possessoire, sans quoi cette disposition n’aurait aucun but. L’arrĂȘt de la cour de cassation du 6 mars 1822, citĂ© par quelques auteurs qui le combattent comme contraire Ă  ces principes, nous parait pouvoir s’expliquer par les circonstances de l’affaire sur laquelle il est intervenu. A la cessation d’un usufruit, le nu-propriĂ©taire intenta ac- — 363 — tion possessoire Ă  un autre usufruitier qui prĂ©tendait avoir remplacĂ© le prĂ©cĂ©dent, dont les droits n’étaient Ă©teints que depuis un mois. Le dĂ©fendeur opposa le dĂ©faut de possession annale, non du trĂ©fonds, mais de la jouissance. On peut concevoir que, dans un tel dĂ©bat pour cette jouissance, la cour ait cru devoir s’arrĂȘter au dĂ©faut de possession matĂ©rielle de la part du nu-propriĂ©taire ; par consĂ©quent, ce qui est dit dans l’arrĂȘt, que l’usufruitier ne possĂšde pas pour et au nom du propriĂ©taire, mais pour lui-mĂȘme et en son nom personnel ; que celui-ci ne peut joindre Ă  sa possession celle de l’usufruitier, ne doit s’entendre que dans un sens restreint Ă  l’espĂšce dans laquelle il a Ă©tĂ© rendu. Nous sommes d’autant plus portĂ© Ă  le dĂ©cider ainsi, que la mĂȘme cour a posĂ© en principe, par arrĂȘt du 7 octobre 1813, que l’usufruitier est essentiellement le mandataire du propriĂ©taire, et que ce qu’on peut faire par son mandataire, on peut, Ă  plus forte raison, le faire soi-mĂȘme. Le droit de l’usufruitier, d’intenter l’action possessoire, Ă©tait Ă©galement proclamĂ© par les anciens auteurs. Nous ne connaissons parmi eux que llodier qui ait enseignĂ© une doctrine contraire ; mais elle devait avoir peu de poids, car, outre que l’opinion de cet auteur Ă©tait isolĂ©e, elle Ă©tait fondĂ©e sur l’assimilation erronĂ©e de l’usufruitier au fermier et au sĂ©questre, qui n’ont qu’une possession prĂ©caire ou naturelle, qui ne possĂšdent pas en leur nom. Bourjon, Droit commun de la France, t. 2, chap. de la Complainte, sect. 3, s’exprime bien diffĂ©remment; voici ses termes L’usufruitier, troublĂ© dans son usufruit, a la voie de la complainte ouverte, parce que son droit est un droit — 304 — rĂ©el qui lui ouvre toutes les actions nĂ©cessaires pour le maintenir dans sa jouissance. 11 doit donc avoir ce droit et cette action de mĂȘme que le propriĂ©taire, comme suite de sa qualitĂ© et de son droit. » Jousse, llousseaud La Combe, en citant brodeau, sur Paris; Cujas, dans ses Observations, liv. 9, chap. 32; Pothier, TraitĂ© de la possession; FerriĂšre, Dictionnaire de droit et de pratique ; les auteurs du Xouveau ĂŒenizart; Pigeau, ProcĂ©dure du ChĂątelet, partagent l’opinion de bourjon. Les auteurs modernes ne sont pas moins formels; M\l. Merlin, Favard, Henrion, Toullier, Duranton, Proudhon, Poncet, CarrĂ©, Guichard, Longchamps, Au- lanier, brossard et plusieurs autres s’en expliquent dans le mĂȘme sens. MM. Dufour et barbedette sont les seuls qui enseignent une doctrine contraire ; mais leur opinion ne peut prĂ©valoir sur celle des auteurs que nous venons de citer. La raison sur laquelle ils la fondent est peu propre Ă  la justifier; ils disent que l’usufruit est une servitude discontinue et apparente, ou continue non-apparente ; mais, au contraire, tous les auteurs le considĂšrent comme une partie de la propriĂ©tĂ©, pars dominii, et l’arrĂȘt du 6 mars 1822 dit aussi que l’usufruitier jouiten vertu de la disposition expresse de la loi qui considĂšre l’usufruit comme une partie de la propriĂ©tĂ©. L’art. 2236 ne rĂ©putĂ© l’usufruitier dĂ©tenteur prĂ©caire que relativement au nu-propriĂ©taire ; son unique but est de l’empĂȘcher de prescrire la nue propriĂ©tĂ©, tant que le titre n’est pas interverti ; mais il est sans application aux relations de l’usufruitier avec les tiers. Cet usufruitier peut intenter contre ceux-ci les actions possessoires, — 36b — puisque, d’une part, le fait qui y donne lieu porte prĂ©judice Ă  sa possession, et que de l’autre, aux termes des art. 578, 567 et 598, il jouit de la chose, de toutes les servitudes, droits et avantages y attachĂ©s connue le propriĂ©taire lui-mĂšme; qu’il doit la conserver Ă  celui-ci, et qu’enfin l’art. 613 le charge des frais des procĂšs relatifs Ă  la jouissance. De ce que l’art. 61A l’oblige Ă  dĂ©noncer l’usurpation au propriĂ©taire, il ne faudrait pas conclure que celui-ci eĂ»t seul droit d’action. 11 en rĂ©sulte seulement qu’elle appartient Ă  l’un comme Ă  l’autre, et que le lĂ©gislateur a voulu mettre le propriĂ©taire Ă  mĂȘme de l’exerce', si le dĂ©tenteur ne jugeait pas Ă  propos de l’intenter lui-mĂȘme. Nous ne pensons pas, nĂ©anmoins, que le nu-propriĂ©taire et l’usufruitier pussent se contraindre rĂ©ciproquement Ă  intenter l’action possessoire ou Ă  y dĂ©fendre. Outre que la loi ne renferme aucune disposition qui autorise une pareille contrainte, elle serait contraire au droit commun, d’aprĂšs lequel personne ne peut ĂȘtre forcĂ© Ă  agir. Il y aurait seulement lieu Ă  la rĂ©pĂ©tition des frais et faux frais. * De mĂȘme que la possession de l’usufruitier profite au propriĂ©taire, de mĂȘme le premier ajoute Ă  sa possession celle de ce dernier lorsqu’elle lui est nĂ©cessaire pour complĂ©ter l’annĂ©e antĂ©rieure au trouble, puisqu’il lui succĂšde dans une partie de la propriĂ©tĂ©. Pothier distingue le cas oĂč le perturbateur en veut aux fruits de celui oĂč il Ă©lĂšve des prĂ©tentions Ă  la nue- propriĂ©tĂ©, et son opinion paraĂźt avoir entraĂźnĂ© les auteurs du Code civil ; mais elle a peu d’application au possessoire ; cela est Ă©vident quant au trouble de fait, qui constitue toujours une atteinte Ă  la jouissance. Pour ce qui est du trouble civil ou de droit, qui consisterait Ă  prĂ©- — 360 — tendre Ă  la nue propriĂ©tĂ©, sans contester les droits de l’usufruitier, comme il ne comporte ni empĂȘchement rĂ©el ni demande d’ĂȘtre mis en possession, il se rĂ©sout gĂ©nĂ©ralement en une action pĂ©titoire qui ne peut ĂȘtre agitĂ©e avec l’usufruitier. Il est un cas oĂč le nu-propriĂ©taire peut avoir une possession propre et indĂ©pendante de celle de l’usufruitier; celui-ci, en effet, est soumis Ă  des restrictions dans l’exercice de ses droits. Il doit conserver la substance de la chose, y faire les rĂ©parations d’entretien, les grosses restant Ă  la charge du nu-propriĂ©taire ; il est tenu d’observer l’ordre des coupes pour les bois taillis ou de futaie, de n’user des pĂ©piniĂšres, des mines et carriĂšres qu’avec modĂ©ration. Le nu-propriĂ©taire qui aura exĂ©cutĂ© les rĂ©parations ou fait condamner l’usufruitier qui abusait de son droit aura une possession de la nue propriĂ©tĂ©. Il aura intĂ©rĂȘt Ă  la conserver, et, par consĂ©quent, il pourra intenter contre un tiers qui se prĂ©tendrait aussi nu-propriĂ©taire et viendrait le troubler, une action pos- sessoire pour y ĂȘtre maintenu ; par la mĂȘme raison, celui-ci pourrait intenter cette action, si la possession Ă©tait de son cĂŽtĂ©. Mais il est une espĂšce particuliĂšre d’usufruitiers Ă  qui l’action possessoire n’est permise qu’à la charge d’obtenir une autorisation prĂ©alable du propriĂ©taire, et mĂȘme de l’autoritĂ© administrative. En effet, si les art. 5 et 7 du dĂ©cret du 6 novembre 1813, sur les biens des cures, disent que les titulaires de ces cures exercent les droits d’usufruit, qu’ils en supportent les charges, ainsi qu’il est Ă©tabli par le Code civil ; qu’ils doivent jouir des biens en bons pĂšres de famille, les entretenir avec soin et s’opposer Ă  toute usurpation ou dĂ©tĂ©rioration, l’art, l/j leur — 367 — dĂ©fend de plaider pour un droit foncier et toute action possessoire est de cette nature sans l’autorisation du conseil de prĂ©fecture, prĂ©cĂ©dĂ©e de l’avis du conseil de fabrique ; dĂ©fense d’autant plus remarquable, qu’ils plaident Ă  leurs frais et risques ; aussi, un arrĂȘt de la cour de cassation du 8 fĂ©vrier 1837 a-t-il refusĂ© l’action possessoire au curĂ© qui n’avait pas d’autorisation. On ne pourrait objecter que, depuis la loi du 18 juillet 1837, il en devrait ĂȘtre diffĂ©remment; que le dĂ©cret de 1813 avait exigĂ© l’autorisation sous l’influence d’une lĂ©gislation qui la prescrivait aux Ă©tablissements publics pour intenter complainte ; mais que la derniĂšre loi, en affranchissant les communes, par consĂ©quent les fabriques, en dispense aussi les curĂ©s qui les reprĂ©sentent et sont leurs mandataires lĂ©gaux. Nous rĂ©pondrions que le dĂ©cret de 1813 est tout spĂ©cial, et n’a Ă©tĂ© en rien abrogĂ© par la loi nouvelle ; que le mandataire peut ĂȘtre assujetti Ă  des prĂ©cautions non exigĂ©es du mandant; que celle invoquĂ©e ne dispense d’autorisation que les Ă©tablissements eux-mĂȘmes, et non ceux qui intentent action Ă . leur place ; que cela est si vrai, que, d’aprĂšs les art. 1 er , /i9 et 50, dont les termes sont gĂ©nĂ©raux, le contribuable qui a droit d’intenter Ă  ses frais les actions que la commune nĂ©glige, ne peut pas plus introduire une action possessoire que toute autre, sans l’autorisation du conseil de prĂ©fecture, bien que la commune en soit dispensĂ©e, comme nous l’avons vu, pour la complainte. La discussion qui prĂ©cĂšde nous conduit naturellement Ă  apprĂ©cier l’effet des jugements qui interviennent sur les actions relatives Ă  la nue propriĂ©tĂ© ou Ă  la jouissance. S’il n’y a, au pĂ©titoire ou au possessoire, de dĂ©bat que — 368 — sur la nue propriĂ©tĂ©, sans contestation sur l’usufruit, l’usufruitier ne doit pas ĂȘtre mis en cause, et le jugement qui intervient n’a aucun effet Ă  son Ă©gard, puisque la chose jugĂ©e ne s’étend pas Ă  l’usufruit. S’il n’y a contestation que sur l’usufruit, sur la jouissance, la nue propriĂ©tĂ© Ă©tant reconnue Ă  celui, qui a concĂ©dĂ© le premier droit, l’usufruitier seul doit dĂ©fendre, et le jugement qui intervient n’a point autoritĂ© de chose jugĂ©e vis-Ă -vis du propriĂ©taire, qui ne peut ĂȘtre mis en cause que dans le cas oĂč chaque prĂ©tendant Ă  l’usufruit tiendrait ses droits de lui et invoquerait sa possession. Si, au contraire, le dĂ©bat roulait sur la possession en gĂ©nĂ©ral, sans restriction ni distinction, il intĂ©resserait Ă©galement le propriĂ©taire et l’usufruitier; un seul ou les deux en mĂȘme temps pourraient figurer au procĂšs ou y intervenir ; mais le jugement rendu avec l’usufruitier seul profiterait au nu-propriĂ©taire s’il Ă©tait favorable, quoiqu’il ne pĂ»t lui ĂȘtre opposĂ© si l’usufruitier avait succombĂ©. Le nu-propriĂ©taire peut mĂȘme obtenir, s’il est encore dans le dĂ©lai, un nouveau jugement qui profitera Ă  l’usufruitiei'. Lorsque l’usufruitier n’a pas dĂ©noncĂ© au propriĂ©taire l’atteinte d’un tiers, quelle soit restreinte Ă  la nue propriĂ©tĂ© ou quelle ne .comporte pas cette distinction, ou que, dans ce second cas, il n’a pas agi dans les dĂ©lais, il est, aux termes de l’art. 61 A, responsable de sa nĂ©gligence; lorsqu’il l’a prĂ©venu, sa responsabilitĂ© cesse, et le propriĂ©taire qui n’a point agi ne peut exercer contre lui aucun recours, car il tient de la loi le droit de poursuivre le perturbateur. Le propriĂ©taire et l’usufruitier sont Ă©galement en faute ; ils ne peuvent exercer aucun recours l’un contre l’autre. Observons, d'ailleurs, que, malgrĂ© les termes des art. KH et 001, l’usufruitier peut intenter les actions possessoires avant d’avoir fait dresser un Ă©tat des immeubles et donnĂ© caution. Il est rĂ©ellement en possession du jour oĂč l’usufruit est ouvert, puisque les fruits lui appartiennent art. 604. Le mode de jouissance seul est restreint jusqu’à l’accomplissement de ces formalitĂ©s, qui ont pour but non de l’en priver, mais d’assurer la conservation de la chose. L’usufruitier nous paraĂźt fondĂ© Ă  exercer l’action pos- sessoire contre le propriĂ©taire qui le trouble dans sa jouissance ; vainement opposerait-on que la loi le considĂšre comme possesseur prĂ©caire, au moins Ă  l’égard de ce dernier; car nous avons dĂ©jĂ  dit qu’il n’en Ă©tait ainsi que pour l’acquisition de la nue propriĂ©tĂ© ; mais il en est diffĂ©remment pour l’usufruit, qui est une partie de la propriĂ©tĂ©, et qui, comme toute autre, peut s’acquĂ©rir par prescription, suivant ce qu’enseignaient, dans l’ancien droit, Lacombe, au mot complainte et au mot. usufruit ; Cujas, FachinĂ©e, etc., dont l’opinion est reproduite et approuvĂ©e par Duranton, t. 4, n" 502; Proudhon, t. 2, n°751 ; Toullier, t. 3,n° 393; Dalloz, RĂ©p ., V° Usufruit, p. 788, qui tous accordent, par voie de consĂ©quence, la complainte Ă  l’usufruitier contre le nu-propriĂ©taire. L’opinion contraire est soutenue par les auteurs de la ThĂ©mis, t. 6, p. 332; mais les raisons sur lesquelles ils se fondent ne peuvent prĂ©valoir sur un si grand nombre d’autoritĂ©s et sur la dĂ©cision positive desarrĂȘts de la cour de cassation des 17 juillet 1816 et 14 dĂ©cembre 1840. Celui-ci est ainsi conçu Attendu 1° qu’aux termes de la loi, l’usufruit est un droit rĂ©el, distinct de la propriĂ©tĂ© du fonds, Pt que, 370 — comme tel, il engendre les actions possessoires ainsi que toutes les autres qui naissent d’un droit rĂ©el; que si, dans l’intĂ©rĂȘt du propriĂ©taire, l’usufruitier est tenu de lui dĂ©noncer les troubles survenus, il a le droit d’agir contre lui lorsque le trouble qu’il Ă©prouve dans sa jouissance provient du fait de ce dernier ; que, par cela mĂȘme qu’il jouit en maĂźtre et par lui-mĂȘme, il a les actions attarliĂ©es h la possession, soit contre les tiers, soit contre le propriĂ©taire, et, en les intentant, il n’exerce pas le droit d’autrui, mais son droit personnel ; attendu 2° que le jugement du 21 mai 1836, n’étant pas constitutif, mais dĂ©claratif du droit de possession, la dame Gardel a pu joindre Ă  sa possession celle de son mari, qui lui avait donnĂ© l’usufruit dont il s’agit, et qui possĂ©dait depuis plus d’une annĂ©e la chose par lui donnĂ©e; qu’il rĂ©sulte de ce qui prĂ©cĂšde, qu’en dĂ©cidant qu’elle ne pouvait pas exercer l’action possessoire dans le cas dont il s’agissait, le jugement dĂ©noncĂ© a expressĂ©ment violĂ© l’art. 23 ci- dessus rĂ©fĂ©rĂ©. » Le propriĂ©taire n’aura pas souvent lieu d’intenter l’action possessoire contre l’usufruitier reconnu. Les demandes que le premier est dans le cas de former ne semblent relatives qu’üi l’abus que celui-ci pourrait se permettre dans l’exercice de ses droits, et la contestation devrait ĂȘtre dĂ©cidĂ©e par l’interprĂ©tation des conventions ou l’application des principes qui constituent le fond. Cependant l’usufruit pouvant s’acquĂ©rir par prescription, le mode de son exercice pouvant Ă©galement s’acquĂ©rir de cette maniĂšre, l’on conçoit qu’il est des cas oĂč le propriĂ©taire ait intĂ©rĂȘt Ă  se faire maintenir dans sa possession. La contestation sur l’interprĂ©tation du contrat ou sur l’acquisition par prescription Ă  dĂ©faut de conven- - 371 tio» peut ĂȘtre longue, et il importe au propriĂ©taire de rĂ©sister en attendant aux excĂšs de l’usufruitier ou Ă  l’usurpation de celui qui se prĂ©tend tel, sans aucun droit. Les droits d’usage et d’habitation sont de la mĂȘme nature que celui d’usufruit. Ils ne diffĂšrent de ce dernier qu’en ce qu’ils sont plus restreints. Ils peuvent ĂȘtre l’objet de l’action possessoire et sont rĂ©gis par les mĂȘmes principes. Les auteurs par nous citĂ©s plus haut ne laissent lĂ -dessus aucun doute. Quant aux droits d’usage dans les forĂȘts, nous nous en occuperons Ă  l’article oĂč il sera question des servitudes. § 7. I' l’ompliytĂ©ose. Le Code civil garde le silence sur l’emphytĂ©ose ; les caractĂšres de ce contrat, mĂȘme dans l’ancienne jurisprudence, n’étaient pas bien fixĂ©s. Les auteurs du Nouveau DĂšnizart la dĂ©finissent un contrat par lequel le propriĂ©taire d’un hĂ©ritage en cĂšde Ă  quelqu’un la jouissance pour un temps et mĂȘme Ă  perpĂ©tuitĂ©, Ă  la charge de bĂątir ou amĂ©liorer, et d’une prestation ou redevance annuelle que le bailleur se rĂ©serve pour marque de son domaine direct. Il ne faut pas la confondre avec le bail Ă  longues annĂ©es ou Ă  rente ; car, suivant Loyseau, elle produit une obligation rĂ©elle qui suit le fonds en quelques mains qu’il passe, tandis que celle rĂ©sultant du bail est personnelle. 11 est gĂ©nĂ©ralement reconnu que l’emphytĂ©ose a titre et possession valable pour intenter l’action possessoire. Cette doctrine a mĂȘme Ă©tĂ© consacrĂ©e par un arrĂȘt formel de la cour de cassation du 2 juin 1822. 572 — Le sieur Bournizien Dubourg, emphytĂ©ote pour quatre- vingt-dix-neuf ans d’un moulin Ă  farine, intenta complainte Ă  M. Despagnac. Elle fut accueillie; mais sur l’appel, le tribunal de Corbeil infirma, attendu que le demandeur n’était que fermier, par consĂ©quent possesseur prĂ©caire. L’arrĂȘt de cassation porte, entre autres motifs, ceux qui suivent Attendu que. le contrat d’emphytĂ©ose a sa nature et produit des effets qui lui sont propres ; Que ces effets sont de diviser la propriĂ©tĂ© du domaine donnĂ© Ă  emphytĂ©ose en deux parties, l’une formĂ©e du domaine utile dont la rente que se retient le bailleur est reprĂ©sentative, l’autre appelĂ©e domaine utile, qui se compose de la jouissance des fruits qu’il produit; Que le preneur possĂšde le domaine utile qui lui est transmis par l’effet de ce partage, comme propriĂ©taire pouvant, pendant la durĂ©e du bail, en disposer par vente, donation, Ă©change ou autrement,, avec la charge toutefois des droits du bailleur; pouvant, pendant le mĂȘme temps, exercer l’action in rem pour se faire maintenir contre tous ceux qui l’y troublent et contre le bailleur lui-mĂȘme, suivant les lois 1 et 3, ff. si ai/er vectigalis; que ces dispositions des lois romaines ont Ă©tĂ© admises en France, tant en pays de droit Ă©crit qu’en pays coutumier, et que le Code civil, qui n’a pas traitĂ© du bail emphytĂ©otique, ne les a ni changĂ©es ni modifiĂ©es. » Quoique la cour se soit fondĂ©e sur les anciens principes, parce qu’il s’agissait d’un contrat passĂ© avant le Code civil, elle eĂ»t dĂ©cidĂ© de mĂȘme en cas d’une emphytĂ©ose stipulĂ©e sous son empire, puisqu’elle dĂ©clare que le Code ne les n pas modifiĂ©s. — 373 — Nous croyons que ce n'est pas seulement contre les tiers, mais encore contre le propriĂ©taire lui-mĂȘme que le possesseur peut intenter l’action possessoire. Outre que l’arrĂȘt ci-dessus le dĂ©cide ainsi, il nous paraĂźt que le droit d’emphytĂ©ose peut, comme celui d’usufruit, ĂȘtre acquis par la prescription. Il faut d’ailleurs appliquer ici ce que nous avons dit en traitant de l’usufruit. $ 8. Biens dos communes et de l’État; des Ă©tablissements publics; des champs de foiic, halles et marchĂ©s. Nous avons dit, pages 209, 219, que les biens de l’État, des dĂ©partements, des communes et des Ă©tablissements publics qui en dĂ©pendent, Ă©tant dans le commerce, pouvaient ĂȘtre prescrits, et par consĂ©quent l’objet des actions pĂ©titoire ou possessoire, soit de la part de l’Etat et des communes, soit contre eux. Cela est Ă©vident pour l'action pĂ©titoire ; tous les jours les communes et l’Etat revendiquent des propriĂ©tĂ©s devant les tribunaux ou y sont traduits. La loi du 9 ventĂŽse an XII et l’ordonnance du 23 juin 1819, relatives aux biens communaux, n’attribuent juridiction aux conseils de prĂ©fecture que lorsque la qualitĂ© communale de l’immeuble n’est pas contestĂ©e. Il en est de mĂȘme Ă  plus forte raison, de l’action possessoire, ainsi que cela rĂ©sulte d’une jurisprudence constante. Ainsi, Ă  l’égard de l’Etat, ce principe a Ă©tĂ© consacrĂ©, notamment par arrĂȘt du 22 juin 1836, dans une espĂšce remarquable. Une coupure avait Ă©tĂ© faite au canal du Japon qui est navigable. Les syndics de l’association se pourvurent par la voie de complainte contre l’auteur de ce fait. Celui-ci prĂ©tendit ĂȘtre aux droits de l’Etat, soutint que le conseil — 37-t — de prĂ©fecture Ă©tait seul compĂ©tent, aux ternies de la loi du 29 florĂ©al an X, qui attribue Ă  l’administration la rĂ©pression des entreprises en matiĂšre de grande voirie, et que, dans tous les cas, l’action possessoire Ă©tait non recevable, parce qu’il s’agissait d’une chose du domaine public, hors du commerce, et par consĂ©quent imprescriptible. le systĂšme fut repoussĂ© par toutes les juridictions. Nous lisons dans l’arrĂȘt de la cour de cassation qu’aux termes de l’art. 2227 du Iode civil, l’Etat est soumis aux mĂȘmes prescriptions que les particuliers; que cette rĂšgle s’applique aux prescriptions relatives Ă  la possession, comme Ă  celles relatives Ă  la propriĂ©tĂ©; d’oĂč il suit que l’action en complainte peut ĂȘtre dirigĂ©e contre l’Etat tout comme une action relative Ă  la propriĂ©tĂ© pourrait l’ĂȘtre. Un arrĂȘt de la cour de cassation, du 15 prairial an XII, a dĂ©cidĂ© que le juge de paix avait pu connaĂźtre d’une action possessoire relative une source naissant dans un terrain communal, soit qu’elle fĂ»t dirigĂ©e contre la commune elle-mĂȘme, soit quelle le fĂ»t contre celui Ă  qui elle avait cĂ©dĂ© son droit aux eaux ; on trouve une dĂ©cision fondĂ©e sur le mĂȘme principe dans un arrĂȘt du 1" avril 1806; la commune soutenait que, s’agissant d’un terrain Ă  elle appartenant, il n’y avait lieu ni Ă  prescription, ni Ă  complainte. Son systĂšme fut repoussĂ© ; dĂ©cisions semblables du conseil d’Etat, les 24 mai 1808 et 10 fĂ©vrier 1810, au sujet d’une fontaine et d’un terrain prĂ©tendus communaux. Enfin, un arrĂȘt de la chambre des requĂȘtes, du 19 janvier 1831, a rejetĂ© le pourvoi d’unĂš commune, fondĂ© Ă  tort sur ce que, d’aprĂšs les lois et ordonnances de l’an XII et de 1819, les contestations re- — 375 — latives aux biens communaux sont de la compĂ©tence de l’administration. 11 existe encore quatre autres arrĂȘts semblables de la mĂȘme cour, des 3 novembre 182/i, 7 aoĂ»t et 18 novembre 1834, et 22 juin 1835. On peut voir sur tout ce qui concerne les biens communaux un trĂšs-bon ouvrage dĂ© AI. Latrulle-Alontmey- lian, ancien avocat aux conseils et Ă  la cour de cassation. Nous n’avons exceptĂ© de l’action possessoire que les choses qui sont hors du commerce, qui forment le domaine public, national, dĂ©partemental ou communal; nous comprendrons parmi les choses hors du commerce, non-seulement celles Ă©noncĂ©es dans les art. 538, 5A0 du Code civil et celles dĂ©signĂ©es page 213, mais encore les monuments ou Ă©tablissements publics, tels que bibliothĂšques, musĂ©es, jardins ^ ”cs, hĂŽpitaux, hĂŽtels de ville; hĂŽtels des grandes administrations, palais des chambres lĂ©gislatives, mais non les jardins qui en dĂ©pendraient et seraient Ă  l’usage particulier du chef d’administration. Nous avons aussi exceptĂ©, page 220 et suivantes, certains biens qui, sans ĂȘtre affectĂ©s Ă  un service public, sont cependant dĂ©clarĂ©s inaliĂ©nables ou imprescriptibles. Nous pouvons y ajouter les forĂȘts de l’Etat, dont l’art. 12 de la loi du 1 er dĂ©cembre 1700 dĂ©fend l’aliĂ©nation, et que les art. 00, 01 et 02 du Code forestier de 1827 dĂ©fendent de grever de droits d’usage ou d’affectations quelconques. Alais pourrait-on Ă©tendre cette exception aux champs de foires, halles et marchĂ©s, en les assimilant aux rues, places et monuments publics ? Il semblerait naturel d’admettre l’affirmative dans le cas oĂč une halle; un marchĂ© auraient Ă©tĂ© construits pour ĂȘtre affectĂ©s Ă  cet usage, comme dans le cas oĂč une foire se tiendrait — 376 — dans un lieu public, n’eĂčt-il aucune autre destination. Les halles Ă  la volaille et au blĂ© de Paris sont, sans contredit hors du commerce. Nous ne verrions d’exception Ă  ce que nous venons de dire que dans le cas oĂč les foires et marchĂ©s tiendraient dans un champ produisant ordinairement des fruits ou dans des bĂątiments pris Ă  loyer d’un particulier. Cependant la cour de cassation, par arrĂȘts des 1 er aoĂ»t 1800 et 19 juillet 1820, a admis un principe diffĂ©rent pour les halles. Nous ne croyons pas qu’ils doivent faire jurisprudence. $ ‱. Biens indivis. Les biens indivis ou communs entre plusieurs propriĂ©taires, tels que murs, fossĂ©s, haies, sentiers d’exploitation, champs, maisons, etc., donnent lieu Ă  la complainte des uns contre les autres en cas de trouble ou usurpation ayant pour but l’attribution d’une possession exclusive. Le communier est bien fondĂ© Ă  demander que la jouissance reste commune, comme elle l’a Ă©tĂ© dans l’annĂ©e antĂ©rieure au trouble, car il fait seulement maintenir ou rĂ©tablir l’état naturel des choses jusqu’au jugement de la propriĂ©tĂ© ou du partage, ce qui est de l’essence de la complainte. Ces principes, contestĂ©s par quelques auteurs et par quelques tribunaux, sont aujourd’hui bien fixĂ©s par de nombreux arrĂȘts de la cour de cassation. Nous citerons particuliĂšrement ceux des 10 novembre 1812, entre Etilein et divers habitants du village de la Vergue; 29 novembre 181 A, Joly; 8 dĂ©cembre 1S2A, entre AthĂ©nas, Heureux et donnerais; 27 juin et 11 dĂ©cembre 1827, entre les hospices d’Arles et le sieur Nay ; 19 novembre 1828, entre les sieurs Domingon — 377 — et Gharmensat; mĂȘme jour, entre Moutier et Viel; lĂ  avril 1830, ClĂ©ment; 29 mars 1841, Garnier. Les sentiers servant Ă  l’exploitation de divers fonds qu’ils traversent, sont de plein droit censĂ©s propriĂ©tĂ© commune, Ă  moins que des titres produits ne dĂ©truisent cette prĂ©somption. ArrĂȘts de la cour de cassation des 29 novembre 181 A, 11 dĂ©cembre 1827, 20 juin 1828, et La- laure, des Servitudes. Nous donnerons de plus grands dĂ©xeloppcmenlsĂ cct Ă©gard, en nous occupant des personnes qui peuvent ou contre lesquelles on peut intenter l’action possessoire. § 10. Biens d’origine nationale et autres vendus par l’administration. Quoique nos lois, et notamment celle du 28 pluviĂŽse an VIII, confĂšrent aux conseils de prĂ©fecture le jugement des contestations relatives aux domaines nationaux vendus par l’Etat, il est incontestable que l’action possessoire Ă  laquelle ils donnent lieu, soit entre l’Etat et des particuliers, soit entre particuliers seulement, est de la compĂ©tence des juges de paix ; car les tribunaux administratifs ne sont chargĂ©s que de juger le fond, par interprĂ©tation des ventes nationales, ou dĂ©claration de ce qui s’y trouve compris, tandis que le juge de paix prononce sur la possession tout-Ă -fait indĂ©pendante de la question de propriĂ©tĂ© qui demeure entiĂšre. Ie nombreux arrĂȘts du conseil et de la cour de cassation ont proclamĂ© ces principes. Nous citerons parmi les premiers ceux des 25 mars 1806,16 aoĂ»t 1808, 26 juillet 1826, 2 h janvier et 19 dĂ©cembre 1827, et parmi les seconds, ceux des 28 aoĂ»t 1810 et 16 janvier 1832. Les mĂȘmes principes s’appliquent Ă  la vente adminis- — 378 -> trative des biens communaux. Quoique la question dĂ© savoir quels sont les objets compris dans l’ordonnance autorisant la vente puisse, dans certains cas, ĂȘtre rĂ©servĂ©e Ă  l’administration, la question de possession annale n’en est pas moins de la compĂ©tence du juge de paix, qui doit seulement surseoir Ă  y statuer, s’il pense que l’interprĂ©tation est utile Ă  la dĂ©cision de la complainte. ArrĂȘts du conseil du 4 juillet 1827 et de la cour de cassation dit 11 mai 1831. Mais des poursuites de vente faites en exĂ©cution de la loi du 14 ventĂŽse an Vil, contre un dĂ©tenteur de domaine national, ne pourraient autoriser une action en complainte. ArrĂȘt de la cour de cassation du 25 juillet 1836. §11. Des servitudes. DĂ©jĂ , nous avons compris diverses servitudes au nombre des choses qui peuvent ĂȘtre la matiĂšre des actions possessoires. L’étendue que nous avons alors donnĂ©e Ăą nos dĂ©veloppements nous permettra d’ĂȘtre ici fort laconique. N“ 1. Notions gĂ©nĂ©rales. La servitude est une charge imposĂ©e en faveur d’un hĂ©ritage sur un autre appartenant Ă  un propriĂ©taire diffĂ©rent; car ne-mini res sua servit. La grande et premiĂšre division des servitudes, tirĂ©e de la cause qui les produit, est en naturelles, lĂ©gales et conventionnelles. Art. 639 du Code civil. Les servitudes naturelles dĂ©rivent de la situation des lieux. Ce sont l’obligation de recevoir les eaux qui dĂ©coulent du fonds supĂ©rieur sans le fait de l’honnne, les droits de bornage et de clĂŽture. Les servitudes lĂ©gales rĂ©sultent des dispositions dĂ© la loi ; les unes ont l’utilitĂ© publique bu communale pour objet. Nous en avons suffisamment traitĂ© en parlant des chemins de lialage, des routes et des voies vicinales ; les autres concernent l’intĂ©rĂȘt particulier; ce sont le mĂŒr et le fossĂ© mitoyens, la distance des plantations, l’extension des branches et racines, la distance ou les prĂ©cautions Ă  observer pour certaines constructions, telles que puits, fosse d’aisance, forge, Ă©table, etc. Les restrictions relatives aux jours, Ă  l’égout des toits, le passage en cas d’enclave, et enfin le passage des eaux créé par la loi du 29 avril 1845. Les servitudes conventionnelles sont Ă©tablies par le fait de l'homme; elles rĂ©sultent des conventions expresses ou prĂ©sumĂ©es, c’est-Ă -dire de la prescription. Une seconde division des servitudes est en continues et discontinues. Les continues sont celles dont l’usage est ou peut ĂȘtre continuel sans avoir besoin du fait actuel de l’homme; les discontinues celles qui ont besoin de ce fait pour ĂȘtre exercĂ©es. La troisiĂšme division est en servitudes apparentes Ă©t non apparentes. Des servitudes peuvent ĂȘtre tout Ă  la fois discontinues et apparentes ou non apparentes. La distinction des servitudes continues et discontinues, apparentes et non apparentes, est sans objet, quant Ă  celles qui rĂ©sultent de la situation des lieux ou de la loi ; elle n’a d’utilitĂ© que pour les servitudes conventionnelles qui sont susceptibles d’acquisition et d’extinction par prescription. Aussi cette distinction est-elle placĂ©e dans le Code au chapitrĂ© des servitudes Ă©tablies par le fait de l’homme. — 380 — Les seules servitudes qui puissent s’acquĂ©rir par la prescription, c’est-Ă -dire par une possession de trente ans, sont celles qui rĂ©unissent le double caractĂšre de l’apparence et de la continuitĂ©. Quant aux autres, c’est-Ă -dire les continues non apparentes et les discontinues apparentes ou non apparentes, la possession mĂȘme immĂ©moriale est inefficace ; un titre est indispensable; cette disposition n’atteint pas, bien entendu, les servitudes dĂ©jĂ  acquises par la possession avant l’émission du Code civil ; mais celles-ci ne peuvent donner lieu Ă  la complainte qu’aprĂšs le jugement de l’action pĂ©titoire. Le jugement est un titre qui vient appuyer la possession ; sans ce titre l’action possessoire est non recevable, et le juge du possessoire doit la rejeter, car il ne peut vĂ©rifier si, en effet, la servitude Ă©tait prescrite avant le Code; ce serait prĂ©juger le pĂ©titoire. C’est ce qui a Ă©tĂ© jugĂ© par un arrĂȘt de la chambre civile du 2 juillet 1823, dans lequel les principes que nous professons sont trĂšs-nettement posĂ©s. Toutefois, il faut s’entendre sur ce qui doit ĂȘtre considĂ©rĂ© comme titre. Nous ne verrions pas un titre valable dans un acte de contradiction suivi d’une possession trentenaire. La contradiction n’a d’autre effet que de lĂ©gitimer la possession et d’autoriser la prescription poulies choses et les droits qui peuvent s’acquĂ©rir de cette maniĂšre; elle serait entiĂšrement nulle pour l’acquisition d’une servitude qui ne peut prendre sa base dans une possession mĂȘme immĂ©moriale. 11 en serait de mĂȘme d’un acte souscrit par un tiers qui prĂ©tendrait avoir droit Ă  la servitude ou par tout autre qui n’aurait jamais possĂ©dĂ© le fonds servant. Mais il en serait autrement, Ă  notre avis, d’un acte de — 381 — concession de servitude Ă©manĂ© du possesseur Ă  titre de maĂźtre et de propriĂ©taire du fonds qui serait grevĂ©. Quoiqu’il vĂźnt Ă  ĂȘtre plus tard Ă©vincĂ© de ce fonds, parce qu’il serait jugĂ© qu’il n’en a pas la propriĂ©tĂ©, le titre ne nous paraĂźtrait pas moins devoir servir de fondement Ă  la prescription et Ă  l’action possessoire ou pĂ©titoire. N° 2. Des servitudes naturelles et lĂ©gales. De ce que l’infĂ©rieur est tenu de supporter les eaux descendant du fonds supĂ©rieur, il suit qu’il n’aurait pas l’action possessoire en cas d’écoulement rĂ©cent d’une source qui n’aurait pas une annĂ©e d’existence. 11 n’aurait pas non plus action en cas d’éboulement d’un terrain supĂ©rieur sur le sien, eut-il Ă©tĂ© amenĂ© par des travaux que la propriĂ©tĂ© autorise, si la cause premiĂšre devait en ĂȘtre attribuĂ©e Ă  un vice occulte du terrain que l’on n’a pu connaĂźtre. ArrĂȘt de la cour de cassation du 29 novembre 1832. Un voisin n’aurait pas davantage action pour empĂȘcher le propriĂ©taire contigu de se clore, quoique cette innovation lui fit perdre l’avantage de la vaine pĂąture, ou tout autre qui ne serait fondĂ© ni sur un titre ni sur la loi. Si un voisin Ă©tablissait des jours et fenĂȘtres dans un mur non mitoyen, mais soit sans observer les distances, soit sans prendre les prĂ©cautions dĂ©terminĂ©es par les articles 676, 677, 678 et 679 du Code civil, il y aurait lieu contre lui Ăą l’action possessoire pour faire rĂ©primer son usurpation ; mais, aprĂšs l’annĂ©e, il faudrait se pourvoir au pĂ©titoire ; et l’action possessoire appartiendrait Ă  l’auteur des vues pour se faire maintenir en cas de — 382 — trouble, parce que la servitude de vue, Ă©tant continue et apparente, est prescriptible. Si le trouble consistait en une construction qui rnas- querait les vues, celui qui les aurait pratiquĂ©es depuis un an aurait l’action possessoire ; la cour de cassation avait d’abord jugĂ© le contraire. ArrĂȘts des 10 janvier 1810, 23 avril 1817, 2/i juin 1823. Mais elle est revenue sur cette jurisprudence par arrĂȘt du l or dĂ©cembre 1835. La complainte serait recevable contre celui qui ouvrirait des vues dans son mur, aprĂšs que le voisin aurait expressĂ©ment dĂ©clarĂ© vouloir acquĂ©rir la mitoyennetĂ©, et pendant qu’on procĂ©derait aux expertises et estimations des indemnitĂ©s qu’il aurait Ă  payer. Ce que nous venons de dire ne s’applique point aux rues, places, routes ou chemins publics sur lesquels on peut percer des jours ou des portes, diriger l’égout de ses toits Ă  sa volontĂ©. Ces diverses servitudes subsistent mĂȘme aprĂšs aliĂ©nation de ces choses en faveur de particuliers qui restent chargĂ©s de les supporter. ArrĂȘt du conseil du 25 avril 1833. Le principe relatif Ă  l’ouverture des fenĂȘtres ou jours, hors des cas et sans les conditions dĂ©terminĂ©es par la loi, s’applique Ă©galement aux Ă©tablissements exĂ©cutĂ©s en contravention aux diverses dispositions de l’article et Ă  l’article 681. Le droit de profiter des eaux d’une source dans le cas prĂ©vu par l’article 643 du Code civil est une servitude lĂ©gale. Le trouble apportĂ© Ă  son exercice donne lieu Ă  la complainte. Le juge de paix a le pouvoir de rechercher la nĂ©cessitĂ© qui, d’aprĂšs la loi, est la cause du droit des habitants. Le droit de passage est, comme nous l’avons dit, une servitude discontinue qui ne peut donner lieu Ă  l’action possessoire, Ă  moins qu’il ne soit appuyĂ© sur un titre. Par arrĂȘts des 3 juin et 2/i novembre 1835, et 9 mars 18/i6, la cour de cassation a dĂ©cidĂ© formellement qu’il en Ă©tait ainsi, lors mĂȘme que le passage s’annonçait par un ouvrage extĂ©rieur, une porte par exemple, parce qu’en effet l’ouvrage rend bien la servitude apparente, mais n’empĂȘche pas qu’elle soit toujours discontinue, et ne puisse s’acquĂ©rir que par titre. Mais il en est diffĂ©remment du passage accordĂ© en cas d’enclave par l’art. 382. L’enclave n’est pas dĂ©finie par la loi. Les juges, mĂȘme au possessoire, doivent avoir certaine latitude pour la rechercher et la constater. La contiguĂŻtĂ© d’un chemin public, d’un cours d’eau, mĂȘme lorsqu’il appartiendrait au propriĂ©taire du fonds, pourrait ĂȘtre dĂ©clarĂ©e ne pas faire cesser l’enclave, si le mauvais Ă©tat du chemin ou la nature de la riviĂšre rendaient le passage dangereux ou trop difficile, ou exigeaient des dĂ©penses trop considĂ©rables pour l’état des communications. Voyez notre TraitĂ© des chemins, et arrĂȘts de la cour de cassation des 31 mai 1825, 23 aoĂ»t 1827 et 16 fĂ©vrier 1835. Il en serait de mĂȘme dans le cas oĂč une partie du fonds ne toucherait Ă  la voie publique que par un fossĂ©, un rocher, une montagne qui s’opposeraient Ă  la communication directe avec cette voie. Le propriĂ©taire tiendrait de la loi le droit de passer sur l’hĂ©ritage ou les hĂ©ritages voisins, et il devrait ĂȘtre maintenu dans la possession qu’il aurait eue pendant un an sans ĂȘtre tenu de produire un acte de concession, parce qu’alors le titre du rĂ©clamant est la loi elle-mĂȘme; ce qui s’applique Ă  toutes les servitudes naturelles ou lĂ©- 384 — gales. ArrĂȘts de la cour de cassation des 26 janvier'1825, 9 mai 1831. Cette solution sur laquelle la jurisprudence a Ă©tĂ© longtemps incertaine, ne saurait plus ĂȘtre aujourd’hui l’objet du moindre doute. Si deux arrĂȘts de la cour de cassation des 7 fĂ©vrier 1811 et 8 juillet 1812, ont d’abord refusĂ© l’action possessoire pour trouble dans l’exercice d’un passage en cas d’enclave, deux autres arrĂȘts des 10 juillet 1821 et 22 aoĂ»t 1827, avaient dĂ©jĂ , Ă  l’occasion d’une question analogue, posĂ© un principe diffĂ©rent, et depuis, dix arrĂȘts des 8 janvier, 7 mai 1829, 10 mars 1830, 21 mars et 9 mai 1831, 27 juin, 19 novembre 1832, 23 mars et 7 juin 1830, et 12 dĂ©cembre 1843 , l’ont de nouveau consacrĂ©. Ainsi, les doutes Ă©levĂ©s par M. Va- zeille, des Prescriptions, tome 1, n°* 409 et 410, ne sont pas fondĂ©s. Et si le propriĂ©taire enclavĂ© qui jouissait dĂ©jĂ  d’une servitude de passage venait Ă  changer la destination primitive de son fonds, il aurait le droit d’exiger, sauf indemnitĂ©, une extension ou modification de la servitude, proportionnellement aux besoins de l’exploitation nouvelle. ArrĂȘt de la cour de cassation, du 8 juin 1836. Mais il faut remarquer que celui qui se prĂ©tendrait ou serait rĂ©ellement enclavĂ©, et qui n’aurait jamais exercĂ© le passage, ou celui qui, aprĂšs l’avoir exercĂ©, aurait besoin d’en obtenir un nouveau, Ă  raison des changements survenus dans les lieux ou dans l’exploitation, ne pourrait, de son autoritĂ© privĂ©e, Ă©tablir ce passage, en choisir l’emplacement, et que s’il le faisait sans l’intervention de la justice, le propriĂ©taire du fonds que l’on veut ainsi grever de servitude, mais qui serait en possession annale de franchise, serait recevable Ă  intenter l’action posses- — ,!8S — soire pour s’y faire maintenir. VrrĂȘt de cassation du lĂŽ juillet 18/iĂą, entre LinarĂšs et Darlot. Si l’enclave n’avait pas une annĂ©e d’existence, le propriĂ©taire de l’hĂ©ritage sur lequel le passage serait pratiquĂ© pourrait faire rĂ©primer ce fait, sans que le possesseur du fonds enclavĂ© pĂ»t opposer que l’exercice d’un droit fondĂ© sur la nĂ©cessitĂ© et sur la loi ne peut pas ĂȘtre un trouble ; car autre chose est le principe du droit, autre chose est le mode de son exercice ; et lorsque l’enclave est prouvĂ©e, il reste encore Ă  rĂ©gler par lequel des fonds voisins ou par quelle partie de ces fonds le passage doit avoir lieu; ce rĂ©glement excĂšde la compĂ©tence du juge de paix et ne peut ĂȘtre fait que par les tribunaux civils. 11 s’ensuit que si, aprĂšs avoir passĂ© pendant moins d’un an, l’enclavĂ© venait Ă  ĂȘtre troublĂ© dans son passage, il ne pourrait intenter complainte pour s’y faire maintenir. Voyez notamment les arrĂȘts de la cour de cassation des 7 juin 1830 et 12 dĂ©cembre 18/3. 11 est Ă©vident que le fait matĂ©riel, la possession annale du passage doit ĂȘtre la rĂšgle des parties et du juge pour dĂ©cider sur la complainte en cas d’enclave ; le propriĂ©taire de l’hĂ©ritage assujetti serait fondĂ© Ă  intenter cette action contre le voisin qui viendrait Ă  changer l’emplacement par lequel il aurait passĂ© pendant une annĂ©e entiĂšre. Cour de cassation, 24 juin 1828. RĂ©ciproquement, le propriĂ©taire du fonds enclavĂ© serait fondĂ© Ă  se faire maintenir dans la possession de passer par la partie du fonds qui lui aurait servi Ă  cet usage pendant un an. Le propriĂ©taire du fonds servant ne pourrait s’v opposer, sous prĂ©texte que le passage est par cet endroit plus long et plus dommageable pour lui, ni demander que le juge de paix recherchĂąt et fixĂąt cet endroit. 386 — d’échelle au nombre des servitudes lĂ©gales; il est Ă©galement certain que, dans les pays oĂč l’acquisition en Ă©tait autrefois permise par possession, il faut que cette acquisition ait Ă©tĂ© accomplie avant le Code. Cependant, la premiĂšre dĂ©cision a Ă©tĂ© controversĂ©e entre MM. Guichard et Aulanier; le premier tient pour l’abolition du tour d’échelle comme servitude lĂ©gale ; le second pense, au contraire, qu’elle forme un droit acquis pour ceux dont les constructions existaient avant le Code ch il. Nous croyons inutile de suivie ces auteurs dans leurs raisonnements opposĂ©s, car la question qui les divise a Ă©tĂ© nettement tranchĂ©e par deux arrĂȘts de la cour de cassation, qui paraissent avoir Ă©chappĂ© Ă  leurs recherches. Nous les avons dĂ©jĂ  citĂ©s ; ils sont des 31 octobre 1810 et 21 avril 1813. M. Merlin les reproduit, V° l'm- sinage, avec des conclusions fort Ă©tendues prononcĂ©es lors du dernier. Il prouve que toutes les servitudes dĂ©rivant des anciens usages ou des dispositions expresses des coutumes, sont abolies par l’art. 7 de la loi du 30 ventĂŽse an XII, lequel dĂ©clare, qu’à compter du jour oĂč ont Ă©tĂ© exĂ©cutoires les lois dont se compose le Code civil, les lois romaines, les ordonnances, les coutumes gĂ©nĂ©rales ou locales... avaient cessĂ© d’avoir force de loi gĂ©nĂ©rale ou particuliĂšre dans les matiĂšres qui sont l’objet de ces lois; qu’il en est ainsi, lors mĂȘme qu’on en aurait joui de temps immĂ©morial avant le Code civil, parce que cette possession rĂ©sultant d’une coutume, celui contre lequel on l'invoque ayant Ă©tĂ© forcĂ© de la soull'rir, il n’en pouvait rĂ©sulter aucune acquisition de droit ; pie l’art. Ăčl du Code civ il ne maintient pie les servitudes acquises par la seule possession, sans le secours de la coutume, — 390 — parce qu’elle est fQiidĂ©e sur le consentement prĂ©sumĂ© du voisin. Les deux arrĂȘts citĂ©s ont pleinement consacrĂ© cette opinion. Ces principes reçoivent exception au cas de rĂ©paration Ă  faire Ă  un mur mitoyen ; chacun des propriĂ©taires Ă©tant tenu d’y contribuer Ă©galement, doit, par une consĂ©quence nĂ©cessaire, fournir le passage sans lequel l’obligation ne pourrait s’accomplir. Quant au tour d’échelle, qui consiste en un terrain dĂ©laissĂ© par le propriĂ©taire au delĂ  de son mur ou bĂątiment, il subsiste toujours, puisqu’il est Ă©tabli Ă  titre de propriĂ©tĂ© et non de servitude. La cour de cassation a jugĂ©, le 15 dĂ©cembre 1835, pie le propriĂ©taire d’un moulin construit sur un canal fait de main d’homme, constituant une propriĂ©tĂ© privĂ©e commune Ă  plusieurs moulins alimentĂ©s par ses eaux, a le droit, en l’absence de titre contraire, de passer sur la douve de ce canal dans toute son Ă©tendue, pour veiller au libre cours des eaux. L’usinier troublĂ© dans la possession d’exercer ce passage, aurait incontestablement l’action possessoire pour s’y faire maintenir, comme en matiĂšre de sentier d’exploitation. .Y’ 3. Des servitudes Ă©tablies par le fait de l'homme. Nous avons dĂ©jĂ  dit que les servitudes continues et apparentes pouvant s’acquĂ©rir par la prescription, la possession annale autorisait la complainte Ă  leur Ă©gard. Ainsi, cette action appartient au possesseur d’une fenĂȘtre, d’un aqueduc, d’un Ă©gout, lorsqu’il est troublĂ©. Mais la possession ne pouvant plus faire acquĂ©rir. ; s — 301 — autres servitudes, ne peut, par consĂ©quent, en ce qui les concerne, servir de fondement Ă  la complainte. Vainement un particulier aura-t-il, de temps immĂ©morial, exercĂ© le puisage ou lavage mĂȘme Ă  l’aide d’établissements fixes et apparents arrĂȘts de cassation du h octobre 1807, fait pacager ses bestiaux arrĂȘt de la mĂȘme cour du 22 novembre 1830 ou passĂ© sur le fonds d’autrui, mĂȘme au moyen d’une porte qu’il y aura ouverte, il n’aura par lĂ  acquis aucun droit. Cette dĂ©cision s’applique aussi Ă  une commune lorsqu’elle a d’autres chemins dans le voisinage. ArrĂȘt du 30 novembre 1830. 11 en est autrement lorsque le demandeur, outre la possession annale qu’il allĂšgue, produit un titre pour prouver que sa possession rĂ©sulte d’un droit lĂ©gitime, et n’est pas l’effet de la tolĂ©rance ou de la familiaritĂ©. Le juge de paix non-seulement peut, mais doit l’apprĂ©cier sous ce seul rapport, quand mĂȘme il serait contestĂ©, pourvu qu’il se borne Ă  maintenir dans la possession sans rien dĂ©cider sur le fond du droit. Nous pensons qu’il aurait le mĂȘme pouvoir, dans le cas oĂč le titre serait combattu par un autre ou attaquĂ© de nullitĂ© pour vice de forme, sauf cependant Ă  l’écarter si cette nullitĂ© Ă©tait constante Ă  ses yeux et rĂ©sultait de faits certains, mais non lorsqu’elle ne peut ĂȘtre la consĂ©quence que d’une action en rescision ou d’une instruction plus ou moins longue. 11 ne pourrait pas davantage prendre pour base de sa dĂ©cision un acte authentique contre lequel une inscription de faux serait admise, ou celui sous-seing privĂ© dont les signatures seraient contestĂ©es. Il a Ă©tĂ© jugĂ© le 1 er avril 1837, par la cour de cassation, que la possession suffit Ă  celui qui, au lieu de rĂ©clamer un simple droit de servitude, se prĂ©tend propriĂ©taire du terrain ou de l’objet sur lequel il a exercĂ© le passage, pacage ou puisage. Du reste, le juge de paix doit n’user du pouvoir d’appliquer les titres qu’avec une grande rĂ©serve. Tous ces principes nous paraissent rĂ©sulter de la jurisprudence constante de la cour de cassation. Nous citerons les arrĂȘts des 2 et 2 /i juillet 1810 , 0 juillet 1812 , 2 mars, 17 mai 1820 , 20 janvier, 10 avril, 0 novembre, 21 dĂ©cembre / lĂ©vrier 1820 , 21 mars, 0 dĂ©cembre 1831 . juge pourrait aussi consulter les titres pour rechercher si l’objet en litige est dans le commerce et susceptible de prescription. La cour de cassation l’a ainsi jugĂ© avec raison, par arrĂȘts des 10 lĂ©vrier et 25 juillet 1837, et 2 lĂ©vrier 18/0. On peut voir encore un arrĂȘt assez important rendu le 12 novembre 1838, par la chambre des requĂȘtes, sur le pourvoi de la ville de Bolbec contre du tribunal du Havre. La mĂȘme cour a jugĂ©, le 21 mai 1838, qu’un petit terrain situĂ© en dehors des murs de clĂŽture d’une propriĂ©tĂ© particuliĂšre et attenant Ă  une place publique, avait pu ĂȘtre prĂ©sumĂ© faire partie de cette place, dĂ©clarĂ© imprescriptible et non susceptible de donner lieu Ă  complainte. La cour de cassation a encore rendu, le 8 mai 1S38, un arrĂȘt qui mĂ©rite une attention spĂ©ciale. Pour se dĂ©fendre d’une action possessoire et soutenir qu’il Ă©tait co-usager avec les demandeurs, le sieur Bou- geret invoquait un trĂšs-ancien titre. Les demandeurs rĂ©pliquent que les droits sont prescrits et Ă©teints, soit parce que, s’agissant d’un sol originairement forestier, 3113 — on n’a pu les conserver que par des dĂ©clarations et procĂšs-verbaux de dĂ©livrance, soit par le non-usage pendant trente ans. Mais les juges du possessoire ont refusĂ© de statuer sur l’exception, et la cour a approuvĂ© ce refus, attendu que si ces juges doivent apprĂ©cier les titres, ils ne doivent pourtant pas prononcer sur leur validitĂ© relativement au fond du droit, se livrer Ă  des instructions longues et dispendieuses pour Ă©carter ou admettre les objections proposĂ©es contre les titres; qu’il suflit d’en reconnaĂźtre la rĂ©gularitĂ©, d’en apprĂ©cier la portĂ©e, de la prendre, s’il y a lieu, pour point de dĂ©part, alin de dĂ©terminer le vĂ©ritable caractĂšre de la possession, tous les droits des parties demeurant rĂ©servĂ©s au pĂ©titoire. Par un autre arrĂȘt du 23 mai 1838, la cour rĂ©gulatrice a cassĂ© un jugement qui avait Ă©cartĂ© un titre un partage de biens communaux fait en 1791 comme nul, aux termes de la loi du 9 ventĂŽse an XII ; elle s’est fondĂ©e sur le motif bon pour l’espĂšce, mais qu’il ne faudrait pas appliquer d’une maniĂšre absolue, qu’en matiĂšre possessoire la question de validitĂ© ou de non validitĂ© des titres ne peut autoriser Ă  dĂ©clarer la possession vicieuse et sans effet. Nous disons qu’il ne faudrait pas appliquer ce motif d’une maniĂšre absolue; nous pensons en effet qu’il faut au moins, pour pie l’action soit recevable, que la validitĂ© du titre soit constatĂ©e quant au possessoire. Kt c’est ce pie la cour de cassation elle-mĂȘme a dĂ©cidĂ© par arrĂȘt du 2t juillet 1839, duquel il rĂ©sulte, qu’au cas d’action possessoire ayant pour objet une servitude discontinue, telle qu’un droit de passage, laquelle action n’est recevable qu’autant que le droit se trouve fondĂ© sur un litre, — 3!>i — le juge du possessoire auquel un tel titre est prĂ©sentĂ© doit, si sa validitĂ© est contestĂ©e, apprĂ©cier lui-mĂȘme cette validitĂ© en ce qui touche le possessoire, pour statuer ensuite sur l’action Ă  laquelle il sert de base. Il ne peut renvoyer cet examen aux tribunaux ordinaires, et surseoir Ă  statuer sur le possessoire, jusqu’à ce que leur dĂ©cision soit intervenue. Nous ne pensons pas que le juge de paix puisse prendre en considĂ©ration ni rechercher une possession tren- tenaire ou immĂ©moriale dans les pays oĂč, avant le Code civil, les servitudes discontinues s’acquĂ©raient de cette maniĂšre ; car, d’une part, le Code veut qu’elles fussent dĂ©jĂ  acquises avant sa promulgation ; et, de l’autre, il n’appartient pas au juge de paix de donner un titre aux parties ; il peut seulement appliquer celui dont l’existence lui est Ă©tablie par la production qu’elles en font. Aussi, en pareil cas, la cour de cassation a-t-elle dĂ©cidĂ©, le 3 octobre 181A et le 2 juillet 1823, que la voie pĂ©titoire est la seule praticable. Remarquons, que lorsque sur une complainte le dĂ©fendeur allĂšgue qu’il a la possession annale de couper des litiĂšres, de fagoter et de faire paĂźtre sur le terrain en litige, que mĂȘme ses auteurs ont cultivĂ© ce terrain pendant nombre d’annĂ©es, sans trouble ni opposition, si le tribunal juge qu’en fait le demandeur ne justifiant pas sullisamment de sa possession annale, il y a lieu Ă  admettre le dĂ©fendeur Ă  la preuve de ses faits de possession, il n’y a point lĂ  de contravention aux dispositions de l’art. HH du Code civil. ArrĂȘt de la cour de cassation du 21 fĂ©vrier 1827. Lorsque le demandeur 11 ’ofĂŻre pas de justifier sa possession exclusive, et que d’ailleurs son adversaire prouve — 39o — qu’il a eu aussi la possession de l’objet litigieux, le juge peut prononcer en faveur de ce dernier, sans ĂȘtre obligĂ© d’ordonner que le demandeur fera preuve de la possession exclusive allĂ©guĂ©e. ArrĂȘt de la cour de cassation du 31 aoĂ»t 1831. Aux ternies de l’art. 692, la destination du pĂšre de famille vaut titre Ă  l’égard des servitudes continues et apparentes. Cette dĂ©cision n’a d’importance qu’au pĂ©ti— toire, parce qu’elle dispense de la prescription ; mais elle n’en a point au possessoire, puisque la possession annale est toujours exigĂ©e pour la complainte, et que les servitudes dont il s’agit sont prescriptibles. Mais l’art. 69A portant que si le propriĂ©taire de deux hĂ©ritages entre lesquels il existe un signe apparent de servitude, dispose de l’un de ses hĂ©ritages sans que le contrat contienne aucune convention relative Ă  la servitude, elle continue de substituer activement ou passivement en faveur du fonds aliĂ©nĂ© ou sur le fonds aliĂ©nĂ©, est-il corrĂ©latif Ă  l’art. 692, fait pour le mĂȘme cas, ou bien s’applique-t-il, sans distinction, Ă  toutes les servitudes continues et discontinues, toutes les fois qu’il existe un signe apparent entre les deux immeubles? Les auteurs les plus graves sont divisĂ©s sur cette question. Les uns prĂ©tendent que l’art. 69A ne doit s’entendre que des servitudes continues et non des servitudes discontinues, et que le principe posĂ© par l’art. 692 doit rĂ©gir l’art. 69A, qui n’en est que le dĂ©veloppement. Telle est l’opinion de MM. Delvincourt, Cours de Code civil, t. 1 er , p. 533 ; Toullier, t. 3, n“ 613, et Favard de Lan- glade, Repert., V° Servitude, sect. 3, § A, n° 3. Mais la doctrine contraire est professĂ©e par MM. Par- dessus, TraitĂ© des servitudes, n°* 289 et 300; Merlin, Rc- pert., V° Servitude, § 19, n° 2 ; Duranton, Cours de droit civil, t. 5, n 0 ' 570 et suiv., et Solon, TraitĂ© des servitudes rĂ©elles, n° 399. Suivant ces auteurs, l’art. 694 n’a aucun rapport avec l’art. 692 ; il statue pour un cas autre que ceux prĂ©vus par celui-ci, et il en est parfaitement indĂ©pendant, puisqu’il ne tire aucune considĂ©ration de la continuitĂ© ou discontinuitĂ© de la servitude; mais qu’au contraire, dans le cas qu’il prĂ©voit, la servitude est maintenue, par cela seul qu’elle est manifestĂ©e par un signe apparent, soit qu’elle soit continue ou discontinue. La jurisprudence, longtemps incertaine, parait s’ĂȘtre fixĂ©e dans ce dernier sens. Nous citerons notamment les arrĂȘts de la cour de Caen du 15 novembre 1836, de la cour de Douai du 1 er juillet 1837, et de la cour de Limoges du 4 aoĂ»t 18/jO ; et ceux rendus par la cour de cassation les 26 avril 1837 et 2/i fĂ©vrier 1810. Ajoutons, toutefois, que ce dernier arrĂȘt introduit une distinction tout-Ă -fait nouvelle, et donne Ă  la question une solution moins gĂ©nĂ©rale, en ce que tous les arrĂȘts antĂ©rieurs ne soumettaient l’application de l’article 694 aux servitudes discontinues qu’à la condition d’un signe apparent, tandis que l’arrĂȘt du 24 fĂ©vrier 1840 exige de plus que la servitude ait une origine lĂ©gale rĂ©sultant soit d’un titre, soit de l’état des lieux et de la nature mĂȘme des choses, comme au cas d’enclave. Quanta l’action possessoire, nous croyons que l’existence d’un signe apparent ne suffirait point pour l’autoriser; il faudrait encore qu’il s’agisse d’une servitude continue. Mais au cas de servitude discontinue, le demandeur allĂ©guerait en vain l’article 694, s’il ne joignait Ă  sa possession annale un titre originaire. 397 — Nous ne considĂ©rons le pacage sur le fonds d’autrui que comme une servitude discontinue, sans distinguer entre la grasse et la vaine pĂąture, conformĂ©ment Ă  l’article 688, dont les termes sont gĂ©nĂ©raux. Il ne peut donc s’établir par la possession, et n’est pas susceptible de l’action possessoire quand il n’est pas appuyĂ© sur un titre. Nous n’admettrions d’exception que dans les cas oĂč la propriĂ©tĂ© ne serait d’aucun autre produit, et oĂč celui qui aurait exercĂ© le pacage se prĂ©tendrait propriĂ©taire du sol. Alors le juge de paix aurait la facultĂ© de considĂ©rer les faits comme constituant une possession non prĂ©caire et Ă  titre de propriĂ©taire. Nous rangeons aussi le droit de secondes herbes dans la catĂ©gorie des servitudes discontinues. La cour de cassation a eu deux fois Ă  prononcer sur ce point. Dans la premiĂšre espĂšce, elle Ă©vita de le faire en dĂ©cidant que le jugement qui avait reconnu qu’une plantation exĂ©cutĂ©e sur un prĂ© grevĂ© de cette servitude ne constituait pas un trouble Ă  la possession, avait jugĂ© en fait, et ne pouvait ĂȘtre cassĂ©. ArrĂȘt du 19 juillet 1825. L’arrĂȘt rendu dans la seconde espĂšce, le 7 mars 1826, Ă©nonce positivement que le droit de secondes herbes, exercĂ© sans titre, est une servitude discontinue. Toutefois, il a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© par un arrĂȘt de la chambre des requĂȘtes du 22 novembre 1841, que la perception des secondes herbes d’un prĂ© au profit d’une commune, soit par elle-mĂȘme, soit par des tiers auxquels elle l’affermait, peut, suivant les circonstances de fait et de lieu dont les tribunaux sont apprĂ©ciateurs souverains, constituer, non une servitude de vaine pĂąture, insusceptible d’ĂȘtre acquise par prescription, non pas mĂȘme un droit d’usage, susceptible d'ĂȘtre rachetĂ© par voie de canton- — 398 — nement, maĂŻs un droit de co-propriĂ©tĂ©, qui peut ĂȘtre acquis par une possession trentenaire. Les usages dans les bois et forĂȘts se divisent en grands et petits. Les premiers consistent dans le droit de faire paĂźtre les bestiaux, de se faire dĂ©livrer du bois de chauffage et de construction. Les autres consistent principalement dans le droit d’enlever les bois morts et morts bois. Les auteurs ne sont pas d’accord sur la nature du droit d’usage ; les uns le considĂšrent comme une co-propriĂ©tĂ© ; les autres, parmi lesquels on compte MM. Ilenrion chapitre A3, § 8, Merlin Questions de droit, V° PĂąture et bavard de Langlade, rĂ©p. V° Usayes droit d’, comme une servitude discontinue. Nous n’avons pas l’intention de nous livrer Ă  la discussion de ces opinions diverses, parce que nous devons nous borner autant que possible Ă  traiter des actions possessoires. Nous dirons seulement que nous adoptons la derniĂšre; que, par consĂ©quent, le trouble Ă  un usage ne peut donner lieu Ă  la complainte qu’autant que le droit est Ă©tabli par titre. Cette solution est commune aux bois de l’État et des particuliers. Nous n’admettrions mĂȘme pas d’exception pour le cas oĂč l’on invoquerait des procĂšs-verbaux de dĂ©fensabilitĂ© et de dĂ©livrance pendant plusieurs annĂ©es, et notamment pendant celle qui aurait prĂ©cĂ©dĂ© le trouble. Ces actes, sufli- sans pour empĂȘcher la prescription du droit rĂ©sultant d’un titre, ne pourraient Ă©quivaloir au titre constitutif exigĂ© par la loi ; il y aurait pour les bois de l’État une raison de plus de cette solution ; c’est que tous les droits non reconnus par des dĂ©cisions antĂ©rieures au Code forestier ou par suite d’instances engagĂ©es dans les deux ans de ce Code sont supprimĂ©s, et qu’il est dĂ©fendu d’en Ă©tablir Ă  l’avenir. *w» 300 â€ąâ€œÂ» La jurisprudence de la cour de cassation nous semble conforme Ă  notre sentiment. Un premier arrĂȘt du O mars 1817 dĂ©cide qu’un droit d’usage dans les bois peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme servitude. Nous lisons dans un autre arrĂȘt du 23 mai 1832 que les droits d’usage dans les forĂȘts sont des servitudes discontinues, qu’en Alsace ces servitudes pouvaient s’acquĂ©rir par la prescription avant le civil ; que l’art. 691 a maintenu les droits d’usage acquis de cette maniĂšre buis cette province avant ce '.ode. Deux autres arrĂȘts de la mĂȘme cour des 6 fĂ©vrier et 3 avril 1833, donnent aussi aux droits d’usage dans les bois et forĂȘts de l’Iitat, des communes ou des particuliers, la qualification de servitudes. Un arrĂȘt plus rĂ©cent, rendu par cette cour le 30 juillet 1838, dĂ©cide encore que les droits d’usage dans les forĂȘts ne constituent au profit des usages qu’une servitude discontinue qui, aux termes des lois sur la contribution fonciĂšre, n’est soumise Ă  aucune partie de cet impĂŽt. Cependant un autre arrĂȘt de la mĂȘme cour, du 6 aoĂ»t 1832, fait rĂ©sulter de la loi du 10 juin 1793 une exception toute spĂ©ciale ; il a jugĂ© qu’une commune en possession d’un pacage, sur un terrain situĂ© dans le territoire d’une commune voisine, doit, aux termes de cette loi, section A, article 2, ĂȘtre maintenue dans sa possession, parce que l’article 691, sur l’impossibilitĂ© d’établir les servitudes discontinues autrement que par titres, n’a portĂ© aucune atteinte Ă  la lĂ©gislation communale rĂ©sultant de cette loi de 1793. Jusqu’ici nous n’avons considĂ©rĂ© que le propriĂ©taire troublĂ© dans l’exercice d’une servitude par celui sur le fonds duquel il prĂ©tend pouvoir l’exercer; mais nous de- — 400 — vons nous occuper aussi de ce propriĂ©taire qui soutiendrait n’ĂȘtre assujetti Ă  aucune charge. Celui-ci aurait sans contredit, en gĂ©nĂ©ral, l’action possessoire appelĂ©e nĂ©gatoire pour se luire maintenir dans la possession libre et franche de son hĂ©ritage, nonobstant un arrĂȘt de la cour de cassation du 2 fĂ©vrier 1820, rendu entre Mairet et la veuve Tarnier, dont nous avons combattu la dĂ©cision dans notre TraitĂ©, des chemins, et que M. Merlin a Ă©galement combattu dans ses Questions de droit, X° Servitudes. Mais comme la prescription peut servir Ă  fixer le mode d’exercice mĂȘme des servitudes lĂ©gales, par exemple pour les eaux que le fonds infĂ©rieur est tenu de supporter et pour le passage en cas d’enclave, il y aurait lieu, aprĂšs une annĂ©e de possession, Ă  une action possessoire, s’il Ă©tait fait quelque innovation Ă  cet Ă©tat Ăźle choses. Voy. pages 258, 315 et 319. L’action possessoire du propriĂ©taire de l’hĂ©ritage serait recevable lors mĂȘme qu’une servitude discontinue, le passage, le puisage ou le pacage, aurait eu lieu pendant plus d’un an avant la demande, lu pareil fait ne peut entraĂźner ni perte ni acquisition de droit. Lors mĂȘme qu’il s’agit de servitudes continues et apparentes, ou de servitudes discontinues, mais fondĂ©es en titres, le propriĂ©taire est admis, aprĂšs un an de non exercice, Ă  intenter l’action possessoire, parce que les servitudes qui rĂ©sultent du fait de l’homine peuvent s’éteindre par la prescription, c’est-Ă -dire par le non usage, pendant trente ans. Art. 705 du Code civil. De nombreux arrĂȘts de la cour de cassation ont fait l’application de ces principes aux usages dans les bois et forĂȘts. — 401 Ils ont dĂ©cidĂ© que l’usage, comme toute autre servitude, Ă©tait prescrit aprĂšs trente ans de la date du titre qui l’avait Ă©tabli; que c’était Ă  l’usager de prouver qu’il avait joui de son droit pendant ce temps, ou au moins pendant celui suffisant pour interrompre la prescription ; que le fait de jouissance ou d’interruption ne pouvait rĂ©sulter que de procĂšs-verbaux rĂ©guliers de dĂ©livrance ou de dĂ©fensabilitĂ©, ou d’actes Ă©manĂ©s soit du propriĂ©taire de la forĂȘt, soit de ses reprĂ©sentants ou Ă©quipollents Ă  de tels procĂšs-verbaux, ou Ă©tablissant un commencement de preuve par Ă©crit propre Ă  autoriser la preuve testimoniale d’une possession lĂ©gitime, sans quelle pĂ»t rĂ©sulter du seul fait matĂ©riel de lĂ  jouissance de l’usage. On peut voir notamment les arrĂȘts des 23 mars, 31 aoĂ»t, 15 et 16 novembre 1842, 4 et 19 novembre 1845. butin un arrĂȘt du 15 novembre 1841 a dĂ©cidĂ©, dans un cas spĂ©cial, que la prescription des droits d’usage et autres servitudes attachĂ©es Ă  un domaine court contre l’acquĂ©reur de ce domaine, Ă  partir du jour de la vente, encore bien qu’à cette Ă©poque le domaine soit affermĂ© par un bail antĂ©rieur qui ne prend fin qu’à une Ă©poque postĂ©rieure Ă  la vente ; dans ce cas, l’acquĂ©reur ne serait pas fondĂ© Ă  prĂ©tendre que la prescription n’a couru contre lui qu’à partir de l’expiration du bail. Il suit de tout ce que nous venons de dire sur les usages dans les bois et forĂȘts que celui qui prĂ©tendrait y avoir droit ne pourrait intenter l’action possessoire contre le propriĂ©taire, qu’autant qu’à un titre constitutif, il joindrait une possession annale antĂ©rieure au trouble, Ă©tablie par des procĂšs-verbaux de dĂ©livrance ou des actes Ă©quipollents, et qu’aprĂšs une annĂ©e de non-exercice de 1 usage, la complainte ait au propriĂ©taire 26 — — ,. ‱. i pour se faire maintenir dans la possession de franchise de son fonds. „ Nous ferons, en terminant, une observation commune Ă  toutes les servitudes ; c’est qu’aux termes de l’art. 701 du Code civil, le propriĂ©taire du fonds, dĂ©biteur de la servitude, peut obtenir le changement du lieu de son exercice, lorsque l’assignation primitive est devenue trop onĂ©reuse, et que l’innovation qu’il propose ne prĂ©judicie pas au crĂ©ancier. La cour de cassation a mĂȘme appliquĂ© ce principe au cas oĂč une transaction avait mis en commun des eaux destinĂ©es Ă  l’irrigation de deux propriĂ©tĂ©s et çn avait rĂ©glĂ© l’usage. Mais le propriĂ©taire du fonds servant ne pourrait opĂ©rer le changement avant d’avoir obtenu l’autorisation de celui Ă  qui la servitude est due, ou, Ă  son refus, de la justice. S’il le faisait, ce crĂ©ancier serait bien fondĂ© Ă  intenter action en complainte ou rĂ©intĂ©grande pour faire rĂ©tablir l’ancien Ă©tat des lieux. — 403 — CHAPITRE III Dp» divers objets qui, dans l’ancien droit, Ă©taient considĂ©rĂ©s comm immeubles ou droits rĂ©els donnant lieu Ă  l’action possessoire, et qui ne pourraient plus eii ĂȘtre l’objet aujourd’hui. SECTION 1". Notions gĂ©nĂ©rales. Nous nous sommes proposĂ©, dans le titre second de cet ouvrage, de faire connaĂźtre les diffĂ©rentes choses qtii peuvent ĂȘtre l’objet des actions possessoires. C’est pour atteindre plus efficacement ce but, qu’aprĂšs en avoir dĂ©jĂ , dans les deux chapitres prĂ©cĂ©dents, passĂ© un assez grand nombre en revue, nous avons cru devoir consacrer un chapitre particulier Ă  certaines d’entre elles qui, dans l'ancienne lĂ©gislation, Ă©taient considĂ©rĂ©es comme droits rĂ©els immobiliers. La comparaison et le rapprochement des unes et des autres feront mieux comprendre encore le sens et l’application des principes que nous avons posĂ©s. Par le mot droit rĂ©el, dit llodier, sur l’art. 1", lit. 18 de l’ordonnance de 1669, quest. 2, on entend un droit attachĂ© Ă  une chose, comme une rente fonciĂšre, un droit de cens, de champart, de dĂźme, de pĂ©age, etc. Les droits de patronage, les droits honorifiques des patrons et des seigneurs sont pareillement regardĂ©s comme des droits rĂ©els, Ă  raison desquels on peut intenter l’action possessoire. Suivant Mareschal et Simon, au Traitç — 404 - des droits honorifiques, t. 1", p. 157, 195, 518, ort compte surtout parmi les droits honorifiques, la litre ou ceinture funĂšbre, le banc, la sĂ©pulture ou le sĂ©pulcre, l’offrande, l’eau bĂ©nite, le pain bĂ©nit, la paix Ă  baiser, le rang aux processions. Il fut jugĂ©, par arrĂȘt du parlement de Toulouse du 27 septembre 1743, que le baron de Lanta avait pu former complainte Ă  raison des droits de justice contre le sieur Molinier, qui prĂ©tendait avoir une vingt-quatriĂšme portion de la justice, dans le lieu de Sainte-Foi, descendant de la baronnie de Lanta. Les particuliers peuvent mĂȘme intenter cette action pour les sĂ©pultures dont ils sont en possession, et les marguilliers pour les bancs. Voyez le TraitĂ© des droits honorifiques, pages 232 et 253. Je ne doute pas, malgrĂ© ce que dit Lange en sa Pratique, liv. 3, cliap. 5, qu’on ne fĂ»t reçu Ă  exercer l’action de complainte et rĂ©intĂ©grande Ă  raison des fonctions, droits et Ă©moluments d’un office, surtout d’un office hĂ©rĂ©ditaire et patrimonial, et tel est l’avis de Loiseau, TraitĂ© des offices , liv. 3, cliap. 4, n° 25. On pourrait encore demander par voie de rĂ©intĂ©grande d’ĂȘtre remis en possession de son Ă©tat de lĂ©gitimitĂ©. » Nous renvoyons Ă  ce que dit Pothier, TraitĂ© de la possession, depuis le n° 88, jusqu’au n° 94, relativement aux droits de complant et de banalitĂ©s, Ă  la corvĂ©e, Ă  la dĂźme. L’action possessoire Ă©tait Ă©galement admise Ă  raison de trouble dans la jouissance des bĂ©nĂ©fices. L’ordonnance de 1067 renferme un titre entier le 15“' consacrĂ© aux procĂ©dures sur le possessoire des bĂ©nĂ©fices. tOo — Pothier, de la Possession, il 0 ’ 134 et suivants, traite cette matiĂšre avec Ă©tendue. M. Henrion de Pansey est d’avis que la complainte peut encore avoir lieu aujourd’hui 1° En faveur des crĂ©anciers de rentes fonciĂšres, lorsqu’ils sont troublĂ©s dans leur jouissance, soit par le dĂ©biteur de la rente, soit par un tiers pii prĂ©tend avoir droit de la percevoir ; mais il pose un principe diffĂ©rent relativement aux rentes constituĂ©es, mĂȘme avec hypothĂšque spĂ©ciale. 11 cite Faber, Mazuer, Brodeau sur l’art. 98 de la Coutume de Paris, n° 3 ; de LauriĂšre sur l’art. 96 ; Imbert, Coquille. 2° Pour droit de champart, c’est-Ă -dire pour le droit de percevoir certaine partie des fruits d’un fonds. 11 pense que si le propriĂ©taire d’un hĂ©ritage grevĂ© du droit de champart refuse d’en continuer le paiement, celui qui l’a perçu pendant les annĂ©es prĂ©cĂ©dentes peut, par voie de complainte possessoire, demander Ă  ĂȘtre maintenu dans sa possession. Il cite deux arrĂȘts du parlement de Paris, des 5 mars 1718 et 27 janvier 1737. 3° Pour droits de pĂ©age. Si une communautĂ© ou des particuliers, dit-il, Ă©taient en possession de la franchise d’un droit de pĂ©age qui serait Ă©tabli sur un pont, un chemin ou un bac, et que le propriĂ©taire du droit voulĂ»t les y assujettir, ils pourraient intenter la complainte Ă  l’effet d’ĂȘtre maintenus possessoirement dans cette franchise. le mĂȘme, si, aprĂšs avoir payĂ© le droit pendant plus d’une annĂ©e, cette communautĂ© ou les particuliers dĂ©claraient qu’ils entendent s’y refuser, le propriĂ©taire du droit aurait la mĂȘme action pour les contraindre Ă  en continuer le paiement. » L’auteur cite Boutillier et Dumoulin. 4° Et pour services Ă©ventuels. L’auteur appelle ainsi l’obligation oĂč seraient un ou plusieurs particuliers de faire telles ou telles rĂ©parations Ă  des maisons, moulins ou autres usines, d’en rĂ©parer les Ă©cluses, d’en curer les biez, d’entretenir les fossĂ©s. Si ces particuliers, sommĂ©s de remplir leurs obligations, s’y refusent, il y a lieu contre eux Ă  la complainte possessoire. Nous avons dĂ©jĂ  eu plusieurs fois occasion de le dire, le vĂ©nĂ©rable prĂ©sident a presque constamment cĂ©dĂ© Ă  l’influence des anciens principes, sans tenir compte des changements que notre nouvelle lĂ©gislation y a apportĂ©s. Il est certain que son opinion et celle de Rodier sont incompatibles avec cette lĂ©gislation. SECTION II. DĂ©signation spĂ©ciale de chacun des objets qui ne sont plus rĂ©putĂ©s immeubles ou droits rĂ©els immobiliers. AprĂšs ljes notions gĂ©nĂ©rales, viennent les dĂ©tails prĂ©cis et dĂ©veloppĂ©s. § 1?'. Des bĂ©nĂ©fices et dĂźmes. On nommait autrefois bĂ©nĂ©fice le droit attribuĂ© Ă  un clerc de jouir durant sa vie de certains biens consacrĂ©s Ă  Dieu, Ă  cause de l’office spirituel dont ce clerc Ă©tait chargĂ© par l’autoritĂ© de l’église. Il n’y a plus aujourd’hui de bĂ©nĂ©fices, ils ont Ă©tĂ© supprimĂ©s par la loi du 12 juillet 1790 ; il ne peut donc plus y avoir de complainte en matiĂšre bĂ©nĂ©ficiale. Il en est de mĂȘme des dĂźmes, dont la suppression a Ă©tĂ© prononcĂ©e parles lois des h aoĂ»t 1789 et 14 avril 1790, qui n’exceptent que celles qui peuvent ĂȘtre assimilĂ©es - *97 - aux rentes fonciĂšres. Ces rentes n’ayant plus de caractĂšre mobilier, ne pourraient ĂȘtre l’objet d’une action pos- sessoire. Ăż 2. Des droits de patronage, rangs aux processions, etc.; des choses saintes, des reliques. Les droits de patronage, les droits honorifiques des patrons, l’offrande, l’eau bĂ©nite, le pain bĂ©nit, la paix Ă  baiser, le rang aux processions, etc., sont aussi abolis par les lois des h aoĂ»t, 1781 et autres subsĂ©quentes, et il n’est pas besoin d’ajouter que dans les lieux oĂč quelques- uns de ces usages abusifs auraient pu se maintenir, ceux qui seraient en possession annale d’en jouir ne pourraient intenter l’action possessoire, soit parce qu’ils en auraient joui sans aucun titre, soit parce que la chose qui serait l’objet de la possession n’aurait aucun caractĂšre mobilier et ne serait pas prescriptible. Il faudrait porter la mĂȘme dĂ©cision relativement Ă  la consĂ©cration des choses saintes, des reliques qui, d’aprĂšs l’espĂšce d’un arrĂȘt du parlement de Paris, rapportĂ©e au tome 2, d’Augeard, Ă©taient autrefois susceptibles de l’action possessoire, mais qui n’en pourraient plus ĂȘtre l’objet aujourd’hui. 4J 3. Des droits do justice et des offices. Les droits de justice sont Ă©galement abolis. Les offices ne subsistent plus au mĂȘme titre qu’autrefois, et n’ont pas un caractĂšre immobilier. Un magistrat n’aurait donc pas l’action possessoire contre quiconque le troublerait dans l’exercice de ses fonctions. Personne ne peut les exercer sans avoir Ă©tĂ© nommĂ© par l’autoritĂ©. 11 ne peut donc y avoir en cette matiĂšre de possession valable ni de prescription. Tout se rĂšgle par l’acte d’institution du fonctionnaire et par le texte des lois qui dĂ©terminent ses attributions, ’.ette dĂ©cision est commune aux divers fonctionnaires de l’Etat dans l’ordre judiciaire, administratif ou militaire. Il en est de mĂȘme des offices ou charges de notaires, d’avouĂ©s, greffiers, commissaires-priseurs, agents de change et autres; tout se rĂšgle aussi par l’ordonnance de nomination et par les lois qui prĂ©cisent les attributions et les droits de ces divers officiers publics. D’ailleurs, l’objet de la contestation, en supposant mĂȘme qu’elle portĂąt sur la clientĂšle ou sur les piĂšces, titres, dossiers, recouvrements, ne se rĂ©duirait-il pas Ă  une chose purement mobiliĂšre? $ k- ic l’état de lĂ©gitimitĂ©. On ne pourrait davantage intenter l’action possessoire pour ĂȘtre maintenu ou rĂ©intĂ©grĂ© dans son titre de lĂ©gitimitĂ© ; car c’est un droit incorporel et qui ne s’applique pas Ă  un objet immobilier ; il ne peut donner lieu qu’à une question d’état qui comprend le fond du droit dont les tribunaux ordinaires doivent seuls connaĂźtre. Mais si, en vertu de ce titre de lĂ©gitimitĂ© dont un particulier est en possession, il possĂšde depuis un an des immeubles sur lesquels un tiers commet des usurpations, il a, sans difficultĂ©, le droit de se faire maintenir ou rĂ©intĂ©grer dans la possession de ces biens. L’état de lĂ©gitimitĂ© peut seulement ĂȘtre pris en considĂ©ration par le juge pour servir Ă  dĂ©terminer le caractĂšre de la possession des immeubles, sur lesquels doit exclusivement porter la maintenue. — 409 — $ 3. De l’action eu revendication d'immeubles. Quoique l’article 531 du Code civil dĂ©clare immeuble par l’objet auquel elle s’applique l’action tendant Ă  revendiquer un immeuble, et qu’un axiome du droit romain considĂšre l’action comme la chose mĂŽme qui habet ac~ tionem ad rem recuperandam, ipsum rem habere videtur, nous ne saurions concevoir, connue le dit M. CarrĂ©, n° 1/j23, un seul cas dans lequel une semblable action donnĂąt ouverture Ă  celle possessoire. M. ’-arrĂ© en donne les raisons suivantes, que nous approuvons Le caractĂšre principal de la possession d’oĂč peut dĂ©river cette action, c’est d’ĂȘtre publique, et certes nulle publicitĂ© dans la possession d’une action. Quel serait d’ailleurs le genre de trouble apportĂ© relativement Ă  une action? Ce ne serait pas sans contredit un trouble de fait ; ce ne pourrait ĂȘtre tout au plus qu’un trouble de droit, rĂ©sultant par exemple de ce qu’un autre que celui Ă  qui appartiendrait l’action l’intenterait dans son propre intĂ©rĂȘt, et comme si elle lui appartenait Ă  lui- mĂȘme; mais en cette circonstance, ce serait Ă  celui qui prĂ©tendrait que l’action lui appartient rĂ©ellement, Ă  intervenir dans l’instance pour revendiquer son droit, et, en tout cas, ce droit ne pourrait ĂȘtre compromis s’il n’intervenait pas, puisque, comme propriĂ©taire de l’action, on ne pourrait jamais lui opposer l’autoritĂ© de la chose jugĂ©e, suivant la maxime res inter alios judicata tertio non nocel. » § 6. Des rentes et champarts. Toutes rentes constituĂ©es avec hypothĂšque ou l’on- — 410 — ciĂšres sont dĂ©clarĂ©es rachetables et mobiliĂšres par les art. 529 et 530 du Code civil ; elles ne peuvent donc devenir l’objet de l’action possessoire. En effet, le crĂ©ancier ne serait troublĂ© que dans le droit d’une prestation pĂ©cuniaire ou en denrĂ©e qui n’a aucun caractĂšre immobilier. champart campi pars est une dĂ©nomination gĂ©nĂ©rale qui signifie le droit d’exiger une certaine quantitĂ© des fruits d’un hĂ©ritage que l’on a donnĂ© il cultiver sous cette condition, soit Ă  perpĂ©tuitĂ©, soit pour un temps. 11 s’appelle aussi dans quelques contrĂ©es terrage, agrier, tosque ou tĂąche, quart, cinquain ou vingtain. On le nomme communĂ©ment complant, quand il a pour objet un terrain plantĂ© en vignes ou destinĂ© Ă  l’ĂȘtre. Les champarts seigneuriaux ou mĂ©langĂ©s de fĂ©odalitĂ©, ont Ă©tĂ© supprimĂ©s par la loi du 17 juillet 1793. Ceux qui Ă©taient purement fonciers ont Ă©tĂ© conservĂ©s; mais ils sont devenus rachetables en vertu des lois des 4 aoĂ»t 1789 et 18 dĂ©cembre 1790, toutes les fois que les baux primitifs avaient transmis au preneur la propriĂ©tĂ© du fonds. Dans les autres cas il n’y a pas lieu au rachat, ainsi que l’a dĂ©cidĂ© un avis du conseil d’état du 4 thermidor an VIH, qui assimile les preneurs Ă  portion de fruits aux fermiers ordinaires. L’admissibilitĂ© de la complainte pour trouble dans la perception d’un champart ou complant a donnĂ© lieu, entre les auteurs modernes, Ă  des dĂ©bats fort animĂ©s que nous ne reproduisons pas, parce que la jurisprudence de la cour de cassation est maintenant fixĂ©e dans le sens de la nĂ©gative par quatre arrĂȘts de la chambre civile. En premier arrĂȘt, du 16 janvier 1826, rejette le pourvoi formĂ© par le sieur BauchĂšne, contre un jugement qui i — 411 — refusait d’admettre la complainte pour droit de cham- part, attendu, porte-t-il, que le demandeur n’indique aucune loi qui donne la qualitĂ© de droit rĂ©el Ă  la prestation par lui rĂ©clamĂ©e Ă  titre de complant; d’oĂč il suit que le jugement attaquĂ© n’a contrevenu Ă  aucune loi. » Le 29 juillet 1828, autre arrĂȘt portant rejet du pourvoi formĂ© contre un jugement du tribunal de Bressuire, qui avait repoussĂ© la complainte ; les motifs sont trop Ă©tendus pour trouver place ici. Le 9 aoĂ»t 1831, arrĂȘt d’autant plus remarquable qu’il casse un jugement par lequel la complainte avait Ă©tĂ© admise ; il esj, ainsi conçu La cour, vu les art. 529 et 530 du Code civil, attendu que les rentes et redevances de toute nature ont Ă©tĂ© dĂ©clarĂ©es rachetables par les lois de 1790,1792 et 1793, et par l’art. 530 du Code civil; que le § 2 de l’art. 529 du mĂȘme Code les a rĂ©putĂ©es meubles par la dĂ©termination de la loi; que, dans l’espĂšce, il s’agissait d’une redevance purement fonciĂšre, Ă©tablie par suite d’une transmission de propriĂ©tĂ©; et non d’un simple bail passĂ© Ă  quelque titre que ce soit; qu’il serait dĂšs lors constant dans la cause que la redevance dont il s’agit aurait Ă©tĂ© de la nature du complant dans son origine, et quelle aurait eu, sous l’ancienne lĂ©gislation, le caractĂšre d’un droit immobilier, qu’elle aurait perdu ce caractĂšre par la nouvelle ; Qu’ayant pris celui de meuble, le refus de paiement de la part du dĂ©biteur ne pouvait ĂȘtre poursuivi que par les voies ordinaires, et non par celle de la complainte possessoire, qui n’est autorisĂ©e qu’en cas de trouble apportĂ© Ă  la jouissance d’un droit immobilier. » Le 11 fĂ©vrier 1833, 4 e arrĂȘt qui a encore cassĂ©, parles mĂȘmes motifs, un jugement du tribunal de Fontenay-le- Conte, qui avait admis la complainte pour refus de paiement d’un champart. Remarquons d’ailleurs que ces arrĂȘts n’ont statuĂ© que dans des cas oĂč le crĂ©ancier d’une portion de fruits a aliĂ©nĂ© la propriĂ©tĂ©. Mais lorsqu’au contraire il l’a conservĂ©e, le preneur n’est plus qu’un colon, un fermier ordinaire; Ă  plus forte raison, ne peut-il intenter l’action possessoire contre son propriĂ©taire, et celui-ci ne peut la former contre lui. § 7. Dos droits de pĂ©age et droits Ă©ventuels. Les droits de pĂ©age ne peuvent donner lieu Ă  l’action possessoire. En effet, l’action qui a pour but de triompher du refus de les acquitter, ou d’ĂȘtre maintenu dans la possession de franchise, ne porte toujours que sur une prestation pĂ©cuniĂšre qui ne prĂ©sente rien d’immobilier, et qu’on ne peut assimiler mĂȘme dans le second cas Ă  un service foncier, c’est-Ă -dire Ă  une servitude imposĂ©e sur un fonds en faveur d’un autre fonds; ce n’est qu’une exception personnelle. Les mĂȘmes motifs servent Ă  rĂ©soudre dans le mĂȘme sens la question de recevabilitĂ© de la complainte pour droits Ă©ventuels. Jf 8. Des sĂ©pultures et tombeaux. Quant aux sĂ©pultures, sĂ©pulcres ou tombeaux, il faut distinguer D’aprĂšs les art. 2 et h du dĂ©cret du 23 prairial an 12, chacun peut choisir le lieu destinĂ© Ă  son inhumation, et ĂȘtre enterrĂ© dans sa propriĂ©tĂ©, pourvu qu’elle soit hors — 413 — et Ă  la distance prescrite de l’enceinte des villes et bourgs, c’est-Ă -dire Ă  35 ou AO mĂštres au moins. Les bienfaiteurs des hĂŽpitaux peuvent ĂȘtre inhumĂ©s dans l’enceinte dĂ© ces Ă©tablissements, lorsqu’ils ont en exprimĂ© le dĂ©sir dans leurs actes de donation ou de derniĂšre volontĂ©. Art. 13. Hors ces cas d’exception, les inhumations se font dans les cimetiĂšres publics. Point de doute qu’en cas d’inhumation dans une propriĂ©tĂ© privĂ©e, l’atteinte portĂ©e Ă  un tombeau ne donnĂąt lieu Ă  la complainte, de la part du possesseur annal du lieu consacrĂ© Ă  la sĂ©pulture. Mais il en serait diffĂ©remment pour les inhumations dans l’enceinte des hĂŽpitaux ou des cimetiĂšres publics, parce que ces propriĂ©tĂ©s sont imprescriptibles, et seulement grevĂ©es d’une servitude de sĂ©pulture. Du reste, la violation des tombeaux ou des sĂ©pultures donne lieu aux peines prononcĂ©es par l’article 350 du '.ode pĂ©nal, indĂ©pendamment de celles applicables au vol, soit que l’inhumation ait Ă©tĂ© faite dans une propriĂ©tĂ© privĂ©e, soit quelle ait eu lieu dans les hĂŽpitaux ou cimetiĂšres. § 9. Chasse et pĂšche. Le droit de chasse ne nous semble pas susceptible de s’acquĂ©rir par la possession, car on ne peut le considĂ©rer que comme une sorte de servitude discontinue qui doit absolument ĂȘtre Ă©tablie par titre ; le titre, fĂ»t-il mĂȘme une facultĂ© perpĂ©tuelle de chasser sur des hĂ©ritages dĂ©terminĂ©s, ne constituerait qu’une concession en faveur de la personne, et ne pourrait, en cas d’obstacle apportĂ© Ă  — tu — son exercice, soit par le propriĂ©taire du fonds, soit par un tiers, autoriser le concessionnaire Ă  intenter la complainte ; car il n’en rĂ©sulterait d’autre avantage que celui de pouvoir s’emparer du gibier qui n’est pas le produit de ce fonds, et ne forme jamais qu’un objet mobilier. Le droit de pĂȘche nous paraĂźt ĂȘtre de la mĂȘme nature. Nous croyons que personne ne peut l’acquĂ©rir par prescription, pas plus le propriĂ©taire de la rive opposĂ©e, qui a droit de pĂȘcher dans le cours d’eaĂŒ de son cĂŽtĂ©, en vertu de la mitoyennetĂ©, qu’un Ă©tranger non riverain. 11 nous semble que l’article 2 de la loi du 15 avril 1829 sur la pĂȘche fluviale, qui, aprĂšs avoir posĂ© le principe gĂ©nĂ©ral que les riverains ont chacun de son cĂŽtĂ© le droit de jĂźĂȘche jusqu’au milieu du cours de l’eau, ajoute, sans prĂ©judice des droits contraires Ă©tablis par possession, n’a pas entendu que le fait de pĂȘche par un non riverain, mĂȘme Ă  l’aide de travaux dans la riviĂšre pour le faciliter, fĂ»t constitutif de prescription. Il a sans doute eu en vue le cas oĂč le lit des eaux serait prescrit par un non riverain, comme lorsqu’il s’agit d’aqueducs, de canaux d’irrigation ou de moulins. La complainte serait inadmissible lors mĂȘme que le droit de pĂȘche, en le supposant susceptible d’aliĂ©nation, ce que nous n’examinons pas ici, aurait Ă©tĂ© cĂ©dĂ© par un acte, soit Ă  un Ă©tranger, soit au co-propriĂ©taire du cours d’eau ; car cette cession n’attribuerait point de droit foncier ; il n’en rĂ©sulterait que l’avantage de s’emparer du poisson. Mais le possesseur d’un hĂ©ritage, du lit du cours d’eau sur lesquels la chasse ou la pĂȘche auraient lieu, pourrait intenter la complainte dans l’annĂ©e du trouble, Ă  moins qu’il n’eĂ»t accordĂ© la facultĂ© dont l’exercice motiverait — 41b — son action, parce que alors on la repousserait en produisant l’acte qu’il a consenti. A plus forte raison la chasse et la pĂȘche par un tiers, au prĂ©judice du propriĂ©taire du fonds, donneraient lieu Ă  l’action possessoire dans les cas oĂč le poisson et le gibier pourraient ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme immeubles, d’aprĂšs ce que nous avons dit prĂ©cĂ©demment pages 200 et suivantes. § 10. Chapelles, bancs et places dans les Ă©glises. Les chapelles, les bancs, les places dans les Ă©glises ou le culte divin est cĂ©lĂ©brĂ© publiquement, ne peuvent ĂȘtre l’objet d’une action possessoire, lors mĂȘme que ces diverses choses auraient Ă©tĂ© Ă©tablies aux frais de quelque particulier; car le sol sur lequel elles reposent est imprescriptible. Ce particulier, malgrĂ© ses travaux et sa longue possession, ne peut y avoir acquis aucun droit. Tous ces principes ont Ă©tĂ© proclamĂ©s par arrĂȘts de la cour de cassation des 1 er dĂ©cembre 1823 et 19 avril 1825. Il n’y a Ă©videmment lieu qu’à des actions ordinaires en dommages intĂ©rĂȘts, ou Ă  toutes autres Ă©tablies par le droit commun, ainsi que l’a dĂ©cidĂ© un arrĂȘt de la mĂȘme cour du 14 mars 1833, dans une espĂšce oĂč la fabrique d’une Ă©glise ayant fait supprimer un de ses bancs, la personne qui prĂ©tendait y avoir droit Ă  trois places avait demandĂ©, par action en justice de paix, non la maintenue en possession annale, mais le rĂ©tablissement du banc ou une indemnitĂ© de 24 fr. pour en tenir lieu. Remarquons mĂȘme, relativement aux bancs dans les Ă©glises, que la concession qui en est faite n’est que provisoire et prĂ©caire, aux termes du dĂ©cret du 30 dĂ©cembre 1809; et qu’il a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ©, par un dĂ©cret du 18 aoĂ»t — 410 — 1807, que la connaissance des contestations auxquelles leur jouissance peut donner lieu appartient Ă  l’autoritĂ© administrative. Mais l’imprescriptibilitĂ© des Ă©glises, des chapelles qui en dĂ©pendent, n’a lieu qu’autant qu’elles sont bien rĂ©ellement consacrĂ©es au culte divin; et elle ne s’applique pas aux anciennes Ă©glises ou chapelles qui n’ont pas Ă©tĂ© mises Ă  la disposition de l’évĂȘque, de la fabrique ou de la commune, aux termes des articles 75 et 70 de la loi du 18 germinal an X, et qui ont Ă©tĂ© au contraire consacrĂ©es Ă  un service non religieux. Celles-ci sont avec raison considĂ©rĂ©es comme des propriĂ©tĂ©s privĂ©es pouvant devenir l’objet d’une possession capable d’autoriser une action possessoire, complainte ou rĂ©intĂ©grande ; ainsi l’a trĂšs- bien dĂ©cidĂ© un arrĂȘt de la cour de cassation du h juin 1835, que nous avons dĂ©jĂ  citĂ©, qui a Ă©tĂ© rendu, sur le pourvoi de la commune de Mayenne, contre l’hospice de la mĂȘme ville. 11 en serait de mĂȘme des chapelles Ă©tablies dans des propriĂ©tĂ©s particuliĂšres ; ainsi beaucoup sont fondĂ©es par des personnes privĂ©es dans leurs maisons ou chĂąteaux ; ces propriĂ©tĂ©s sont alors prescriptibles comme toutes chapelles appartenant aux particuliers, fussent-elles consacrĂ©es Ă  l’exercice du culte divin ; c’est ce qui rĂ©sulte de l’arrĂȘt du A juin 1835, dans lequel on lit que l’imprescriptibilitĂ© est sans application Ă  une Ă©glise ou chapelle d’une maison particuliĂšre, d’un chĂąteau, d’un Ă©tablissement particulier quelconque, Ă©glise ou chapelle, qui ne pourrait ĂȘtre dans ce cas autre chose qu’une propriĂ©tĂ© privĂ©e, quoique le culte divin y fĂ»t publiquement cĂ©lĂ©brĂ©. » M. CarrĂ©, dans son Gouvernement des paroisses, n 0 ' 300, 307, va jusqu’à appliquer ces principes aux chapelles qui ne sont pas situĂ©es sous les voĂ»tes de l’église, niais qui ont leur voĂ»te Ă  part. Il dĂ©cide que celles-ci sont susceptibles d’ĂȘtre prescrites, et par suite qu’elles donnent lieu Ă  l’action possessoire; mais il faudrait pour cela que le juge qui a un pouvoir discrĂ©tionnaire Ă  cet Ă©gard commençùt par dĂ©clarer qu’elles ne font pas partie de l’église. ArrĂȘt de la cour de cassation du 1S juillet 18-28. Ăż 11. D — Lorsqu'il \ a lieu Ă  l’action en rĂ©intĂ©grande, il snliil que le demandeur allĂšgue la possession au moment de la voie de lait, et conclue Ă  y ĂȘtre rĂ©intĂ©grĂ© avec rĂ©tablissement des lieux dans leur prĂ©cĂ©dent Ă©tat, dommages-intĂ©rĂȘts et dĂ©pens. Si le dĂ©fendeur seid ne se prĂ©sente pas, le juge de paix peut donner dĂ©faut et adjuger les conclusions du demandeur sans ordonner d’enquĂȘte, de visite de lieux. Quoique l’article 150 du '.ode de procĂ©dure civile qui impose au juge, a\ant de donner dĂ©faut, l’obligation de vĂ©rifier si les conclusions sont justes, semble par la place qu’il occupe ne s’appliquer qu’aux contestations portĂ©es devant les tribunaux de premiĂšre instance, Ă  raison de leur importance et de la nature des moyens sur lesquels elles reposent, cependant, dĂšs que l’article 10 porte que la cause sera jugĂ©e par dĂ©faut, ce qui veut dire apprĂ©ciĂ©e, que les Ibis exigent que tout jugement soit motivĂ©, c’est un devoir pour le juge de paix de rechercher de quel cĂŽtĂ© est le bon droit, de maniĂšre Ă  prononcer en faveur de celui-lĂ  mĂȘme qui fait dĂ©faut, si la prĂ©tention de l’adversaire qui comparaĂźt ne lui semble pas fondĂ©e. \joutons que d’ailleurs la loi ne prescrit au juge aucune rĂšgle pour former sa conviction il suffit donc qu’il la dĂ©clare pour que le jugement soit rĂ©gulier; l’art. 24 ne suppose la nĂ©cessitĂ© d’une enquĂȘte que lorsque la possession ou le trouble sont dĂ©niĂ©s, et, d’aprĂšs l’art. lors mĂȘme que le dĂ©fendeur se prĂ©sente, conteste l’un ou l’autre, consent aux preutes et vĂ©rifications ou les requiert, e’est pour le juge, une facultĂ© et non une obligation absolue de les ordonner. Lu ell'et, le demandeur ou le dĂ©fendeur peut avoir dans des actes relatifs Ă  la jouissance, dans des mĂ©moires ou — Ht — quittances de travaux ou d'impĂŽts, la preuve positive de sa possession ou de tout autre moyen ou exception, dette possession peut ĂȘtre purement civile; de mĂȘme qu’aux termes des articles 2244, 22A8, l’interruption civile rĂ©sulte d’une citation eu justice, d’un commandement, d’une saisie ou d’une reconnaissance, de mĂȘme aussi la possession peut rĂ©sulter d’actes semblables, puisque ces actes ont pour but de la conserver en empĂȘchant un tiers de l’acquĂ©rir; la vue des lieux peut mĂȘme par elle seule, et sans le secours des tĂ©moins, conduire le juge Ă  dĂ©cider sur la possession en laveur de l’une ou l’autre des parties; car lĂ  oĂč la preuve testimoniale est permise, de simples prĂ©somptions peuvent tenir lieu de tĂ©moignages. Article 1353 du Code civil. l/enquĂšte ne peut porter sur le fond du droit. Au surplus, ce n’est pas seulement dans ces divers cas que le juge peut se dispenser d’ordonner la preuve; il a sur ce point un pouvoir discrĂ©tionnaire et indĂ©fini, soit qu'il prononce par dĂ©faut ou contradictoirement. Divers arrĂȘts de la cour de cassation des 25 juillet 1825, 28 juin 1830, 22 mai 1833, 4 juin 1835, 17 dĂ©dĂ©cembre 1844, ont consacrĂ© ces principes dans des espĂšces oĂč les dĂ©fendeurs ne s’étaient pas bornĂ©s Ă  dĂ©nier les faits articulĂ©s par leurs adversaires, mais avaient conclu formellement Ă  la preuve des faits qu’ils allĂ©guaient. lĂŻarrĂȘt du 22 mai 1833 est surtout remarquable en ce qu’il est rendu dans une espĂšce oĂč, pour ne point admettre la preuve, les juges ne dĂ©claraient mĂȘme pas qu’elle Ă©tait inutile, ni dans quels Ă©lĂ©ments du procĂšs ils avaient puisĂ© leur conviction. ’.et arrĂȘt a Ă©tĂ© rendu sur le pourvoi du sieur Bayle contre Lautier. Le juge de paix s’était dĂ©clarĂ© incompĂ©tent parce que les travaux avaient Ă©tĂ© complĂštement exĂ©cutĂ©s sur le fonds du dĂ©fendeur quand l’action pos- sessoire avait Ă©tĂ© formĂ©e. Sur l’appel du sieur Lautier, Bayle, aprĂšs avoir conclu Ă  la confirmation, dĂ©niait subsidiairement le trouble articulĂ© par le demandeur ; il soutenait qu’à la distance oĂč son barrage Ă©tait placĂ© il Ă©tait impossible qu’il fit refluer les eaux sur le fonds de celui-ci et lui causĂąt aucun prĂ©judice, aucune incommoditĂ©. 11 faisait observer que, d’aprĂšs l’article 540 du Code civil, il n’est interdit Ă  l’infĂ©rieur de barrer les eaux qu’autant qu’il en rĂ©sulte un dommage pour les voisins, mais que le barrage non nuisible est permis. Il conclut expressĂ©ment Ă  ĂȘtre admis Ă  la preuve des faits qu’il articulait. Sur ce, jugement ainsi conçu ConsidĂ©rant que les ouvrages Ă©tablis par Bayle se composent d’une marteliĂšre et d’une vanne en bois qui y est adaptĂ©e, que le juge de paix pouvait se dĂ©clarer incompĂ©tent relativement Ă  la marteliĂšre, parce qu elle est sur le terrain de Bayle et qu’elle n’était pas par elle- mĂȘme un obstacle Ă  l’écoulement des eaux; qu’il n’en est pas de mĂȘme de la vanne, qui, Ă©tant destinĂ©e Ă  procurer la rĂ©union de ces mĂȘmes eaux, change l’état ordinaire du fossĂ© en les y faisant refluer, ce qui justifie l’action introduite devant le premier juge; qu’à cet Ă©gard, l’on excipe en vain de ce que l’intimĂ© a construit sur sa propriĂ©tĂ©, puisqu’une partie de cette construction Ă©tant le moyen employĂ© pour changer un Ă©tat de choses prĂ©existant dans un objet commun entre les parties, chacune a le droit de rĂ©clamer le maintien de la situation primitive ; par ces motifs, le tribunal rĂ©forme la sentence dont — 443 — est appel, Ă©yoquant, ordonne que Bayle sera tenu d’enlever et supprimer la vanne, et de rendre libre la circulation des eaux. » Pourvoi pour violation des art. 2/i et /i73 du Code de procĂ©dure, en ce que le jugement attaquĂ© a prescrit de piano la destruction d’une vanne, sans avoir prĂ©alablement ordonnĂ© une enquĂȘte, une vĂ©rification des lieux pour constater s’il y avait trouble Ă  la possession de Lautier, et s’il Ă©prouvait un prĂ©judice, lorsque, comme dans l’espĂšce, il y avait dĂ©nĂ©gation de ces faits et oll're surabondante de la part du dĂ©fendeur de prouver qu’ils n’existaient pas. Dans tous les cas, ajoutait le sieur Bayle, le tribunal devait au moins dĂ©clarer d’une maniĂšre positive que l’instruction sollicitĂ©e Ă©tait inutile, et donner les motifs pour lesquels il la refusait; il n’a pas mĂȘme expressĂ©ment dĂ©clarĂ© qu’il y eĂ»t trouble, dommage. Il a encore violĂ© l’art. i73, qui n’autorise les juges d’appel Ă  Ă©voquer qu’autant que l’affaire est en Ă©tat. Sur ce, arrĂȘt de rejet dans lequel on lit le motif suivant Attendu qu’aucune loi n’impose au juge de paix l’obligation d’ordonner l’enquĂȘte en matiĂšre de complainte, lorsqu’il trouve d’ailleurs sa religion sufli- sannnent instruite ; que le tribunal d’appel a reconnu que la cause Ă©tait en Ă©tat de recevoir un jugement dĂ©finitif; que, dĂšs lors, en Ă©voquant le fond et y statuant dĂ©finitivement sans ordonner l’enquĂȘte demandĂ©e, le tribunal, loin de violer l’art. 2/i, n’a fait qu’une juste application de l’art. A73 du Code de procĂ©dure. » On lit dans l’arrĂȘt du k juin 1835, que la question de savoir si le demandeur en rĂ©intĂ©grande Ă©tait ou non en possession actuelle de l’objet litigieux, au moment de la violence donl il s’est plaint, n’est autre chose qu une question de fait soumise Ă  l’apprĂ©ciation exclusive du juge, comme le sont tous les faits dont la preuve est admissible ; qu’en cas de dĂ©nĂ©gation des faits de possession, l’art. 2/i du Code de procĂ©dure civile n’impose point au juge l’obligation d’ordonner la preuve; car il se peut pie des faits const ants et dĂ©jĂ  justifiĂ©s soient dĂ©niĂ©s par erreur ou de mauvaise foi; le juge convaincu n’est pas tenu d’ordonner une preuve inutile ; l’art. 2/i porte seulement que l’enquĂȘte qui sera ordonnĂ©e ne pourra porter sur le fond du droit, et l’art. 3/i laisse toute latitude au juge, en disant qu’il ordonnera la preuve, s’il la trouve utile et admissible. Puisque nous venons de parler de rĂ©intĂ©grande, examinons la question de savoir si, aprĂšs avoir Ă©tĂ© admis Ă  la preuve de la possession et de la violence sur action en rĂ©intĂ©grande, le demandeur pourrait conclure Ă  la pleine maintenue, c’est-Ă -dire, transformer cette action en complainte, parce que les tĂ©moins auraient dĂ©posĂ© d’une possession annale ? Nous sommes d’avis de la nĂ©gative. Le juge n’a Ă©tĂ© saisi que d’une action en rĂ©intĂ©grande ; il n’a pas admis les parties Ă  la preuve d’une possession annale. On 11 e peut, dans le cours de l’instance, changer la nature de l’action quand les rĂšgles qui gouvernent l’une et l’autre sont diffĂ©rentes, l’est par un effet du hasard que les tĂ©moins ont dĂ©posĂ© d’une possession annale. Le dĂ©fendeur 11 ’a pu prĂ©voir ce rĂ©sultat ni prĂ©parer la preuve contraire. Cette substitution d’une action Ă  l’autre serait une surprise. Mais nous croyons, comme nous l’avons dĂ©jĂ  dit p. o — contre son vendeur Ă  l’occasion de la complainte intentĂ©e contre le premier. ArrĂȘt du 11 janvier 1809. 3° Dans celle qui maintient dans le droit de passer avec chars et bƓufs, en se fondant sur la possession et sur un titre constitutif de la servitude. ArrĂȘt du 24 juillet 1810. !\° Dans celle qui prend en considĂ©ration l’art. 558 du '.ode civil, pour dĂ©cider que celui qui, ’ 'es basses eaux, a coupĂ© les herbes d’un Ă©tang, n’a pu acquĂ©rir une possession de nature Ă  autoriser la complainte. ArrĂȘt du 23 avril 1811. 5° Dans celle qui maintient un propriĂ©taire d’hĂ©ritage traversĂ© par un cours d’eau en possession de ne pas souffrir le passage que rĂ©clame le propriĂ©taire infĂ©rieur, comme une consĂ©quence du droit d’aqueduc, par application des articles 393, 397, 398 du Code civil, la dĂ©fense, quoique portant sur le fond, s’appuyant de l’art. 640 du mĂȘme Code, et soulevant une question de propriĂ©tĂ©, ne pouvant changer la compĂ©tence. ArrĂȘts des 23 fĂ©vrier 181 A, 12 juin 1810, 30 novembre 1818, 9 fĂ©vrier, 2 mars 1820, 29 dĂ©cembre 1828. MĂȘme dĂ©cision quand les titres sont contestĂ©s ou combattus par d’autres. 10 mai 1820. 3° Dans celle qui accueille la complainte du propriĂ©taire de l’hĂ©ritage supĂ©rieur contre l’infĂ©rieur, lequel a Ă©tabli une digue qui empĂȘche l’écoulement des eaux. ArrĂȘt du 13 juin 181 A. 7" Dans celle qui accueille l’action possessoire de l’acquĂ©reur de la partie infĂ©rieure d’un prĂ© contre le propriĂ©taire de la partie supĂ©rieure, en se fondant sur ce que, d’aprĂšs un acte, la destination du pĂšre de famille et les art. 088 et 089 du Code civil, l’écoule- — i'j" — ment a lieu Ă  titre de servitude continue. ArrĂȘt du 13 juin 181 A. 8° Dans celle qui prend en considĂ©ration les dispositions de la loi et du droit commun, lesquelles Ă©quivalent Ă  un titre, pour maintenir le demandeur dans sa possession annale. 1" mars 1815, 20 janvier 1825. 9° Dans celle qui rejette la demande possessoire par des motifs relatifs Ă  la propriĂ©tĂ© du fonds en mĂȘme temps qu’à la nature de la possession, lorsque d’ailleurs le demandeur est renvoyĂ© Ă  se pourvoir au pĂ©titoire. 20 janvier et 9 novembre 1825. La mĂȘme chose a Ă©tĂ© jugĂ©e par deux autres arrĂȘts, l’un du 12 dĂ©cembre 1830, l’autre du 8 avril 18A6, rendu sur le pourvoi d’un grand nombre d’habitants d’Entraigues qui rĂ©clamaient la maintenue en possession d’affouages. Nous appelons l’attention spĂ©cialement sur ce dernier arrĂȘt, qui Ă©tend aussi loin que possible la doctrine qui permet au juge du possessoire d’apprĂ©cier les titres de propriĂ©tĂ© soit pour accueillir, soit pour rejeter la complainte. 10° Dans celle qui, en reconnaissant une possession, ordonne une plantation de bornes pour Ă©viter un nouveau trouble, tenir lieu de cĂ©pĂ©es coupĂ©es et sous la rĂ©serve de l’action pĂ©titoire. 27 avril 181A et 2; que le maire ayant, devant le juge de paix, mĂ©connu la possession du demandeur et articulĂ© possession contraire, avait agi en temps utile; que l’autorisation postĂ©rieure et l’intervention en appel faisaient revivre ces dĂ©fenses; que les exceptions du maire Ă©tant reeevables, le tribunal d’appel ne pouvait statuer sur l’action principale sans statuer en mĂȘme temps sur ces exceptions. Un autre arrĂȘt de la cour de cassation du 13 juin 18/43, rendu sur le pourvoi des sieurs Sol et consorts contre la ville de Toulouse, a encore dĂ©cidĂ© que si celui qui a commis un lait de trouble prĂ©tend n’avoir agi qu’au nom et dans l’intĂ©rĂȘt d’un tiers, il ne peut soutenir que l’action — -toi» — possessoire Ă©tait non recevable contre lui ; il n’a que le droit de mettre en cause et d’appeler en garantie celui pour le compte duquel il a agi, lors mĂȘme que ce serait une commune. section vm De l'intervention. Lu tiers peut intervenir dans une instance possessoirc, sans y avoir Ă©tĂ© appelĂ©, pour appuyer le demandeur ou le dĂ©fendeur en prenant son lait et cause, '.'est aussi ce qui rĂ©sulte de l’arrĂȘt du 18 janvier 1832, citĂ© dans le paragraphe prĂ©cĂ©dent. Rien ne s’opposerait Ă  ce qu’il y intervĂźnt mĂȘme pour soutenir que la possession n’appartient Ă  aucune des parties, et doit lui ĂȘtre adjugĂ©e. L’article 466 et les autres dispositions du Code de procĂ©dure, en matiĂšre d’intervention, formant le droit commun, sont par consĂ©quent applicables aux justices de paix comme aux autres juridictions. Cette doctrine est indiquĂ©e par M. Henrion de Pansey, chap. 47, intitulĂ© De la rĂšgle complainte sur complainte n’a lieu. C’est, dit-il, une des rĂšgles de l’ordre judiciaire, que complainte sur complainte n’a lieu, de mĂȘme que saisie sur saisie ne vaut. 11 existe une instance en complainte entre deux particuliers qui se prĂ©tendent respectivement en possession du mĂȘme objet depuis an et jour. Un tiers, qui a la mĂȘme prĂ©tention, intervient au procĂšs et dĂ©clare qu’il le prend pour trouble Ă  sa possession ancienne, notamment d’an et jour. 11 le peut, sans doute-, mais formera-t-il une se- i/O — coude complainte? Non; ce serait complainte sur complainte. 11 doit se borner Ă  former opposition Ă  la coins plainte existante, et cette opposition le conduira au mĂšipe rĂ©sultat. » Et sur cela, M. Henrion cite Imbert. Dans une affaire jugĂ©e par la cour de cassation, le 17 mars 1819 Journal des Audiences, 1814, page 376, on voit que les parties et les juges qui ont prononcĂ© le jugement attaquĂ© avaient donnĂ© un autre sens Ă  la maxime, en dĂ©cidant que l’acquĂ©reur d’une personne dĂ©jĂ  condamnĂ©e au possessoire ne peut pas intenter la complainte en vertu de la possession postĂ©rieure. Mais la distinction des auteurs que nous avons citĂ©s est subtile et inadmissible ; et d’abord, dans leur systĂšme, qu’importerait que le tiers Ă  qui l’on reconnaĂźt le droit d’intervention se bornĂąt Ă  s’opposer Ă  la complainte ou qu’il dĂ©clarĂąt la prendre pour trouble et en former une de son chef, puisqu’on avoue que dans les deux cqs il obtiendra le mĂȘme rĂ©sultat ? 11 y a mieux encore il serait impossible Ă  l’intervenant d’obtenir la maintenue ou la rĂ©intĂ©grande dans sa possession, s’il n’y concluait pas formellement ; une simple opposition n’équivaudrait pas Ă  des conclusions de cette nature. Nous soutenons donc qu’il peut, Ă  son choix, ou intervenir dans l’instance, dĂ©clarer qu’il prend le procĂšs ou le fait qui y a donnĂ© lieu pour trouble Ă  sa possession, et demander Ă  y ĂȘtre maintenu, aux termes de l’arrĂȘt du 18 janvier 1832, dĂ©jĂ  citĂ©, ou intenter une action possessoire sĂ©parĂ©e Ă  l’un et l’autre, ou seulement Ă  celui qui sera considĂ©rĂ© comme l’auteur direct du trouble. 11 n’est, d’ailleurs, dans la nĂ©cessitĂ© de prendre l’une ou l’autre voie que lorsqu’un des particuliers en cause est sou reprĂ©sentant. CHAPITRE III lu jugement, de son effet et de ses suites, et des divers retours dont il peut ĂȘtre l'objet. SECTION l'*. Du jugement. Nous avons dĂ©jĂ , dans le chapitre prĂ©cĂ©dent, parlĂ© du jugement par dĂ©faut ; nous ferons en outre observer ici qu'il peut ĂȘtre frappĂ© d’opposition dans les trois jours de sa signification, et nous allons nous occuper plus particuliĂšrement du jugement contradictoire ou dĂ©finitif. AprĂšs que les enquĂȘtes ont eu lieu, si le juge de paix en a ordonnĂ©, il procĂšde Ă  ce jugement. Il doit avoir soin de le rendre dans les quatre mois qui suivent la prononciation de son interlocutoire. Plus tard, il devrait ĂȘtre annulĂ© par les juges d’appel, ainsi que la procĂ©dure qui l’aurait prĂ©cĂ©dĂ© et qui serait pĂ©rimĂ©e de plein droit, mĂȘme au prĂ©judice des femmes, des mineurs et interdits, car l’article 15 du Code de procĂ©dure est conçu en termes gĂ©nĂ©raux qui n’admettent aucune distinction. Sous l’empire de la loi du 25 octobre 1790, la Gour de cassation avait jugĂ©, par arrĂȘt du 15 germinal an XI, que cette pĂ©remption Ă©tait d’ordre public et ne pouvait ĂȘtre convertie par le fait des parties. Quoique les termes de l’article 15 du Code de procĂ©dure different peu de la loi de 1790, ou a cependant soutenu, et la cour de cassation a jugĂ© par arrĂȘt du 7 janvier 1835, en assimilant cette pĂ©remption Ă  une prescription et par application de l’article 2221 du Code civil ou de l’article 399 du Code de procĂ©dure, que les parties pouvaient y renoncer, soit expressĂ©ment, soit tacitement. Mais en acceptant cette solution, il faudrait au moins reconnaĂźtre que, comme aux termes de l’article 2222 du Code civil, ceux-lĂ  seuls qui peuvent aliĂ©ner sont capables de renoncer Ă  la prescription, un tuteur, un maire ou autre administrateur ne pourraient renoncer Ă  la pĂ©remption si cette renonciation avait pour effet soit de priver ceux qu’ils reprĂ©sentent de leur action posses- soire, parce qu’ils ne seraient plus dans l’annĂ©e du trouble pour la renouveler, soit de les priver d’opposer Ă  l’administrateur qu’il n’est plus lui-mĂȘme dans ce dĂ©lai, car il en rĂ©sulterait perte de possession et quelquefois mĂȘme de propriĂ©tĂ©. Au surplus, la cour de cassation est maintenant saisie de cette question par suite de l’admission du pourvoi de la commune de Breteuil. M. Avisse est chargĂ© de la cause de cette commune. L’action possessoire, au cas de la pĂ©remption Ă©tablie par l’article 15, serait considĂ©rĂ©e comme non avenue et ne pourrait ĂȘtre renouvelĂ©e qu’autant que le demandeur serait encore dans l’annĂ©e du trouble. Le juge se dĂ©termine par le rĂ©sultat des enquĂȘtes. A cet Ă©gard, plusieurs cas peuvent se prĂ©senter. Ou les enquĂȘtes prouvent clairement une possession exclusive en faveur du demandeur, et alors le juge l’y maintient ; Ou elles prouvent qu’il n'a pas la possession exclusive, mais seulement une possession commune ; le juge le maintient dans cette possession si le dĂ©fendeur la lui a contestĂ©e intĂ©gralement, mais le dĂ©boute de sa demande lorsque celui-ci n’a contestĂ© que la possession exclusive, a allĂ©guĂ© la jouissance commune, et que le fait qui a donnĂ© lieu au procĂšs rentre prĂ©cisĂ©ment dans cette jouissance Ou les enquĂȘtes, loin d’établir la possession du demandeur, prouvent celle du dĂ©fendeur, et alors le juge doit dĂ©bouter le premier de son action ; Ou les empiĂštes Ă©tablissent que l’action possessoire n’a pas Ă©tĂ© intentĂ©e dans l’annĂ©e du trouble, et, alors le juge de paix doit la dĂ©clarer non recevable ; Ou enfin les enquĂȘtes n’établissent positivement soit seules, soit avec le secours des localitĂ©s et des titres, de possession ou dĂ©tention en faveur d’aucune des parties, et alors le juge doit les renvoyer Ă  procĂ©der au pĂ©titoire. ce qui est, en d’autres termes, dĂ©clarer le demandeur purement et simplement non recevable, puisque, de cette derniĂšre formule, il rĂ©sulte manifestement que les parties n’ont plus que l’action au fond. Pour prononcer rĂ©guliĂšrement, et suivant la rigueur des principes, le juge de paix devrait, dans ce cas, condamner le demandeur aux dĂ©pens, d’aprĂšs l’article 130 du '.ode de procĂ©dure civile. Toute partie qui succombe doit y ĂȘtre condamnĂ©e ; il ne devrait ni les compenser, ni les rĂ©server, pour que, dans ce dernier cas, le juge du pĂ©titoire y statuĂąt ; nous ne verrions de motif lĂ©gal Ă  la compensation ou Ă  la rĂ©serve que dans le cas ou le dĂ©fendeur se serait rendu reconventionnellement demandeur en maintenue, et oĂč il serait dĂ©clarĂ© par le juge qu’aucune des parties n’a prouvĂ© sa possession. Le juge de paix pourrait alors» ordonner le sĂ©questre ou accorder la rĂ©crĂ©ance, comme nous l’avons vu page 07. L’article 2000 du Code civil autorise le juge de paix Ă  prononcer la contrainte par corps, mais en cas de rĂ©in- tĂ©grande exclusivement. La contrainte par corps aurait lieu non-seulement pour le dĂ©laissement de l’hĂ©ritage, mais encore pour la restitution des fruits et le paiement des dommages-intĂ©rĂȘts ; mais non pour les dĂ©pens de l’instance. Elle ne serait pas applicable au cas de simple complainte. L’article 1 20 du Code de procĂ©dure, qui autorise Ă  la prononcer pour dommages-intĂ©rĂȘts excĂ©dant 300 lianes, ne peut ĂȘtre Ă©tendu aux matiĂšres dont les juges de paix connaissent. Nous croyons mĂȘme que les juges d’appel n’auraient pas en ces matiĂšres plus de pouvoir que ces magistrats, et ne pourraient par consĂ©quent la prononcer lors mĂȘme qu’en inlirmant ils accorderaient des dommages-intĂ©rĂȘts excĂ©dant 300 francs que le premier juge avait refusĂ©s ; car le tribunal d’appel doit seulement examiner si la premiĂšre dĂ©cision est bien ou mal rendue, et n’a d’autre mission que de faire ce que le premier juge aurait pu ou dĂ» faire et n’a pas fait. L’art. 120 ne s’applique qu’aux matiĂšres dont un tribunal d’arrondissement est saisi au premier degrĂ©. La contrainte par corps ne peut jamais ĂȘtre prononcĂ©e contre les septuagĂ©naires, les femmes et les filles article 2000 du Code civil, quand mĂȘme le fait aurait Ă©tĂ© susceptible de poursuite correctionnelle, et par consĂ©quent de cette contrainte, aux termes de l’article 52 du Code pĂ©nal, car elle ne peut ĂȘtre appliquĂ©e que par les tribunaux de justice rĂ©pressive. — 4T6 — SECTION 11. De l’appel et du dernier ressort. Les jugements qui prononcent sur les actions posses- soires ne sont en gĂ©nĂ©ral rendus qu’en premier ressort, et sont consĂ©quemment susceptibles d’appel, lors mĂȘme que le demandeur n’aurait conclu qu’à des dommages- intĂ©rĂȘts n’excĂ©dant pas 100 francs. A la vĂ©ritĂ©, la jurisprudence a Ă©tĂ© longtemps incertaine sur ce point. Par arrĂȘts des 2 A messidor an XI et 2A prairial an XII, la cour de cassation avait Ă©tabli le principe que nous venons de rappeler. Depuis, aprĂšs de longs dĂ©bats et beaucoup de difficultĂ©s, elle a abandonnĂ© cette jurisprudence, et dĂ©cidĂ©, par six arrĂȘts des 0 frimaire an XIV, 6 octobre 1807, 28 octobre 1808, 13 novembre 1811, 1" juillet 1812 et 13 aoĂ»t 1818, que dĂšs l’instant que le demandeur en complainte avait fixĂ© Ă  50 francs * ou Ă  une somme infĂ©rieure les dommages-intĂ©rĂȘts qu’il rĂ©clamait, le juge de paix devait prononcer en dernier ressort. Cette sĂ©rie de dĂ©cisions n’a pas empĂȘchĂ© M. Merlin de donner la prĂ©fĂ©rence Ă  celles de l’an XI et de l’an XII, et la cour, aprĂšs avoir de nouveau examinĂ© la question en audience solennelle de toutes ses chambres, prĂ©sidĂ©e par le garde des sceaux, est revenue Ă  sa premiĂšre jurisprudence, par arrĂȘt du 25 mai 1822, rendu sur le pourvoi du sieur BarrĂ© ; il est ainsi motivĂ© Attendu qu’il est de principe gĂ©nĂ©ral que les actions ayant pour objet des choses d’une valeur indĂ©terminĂ©e * 00 fr. talent, avant la loi de 1138, le taux du dernier resxort. doivent subir deux degrĂ©s de juridiction ; que la loi n’a pas exceptĂ© l’action en complainte de l’application de cette rĂšgle gĂ©nĂ©rale ; qu’il suit de lĂ , que si l’immeuble ou droit rĂ©el dont la possession est litigieuse, et dans lesquels le demandeur en complainte veut se faire maintenir, est d’une valeur indĂ©terminĂ©e, le juge de paix ne peut statuer qu’en premier ressort ; que, dans l’espĂšce, indĂ©pendamment des dommages-intĂ©rĂȘts dont la valeur a Ă©tĂ© fixĂ©e Ă  48 francs, le juge de paix de a maintenu le sieur barrĂ© dans une possession par lui rĂ©clamĂ©e, contestĂ©e par tes dĂ©fendeurs, et dont la valeur Ă©tait indĂ©terminĂ©e ; d’oĂč il suit que le tribunal de Bourges, en recevant l’appel, n’a pas violĂ© l’art. 10, tit. 3 de la loi du *24 aoĂ»t 1790, et qu’il en a fait au contraire une juste application. » Quatre arrĂȘts de la mĂȘme cour, des 11 avril 1825, 14 fĂ©vrier 1820, 31 juillet 1828, 31 aoĂ»t 1831, sont semblables au prĂ©cĂ©dent. Le mĂȘme principe s’applique Ă  la rĂ©intĂ©grande, car il s’agit aussi, sur cette action, de la possession d’un immeuble de valeur indĂ©terminĂ©e que veut recouvrer une partie, et qu’elle conservera jusqu’à ce qu’un jugement possessoire ou pĂ©titoire la condamne Ă  l’abandonner. L’arrĂȘt du 19 novembre 1819, qui dĂ©cide le contraire, a Ă©tĂ© rendu sous l’influence de la jurisprudence que l’arrĂȘt solennel du 25 mai a changĂ©e. Aussi, un autre arrĂȘt de la cour du 5 mars 1828 a-t-il positivement dĂ©cidĂ©, qu’en matiĂšre de rĂ©intĂ©grande, le jugement n’était rendu qu’à la charge de l’appel. La loi de 1838 a posĂ© sur tout cela quelques principes qu’il importe de signaler. Son article 0 porte que les juges de paix connaissent des actions possessoires Ă  la charge d’appel, et l’art. 1" — ni — n’accorde Ă  ces juges le pouvoir de prononcer en dernier ressort que lorsqu’il s’agit de demandes purement personnelles d’une valeur de 100 francs seulement. 11 n’y aurait pas d’exception, lors mĂȘme qu’il pourrait ĂȘtre Ă©tabli que la valeur du fonds en litige est de 100 francs, ou que le demandeur concilierait Ă  ce qu’il fĂ»t fait dĂ©fense Ă  son adversaire de le troubler Ă  l’avenir dans sa possession, Ă  moins que celui-ci n’aimĂąt mieux payer une somme de 100 francs. La loi, en effet, est conçue en termes gĂ©nĂ©raux qui repoussent toute distinction; elle ne s’arrĂȘte pas non plus au revenu, comme elle le fait pour rĂ©gler le premier ou le dernier ressort dans les tribunaux de premiĂšre instance ; ce revenu ne fĂ»t-il que de quelques centimes, le jugement n’en serait pas moins susceptible d’appel. Nous ne pouvons donc attribuer qu’à une erreur typographique ce qui est dit au Nouveau RĂ©pertoire de M. Dalloz aĂźnĂ©, que le juge du possessoire statuerait en dernier ressort si la valeur de l’objet litigieux Ă©tait infĂ©rieure Ă  00 francs en rente ou par prix de bail. Mais il en serait diffĂ©remment si, au jour de la comparution devant le juge de paix, le dĂ©fendeur reconnaissait expressĂ©ment la possession et se bornait Ă  contester soit le trouble, soit le quantum des dommages-intĂ©rĂȘts, que nous supposons toujours fixĂ©s par le demandeur Ă  100 francs seulement, car le premier ou dernier ressort doit ĂȘtre dĂ©terminĂ© par la valeur Ă  laquelle les conclusions des parties ont limitĂ© le litige au moment du jugement, abstraction faite des conclusions antĂ©rieures. L’art. 5 de la 101 nouvelle sur les justices de paix fournit un argument Ă  l’appui de cette opinion, puisqu'il dĂ©fĂšre aux juges de paix la connaissance en dernier ressort jusqu’à J 00 francs — 478 — des actions pour dommages faits aux champs, fruits et rĂ©coltes, et de celles relatives Ă  l’élagage des arbres ou haies, et au curage soit des fossĂ©s, soit des canaux servant Ă  l’irrigation des propriĂ©tĂ©s et au mouvement des usines, lorsque les droits de propriĂ©tĂ© ou de servitude ne sont pas contestĂ©s. Mais lorsque le juge de paix est dans le cas de statuer en dernier ressort sur le fond, en raison de la valeur du litige, son jugement est cependant sujet Ă  l’appel, quant aux questions de compĂ©tence, soit qu’elles s’élĂšvent Ă  raison du domicile, de la situation de l’objet litigieux ou de la matiĂšre, puisque l’art. 14 de la loi de 1838 ne distingue pas. L’art. 13 de cette loi porte que l’appel des jugements des juges de paix ne sera recevable ni avant les trois jours qui suivront celui de la prononciation des jugements, Ă  moins qu’il n’y ait lieu Ă  exĂ©cution provisoire, ni aprĂšs les trente jours qui suivront la signification Ă  l’égard des personnes domiciliĂ©es dans le canton ; Que les personnes domiciliĂ©es hors du canton auront pour interjeter appel, outre le dĂ©lai de trente jours, le dĂ©lai rĂ©glĂ© par les art. 73 et 1033 du Code de procĂ©dure civile. L’art. 14 ajoute que l’appel des jugements par lesquels le juge de paix se sera dĂ©clarĂ© compĂ©tent, ne pourra ĂȘtre interjetĂ© qu’aprĂšs le jugement dĂ©finitif ; et un arrĂȘt de la chambre des requĂȘtes, en date du 13 janvier 1847, rendu sur le pourvoi du sieur Thibault et la plaidoirie de M. Avisse, a Ă©tendu ce principe mĂȘme Ă  un jugement qui, en statuant sur la compĂ©tence, avait prescrit une mesure interlocutoire, par exemple, une visite de — -179 — lieux et une enquĂȘte; nous croyons, toutefois, cet arrĂȘt susceptible de critique sous ce dernier point de vue; Fappel est de droit commun, la prohibition est l’exception ; on ne peut l'Ă©tendre au delĂ  du cas spĂ©cifiĂ© en termes exprĂšs. Les jugements par lesquels le juge de paix se dĂ©clare incompĂ©tent, sont forcĂ©ment susceptibles d’appel immĂ©diatement aprĂšs les trois jours de la prononciation. Les juges d’appel ont, aux termes de l’art. /i73 du Code de procĂ©dure, la facultĂ© d’évoquer le fond, pourvu qu’il soit en Ă©tat et qu’ils y statuent dĂ©finitivement par un seul et mĂȘme jugement; mais il importe qu’ils fassent bien attention Ă  remplir les conditions auxquelles l’exercice de cette facultĂ© est subordonnĂ© ; ils ne doivent pas infirmer par un premier jugement, et renvoyer Ă  procĂ©der au fond pour prononcer plus tard leur dĂ©cision dĂ©finitive; ils violeraient la loi. Ils doivent, s’ils ne sont pas suffisamment Ă©clairĂ©s, rendre un jugement d’avant faire droit, sans rien juger, et en rĂ©servant tous les moyens des parties. Toutefois, ce qui prĂ©cĂšde ne s’applique qu’au cas oĂč le fond n’a pas Ă©tĂ© dĂ©finitivement jugĂ© par le juge de paix ; mais s’il l’a Ă©tĂ©, fĂčt-ce mĂȘme par jugement par dĂ©faut auquel on n’aurait pas formĂ© opposition, l’appel dĂ©fĂ©rant nĂ©cessairement au tribunal le fond du procĂšs, il n’y a pas lieu Ă  l’astreindre aux conditions de cet article, puisqu’il n’évoque pas. Alors il peut, aprĂšs avoir infirmĂ©, prescrire un avant faire droit et juger dĂ©finitivement le fond par une dĂ©cision subsĂ©quente. Ces points divers rĂ©sultent d’un grand nombre d’arrĂȘts de la cour de cassation, que l’on trouve dans tous les recueils. On peut voir notamment ceux des 28 avril — 180 4823, 22 dĂ©cembre 4824, 4$ novembre 4828, 24 mai 4833. Les juges d’appel peuvent mĂȘme, en infirmant une sentence du juge de paix qui aurait prononcĂ© sur le fond dĂ©finitivement, ou retenir le jugement, du fond ou le renvoyer devant un juge de paix autre que celui qui a d’abord statuĂ©. Ainsi, supposons que le juge de paix ait accueilli la complainte en se fondant, malgrĂ© la dĂ©nĂ©gation du dĂ©fendeur, sur ce que les actes produits Ă©tablissaient la possession et le trouble, et que le tribunal d’appel ait infirmĂ©, par le motif que la preuve n’en Ă©tait pas acquise, et en ordonnant soit une enquĂȘte ou expertise, soit une visite des lieux ; il pourra ou faire ces opĂ©rations, ou remoyer devant un juge de paix pour qu’il j soit procĂ©dĂ© et qu’il soit statuĂ© au fond. On ne pourrait opposer que ce serait faire parcourir aux parties plus de deux degrĂ©s de juridiction, puisque la jurisprudence qui s’était introduite sous la loi du 4" mai 1790 a Ă©tĂ© changĂ©e par les art. 472 et 473 du Code de procĂ©dure civile. D’aprĂšs le premier de ces articles, l'exĂ©cution d’un jugement infirmatif peut ĂȘtre renvoyĂ©e Ă  un juge de premiĂšre instance ; et suivant le second, le tribunal a la facultĂ© de garder le jugement du fond, ce qui signifie qu'il peut aussi le renvoyer au magistrat infĂ©rieur. demandeur en complainte pourrait produire en appel un titre dont il n’aurait pas argumentĂ© dev ant le juge de paix. Ainsi, par exemple, celui qui aurait demandĂ© Ă  ĂȘtre maintenu dans un droit de passage, de puisage, mais qui n’aurait invoquĂ© aucun acte, pourrait, sur l’appel, qu’il fut intimĂ© ou appelant, exhiber un titre susceptible de justifier sa prĂ©tention ce ne serait pas une non- — 4ftl voile demande, puisque la chose litigieuse, le droit qu’il prĂ©tend y exercer n’auraient point changĂ©, le serait tout simplement un moven nouveau autorisĂ© par l’art. Atii du iode de procĂ©dure; Ă  plus forte raison le dĂ©fendeur aurait-il la mĂȘme facultĂ©. Mais si devant le juge de paix il ne s’était agi que d’une action en rĂ©intĂ©grande, sans production de titre, et si devant le tribunal le demandeur abandonnait la rĂ©intĂ©grande, ou plutĂŽt la convertissait en complainte et produisait un titre, ces conclusions constitueraient une demande nouvelle dill'Ă©rente de la premiĂšre, soumise a d'autres rĂšgles que celles-ci. Les juges devraient la dĂ©clarer non recevable, ainsi que nous l'avons dit p. M/i. Le juge de paix pourrait ordonner l’exĂ©cution provisoire de son jugement, avec ou sans caution, suiv ant les distinctions Ă©tablies par les art. 1! et 12 de la loi de 1838. Plusieurs arrĂȘts de la cour de cassation, et notamment celui du S novembre 1833, rendu sur le pourvoi des sieurs Lefebvre et SeilliĂšre, ont dĂ©cidĂ© que le juge du possessoire pouvait prononcer la solidaritĂ© pour le paiement des dommages-intĂ©rĂȘts auxquels il condamnait les divers co-auteurs d'un fait de trouble. Cependant, nous n’avons jamais pu approuver cette jurisprudence, qui nous parait contraire au principe gĂ©nĂ©ral, que chacun doit seulement une part Ă©gale de la dette commune, Ă  moins qu’il n’y ait solidaritĂ© Ă©tablie par la loi ou indivisibilitĂ© dans l’obligation. r, rien n’est plus divisible qu’une somme de dommages-intĂ©rĂȘts, et aucune disposition lĂ©gale n’autorise en pareil cas une condamnation solidaire. ai lH* — section m. tics voles extraordinaires pour attaquer les jugements. 11 existe quatre voies extraordinaires pour attaquer les jugements et arrĂȘts en gĂ©nĂ©ral ; ce sont 1° la tierce opposition , 2° la requĂȘte civile, 3° la prise Ă  partie, /i° le pourvoi en cassation. De ces quatre voies, il n’y a pic la requĂȘte civile qui, aux termes de l’art. /80 du Code de procĂ©dure, ne soit pas admise contre les sentences de justice de paix ; mais les trois autres le sont incontestablement, d’aprĂšs les art. h7h, / i78, 509 du Code de procĂ©dure, et 15 de la loi du 25 mai 1838. Cependant la requĂȘte civile pourrait ĂȘtre admise contre le jugement rendu sur l’appel de la sentence du juge de paix ; c’est ce qu’on peut induire de l’art. 509 du Code de procĂ©dure civile et d’un arrĂȘt de la cour de cassation du l/i juin 18/13, rendu sur le pourvoi d’un sieur Garnier. 11 y a lieu au recours en cassation, soit contre les jugements en dernier ressort des juges de paix dans les cas fort rares oĂč ils prononcent ainsi, soit contre ceux rendus sur l’appel par les tribunaux de premiĂšre instance. Nous ferons toutefois remarquer qu’il existe entre les uns et. les autres une grande diffĂ©rence relativement aux moyens de les attaquer. Les jugements des tribunaux de premiĂšre instance peuvent ĂȘtre attaquĂ©s pour simple violation de loi, incompĂ©tence ou excĂšs de pouvoir, tandis que ceux Ă©manĂ©s des juges de paix ne peuvent l’ĂȘtre que pour excĂšs de pouvoir. Art. 15 de la loi du 25 mai 1838. V la vĂ©ritĂ©, il semblerait rĂ©sulter, au premier aperçu de — 483 — la gĂ©nĂ©ralitĂ© des termes de cet article, que, dans tous les cas, l’excĂšs de pouvoir donne lieu au pourvoi en cassation; mais cela ne peut s’appliquer qu’aux jugements en dernier ressort ; ainsi les jugements des juges de paix rendus seulement en premier ressort doivent ĂȘtre attaquĂ©s par la voie d’appel, mĂȘme pour excĂšs de pouvoir, et quant Ă  ceux rendus en dernier ressort, ils ne peuvent l’ĂȘtre que par voie de cassation et dans le seul cas oĂč ils sont entachĂ©s de ce vice. C’est aussi le sentiment de MM. Curasson et TarbĂ©. Nous n’en dirons pas davantage Ă  cet Ă©gard, parce qu’il existe sur les attributions de la cour de cassation deux trĂšs-bons ouvrages, l'un de M. Godard de Saponay, notre collĂšgue, et l’autre de M. TarbĂ©, enlevĂ© si jeune Ă  la magistrature et Ă  ses nombreux amis. SECTION IV. Effets du jugement. Nous avons dĂ©jĂ  indiquĂ©, pages /0, 82, 269, 287, l’effet du jugement de maintenue dans la possession annale ou de rĂ©intĂ©grande dans la possession instantanĂ©e. Au second cas, celui qui a succombĂ© peut intenter complainte en prouvant une possession annale antĂ©rieure Ă  celle dans laquelle son adversaire a Ă©tĂ© rĂ©tabli, Ă  moins qu’il n’ait laissĂ© passer l’annĂ©e du trouble. Au premier cas, celui qui a Ă©tĂ© maintenu ne peut plus ĂȘtre Ă©vincĂ© de la chose que par action pĂ©titoire. 11 est rĂ©putĂ© propriĂ©taire jusqu’à ce que son adversaire prouve son droit par un titre formel ou par une possession constitutive de prescription antĂ©rieure Ă  la sienne. DĂšs que celui qui est maintenu en possession est rĂ©- — 484 — putĂ© propriĂ©taire jusqu’à preuve contraire ai t. 2230 du Code civil, parce qu’il n’a pu gagner sa cause qu’en se fondant sur une possession animo domini, il s’ensuit qu’il peut non-seulement recueillir les produits comme un usufruitier ou fermier, mais mĂȘme disposer de la chose et faire tous actes de propriĂ©tĂ©, mĂȘme pendant l’instance pĂ©titoire qui serait intentĂ©e par son adversaire ; il serait seulement exposĂ© Ă  une action, et les tiers acquĂ©reurs Ă  une demande en rĂ©solution pour le cas oĂč il succomberait au pĂ©titoire. L’article 1001 du Code civil nous paraĂźt inapplicable ici, et le juge saisi du pĂ©titoire ne pourrait ordonner le sĂ©questre de l’objet litigieux sans porter atteinte Ă  la chose jugĂ©e. Supposons, en effet, que la complainte ait Ă©tĂ© intentĂ©e Ă  raison d’une coupe de bois, d’une dĂ©molition de bĂątiment ou d’un projet de vente publiquement annoncĂ©, et que le dĂ©fendeur se lĂ»t lui-mĂȘme constituĂ© reconventionnellement demandeur en maintenue et ait rĂ©ussi, n’est-il pas Ă©vident qu’il pourra continuer ce qu’il avait commencĂ©, et que le sĂ©questre avec toutes ses suites rendrait illusoires la possession reconnue et les dispositions du jugement de complainte? Le sĂ©questre ne percevrait-il pas d’ailleurs les fruits et revenus, et le possesseur ne serait-il pas ainsi privĂ© mĂȘme de la jouissance la plus ordinaire? Cette consĂ©quence ne vient-elle pas encore fortifier notre sentiment? 11 est bien Ă©vident que le jugement rendu au posses- soire, se bornant Ă  maintenir le demandeur en sa possession, ne peut, lors mĂȘme qu’il applique des titres ou une loi constitutifs du droit au fond, avoir, sur ce dernier point, l’autoritĂ© de la chose jugĂ©e ; que les juges du pĂ©titoire ne seraient pas liĂ©s non plus par l'apprĂ©ciation qui 485 — aurait Ă©tĂ© faite de la possession par le juge de paix ; s’ils peuvent s’en aider, comme de tous les Ă©lĂ©ments de la cause, ils peuvent aussi la dĂ©clarer prĂ©caire, quoique celui-ci l’ait dĂ©clarĂ©e lĂ©gale et lĂ©gitime. Cour de cassation, 1" mars 1820, l" fĂ©vrier 18/il, 25 janvier 18/i2. Tout ce qui peut rĂ©sulter de la sentence au possessoire, c’est que le demandeur a ou n’a pas possession annale avec les rĂ©parations, dommages, intĂ©rĂȘts et dĂ©pens qu’il a paru juste au juge d’allouer Ă  l’une ou l’autre partie. La sentence de ce magistrat n’a autoritĂ© de chose jugĂ©e que pour les faits de trouble qui y ont donnĂ© lieu, et ne s’étend pas Ă  des faits tout diffĂ©rents qui peuvent bien n’en avoir pas le caractĂšre arrĂȘt de la cour de cassation du 30 mars 18/il, affaire Saul nier ; l’autoritĂ© de la chose jugĂ©e n’a Ă©galement lieu qu’entre les mĂȘmes parties. Ainsi une sentence rendue contre un seul de plusieurs intĂ©ressĂ©s Ă  la mĂȘme chose ne peut ĂȘtre invoquĂ©e par les autres ou opposĂ©e aux autres; et en supposant qu’à cause de l’indivisibilitĂ© de l’objet en litige, et delĂ  disposition de l’article /i78 du Code de procĂ©dure, elle doive s’exĂ©cuter provisoirement jusqu’à la rĂ©tractation par la voie de la tierce-opposition, toujours est-il que, par l’emploi de cette voie de recours, on doit amener un nouvel examen de la cause, et que si le demandeur est jugĂ© fondĂ©, la rĂ©tractation doit profiter mĂȘme Ă  celui qui avait d’abord succombĂ©. Du reste, l’autoritĂ© de la chose jugĂ©e peut ĂȘtre opposĂ©e, bien entendu, Ă  tous les reprĂ©sentants de celui qui a succombĂ©, aux hĂ©ritiers, acquĂ©reurs, etc., comme ceux- ci peuvent l’invoquer lorsque la dĂ©cision a Ă©tĂ© rendue en faveur de leur auteur, pourvu pie la dĂ©cision soit intervenue avant le changement d’état rĂ©guliĂšrement cons- tatĂ©. ArrĂȘt de la cour de cassation du 30 novembre 1840. L'effet de la maintenue possessoire est de rejeter sur l’adversaire la nĂ©cessitĂ© de l’action pĂ©titoire et de la preuve de sa propriĂ©tĂ© ou de son droit; mais celte preuve peut se faire de plusieurs maniĂšres, par titres, c’est-Ă - dire par actes valables Ă©manĂ©s de parties ayant qualitĂ©s pour les consentir, par possession constitutive de prescription et par la disposition lĂ©gale. Nous n’avons aucune explication Ă  donner sur les titres dont la validitĂ© et l’existence dĂ©pendent de l’application des rĂšgles du droit commun. Quant Ă  la possession trentenaire qu bien Ă  celle de dix ou vingt ans, elle est tout en faits qui peuvent ĂȘtre prouvĂ©s par tĂ©moins; ils peuvent l’ĂȘtre Ă©galement, aux termes de l’article 1353 du Code civil, par des prĂ©somptions abandonnĂ©es Ă  la conscience du magistrat; la prescription peut donc s’établir par de simples prĂ©somptions. Ces prĂ©somptions peuvent encore, quoiqu’il ne s’agisse pas d’établir la prescription, servir de preuve de propriĂ©tĂ©, surtout lorsqu’il faut dĂ©terminer l’étendue des circonstances et dĂ©pendances, des accessoires d’un domaine. Quand le titre de propriĂ©tĂ© est Ă©crit sur les lieux, rĂ©sulte de faits matĂ©riels, de dĂ©nominations que les juges trouvent positifs, on ne voit pas pourquoi on leur contesterait le pouvoir de reconnaĂźtre la propriĂ©tĂ© et de faire cesser l’ayantage de la maintenue possessoire ; n’est-ce pas lĂ  une apprĂ©ciation laite dans les limites lĂ©gales et qui Ă©chappe Ă  la censure de la cour rĂ©gulatrice? C’est aussi ce qu’elle a jugĂ© par l’arrĂȘt du 31 juillet 1832, dĂ©jĂ  citĂ©, et par un autre arrĂȘt du 24 fĂ©vrier 1840, rendu contre l’État qui revendiquait la propriĂ©tĂ© d’arbres plantĂ©s sur une route royale; arbres que la loi du 12 niai 1825 prĂ©sume appartenir Ă  l’Jvtut. Mais cette prĂ©somption Ă©tait dĂ©truite par une prĂ©somption contraire. Restent les prĂ©somptions lĂ©gales. Pour les haies, les fossĂ©s, les murs, la loi Ă©tablit en principe gĂ©nĂ©ral la mitoyennetĂ©, sauf les exceptions rĂ©sultant de certains faits, de titres et de la prescription. Nous pensons pie la sentence de maintenue en possession exclusive de ces objets n’a d’autre effet pie d’en assurer la possession pro\ isoire Ă  celui qui l’a obtenue, et qui peut en avoir acquis la pleine propriĂ©tĂ© par titre ou par prescription; mais,de mĂȘme que le demandeur au pĂ©titoire pourrait invoquer un titre Ă©crit ou la prescription, de mĂȘme aussi il peut invoquer la prĂ©somption de la loi qui forme un vĂ©ritable titre. La cour de cassation a ainsi jugĂ© pour la haie par arrĂȘts des 13 dĂ©cembre 1830 et 17 janvier 1838, qui s’appliquent aussi au mur et au fossĂ©. Nous en dirons autant relativement aux servitudes, Ă  celles qui ne peuvent s’acquĂ©rir que par titres comme Ă  celles qui peuvent s’acquĂ©rir en outre par la possession. Le propriĂ©taire du fonds que l’on prĂ©tend asservi et qui a succombĂ© au possessoire, ayant un titre de propriĂ©tĂ© qui rĂ©clame toujours en sa faveur, devra rĂ©ussir dans son action pĂ©titoire si son adversaire ne prouve pas son droit de servitude par titres ou par prescription ; celui-ci aura toujours eu l’avantage de jouir de la servitude jusqu’à la dĂ©cision au pĂ©titoire, et c’est bien quelque chose. Il en serait de mĂȘme, Ă  plus forte raison, dans le cas oĂč le juge le paix aurait constate une possession immĂ©moriale, ainsi que l’a dĂ©cidĂ© la cour de cassation, par arrĂȘt du 31 juillet 1832, rendu entre le sieur Pierrot et la commune de Pressigny. Remarquons, toutefois, que le dĂ©fendeur au posses- soire 11 e peut, aux termes de l’article 27 du iode de procĂ©dure, se pourvoir au pĂ©titoire, non-seulement qu’aprĂšs que l’instance sur le premier point est entiĂšrement terminĂ©e, tant en premiĂšre instance qu’en appel, ou qu’il a dĂ©clarĂ© acquiescer au jugement, mais encore qu’il l’a complĂštement exĂ©cutĂ©, par l’abandon du fonds, la destruction des ouvrages qu’il aurait pu faire, la rĂ©paration des dĂ©gradations, le payement des dommages-intĂ©rĂȘts et des frais; il ne pourrait sĂ© pourvoir quand mĂȘme il l'aurait exĂ©cutĂ© en majeure partie, et qu’il ne de\ rait plus pie quelques dĂ©pens. Si nĂ©anmoins la partie qui a obtenu les condamnations Ă©tait en retard de les faire liquider, le juge du pĂ©titoire pourrait fixer, pour cette liquidation, un dĂ©lai aprĂšs lequel l’action au pĂ©titoire serait reçue. Art. 27 du '.ode de procĂ©dure. dĂ©fendeur 11 e pourrait supplĂ©er Ă  l’exĂ©cution des condamnations par une caution d’y satisfaire ; la loi n’admet pas ce tempĂ©rament. Elle exige une exĂ©cution rĂ©elle et immĂ©diate. Lors mĂȘme qu’il y aurait retard de faire liquider les condamnations, la caution serait encore inadmissible tout ce [ue la loi permet, c’est la fixation d’un dĂ©lai pour la liquidation. Comment, d’ailleurs, dĂ©terminer sĂ»rement l’étendue du cautionnement pour des condamnations non liquidĂ©es? Du reste, il est loisible au dĂ©fendeur au pĂ©titoire de renoncer Ă  l’exception dilatoire puisĂ©e dans l’art. 27 ; cette renonciation rĂ©sulterait suffisamment, suivant nous, de ce qu’il aurait dĂ©fendu au fond, sans la faire valoir. Cette disposition n'est point applicable au demandeur qui aurait succombĂ© et aurait Ă©prouvĂ© des condamnations ; il pourrait se pourvoir au pĂ©titoire avant d’v avoir satisfait. Dans le mĂȘme cas oĂč le demandeur a succombĂ©, son adversaire est rĂ©putĂ© propriĂ©taire jusqu’à ce qu’il prouve son droit par la voie pĂ©titoire. Il en serait encore ainsi dans le cas on l’action pĂ©titoire n’aurait pas Ă©tĂ© prĂ©cĂ©dĂ©e de la complainte, d’aprĂšs les deux rĂšgles de droit in ilnbio inelior est musa passidentis, et adore non probante rens absoleilitr. Toutefois, lorsqu'il n’est intervenu aucun jugement de maintenue, le juge du pĂ©titoire peut ordonner le sĂ©questre. de lacliose litigieuse, si le dĂ©tenteur en abuse, y commet des dĂ©vastations, ou si l’état de ses allaires fait craindre qu’il ne puisse restituer les fruits qu’il pourrait ĂȘtre, par la suite condamnĂ© Ă  rendre, ou enfin si aucune des parties n’a rĂ©ellement la possession. Nous devons rĂ©soudre ici une question indiquĂ©e ci-dessus, pages 118 et 121, oĂč nous avons rapportĂ© deux arrĂȘts de la cour de cassation des 12 juin 1800 et 17 mars 1810,qui ont dĂ©cidĂ© que la possession dans laquelle on s’était maintenu aprĂšs un jugement sur complainte qui l’avait adjugĂ©e Ă  un autre, ne pouvait autoriser l’action possossoire de la part du dĂ©tenteur, qui n’était toujours considĂ©rĂ© que comme possesseur prĂ©caire. les dĂ©cisions nous paraissent fort justes quand l'action est intentĂ©e par le dĂ©fendeur dĂ©jĂ  condamnĂ© au posses- soire, parce que, d’aprĂšs l’art. 2210, la dĂ©tention prĂ©caire ne peut, quelque temps qu’elle ait durĂ©, confĂ©rer aucun droit, aucun litre Ă  celui qui l’invoque, Ă  moins qu’il n’y ait eu interversion, aux termes de l’art. 2218. Mais il en est diffĂ©remment quand c’est un acquĂ©reur qui invoque une possession Ă  lui propre et postĂ©rieure Ă  son acquisition. L’art. 2239, dont nous avons dĂ©veloppĂ© le sens dans le tit. 1 er , s’applique directement ici. Or, c’était prĂ©cisĂ©ment l’esprit des deux arrĂȘts que nous venons de citer. Lorsque c’est le demandeur en complainte qui a succombĂ©, il faut distinguer s’il a Ă©tĂ© jugĂ© que sa possession Ă©tait prĂ©caire, il est Ă©vident que ce vice subsistant toujours, une possession postĂ©rieure ne peut autoriser la complainte, Ă  moins qu’il n’y ait interversion. Mais s’il a Ă©tĂ© dĂ©boutĂ© de sa complainte par le motif qu’il ne promait pas de possession annale ou qu’il n’existait pas de trouble, il pourra, plus tard, la renouveler, parce qu’il peut avoir acquis une possession civile, ou qu’il peut ĂȘtre survenu un trouble positif. Celui qui, aprĂšs avoir obtenu gain de cause au posses- soire, perd son procĂšs au pĂ©titoire, n’est pas obligĂ© de restituer les dĂ©pens ni les dommages-intĂ©rĂȘts auxquels il a fait condamner son adversaire. Ils ont Ă©tĂ© occasionnĂ©s par le fait de celui-ci ; c’est lui qui, en agissant irrĂ©guliĂšrement, au lieu de se pourvoir en justice, a mis le premier dans la nĂ©cessitĂ© de le poursuivre et de faire rĂ©primer sa voie de fait. Il doit eu ĂȘtre puni, et il ne le serait pas ou ne le serait qu’imparfaitement s’il pouvait ensuite recouvrer les dĂ©pens et les indemnitĂ©s, ou du moins celles-ci. Ce serait encourager les voies de fait, puisque les condamnations ne seraient qu’une avance qu’on pourrait toujours recouvrer. 11 laudrait en dire autant du cas oĂč les dĂ©pens auraient Ă©tĂ© compensĂ©s entre les parties. Le demandeur au pĂ©titoire ne pourrait rĂ©clamer de son adversaire la portion des dĂ©pens pie la compensation a fait peser sur lui. Mai» si, par un jugement rendu sur le possessoire, le — 491 — juge de paix avait, mĂȘme Ă  tort, rĂ©servĂ© les dĂ©pens, cette sentence ayant acquis force de chose jugĂ©e, Ă  dĂ©faut de recours, devrait recevoir son exĂ©cution, et les juges de l’action pĂ©titoire, en accueillant la demande, pourraient condamner le dĂ©fendeur aux dĂ©pens des deux instances; c’est ce que la cour de cassation a dĂ©cidĂ© pur arrĂȘt du 8 dĂ©cembre 1836. Voyez aussi p. /73. Quant aux fruits, la dĂ©cision est dans l’application du principe Ă©tabli par l’art, ĂŽ/p. Le possesseur de bonne foi, obligĂ© d’abandonner la chose qui ne lui appartient pas, conserve les fruits qu’il a perçus antĂ©rieurement Ă  l’action, lors mĂȘme qu’il n’existe aucun jugement qui l’ait prĂ©alablement maintenu dans sa possession, soit parce qu’il n’y a pas eu de demande possessoire, soit parce qu’aucune des parties n’a justifiĂ© de la possession annale et Ă  titre de propriĂ©taire qu’elle allĂ©guait. A plus forte raison doit-il conserver les fruits quand il en a obtenu un ; mais cette consĂ©quence ne rĂ©sulte pas forcĂ©ment d’une pareille dĂ©cision ; car, comme nous l’avons vu au titre 1 er , page 129, la bonne foi n’est pas nĂ©cessaire dans celui qui forme la complainte. Toutefois, pour le contraindre Ă  restituer les fruits, une dĂ©claration formelle de mauvaise foi serait indispensable de la part des juges du pĂ©titoire ; car, aux termes de l’art. 2268 du iode civil, la bonne foi est toujours prĂ©sumĂ©e, et c’est Ă  celui qui allĂšgue la mauvaise foi Ă  la prouver, les principes ont Ă©tĂ© consacrĂ©s par arrĂȘt de la cour de cassation, rendu le 5 juillet entre le sieur Bartholdy et la ville de Colmar, qui a cassĂ© un arrĂȘt de la cour royale de la mĂȘme ville. Depuis, de nombreux arrĂȘts ont de nouveau consacrĂ© le principe de la nĂ©cessitĂ© d’une dĂ©claration expresse de i!-2 — mauvaise foi pour lĂ©gitimer la restitution des fruits; nous citerons notamment ceux des 2/i juillet 1839 et 12 mai IH/iO; mais il ne faut pas se mĂ©prendre sur ce qu’on doit considĂ©rer comme fruits on ne pourrait, par exemple, considĂ©rer comme tels des arbres de haute futaie non mis en coupes rĂ©glĂ©es. Le possesseur de bonne foi, eĂ»t-il obtenu un jugement de maintenue , ne pourrait donc ĂȘtre autorisĂ© Ă  les conserver; il devrait, au contraire, ĂȘtre condamnĂ© Ă  les restituer, dans tous les cas, au demandeur au pĂ©titoire qui serait dĂ©clarĂ© propriĂ©taire du bois, ainsi que cela rĂ©sulte de l’art. 591 du Code civil et de, l’arrĂȘt Colasson du 8 dĂ©cembre 1836, prĂ©cĂ©demment citĂ©. Lorsque l’objet litigieux a Ă©tĂ© mis en sĂ©questre ou en rĂ©crĂ©ance, mĂȘme entre les mains de l’une des parties, il est Ă©vident que, pendant tout le temps que cet Ă©tat de choses a durĂ©, elle n’a pas eu la possession de l’objet litigieux et n’a pu en gagner les fruits; elle est dĂšs lors tenue d’en rendre compte Ă  celui qui rĂ©ussit au pĂ©titoire. Quant aux impenses et amĂ©liorations que le possesseur Ă©vincĂ© aurait pu faire, il faudrait suivre pour le rĂšglement de ses droits et obligations les principes tracĂ©s par les art. 555 et 1375 du Code civil. 11 y aurait aussi lieu de l’assujettir Ă  tenir compte des destructions et dĂ©tĂ©riorations qu’il aurait commises. Faisons observer, en terminant, que le juge de paix ne serait nullement liĂ© par un interlocutoire, eĂ»t-il mĂȘme Ă©tĂ© exĂ©cutĂ© sans rĂ©serves par les d'eux parties ; et aprĂšs avoir ordonnĂ© la preuve par tĂ©moins et par visite des lieux, pour vĂ©rifier la possession et le trouble allĂ©guĂ©s, il pourrait, par le jugement dĂ©finitif, Ă©carter le rĂ©sultat — 493 — fte cette instruction comme inutile, se dĂ©terminer par une exception, comme, par exemple, celle tirĂ©e de ce que l’objet du litige est une chose consacrĂ©e Ă  un usage public hors du commerce, et non susceptible de prescription. Ces principes rĂ©sultent d’une foule d’arrĂȘts, et notamment de celui de cassation du 25 juillet 1837. Le jugement possessoire n’aurait mĂȘme, comme nous l’avons dit, aucune influence sur la nature et l’apprĂ©ciation des faits que les juges du pĂ©titoire pourraient caractĂ©riser tout autrement. Supposons, par exemple, que le juge de paix eĂ»t repoussĂ© la complainte par le motif que les faits articulĂ©s ne sont que de tolĂ©rance et de jouissance prĂ©caire, ou ne constituent que l’exercice d’une servitude discontinue, et que le demandeur reproduise identiquement les mĂȘmes faits devant le juge du pĂ©titoire, bien Ă©videmment celui- ci ne sera pas liĂ© par la premiĂšre sentence, et pourra dĂ©cider que ces faits, continuĂ©s pendant trente ans, ont produit l’acquisition de la propriĂ©tĂ© par la prescription. FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE. TABLE DES MATIÈRES PREMIÈRE PARTIE TRAITÉ DE LA POSSESSION ET DES ACTIONS l'OSSESSOIItES 111 Rh 1". Dos actions possessoires en gĂ©nĂ©ral ; possession requise; dĂ©lai pour los intontor. i CHAPITRE I er . Principes du droit romain et du droit français ancien et actuel, sur les actions possessoires en gĂ©nĂ©ral et sur plusieurs d’entre elles on particulier. —DĂ©finition de ces actions et de la possession qui y donne lieu ; de leur but. ib. Section i". Actions possessoires en gĂ©nĂ©ral. ib. Section ii. De la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre, de la rĂ©intĂ©- grande, de la i-Ă©crĂ©ance et du sĂ©questre. 14 § 1 ". De la dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre. jb. iV 1 . Droit romain. 15 N“ 2 . Ancien droit français. 23 N" 3 . Droit français actuel. 32 $ 2. De la rĂ©intĂ©grande. 37 S 3 . De la rĂ©crĂ©ance et du sĂ©questre. 69 Section iii. Objet et but de l’action possessoire. 82 CHAPITRE II. DurĂ©e de la possession requise pour pouvoir intenter l’action possessoire. DĂ©lais dans lesquels elle doit ĂȘtre exercĂ©e. — De ceux contre lesquels ils courent. 87 Section i". DurĂ©e de la possession et dĂ©lais dans lesquels l’action doit ĂȘtre intentĂ©e. .. ib. Section h. Les dĂ©lais dans lesquels l’action doit ĂȘtre formĂ©e courent contre toutes personnes. 100 CHAPITRE III. Nature de la possession exigĂ©e pour l’exercice de l’action en complainte; maniĂšre dont elle s’acquiert et se perd. 110 Section t re . Observations gĂ©nĂ©rales. ib. Section ii. DĂ©veloppements des principes de chacune des qualitĂ©s de la possession. 113 § 1 ". Possession non prĂ©caire. ib. 4 2 . Bonne et mauvaise foi dans la possession. 126 3 . Possession continue et non interrompue. 141 5 Î 4 . Possession paisible. 157 N° 1". Observations gĂ©nĂ©rales. ib. N" 2 . Des diverses espĂšces de trouble.. 158 jĂŻ 5 . Possession publique. Ig/, l’ign » 6 . Possession non Ă©quivoque et Ă  titre de propriĂ©taire. ..... 191 S 7. Possession de tolĂ©rance, ou de simple facultĂ©. 19 ,t S 8 . Possession non violente. 19 g Ăż 9. Possession de choses qui sont dans le commerce et prescrij- tibles. 208 TITRE II. Des choses pour lesquelles on peut intenter les actions possessoires. 227 CHAPITRE I". Des biens en gĂ©nĂ©ral pii peuvent ĂȘtre la matiĂšre de ces actions. jb. Section t re . I.’action possessoire est admise pour les immeubles et droits rĂ©els, mais non jtour les immeubles lictifs. il. Section ii. Des meubles isolĂ©s et des universalitĂ©s de meubles. . . 233 Section tu. Immeubles par destination. 238 Section iv. Des immeubles ameublis par stipulation. 248 CHAPITRE II. Des divers immeubles et droits rĂ©els qui peuvent ĂȘtre l’objet des actions possessoires. 251 Section i". Des choses dĂ©signĂ©es par le Code de procĂ©dure et par la loi du 25 mai 1838 comme pouvant ĂȘtre l'objet des actions possessoires. il. jj 1 ". Des dĂ©placements de bornes. 252 § 2. Des usurpations de terre. 260 Ăż 3. Des usurpations d’arbres et de haies. 263 Sj 4 . Usurpation de murs, fossĂ©s, etc. 281 ij 5. Des entreprises sur les eaux. 288 A ht. 1". Des eaux navigables ou flottables et accessoires. 290 Art. 2. Des eaux qui 11 e sont ni navigables ni flottables. 296 A” 1 ". Dos eaux qui n’ont pas de cours lacs, Ă©tangs, mares, citernes, puits, fontaines, eaux minĂ©rales. ib. N° 2. Des eaux courantes. 30 H Section ni. Des choses non dĂ©signĂ©es par le Code de procĂ©dure ni par la loi de 1838, et qui peuvent ĂȘtre l’objet des actions possessoires. 330 § 1". Des chemins. ib. N° 1. Chemins royaux, dĂ©partementaux et de halagç. ib. N“ 2. Chemins vicinaux ou communaux. 340 N° 3. Chemins privĂ©s ou de desserte. 3/16 N“ 4. Chemins de fer. 3 iig § 2. Des marais. 330 3. Des mines. 353 li. De l’état de lĂ©gitimitĂ©. /,08 s 3. De l’action en revendication d’immeubles. /joo Ăż fi. Des rentes et clmmparts.’ p,. ^ 7. Des droits de pĂ©age et droits Ă©ventuels. . 412 * 8. Des sĂ©pultures et tombeaux.’ j,. Ăż tl. lhasse et pĂšche. 4i;j ij 10. Chapelles, bancs et places dans les Ă©glises. . 415 *411. Des banalitĂ©s. 477 TITRE 111. De la procĂ©dure relative au\ actions jiossessoires. . . . 410 CHAPITRE 1". Iles rĂšgles Ă  suivre pour former la demande. ib. Section 1". Notions gĂ©nĂ©rales. il,. Section 11. De ceux par qui et contre qui les actions possessoires doivent ĂȘtre formĂ©es. CHAPITRE II. Do la procĂ©dure devant le juge de paix. 4au Section i rc . Du demandeur. jli. Section 11. Du dĂ©fendeur. 447 Section ni. Du cas oĂč le demandeur et le dĂ©fendeur font defaut. . Section iv. Do la prohibition du cumul du possossoire et du pĂ©ti- toiro. il,. S 1 er . Notions gĂ©nĂ©rales. il,. ^ 2. Des cas oĂč il n’y a pas cumul. 432 Section v. Des moyens de dĂ©fense fondĂ©s sur ce qu’il s’agit de matiĂšres ou d’actes administratifs. 440 Section ni. Des demandes en garantie. 403 Section vu. De l’intervention. 400 CHAPITRE III. Du jugement, de son effet, de ses suites et des di- ters recours dont il peut ĂȘtre l’objet. 471 Section i r '. Du jugement. ih. Section ii. De l’appel et du dernier ressort. 473 Section tu. Du recours en cassation. 482 Section n. Effets du jugement.. . . . iS3 l’an». — Imprimerie de lits aine., rue des Grands-Augustin», 7. TRAITÉ LA POSSESSION DE LA PROPRIÉTÉ DES ACTIONS POSSESSOIRES ET PÉTITOIRES orv rages ne nÉne aetemi Ot’l SE TROTTENT A LA MÊME ADRESSE RĂ©gime des» enu\. ou TraitĂ© des eaux de la mer, des fleuves, riviĂšres navigables et flottables, et autres eaux de toute espĂšce, 3 e Ă©dition, avec un commentaire sur le dĂ©cret de dĂ©centralisation administrative, du 25 mars 1852 ; le tout mis au courant de la lĂ©gislation et de la jurisprudence, jusqu’en avril 1853. 5 volumes. Prix 20 fr. et 26 fr. par la poste. Commentaire de* loi* des 20 avril 1845, et fl I juillet A849, sur les irrigations, avec un extrait des lĂ©gislations Ă©trangĂšres sur le mĂȘme sujet. Prix 3 fr. et 3 fr. 50 c. par la poste. TraitĂ© des chemins de toute espĂšce, comprenant les grandes routes, les chemins vicinaux, rues et places publiques, arbres, haies, fossĂ©s, alignements, rĂšglements de voirie, i e Ă©dition. 1 vol. in-8°. Prix 7 fr. et 10 fr. par la poste. SupplĂ©ment nu traitĂ© des chemins, contenant un commentaire de la loi du 21 mai'1836, sur les chemins vicinaux, et de nombreuses additions au TraitĂ©. Prix 3 fr. et 4 fr. par la poste. IMPRIMERIE DE PILLET FILS AISÉ, BCE DES GRAXDS-AIGCSTIXS, 5. TRAITÉ DE LA POSSESSION DE LA PROPRIÉTÉ ET DES ACTIONS POSSESSOIIIES ET PÉTITOIRES DEUXIÈME PARTIE DE LA PROPRIÉTÉ ET DES ACTIONS PÉTITOIRES PRÉCÉDÉE DÏ'N SUPPLÉMENT A LA PREMIÈRE PARTIE POSSESSION ET ACTIONS POSSESSOIRES, ET SUIVIE D’UNE TABLE ALPHABÉTIQUE ET RAISONNÉE DES MATIÈRES CONTENUES DANS LES DEUX VOLUMES Par F. X. P. GARNIER Avocat Ă  la Cour impĂ©riale de Paris, ancien magistrat, ancien prĂ©sident du Conseil de l'ordre des avocats au Conseil-d’Etat et a la Cour de cassation, membre de la LĂ©gion d'honneur, de la SociĂ©tĂ© philoterhnique, de l'AcadĂ©mie des sciences, belles-lettres et arts de Clermont-Ferrand, et de plusieurs autres SociĂ©tĂ©s savantes. PARIS CHEZ L'ÉDITEUR, RUE DE TOURNON, AA 1853 A LA 1" PARTIE Dl TRAITÉ DE IA POSSESSION DES ACTIONS POSSESSOIRES ET PÉTITOIHES C’est-Ă -dir9 4 celle qui traite de la possession et des actions possessoires. 32 Avant de nous occuper des actions pĂ©tiloires, nous croyons devoir offrir, dans un appendice, un rĂ©sumĂ© de doctrine sur plusieurs questions importantes que nous avons eu Ă  examiner depuis la publication de la premiĂšre partie de notre travail, et une analyse de toute la jurisprudence, depuis la mĂȘme Ă©poque jusqu’à ce jour. A ce moyen, cette partie de notre TraitĂ© sera, nous l’espĂ©rons du moins, aussi complĂšte et aussi utile que possible. APPENDICE. Page 37, aprĂšs le 3' alinĂ©a , ajoutez ZachariĂŠ et Molitor pensent Ă©galement que l’ancienne dĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre, telle que l’entendaient les lois romaines et notre vieux droit français, n’existe plus aujourd’hui ; qu’elle est en tous points assimilĂ©e aux actions possessoires ordinaires, Ă  la complainte et soumise aux mĂȘmes conditions que ces actions. On peut voir Molitor, de la Possession et des Actions possessoires, ouvrage posthume, de la page 210 Ă  la page 225, oĂč il rapporte textuellement l’opinion de ZachariĂŠ. Au surplus, la jurisprudence actuelle depuis longtemps fixĂ©e dans ce sens, attestĂ©e par de nombreux arrĂȘts de la Cour de cassation, et l’opinion presque unanime des auteurs, ne peuvent plus laisser de doute sur ce point et doivent faire cesser toute controverse. P. 65, aprĂšs le 1" alinĂ©a, ajoutez ce qui suit Depuis l’impression de cette partie de notre ouvrage, il est intervenu trois arrĂȘts de la Cour de cassation qui — 500 — ont entiĂšrement confirmĂ© la jurisprudence des prĂ©cĂ©dentes dĂ©cisions. L’un en date du 22 novembre 1846, Ă©manĂ© de la chambre civile, casse un jugement qui avait refusĂ© d’accueillir une action en rĂ©intĂ©grande, en se fondant sur ce que le demandeur ne justifiait pas d’une possession annale. La Cour a reconnu, que dĂšs qu’il s’agissait d’une action en rĂ©intĂ©grande motivĂ©e sur une voie de fait, la possession existant au moment de cette voie de fait Ă©tait suffisante. Les deux autres arrĂȘts Ă©manĂ©s de la chambre des requĂȘtes, sont des 10 aoĂ»t et 3 mai 1848, et rejettent des pourvois formĂ©s contre des jugements qui avaient accueilli des actions en rĂ©intĂ©grande, fondĂ©es sur possession non annale. Le premier dit, dans l’un de ses motifs, que l’action en rĂ©intĂ©grande peut ĂȘtre intentĂ©e toutes les fois que le dĂ©tenteur d’un immeuble en a Ă©tĂ© dĂ©possĂ©dĂ© par un acte de violence, pourvu cependant que la dĂ©tention ne soit pas elle-mĂȘme le rĂ©sultat d’un fait violent, furtif ou clandestin. Le second dĂ©cide positivement que l’allĂ©gation d’un droit et d’une possession annale antĂ©rieure, de la part de l’auteur de la voie de fait, n’avait pu empĂȘcher l’admission de l’action en rĂ©intĂ©grande fondĂ©e sur la simple possession qu’avait le demandeur au moment oĂč cette voie de fait avait Ă©tĂ© commise. Nous pouvons ajouter Ă  toutes les autoritĂ©s citĂ©es dans notre ouvrage principal et dans cet appendice, l’opinion de Molitor, professeur Ă la facultĂ© de droit de Gand, TraitĂ© de la possession et des actions possessoires, ouvrage publiĂ© en 1852 ; on trouvera, de la page 199 Ă  la page 208, une discussion assez Ă©tendue de la question de rĂ©intĂ©grande. — 301 — L’auteur cite Ă  l’appui de son opinion l’art. 9 de la loi belge du 25 mars JS41, sur la compĂ©tence en matiĂšre civile et la discussion de cet article Ă  la chambre des reprĂ©sentants ; il s’exprime en ces termes Il rĂ©sulte formellement de la discussion Ă  laquelle l’art. 9 de cette loi a donnĂ© lieu, que l’action en rĂ©intĂ©grande n’y est nommĂ©e que pour indiquer que le lĂ©gislateur a entendu conserver cette action avec le caractĂšre que nous lui connaissons. En effet, dans le projet du gouvernement, l’art. 9 de la loi ne faisait aucune mention de la rĂ©intĂ©grande; mais lors de la discussion, Ă  la sĂ©ance du 5 mai 1840, AI. de Garcia fit remarquer qu’il lui paraissait utile de trancher par une disposition lĂ©gislative la controverse qui s’était Ă©levĂ©e sur cette action ; en consĂ©quence, il prĂ©senta un amendement tendant Ă  faire nommer dans la loi l’action en rĂ©intĂ©grande, pour montrer par lĂ  que la loi entendait conserver cette action et y appliquer les principes reconnus ; puis, sur une observation prĂ©sentĂ©e par AI. Leclerq, alors ministre de la justice, pour montrer ce qu’il y avait de peu prĂ©cis dans l’amendement, Al. de Garcia ajouta qu’il voulait que, par son amendement, il fĂ»t reconnu que l’action en rĂ©intĂ©grande Ă©tait non-seulement une action possessoire, mais une action possessoire sui generis; et que, par son insertion dans la loi, la conservation de cette action, complĂštement indĂ©pendante de la possession annale, serait placĂ©e en dehors de toute contestation ; qu’on continuerait donc Ă  y appliquer les principes qui ont existĂ© dans l’ancien droit, et qui rĂ©ellement n’ont pas Ă©tĂ© dĂ©truits. AI. Ilaikeni parla dans le mĂȘme sens, et montra que la loi française du 25 mai 1838 contenait une disposition qui tranche dans le mĂȘme sens cette question — 302 — controversĂ©e; puis l'amendement de M. de Garcia fut adoptĂ© sans autre discussion. » Nous sommes donc, plus que jamais, fondĂ© Ă  persister dans notre opinion sur le maintien par notre lĂ©gislation actuelle de la rĂ©intĂ©grande, avec les caractĂšres et conditions marquĂ©s dans la lĂ©gislation antĂ©rieure ; et nous avons la conviction, que toute controverse doit cesser dans les tribunaux comme parmi les auteurs. Il est Ă©vident que la lutte serait dĂ©sormais inutile et que les tribunaux qui la favoriseraient rendraient un bien mauvais service aux parties en les exposant Ă  des frais considĂ©rables, car la Cour de cassation ne manquerait pas d’annuler leurs dĂ©cisions. P. 103, aprĂšs le 1 er alinĂ©a , ajoutez La chambre des requĂȘtes de la Cour de cassation a rendu, le 1 er aoĂ»t 1848, un arrĂȘt qui semble condamner la doctrine que nous venons de dĂ©velopper Ă  la page prĂ©cĂ©dente. Mais la condamnation est plutĂŽt dans les circonstances de l’espĂšce sur laquelle il est intervenu que dans sa rĂ©daction. En fait, il s’agissait bien de fouilles successivement opĂ©rĂ©es dans un champ, et dont les premiĂšres remontaient Ă  plus d’une annĂ©e avant l’action en complainte; mais la Cour a motivĂ© son arrĂȘt d’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, . et a interprĂ©tĂ© le jugement de maniĂšre Ă  y trouver la dĂ©claration que le trouble n’avait rĂ©ellement existĂ© que par la derniĂšre fouille ; de sorte que c’était lĂ  une apprĂ©ciation de fait quelle ne pouvait reviser. La Cour nous paraĂźt d’ailleurs avoir Ă©tĂ© ici dominĂ©e par la considĂ©ration qu’avait prĂ©sentĂ©e le rapporteur, qu’au fond, la — 503 — complainte avait Ă©tĂ© repoussĂ©e, de sorte que le pourvoi Ă©tait presque sans intĂ©rĂȘt. Quoi qu’il en soit, nous persistons Ă  penser que l’action en complainte doit ĂȘtre intentĂ©e dans l’annĂ©e du premier fait de trouble, Ă  peine de dĂ©chĂ©ance. La loi exige une possession annale, antĂ©rieure au trouble, et une action dans l’annĂ©e de ce mĂȘme trouble. La thĂ©orie des troubles successifs mĂšnerait bien loin. Qu’un particulier exploite journellement une marniĂšre, une carriĂšre, on soutiendra qu’à la fin de l’annĂ©e, depuis le dernier fait, c’est-Ă -dire deux ans aprĂšs le premier, l’action sera encore recevable. Il en pourrait ĂȘtre de mĂȘme pour des bois, des terres, mĂȘme pour des bĂątiments, dont les travaux de rĂ©parations, ou les faits d’occupation, dureront une annĂ©e. Ce serait s’écarter du texte comme de l’esprit de la loi. Que les juges du possessoire aient une certaine latitude pour rechercher les faits constitutifs du trouble, nous le concevons, puisque la loi exige le trouble rĂ©el. Un fait peut annoncer l’intention de troubler sans ĂȘtre une atteinte Ă  la possession ; nous le disons nous-mĂȘme en citant un exemple ; nous en trouvons mĂȘme un nouvel exemple dans deux arrĂȘts des requĂȘtes des 3 et h aoĂ»t 1852, rendus sur les pourvois du sieur Martel contre le sieur de BĂ©thune. Mais, dansl’espĂšce del’arrĂȘtclul cr aoĂ»t, Ă©videmment les premiĂšres fouilles constituaient un trouble Ă  la possession de celui qui prĂ©tendait avoir des droits exclusifs au fonds sur lequel elles avaient eu lieu. P. 267, aprĂšs le 1 er alinĂ©a, ajoutez La Cour de cassation a, par arrĂȘt du 1 h novembre 18Ù9, admis l’action possessoire Ă  raison d’arbres — 504 — abattus par un voisin ; le juge d’appel l’avait repoussĂ©e, en se fondant sur ce que les arbres Ă©taient un objet mobilier, dont la destruction ne pouvait donner lieu qu’à une indemnitĂ© pĂ©cuniaire ; mais la Cour a annulĂ©, par le motif que le demandeur en complainte, en articulant la possession annale des arbres, avait soutenu que le sol sur lequel ils avaient Ă©tĂ© plantĂ©s lui appartenait Ă©galement, et qu’il avait conclu Ă  ce que son adversaire fĂ»t tenu de les remplacer; que, par consĂ©quent, le dĂ©bat Ă©tait bien relatif Ă  un objet immobilier. La Cour n’a pas eu besoin d’examiner la question de savoir si les arbres, abstraction faite du terrain, auraient pu devenir l’objet d’une action possessoire. Nous l’avons traitĂ©e page 264, Ă  laquelle nous renvoyons. P. 284, aprĂšs le 3' alinĂ©a, ajoutez Mais deux arrĂȘts de rejet de la Cour de cassation, chambre civile, en date des 11 avril 1848 et 3 juillet 1849, sont un peu en opposition avec notre doctrine. Ils reconnaissent, comme Ă©tant encore en vigueur, les usages locaux qui obligent celui qui se clĂŽt par un fossĂ© Ă  laisser un certain espace de son terrain entre ce fossĂ© et la propriĂ©tĂ© voisine, et ils accordent l’action possessoire contre le propriĂ©taire qui Ă©tablit son fossĂ© Ă  l’extrĂȘme limite de son fonds, soit parce qu’en agissant ainsi, il expose le fonds voisin Ă  des Ă©boulements et dommages, soit parce qu’il tend Ă  usurper la propriĂ©tĂ© du franc- bord au delĂ  du fossĂ© et qui est censĂ© l’accessoire de ce fossĂ©. Ils dĂ©clarent formellement que le juge de paix est autorisĂ© Ă  prendre en considĂ©ration ces usages et ces circonstances pour apprĂ©cier l’action possessoire. — 503 — Nous n’avions pas dit que celui qui Ă©tablissait un fossĂ© fĂ»t absolument dispensĂ© d’observer une distance. Nous pensions seulement que les usages ou rĂšglements n’étant pas maintenus par le Code, pour Ă©viter sans doute le chaos de l’ancien Ă©tat de choses, et pour Ă©tablir, autant que possible, l’uniformitĂ© de lĂ©gislation, il y avait seulement lieu par le juge de paix de rechercher si les travaux Ă©taient en fait nuisibles ou non nuisibles. AprĂšs y avoir bien rĂ©flĂ©chi, nous ne pouvons nous ranger ii la doctrine consacrĂ©e par ces arrĂȘts, et nous devons persister dans notre opinion nous ne pouvons admettre le maintien des anciens usages ou rĂšglements qui nous ramĂšneraient la divergence, les inconvĂ©nients des anciennes coutumes. P. 291, aprĂšs le 5 e alinĂ©a, ajoutez ce qui suit Par arrĂȘt du 26 novembre 18/i9, la Cour de cassation, chambre civile, a fait l’application de ces principes, en cassant un jugement du Tribunal de Nogent, qui les avait mĂ©connus. Il s’agissait des rives artificielles ou digues de la Seine que l’État avait fait construire de 1785 Ă  1788. La ville de Nogent-sur-Seine ayant intentĂ© action possessoire Ă  l’État, qui avait vendu les herbes excrues sur ces digues, le juge de paix et le tribunal d’appel avaient dĂ©clarĂ© la possession valable, parce que, suivant eux, les digues ou rives artificielles n’étaient par aucnne loi placĂ©es hors du commerce, et Ă©taient consĂ©quemment prescriptibles. La cassation est fondĂ©e sur les motifs suivants PĂ©titoire ou action pĂ©titoire, en latin petitorium, vient de petere, demander, poursuivre, et sous ce rapport on pourrait dire que cette expression convient Ă  toutes les demandes faites en justice, quel qu’en soit l’objet, mobilier ou immobilier, droit incorporel, crĂ©ance d’une somme d’argent, rentes, et comprend mĂȘme l’action possessoire. Mais dans l’usage consacrĂ© par une longue suite de siĂšcles, le mot pĂ©titoire a servi Ă  dĂ©signer le fond du droit, la propriĂ©tĂ© mĂȘme de la chose et l’action au moyen de laquelle on revendique cette propriĂ©tĂ©, par opposition au possessoire qui dans l’origine, c’est-Ă -dire dans le droit ante-Justinien, comme nous l’avons vu p. 3, de la l re partie, n’était considĂ©rĂ© ni comme une demande ni comme une action, et ne donnait pas lieu Ă  un juge- — 5S3 — ment *. Nous devons ajouter que l’expression pĂštitoire, dans sa gĂ©nĂ©ralitĂ©, a Ă©tĂ© appliquĂ©e Ă  la revendication de la propriĂ©tĂ© des choses purement mobiliĂšres, comme Ă  celle des immeubles. Cela se conçoit, les meubles et les immeubles pouvaient ĂȘtre l’objet d’un interdit; et dans notre ancien droit français, les meubles pouvaient ĂȘtre aussi, quoique d’une maniĂšre plus restreinte, l’objet de la complainte. Petere hƓrcditatem, petitio hĂŠreditatis, demander une hĂ©rĂ©ditĂ©, pĂ©tition d’hĂ©rĂ©ditĂ©, c’était lĂ  en effet une action sur le fond mĂȘme du droit de l’hĂ©rĂ©ditĂ©, et tendant Ă  se faire dĂ©livrer les objets qui la composaient. 11 y a au Digeste un titre de hĂŠreditatis petitione et au Code, trois titres de petitione hĂŠreditatis, de petitionibus bonorum sublatis, de plus petitionibus ; au Digeste et au Code, il y a un titre de Rei vindicatione. 12° La loi 62, ff. de judiciis est ainsi conçue Inter liligantes non aliter lis expediri potest quam si alter peti- tor, alter possessor sit esse enim debet qui onera petitoris, sustineat et qui Commodo possessoris fungatur. Au titre UH possidetis, nous lisons loi 1", § 1". Hoc interdictum Uli possidetis de soli possessore scriptum est, quern potiorcm prĂŠtor in soli possessione habebat, et est prohibitorium ad retinendam possessionem. —§ 2. Uu- jus autem intei'dicti proponendi causa hƓc fuit quod sepa- rata esse debet possessio a proprietate ; /ieri etenirn potest, ut alter possessor sit, dominas non sit; alter dominas qui- dem sit, possessor vero non sit fieri potest ut et possessor idem et dominus sit. —§3. Inter litigatores ergo quo - tiens est proprietatis controversia, aut convenit inter li- * In interdicto, possessio; in acticne, proprielas vertilur. L. U, 5 ult. ff y de excep. rei JudicatĂŠ. — 554 — tigatores uter possessor sit, uter petitor, aut non convenu. Si convenit, absolutum est ille possessoris commodo, quem convenit possidere; ille petitoris onere fungetur. Au titre de Rei vindicatione, il est question du jugement pĂ©titoire, Judicium petitorium. Nous lisons encore au g A, titre de Interdictis des Institues de Justinien RetinendĂŠ possessionis causa comparata sunt interdicta, Uti possidetis et Utrubi; cum ab utraque parte de proprietate alicujusrei, controversia sit, et ante quƓralur, uter ex litigatoribus possideat, et uter petere debeat. Namque nisi ante exploratum fuerit, utrius eorum posses- sio sit, non potest petitoria actio institui quia et civilis et naturalis ratio facit, ut alius possideat, et alius a possi- dente petat. Et quia longĂ© Commodius est et potius possidere quam petere. Ideo plerumque et fere semper ingens existit contentio de ipsa possessione. Commodum autern possidenti in eo est, quod etiamsi ejus res non sit, qui possidet, si modo actor non potuerit suam esse probare, remanet in suo loco possessio; propter quam causam, cum obscura sunt utriusque jura, contra petitorem judicari solet. Interdicto Uti possidetis de fundi vel ĂŠdium possessione conlenditur. Dans les plus cĂ©lĂšbres interprĂštes du droit romain, notamment dans Barthole et Cujas, on ne trouve rien autre chose sur l’action pĂ©titoire, si ce n’est quelle est relative Ă  la propriĂ©tĂ©, tandis que l’interdit est en gĂ©nĂ©ral relatif Ă  la possession. On peut voir particuliĂšrement les commentaires sur l’interdit Uti possidetis, sur les titres de Acq. et amitt. possessione, de Rerum divisione, de Rei vin- dicat. VoilĂ  pour le droit romain. — 55o — » 13° Voyons maintenant les auteurs français et Ă©trangers, et commençons par ceux de nos auteurs qui ont Ă©crit avant le Code de procĂ©dure civile. Imbert, Pratique judiciaire, p. h, s’exprime ainsi La matiĂšre et cause civile est ou personnelle ou rĂ©elle, pĂ©titoire ou possessoire. La personnelle procĂšde de contrat ou acte Ă©quipollent Ă  contrat. En la pĂ©titoire est question de la propriĂ©tĂ© et seigneurie de la chose ; en la possĂšssoire, de la possession. Et parce qu’en toutes actions civiles y a presque mĂŽme et semblable style de procĂ©dure, nous les traiterons toutes par un mĂȘme ordre ; fors quand il y aura diffĂ©rence en la procĂ©dure ; car, en ce cas, en chacun lieu propre et particulier nous mettrons la diffĂ©rence. » Et en note En termes de droit, sont mises deux espĂšces d’actions In rem, quĂŠ dicitur vindicatio, et in personam quĂŠ condictio appellatur, L. aclionum gĂ©nĂ©ra 25 * et L. actionib 37. 1. de actionibus ; § sed istĂŠ, §namque, § appellamus, aux institutions de Justinien, liv. Ă , Titre de Act. Combien que plusieurs autres divisions soient mises Ăšs dits lieux. Mais les dĂ©finitions de l’action personnelle ou pĂ©titoire sont prinses de la mesme loy. 25 D. de Act. et du § omnium actionum et § appellamus, Instit., eodem litulo. » Nous lisons dans le mĂȘme ouvrage Pratique judiciaire, Ă  la p. 222, en note. Notez que celui qui agit au pĂ©titoire, possessorem adversarium agnoscit. § omnium Inst, de Act. cui datur actio multo magis exceptio, * Aclionum gĂ©nĂ©ra sunt duo in rem quĂŠ dicilur vindicatio; et in personam quĂŠ condictio appellatur. In rem actio est per quam rem nostram quĂŠ ab alio possidetur, petimus ; et semper adversus eum est qui rem possidet. — 556 — L. vindicantem D. de evict., ainsi qu’il a Ă©tĂ© jugĂ© par arrĂȘt rĂ©citĂ© par Gallus, q. 46, n" 17, et ne doit ĂȘtre suivie la distinction de Jason, m § Ɠquo Inst, de Action. » Enfin, le mĂȘme Imbert, Pratique, p. 443, s’exprime ainsi Mais il y a une matiĂšre que l’on appelle nĂ©gatoire, laquelle, combien qu’elle semble ĂȘtre pĂ©titoire, nĂ©anmoins ne l’est, et celui qui l’intente ne constitue le dĂ©fendeur possesseur ; et la forme d’intenter cette action est Ă  ce qu’il soit dit et dĂ©clarĂ© le dĂ©fendeur n’avoir droit d’aller et venir par tel lieu, etc. Il y a plusieurs autres actions, lesquelles semblent ĂȘtre pĂ©titoires, lesquelles ne le sont. Comme si l’on propose pour avoir payement des arriĂ©- rages de quelque rente, sans conclure Ă  continuation et en ce cas le dĂ©fendeur lors pour raison de la dĂ©nĂ©gation, qui emporte trouble, le demandeur pourra former complainte. » VoilĂ , Ă  peu prĂšs, tout ce que nous trouvons sur les actions pĂ©titoires, dans l’ouvrage trĂšs-Ă©tendu de notre vieil auteur. Nous n’en trouvons pas davantage dans les ouvrages de Masuer et de Itebuffe qui avaient prĂ©cĂ©dĂ© celui d’Imbert, et qui ne se sont pas mis plus en frais que lui sur ce sujet quoiqu’ils aient tous trois traitĂ© des actions possessoires avec plus de soins et de dĂ©veloppements. Duplessis, Coutume de Paris, tome 1 er , des actions, livre 1 er p, 597, s’exprime ainsi Comme toutes choses sont meubles ou immeubles, aussi pour les immeubles y a-t-il premiĂšrement l’action pĂ©titoire pour en revendiquer la propriĂ©tĂ©; secondement, l’action possessoire ou complainte, pour en revendiquer ou conserver la possession. TroisiĂšmement, et, pour les meubles, il y a l’actiou — 557 — de revendication de meubles, qui est aussi bien rĂ©elle que les autres ; il n’y a diffĂ©rence que de nom. La coutume n’a point parlĂ© de l’action pĂ©titoire non plus que de l’action de revendication de meubles. Aussi leur pratique est-elle assez notoire dans l’usage, et tout ce qui s’en observera en passant est que A l’égard de l’action pĂ©titoire, elle ne se juge que sur des titres, si ce n’est qu’il y ait prescription allĂ©guĂ©e, et dure dix, vingt ou trente ans, suivant la distinction articles 113 et 118. » C’est lĂ  tout ce que dit Duplessis de l’action pĂ©titoire, dans deux volumes in-folio. Dumoulin, sur la mĂȘme coutume de Paris, s’exprime en termes analogues. Brodeau et DelauriĂšre, sur la mĂȘme coutume, en disent bien moins encore, puisqu’ils se bornent Ă  poser en principe que le pĂ©titoire ne doit pas ĂȘtre accumulĂ© avec le pos- sessoire, sans nous faire connaĂźtre ce que c’est que le pĂ©titoire. Quant Ă  Domat, il garde le silence le plus absolu sur l’action pĂ©titoire. Nous avouons n’en avoir pu mĂȘme dĂ©couvrir le nom dans tout son ouvrage. Basnage,BĂ©rault,Flaust,Latournerye, commentateurs de la Coutume de Normandie, et Houard, Dictionnaire du droit normand, disent seulement que l’action pĂ©titoire est relative Ă  la propriĂ©tĂ©. Voici tout ce que nous trouvons dans le Commentaire de la coutume d’Auvergne, de Chabrol, T. I" p. 63 Pour rĂ©unir tous les principes sur cette matiĂšre des actions possessoires il reste Ă  observer que la question de propriĂ©tĂ©, qu’on appelle le pĂ©titoire, ne peut ĂȘtre agitĂ©e qu’aprĂšs la dĂ©cision du possessoire et l’exĂ©cution du jugement qui y a fait droit c’est la disposition de l’ordonnance de 1667 ; elle n’a fait que confirmer une maxime — 338 — ancienne ; le possessoire ne serait pas d’un grand avantage au possesseur, si l’on pouvait y joindre le pĂ©titoire. » Coquille, sur la Coutume de Nivernais-, Auroux des Pommiers, sur celle du Bourbonnais; d’ArgentrĂ© sur celle de Bretagne, ChassanĂ© et Davot sur celle de Bourgogne s’expriment Ă  peu prĂšs dans les mĂȘmes termes. Henrys et Bretonnier, dans quatre volumes in-folio, Ă©crivent Ă  peine ce que c’est que l’action possessoire; quant Ă  l’action pĂ©titoire, ils n’en prononcent mĂȘme pas le nom, et s’occupent fort peu de la revendication. Pothier, dans son Introduction gĂ©nĂ©rale aux coutumes, se borne Ă  mentionner l’action pĂ©titoire, mais sans mĂȘme la dĂ©finir; il n’en Ă©crit mĂȘme pas le nom dans son TraitĂ© de la Revendication, dans celui de la Possession et des Actions possessoires. Enfin, dans son TraitĂ© de la ProcĂ©dure civile, Ɠuvre posthume, nous lisons ce qui suit On ne doit point, dans les instances de complainte, cumuler le pĂ©titoire au possessoire ; c’est pourquoi lorsqu’une demande en complainte ou rĂ©intĂ©grande a Ă©tĂ© intentĂ©e, on ne peut pas former de demande au pĂ©titoire, c’est-Ă -dire former aucune contestation sur la propriĂ©tĂ© de l’hĂ©ritage ou du droit dont la possession est contestĂ©e, jusqu’à ce que l’instance sur ce possessoire ait Ă©tĂ© entiĂšrement terminĂ©e. L’auteur ajoute sous le mĂȘme numĂ©ro La partie qui a Ă©tĂ© condamnĂ©e au possessoire, n’est pas recevable Ă  former sa demande au pĂ©titoire, jusqu’à ce qu’elle ait entiĂšrement exĂ©cutĂ© le jugement rendu contre elle au possessoire, etc. » Lange, Boutaric, Theveneau, Bornier, Jousse, parlent bien du pĂ©titoire comme ne devant pas ĂȘtre cumulĂ© avec le possessoire; mais ils ne donnent mĂȘme pas une — 559 — dĂ©finition quelconque, la dĂ©finition la plus brĂšve du pĂ©ti- toire. Rodier se contente de-dire qu’il diffĂšre de la complainte en ce que celle-ci est fondĂ©e sur le fait de la possession, tandis que le pĂ©titoire est relatif Ă  la propriĂ©tĂ© et est fondĂ© sur le droit et les titres. PĂ©titoire dit Pigeau, ProcĂ©dure du ChĂątelet. T. II, p. 113, c’est l’action par laquelle on rĂ©clame un bien dont on se prĂ©tend propriĂ©taire et qui est possĂ©dĂ© par un autre. » 14° Bourjon, Droit commun de la France, T. II, p. 515, s’exprime ainsi Celui qui est propriĂ©taire d’un hĂ©ritage ou autre immeuble, qui se trouve en la possession d’un autre, a l’action pĂ©titoire contre le possesseur, pour en revendiquer la propriĂ©tĂ©; c’est son objet et sa fin cette action a lieu contre celui qui a possĂ©dĂ© avec titre et bonne foi, comme contre l’usurpateur, lorsque son titre est vicieux, quoiqu’il en ait ignorĂ© le vice. De lĂ  il suit que celui qui a acquis un hĂ©ritage, croyant que le vendeur d’icelui en Ă©tait propriĂ©taire, peut ĂȘtre assignĂ©, par le vrai propriĂ©taire, pour ĂȘtre condamnĂ© Ă  se dĂ©sister, Ă  son profit, delĂ  propriĂ©tĂ©, possession et jouissance d’icelui, et que le dernier, justifiant son droit, le premier doit ĂȘtre Ă©vincĂ©, c’est la juste fin de cette action. » Le Dictionnaire de TrĂ©voux, V° PĂ©titoire, s’exprime ainsi Terme de jurisprudence, action par laquelle on demande le fonds ou la propriĂ©tĂ© d’une chose. Poursuite que l’on fait pour retirer la possession d’un bien qui nous appartient, de celui qui en est le possesseur, en justifiant que nous en avons la propriĂ©tĂ©. On le dit mĂȘme de l’instance faite en justice pour ĂȘtre maintenu ou Ă©tabli dans la jouissance d’un bĂ©nĂ©fice. Petitoria, disceptatio. Il — 560 — se dit par opposition au possessoire oĂč il ne s’agit que de la possession. Le pĂ©titoire des bĂ©nĂ©fices appartient aux juges d’église, les sĂ©culiers n’en jugent que la complainte possessoire dans les causes de spoliation. Il faut juger le possessoire avant que de pouvoir agir pour le pĂ©titoire. Action pĂ©titoire, ou au pĂ©titoire. Demande faite en justice pour obtenir la propriĂ©tĂ© d’un hĂ©ritage ; et en matiĂšre bĂ©nĂ©ficiai, demande faite pour ĂȘtre dĂ©clarĂ© titulaire d’un bĂ©nĂ©fice. » PrĂ©vĂŽt de la JannĂšs, dans ses Principes de la jurisprudence française, dit aussi que l’action pĂ©titoire porte sur le fond du droit, Ă  la diffĂ©rence de l’action possessoire, qui n’a pour objet que la possession et ajoute qu’il y a autant d’actions pĂ©titoires que de maniĂšres d’acquĂ©rir la propriĂ©tĂ© ou des droits sur les immeubles. Poullain-Duparc prononce le nom du pĂ©titoire, mais sans mĂȘme le dĂ©finir. FerriĂšre, Dictionnaire de droit et de pratique, V° Action, s’exprime dans les termes suivants Action pĂ©titoire, est celle par laquelle, celui qui a la propriĂ©tĂ© d’un fonds ou qui a un droit rĂ©el sur un hĂ©ritage, agit contre le possesseur d’icelui, Ă  l’effet d’avoir la possession de l’immeuble qui lui appartient, ou d’avoir la jouissance des droits dont l’hĂ©ritage est chargĂ© envers lui. Cette action a donc lieu pour deux diffĂ©rents objets. Le premier pour avoir la possession d’un fonds qui nous appartient, et alors le demandeur conclut Ă  ce que, attendu qu’il est propriĂ©taire d’un tel hĂ©ritage, le dĂ©fendeur qui le possĂšde soit condamnĂ© Ă  se dĂ©sister et dĂ©partir de la possession et occupation dudit hĂ©ritage, soit tenu de le restituer au demandeur et d’en rendre les fruits — 561 — depuis son indue jouissance, avec dommages-intĂ©rĂȘts et dĂ©pens. L’autre objet est d’avoir la jouissance des droits rĂ©els, comme sont le cens et les rentes fonciĂšres dont un hĂ©ritage est chargĂ© ; et en ce cas le demandeur conclut Ă  ce que le possesseur de l’hĂ©ritage qui est chargĂ© du cens ou de la rente fonciĂšre, soit tenu d’en payer au demandeur tant d’annĂ©es d’arrĂ©rages Ă©chues, d’en continuer le payement dans la suite, de donner ses hĂ©ritages par dĂ©claration et d’exhiber ses titres, sinon qu’il ait Ă  dĂ©guerpir. » PĂ©titoire dit l’ancien Denizart V° PĂštitoire du latin pelere , demander est un ternie de Palais, qui signifie l’action par laquelle on demande le fonds ou la propriĂ©tĂ© d’une chose. Il se dit par opposition Ă  possessoire oĂč il ne s’agit que de la possession. » L’action pĂ©titoire, disent les auteurs du nouveau Denizart V e Action, p. 196, est celle par laquelle nous demandons Ă  ĂȘtre dĂ©clarĂ©s propriĂ©taires d’un immeuble ou d’un droit rĂ©el comme une servitude ou droit de cens, une rente fonciĂšre ou de quelque droit universel, tel qu’une succession. » 15° Passons aux auteurs modernes. Par l’action pĂ©titoire, dit Merlin. Repert. V° Action, nous revendiquons la propriĂ©tĂ© d’un fonds ou d’un droit rĂ©el contre le possesseur. » Poncet, des actions, n° 52, s’exprime dans les termes suivants Action pĂ©titoire. C’est la revendication de la propriĂ©tĂ© ; donc elle prend sa source et son principe dans le droit de propriĂ©tĂ© que nous prĂ©tendons avoir sur l’immeuble. 36 — 362 — C’est la revendication d’un immeuble, donc c’est tel immeuble dĂ©signĂ© qui en est l’objet direct. C’est cet immeuble que nous attaquons ; donc nous ne pouvons agir que devant le Tribunal de la situation et contre la personne qui a qualitĂ© pour le dĂ©fendre. N° 55. D’aprĂšs tout ce qui vient d’ĂȘtre dit, nous pouvons dĂ©velopper notre dĂ©finition de l’action pĂ©titoire ainsi qu’il suit C’est l’action par laquelle nous demandons au Tribunal que notre propriĂ©tĂ©, sur un ou plusieurs immeubles dĂ©signĂ©s et situĂ©s dans son arrondissement, soit reconnue, et, qu’en consĂ©quence, le dĂ©fendeur soit condamnĂ© Ă  nous en relĂącher la possession vĂ©ritable ou civile. » Boncenne, ThĂ©orie de la procĂ©dure civile. T. I, p. 52 L’action pĂ©titoire est la revendication delĂ  propriĂ©tĂ© d’un immeuble ou d’un droit rĂ©el sur un immeuble, contre celui qui le possĂšde et qui prĂ©tend aussi en ĂȘtre propriĂ©taire. Il faut bien supposer que le demandeur en ce cas est privĂ© de la possession et que la propriĂ©tĂ© ou le droit lui sont contestĂ©s; autrement l’intĂ©rĂȘt de son action ne se concevrait pas. » Et p. 65 Dans les cas gĂ©nĂ©raux oĂč la possession est utile, l’action possessoire se rĂ©duit aux termes les plus simples lequel des concourrents possĂšde, lequel ne possĂšde pas? L’action pĂ©titoire conduit Ă  cette question lequel est propriĂ©taire? Car celui qui ne possĂšde pas peut ĂȘtre le vĂ©ritable propriĂ©taire. Ici c’est un fait, lĂ  c’est un droit Ă  juger. » Thomines Desmazures, dans son Commentaire du Code de procĂ©dure, rappelle bien la rĂšgle que le demandeur au pĂ©titoire ne sera plus recevable Ă  agir au possessoire ; que le pĂ©titoire et le possessoire ne doivent pas ĂȘtre eu- — 563 — mulĂ©s; mais tout ce qu’il dit de l’action pĂ©titoire c’est qu’elle est relative Ă  la propriĂ©tĂ©. Par l’action pĂ©titoire, disent CarrĂ© et Chauveau sur l’art. 23, Code de procĂ©dure, le propriĂ©taire d’un fonds ou d’un droit rĂ©el attachĂ© au fonds, agit contre celui qui possĂšde l’un ou l’autre Ă  l’effet d’en ĂȘtre dĂ©clarĂ© propriĂ©taire. » Delaporte, Demiau, Pigeau, Berriat Saint-Prix, Dalloz aĂźnĂ©, Armand Dalloz, dans leurs RĂ©pertoires de jurisprudence; Devilleneuve, dans sa Table raisonnĂ©e; Curasson, dans son TraitĂ© de la compĂ©tence des juges de paix , s’expriment Ă  peu prĂšs dans les mĂȘmes termes. Les actions possessoires , est-il dit au Dictionnaire de procĂ©dure de Bioche et Couget, sont uniquement relatives Ă  la possession ; celles qui ont trait Ă  la propriĂ©tĂ©, s’appellent pĂ©titoires. Il y a entre ces deux espĂšces d’actions la mĂȘme diffĂ©rence qu’entre la propriĂ©tĂ© et la possession. » Dictionnaire de l’AcadĂ©mie, V° PĂ©titoire PĂ©titoire, terme de jurisprudence. Il se dit en parlant d’une demande faite en justice, pour ĂȘtre maintenu ou rĂ©tabli dans la propriĂ©tĂ© d’un bien immobilier. Se pourvoir au pĂ©titoire, demande au pĂ©titoire, demandeur, dĂ©fendeur au pĂ©titoire. Gagner son procĂšs au pĂ©titoire, ĂȘtre dĂ©clarĂ© lĂ©gitime propriĂ©taire de l’hĂ©ritage en litige. » 15° 6is La lĂ©gislation de la Grande-Bretagne connaĂźt peu la distinction entre les actions possessoires et pĂ©titoires. Les commentateurs, et notamment Blackstone, ne prononcent pas le nom de celles-ci; quant Ă  ce qui touche Ă  la possession, celui qui y a rĂ©ellement droit et en a Ă©tĂ© dĂ©pouillĂ©, peut en gĂ©nĂ©ral la reprendre, pourvu que ce soit sans violence, ce que Blackstone appelle remĂšde par en- — 561 — trĂ©e ou d’entrĂ©e, et s’il est empĂȘchĂ©, il peut en faire le simulacre le plus prĂšs possible de la propriĂ©tĂ©, avec rĂ©itĂ©ration tous les ans. Dans des cas particuliers, il y a lieu Ă  un writ d’entrĂ©e ou Ă  une assise, actions sur lesquelles la possession seule est agitĂ©e. Mais dans le premier cas, la mesure sur les entrĂ©es peut ĂȘtre inefficace, et dans tous la partie peut avoir intĂ©rĂȘt Ă  prĂ©fĂ©rer la voie du droit commun. Or, tous les juges, tous les tribunaux, sont Ă©galement compĂ©tents pour connaĂźtre des deux catĂ©gories d’actions relatives aux immeubles situĂ©s dans la circonscription de leur ressort. La contestation commence gĂ©nĂ©ralement par un icrit original, sollicitĂ© et obtenu de la Cour de la chancellerie, qui est, comme le dit Blackstone, l’Officina justitiƓ la boutique ou la monnaie de la justice, et qui ordonne au dĂ©fendeur de faire justice au demandeur ou de comparaĂźtre en justice pour rĂ©pondre Ă  sa prĂ©tention. On fait usage du writ lorsque, entre autres choses, il s’agit de la restitution de la possession d’une terre. AprĂšs l’expĂ©dition du writ original, le premier pas que l’on fait dans la poursuite d’une cause s’appelle le procĂšs, comme le seul moyen d’obliger le dĂ©fendeur Ă  comparaĂźtre en justice. Avis est donnĂ© Ă  la partie d’y obĂ©ir. Cet avis est donnĂ© par assignation qui est un avertissement de comparaĂźtre Ă  la Cour sur le rapport du writ original donnĂ© au dĂ©fendeur par deux messagers du scliĂ©- riff, appelĂ©s sergents, soit Ă  la personne, soit Ă  sa maison, soit Ă  sa terre. Cet avertissement se donne sur la terre dans les actions rĂ©elles, en fichant un bĂąton ou baguette blanche sur les terres du dĂ©fendeur. Cette baguette ou bĂąton, chez les peuples du Nord, s’appelle baciilus nunciatorius , et par le Statut 31 d’Elisabeth, — 565 — ch. 3., l’avis doit aussi ĂȘtre publiĂ© un jour de dimanche, devant la porte de l’église paroissiale. NĂ©anmoins dans les petites causes, c’est-Ă -dire dans celles au-dessous de la valeur de 40 shellings, qui s’intentent dans les cours fonciĂšres ou dans celles des comtĂ©s, il n’est pas besoin de writ royal. Les procĂšs comme du temps des Saxons continuent d’y ĂȘtre intentĂ©s par plaintes; c’est-Ă -dire par un mĂ©moire particulier prĂ©sentĂ© en pleine Cour au juge, et par lequel le demandeur expose la cause de l’action. Dans ce cas le juge est tenu de lui rendre justice, sans aucun ordre spĂ©cial du roi. Blackstone, Lois anglaises, liv. 3, cliap. 18 et 19. On trouvera peu ou point de lumiĂšres, sur le sujet de cet ouvrage, dans les autres lĂ©gislations Ă©trangĂšres, ainsi qu’on pourra s’en convaincre en lisant les trĂšs-utiles et trĂšs-bons travaux de deux laborieux et savants magistrats, l’un de notre ami, M. de Saint-Joseph, intitulĂ© Concordance des Çodes civils français et Ă©trangers, l’autre de M. Victor Foucher. Les commentateurs ou interprĂštes des lĂ©gislations Ă©trangĂšres, dont les ouvrages nous ont passĂ© sous les yeux, ne nous offrent Ă©galement que de faibles ressources. 16° Quant Ă  nous, voici notre dĂ©finition de l’action pĂ©- titoire C’est l’action par laquelle nous revendiquons la propriĂ©tĂ© ou la franchise d'un immeuble ou l’exercice d’un droit rĂ©putĂ© immobilier, contre celui qui a la possession de la chose ou qui nous a troublĂ©, soit dans notre propriĂ©tĂ©, soit dans notre possession. Quoique des lois romaines et des auteurs disent que l’action dont il s’agit doit ĂȘtre intentĂ©e contre celui qui a la possession, par celui qui ne l’a pas et qui se prĂ©tend — S66 — propriĂ©taire, parce qu’autrement il est sans intĂ©rĂȘt, la possession devant lui suffire, et que les actions relatives aux servitudes qu’ils appellent nĂ©gatoires quand elles ont pour but de s’en affranchir, et confessoires quand elles tendent Ă  se les faire adjuger, ne puissent pas ĂȘtre rangĂ©es dans la classe des actions possessoires ou pĂ©ti- toires, par la raison qu’elles ne sont pas l’objet d’une vĂ©ritable possession, nous ne pouvons admettre d’aprĂšs les principes de notre droit, ni ces dĂ©cisions, ni les raisons sur lesquelles elles sont fondĂ©es, qui nous paraissent plus subtiles que solides, et reposer sur de vĂ©ritables disputes de mots. Nous pensons que les servitudes comme les immeubles sont l’objet d’une vĂ©ritable possession, avec des caractĂšres diffĂ©rents, sans doute, comme les droits que cette possession indique ; que celui dont la propriĂ©tĂ© ou la possession est contestĂ©e ou troublĂ©e, quoiqu’il n’ait pas Ă©tĂ© rĂ©ellement dĂ©possĂ©dĂ©, peut trĂšs-bien, au lieu d’intenter l’aetion possessoire en cas de simple trouble Ă  sa possession, prĂ©fĂ©rer l’action pĂ©titoire; que quelquefois mĂȘme il n’aura pas le choix comme s’il n’a pas de possession annale; qu’il peut avoir intĂ©rĂȘt Ă  faire cesser les doutes, les dĂ©nĂ©gations Ă©levĂ©s sur son droit de propriĂ©tĂ©. La rĂšgle que nous avons rappelĂ©e comme puisĂ©e dans les lois romaines et les auteurs, ne peut donc ĂȘtre considĂ©rĂ©e que comme un principe gĂ©nĂ©ral, mais non absolu. Molitor, de la Revendication est de notre avis, et donne mĂŽme aux lois romaines une interprĂ©tation conforme Ă  notre sentiment. Sans doute, il arrivera rarement que celui qui, malgrĂ© un trouble peu grave, conservera la jouissance de l'immeuble ou dont la propriĂ©tĂ© — 567 — ne sera l’objet que d’une protestation vague de la part d’un tiers, intentera Ă  celui-ci procĂšs au pĂ©titoire, parce que son intĂ©rĂȘt est un sĂ»r garant qu’il ne fera pas de procĂšs lĂ©gĂšrement et sans nĂ©cessitĂ© ; mais il n’en est pas moins vrai qu’il aura ce droit par exception si l’on veut, et que les tribunaux ne pourraient le repousser qu’autant qu’ils dĂ©couvriraient que son action serait dictĂ©e par une crainte exagĂ©rĂ©e ou par un Ă©vident esprit de tracasserie et de chicane. 17° Ainsi, tandis que l’action possessoire complainte ou rĂ©intĂ©grande est uniquement fondĂ©e sur la possession annale ou instantanĂ©e, et n’a pour rĂ©sultat que d’y faire maintenir ou rĂ©intĂ©grer, ce qui ne constitue qu’une mesure provisoire qui ne termine rien posses- sionis momentanea est utilitas , laisse intacts les droits au fond, les droits dans la chose mĂȘme, la propriĂ©tĂ©, et qui peut ĂȘtre prise contre le propriĂ©taire lui-mĂȘme, l’action pĂ©titoire, au contraire, ne donne lieu qu’à l’examen et Ă  la dĂ©cision de la question de propriĂ©tĂ© ; et le jugement, qui intervient pour dĂ©cider auquel des contendants la propriĂ©tĂ© appartient, fixe la position et les droits respectifs des parties, et termine entre eux tout dĂ©bat relatif Ă  la chose litigieuse. Le demandeur au pĂ©titoire doit donc conclure formellement Ă  ĂȘtre dĂ©clarĂ© propriĂ©taire ou copropriĂ©taire d’un immeuble, d’un droit rĂ©el d’usufruit, d’usage, d’habitation, de servitude, ou Ă  ce que l’immeuble dont il est reconnu propriĂ©taire, soit dĂ©clarĂ© franc de toute charge fonciĂšre ou servitude, et s’il demande en mĂȘme temps Ă  ĂȘtre maintenu ou rĂ©intĂ©grĂ© en possession, c’est seulement comme consĂ©quence de son droit de propriĂ©tĂ©, Ă  la diffĂ©rence du demandeur au possessoire qui conclut Ă  ĂȘtre — 568 — maintenu ou rĂ©intĂ©grĂ© dans sa possession, et abstraction faite de tout droit Ă  la propriĂ©tĂ©. Voy. page 551. 15° Ce qui prĂ©cĂšde fait bien comprendre que nous ne considĂ©rons pas comme pĂ©titoire toute action relative Ă  un immeuble, toute action rĂ©elle immobiliĂšre; et que nous ne lui attribuons ce caractĂšre que lorsque le droit au fond est rĂ©clamĂ©, c’est-Ă -dire lorsqu’il s’agit de la propriĂ©tĂ©. Nous ne pourrions donc ranger dans la classe des actions pĂ©titoires proprement dites, les actions en partage d’une succession dans laquelle il existe des immeubles, lorsqu’il ne s’agit que de l’opĂ©ration matĂ©rielle de la division des biens entre les cohĂ©ritiers dont les droits hĂ©rĂ©ditaires sont reconnus ; une demande en bornage, qui ne soulĂšverait non plus aucun dĂ©bat sur le fond des droits des parties, et qui, par ce motif, serait de la compĂ©tence du juge de paix ; une demande en suppression de plantations comme faites Ă  une distance moindre que celle dĂ©terminĂ©e par les usages ou rĂšglements et par la loi, la demande en Ă©lagage d’arbres, la demande Ă  fin d’observation des rĂšglements ou usages sur les distances Ă  observer ou les prĂ©cautions Ă  prendre relativement Ă  certains ouvrages exĂ©cutĂ©s prĂšs ou contre un mur mitoyen ou non mitoyen art. 87i, Code civil, etc., qui seraient toutes trois comme celle en bornage de la compĂ©tence du juge de paix. Nous nous croyons d’aulant plus fondĂ© Ă  leur refuser le nom d’action pĂ©titoire, que les juges de paix ne connaissent jamais, comme on le sait, des questions de propriĂ©tĂ©; que mĂȘme les art. 5 et 6 de la loi du 25 mai 1838, refusent positivement Ă  ces magistrats la connaissance des matiĂšres dont nous venons de parler, aussitĂŽt que les droits de propriĂ©tĂ© ou de servitude sont contestĂ©s. — 569 — 19° Nous savons bien que quelques personnes, et notamment des praticiens, veulent donner le nom d’action pĂ©titoire Ă  toute action qui touche Ă  un immeuble, ne fĂ»t-ce mĂȘme que pour les rĂ©coltes; nous savons mĂȘme qu’un arrĂȘt de la Cour de cassation, du 11 dĂ©cembre ISM, semble servir de prĂ©texte Ă  ce sentiment; mais nous ne pouvons le partager. Nous croyons qu’on donne trop de portĂ©e Ă  cet arrĂȘt. On en va juger. 20° Une petite riviĂšre traverse les propriĂ©tĂ©s des sieurs Matton et d’Hervilly, situĂ©es en face l’une de l’autre. Le premier, prĂ©tendant que celui-ci avait fait des travaux qui. constituaient une entreprise sur le cours d’eau, l’assigna en complainte. Le sieur d’Hervilly demanda reconventionnellement que son adversaire fĂ»t condamnĂ© Ă  couper des branches d’arbres, et Ă  dĂ©truire des arbres qui n’étaient pas Ă  la distance prescrite par l’art. 571 du Code civil. Sentence du juge de paix, qui, aprĂšs descente sur les lieux, accueille la demande du sieur Matton et repousse celle reconventionnelle du sieur d’Hervilly. Mais sur l’appel, ce fut tout le contraire; il y eut infirmation complĂšte. La demande principale fut repoussĂ©e, et celle reconventionnelle fut admise. Le Tribunal ordonna la destruction des arbres plantĂ©s Ă  une distance moindre que celle voulue par la loi. Pourvoi en cassation. —Le sieur Matton insiste sur ce que les arbres, ayant Ă©tĂ© plantĂ©s depuis plus d’un an, ne pouvaient faire la matiĂšre que d’une action pĂ©titoiie, qui ne devait pas ĂȘtre exercĂ©e reconventionnellement Ă  une action possessoire que le juge avait mĂȘme repoussĂ©e. ArrĂȘt. — Attendu que la demande reconventionnelle du sieur d’Hervilly, qui tendait Ă  faire condamner le — 570 — demandeur Ă  arracher des arbres plantĂ©s Ă  une distance moindre que celle qui est dĂ©terminĂ©e par la loi, n’a, dans les termes de la cause, soulevĂ© aucune question qui se rattache Ă  une contestation sur la propriĂ©tĂ©; que, d’autre part, lors mĂȘme que cette demande aurait eu un caractĂšre pĂ©titoire , par cela seul quelle Ă©tait de nature Ă  ĂȘtre soumise au juge de paix, elle pouvait ĂȘtre l’objet d’une reconvention, mĂȘme dans un litige engagĂ© au posses- soire; que, par suite, le juge de paix Ă©tait compĂ©tent pour en connaĂźtre; la Cour rejette le pourvoi. » Comme on le voit, l’arrĂȘt est loin de dĂ©clarer que la demande reconventionnelle en suppression d’arbres plantĂ©s Ă  une distance moindre que celle fixĂ©e par les usages et rĂšglements, est une action pĂ©titoire; il y a tout au plus, dans la dĂ©cision de la Cour, une simple supposition, une hypothĂšse. Ce ne serait pas, dans tous les cas, d’aprĂšs la supposition de la Cour, une action pleinement pĂ©titoire; elle y toucherait seulement; elle aurait un caractĂšre pĂ©titoire. L’arrĂȘt n’aurait pu reconnaĂźtre dans cette demande, une vĂ©ritable action pĂ©titoire, sans violer ouvertement les art. 25, 26 et 27 du Code de procĂ©dure, qui prohibent le cumul du pĂ©titoire et du possessoire, veulent qu’ils soient dĂ©cidĂ©s par des juges diffĂ©rents, et dĂ©clarent le juge de paix incompĂ©tent pour connaĂźtre de l’action pĂ©titoire. Il faudrait en dire autant des dommages causĂ©s aux propriĂ©tĂ©s, champs, fruits et rĂ©coltes, par l’exploitation d’un Ă©tablissement industriel, non autorisĂ© ou autorisĂ©, car une semblable action n’entraĂźne aucune discussion sur le fond du droit de propriĂ©tĂ© ou de servitude des immeubles qui sont la cause ou le sujet du dommage. On peut voir sur ce point l’excellent ouvrage que M. Avisse a publiĂ© sur les Ă©tablissements dangereux, insalubres ou incommodes. On ne pourrait non plus considĂ©rer comme pĂ©ti- toire la demande formĂ©e contre le propriĂ©taire d’un Ă©tablissement industriel pour le faire condamner, soit Ă  modifier, soit mĂȘme Ă  dĂ©truire cet Ă©tablissement, en se fondant sur ce qu’il est dangereux pour la salubritĂ© publique, pour la santĂ© des hommes, des animaux, du voisinage, et compromet gravement les rĂ©coltes ou les produits des propriĂ©tĂ©s voisines. Dans une pareille action, en effet, ni la propriĂ©tĂ© du dĂ©fendeur, ni celle du demandeur, prises et considĂ©rĂ©es en elles-mĂȘmes, ne sont l’objet de la contestation. Le dĂ©bat porte exclusivement sur l’usage que le dĂ©fendeur fait de sa propriĂ©tĂ©, et le demandeur, tout en rendant hommage au principe Ă©crit dans la premiĂšre partie de l’art. 5ZiĂ» du Code civil, que la propriĂ©tĂ© est le droit de jouir et disposer des choses de la maniĂšre la plus absolue, se borne Ă  invoquer contre lui la deuxiĂšme disposition de cet article Pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibĂ© par les lois et rĂšglements. » Or, les lois et rĂšglements dĂ©fendent de porter atteinte Ă  la salubritĂ©, Ă  la santĂ© des citoyens et aux produits des propriĂ©tĂ©s d’autrui *. 11 en serait diffĂ©remment, et l’action serait pĂ©titoire, si le demandeur, au premier motif de sa demande, en joignait un autre, tirĂ©, soit de ce que le dĂ©fendeur a bĂąti sur un terrain appartenant au demandeur lui-mĂȘme, soit de ce que le dĂ©fendeur s’était interdit la facultĂ© de cons- * Voyez encore l’ouvrage de M. 4 v > sse , avocat au Conseil-d’État et Ă  la Cour de cassation, sur les Ă©tablissements industriels de toute espĂšce, et les lois et rĂšglements qu’il cite. — 572 — truire sur le sien ; ou si celui-ci, en prĂ©tendant que son Ă©tablissement est seulement incommode, nuisible aux rĂ©coltes, soutenait en outre qu’il rĂ©sulte de conventions arrĂȘtĂ©es entre eux ou ceux qu’ils reprĂ©sentent que le demandeur est tenu de supporter ces charges Ă  titre de servitude. 21“ Concluons donc de tout cela que les actions en partage, en bornage, en suppression d’arbres, de haies trop rapprochĂ©s, en Ă©lagage et rĂ©paration de dommages causĂ©s aux propriĂ©tĂ©s par des Ă©tablissements industriels dans les circonstances que nous avons indiquĂ©es et sans dĂ©bat sur la propriĂ©tĂ© du fonds, ne peuvent ĂȘtre tout au plus appelĂ©es que des actions quasi-pĂ©titoires. 22“ Mais on devrait considĂ©rer comme une action bien rĂ©ellement pĂ©titoire, une demande tendant Ă  obtenir en cas d’enclave, et moyennant indemnitĂ© Ă  fixer, aux termes des art. 582, 583, 684 du Code civil, un passage qu’on n’aurait jamais exercĂ© sur les fonds de ses voisins. Faisons observer que si l’on avait une possession tren- tenaire de ce passage, on aurait acquis le droit de l’exercer par le lieu mĂȘme oĂč il aurait Ă©tĂ© pratiquĂ©, et l’on serait affranchi de toute indemnitĂ©. On pourrait, dans le mĂȘme cas, si l’on Ă©tait troublĂ© dans sa possession, intenter l’action en complainte possessoire. 23“ Il faut encore donner le nom d’action pĂ©titoire, soit Ă  la demande tendant Ă  se faire accorder le droit d’aqueduc prĂ©vu et autorisĂ© par la loi du 29 avril 1845, soit Ă  celle tendant Ă  obtenir la facultĂ© d’appuyer un barrage de prise d’eau sur les fonds voisins, aux termes de la loi du 11 juillet 1847. Nous pouvons mĂȘme Ă©tayer notre opinion d’un arrĂȘt de la Cour de cassation, du 25 aoĂ»t 1852, sur lequel nbus aurons bientĂŽt occasion — 573 — de revenir, et qui, rendu dans l’espĂšce d’une demande Ă  fin d’autorisation d’établir un barrage sur la rive opposĂ©e, qualifie formellement cette demande d’action pĂ©ti— toire. 24° Nous ne terminerons pas ce chapitre sans citer plusieurs exemples, plusieurs dĂ©cisions judiciaires, qui serviront Ă  faire encore mieux comprendre, s’il est possible, le caractĂšre de l’action pĂ©titoire et sa diffĂ©rence avec l’action possessoire. Nous reviendrons d’ailleurs avec plus de dĂ©veloppements sur ce sujet dans le chapitre relatif Ă  la procĂ©dure et au jugement des actions pĂ©titoires. 25° La dĂ©cision qui est relative au fond du droit, soit pour accueillir l’action du demandeur en reconnaissant sa propriĂ©tĂ©, soit en le repoussant par le motif qu’il n’en a pas justifiĂ© ou qu’elle' appartient au dĂ©fendeur, est un jugement au pĂ©titoire. Action en justice de paix par un sieur Debarrois aux sieurs lliquet et Ribouleau, pour ĂȘtre maintenu dans la possession annale d’un bois que ces derniers avaient rĂ©cemment fait couper. Les dĂ©fendeurs ont rĂ©pondu qu’ils s’étaient renfermĂ©s dans les limites du bornage fait entre Debarrois et leur auteur, suivant procĂšs-verbal homologuĂ© par le Tribunal de Sens; que, de plus, deux jugements du mĂȘme Tribunal, en date des 27 avril 1820 et 15 dĂ©cembre 1831, avaient jugĂ© que les bornes Ă©tablies Ă©taient la limite de la propriĂ©tĂ© de Debarrois, dont la possession ne pouvait prĂ©valoir contre ces actes. Sentence du juge de paix qui dĂ©clare l’action mal fondĂ©e. Sur l’appel, jugement du Tribunal de Sens qui con- 574 — firme, attendu que la possession dont se prĂ©vaut le demandeur n’a point les caractĂšres voulus par l’art. 2229, Gode civil, puisque le terrain sur lequel il a fait les ouvrages qui sont l’objet de sa complainte possessoire, a Ă©tĂ© jugĂ© appartenir Ă  ses adversaires. 11 Ă©tait Ă©vident que les juges ne s’étaient occupĂ©s que des titres et de la propriĂ©tĂ©, et avaient nĂ©gligĂ© la possession annale qui pouvait cependant ĂȘtre acquise depuis les jugements. Aussi, par arrĂȘt du 17 mai 1848, la Cour rĂ©gulatrice a-t-elle cassĂ©, en se fondant sur ce que le motif du jugement attaquĂ© n’apprĂ©ciait pas le fait de possession en lui-mĂȘme, mais qu’il le repoussait d’une maniĂšre absolue, et par cela seul qu’il ne pouvait avoir de valeur en regard du droit de propriĂ©tĂ© qui, avant l’existence de ce fait, avait Ă©tĂ© reconnu au profit des dĂ©fendeurs Ă  l’action possessoire; qu’en dĂ©cidant ainsi, le jugement attaquĂ© avait cumulĂ© le pĂ©titoire et le possessoire et ouvertement violĂ© les art. 23 et 25 du Code de procĂ©dure, et l’art. 2229 du Code civil. 26° Nous trouvons un nouvel exemple dans un arrĂȘt de la Cour de cassation, chambre civile, en date du 11 aoĂ»t 1852, cassant un jugement qui, pour repousser une action possessoire relative Ă  l’usurpation d’un terrain, s’était uniquement fondĂ© sur ce que, d’aprĂšs les titres produits par le dĂ©fendeur, en s’emparant de ce terrain, il n’avait fait qu’user de son droit. Voyez d’autres arrĂȘts des 12 avril 1813, 7 aoĂ»t 1833 qui ont cassĂ© des jugements qui, soit pour accueillir la complainte, soit pour la repousser, s’étaient uniquement fondĂ©s sur les titres sans s’occuper de la possession. 27° L'n autre arrĂȘt de la chambre des requĂȘtes, en date du 17 novembre 1847, a dĂ©cidĂ© que l’inexĂ©cution — 575 — d’une convention passĂ©e entre deux propriĂ©taires voisins, au sujet du mode d’exercice d’une servitude, ne pouvait donner lieu qu’à une action pĂ©titoire. 28° Nous avons dit, Impartie, p. 450, que le juge de paix ne pouvait cumuler le possessoire et le pĂ©titoire. Nous en dirons autant du juge ou Tribunal de premiĂšre instance. Il ne pourrait, par deux dĂ©cisions distinctes, constater la possession annale et y maintenir ou rĂ©intĂ©grer l’une des parties, et juger la question de propriĂ©tĂ© en faveur de la mĂŽme partie ou de son adversaire ; il ne pourrait pas davantage rendre une dĂ©cision sĂ©parĂ©e sur la possession annale ou la rĂ©intĂ©grande, en attendant le jugement du fond, ou ne considĂ©rer l’action pĂ©titoire portĂ©e devant lui que comme une action en rĂ©intĂ©grande mal qualifiĂ©e et y statuer. Car les actions possessoires et pĂ©titoires sont des matiĂšres bien diffĂ©rentes, attribuĂ©es Ă  des tribunaux bien diffĂ©rents aussi, et il n’est permis Ă  personne de changer les rĂšgles de compĂ©tence Ă  raison de la matiĂšre, les rĂšgles d’attribution judiciaire * ; la rĂ©intĂ©grande, ou renvoi en possession, pourrait seulement ĂȘtre prononcĂ©e comme une consĂ©quence de la dĂ©claration ou attribution de propriĂ©tĂ© **. Cependant une mesure provisoire, une sorte de sĂ©questre pourrait ĂȘtre prononcĂ©e en faveur de l’une des parties, jusqu’à la dĂ©cision dĂ©finitive sur la question de propriĂ©tĂ©. Nous trouvons un exemple d’une semblable mesure dans l’espĂšce d’un arrĂȘt de la Cour de cassation, du 19 avril 1836, oĂč nous voyons qu’un jugement de premiĂšre instance avait maintenu le dĂ©fendeur dans sa possession, qui n’était ‱ ArrCt de la Cour de cassation, du 16 mars 1841, entre Mulot et Toustain-, Devilleneuve et Carette 1841-1-196; Dalloz et Journal du Palais. " Voyez ci-dessus, page 567. — 570 — pas contestĂ©e, et ordonnĂ© en mĂȘme temps une mesure d’instruction avant faire droit au pĂ©titoire. 29° 11 y a des choses qui ne peuvent jamais donner lieu qu’à l’action pĂ©titoire, Ă  l’exclusion de celle pos- sessoire ; encore est-il vrai, dans ce cas, que la premiĂšre ne peut ĂȘtre que trĂšs-rarement portĂ©e devant les tribunaux avec chance de succĂšs, parce que la question de propriĂ©tĂ©, on peut le dire, est dĂ©cidĂ©e d’avance par l’autoritĂ© administrative. Lorsqu’il s’agit de dĂ©terminer les limites d’un fleuve, ‱d’une riviĂšre navigable ou flottable, de la mer, d’une grande route, et de savoir si un terrain litigieux fait partie du lit, des bords de ce fleuve, de cette riviĂšre, de la mer, du sol de la route ou des hĂ©ritages riverains, des propriĂ©tĂ©s privĂ©es, c’est Ă  l’autoritĂ© administrative Ă  dĂ©cider la question que soulĂšve le dĂ©bat, sauf recours au ministre. On reconnaĂźt bien que les particuliers ont la facultĂ© de porter la question de propriĂ©tĂ© devant les tribunaux, aprĂšs la dĂ©cision rendue par l’autoritĂ© administrative; mais c’est lĂ  plutĂŽt une fiction qu’une rĂ©alitĂ©, un principe qui reste pour ainsi dire Ă  l’état de thĂ©orie, et dont on n’aperçoit guĂšre d’application pratique ; car que reste-t-il Ă  faire en gĂ©nĂ©ral aux tribunaux, en prĂ©sence du principe qui leur dĂ©fend de porter la moindre atteinte aux mesures prises par cette autoritĂ©, qui peut, ainsi que cela rĂ©sulte de la jurisprudence du Conseil-d’État, fixer l’étendue du domaine public, non-seulement pour le prĂ©sent, mais dans le passĂ©, si loin qu’on le fasse remonter *, et en prĂ©sence de la rĂšgle d'inaliĂ©nabilitĂ©, d’imprescriptibilitĂ© du * ArrĂȘts du Conseil-d’État, des 31 mai 1851,3 juillet 1832. Voyez ci- dessus, Appendice, p. 307. — ÂŁ>77 — domaine public? n’est-il pas Ă©vident que l’administration aura, presque toujours par le fait, tranchĂ©, d’ maniĂšre dĂ©finitive, la question de propriĂ©tĂ© en faveur de l’État? NĂ©anmoins, il peut y avoir des circonstances particuliĂšres et assurĂ©ment fort rares, oĂč l’action pĂ©titoire ne sera pas stĂ©rile, comme celle, par exemple, oĂč le demandeur pourra produire des titres de propriĂ©tĂ© d’une date antĂ©rieure Ă  l’édit de 1566, c’est-Ăč-dire remontant Ă  une Ă©poque oĂč le domaine public Ă©tait aliĂ©nable et prescriptible. 37 — 578 — CHAPITRE DEUXIÈME. DES CONDITIONS EXIGÉES POUR INTENTER LES ACTIONS PÉTITOIRES. SOMMAIRE ' 30“ Transition. — Objet du prĂ©sent chapitre. — Cas et conditions auxquels les actions pĂ©titoires peuvent ĂȘtre intentĂ©es. 31° La condition fondamentale est que le demandeur soit propriĂ©taire. 32° Importance de la propriĂ©tĂ©.—Sa cause et ses effets. —Blackstone, Montesquieu, Treilliard, Portalis, Faure, Ballanclie, Thiers, Dalloz aĂźnĂ©, Armand Dalloz, Proudlion, Giraud, Pellat, Code NapolĂ©on. 33° Nous ne sommes pas propriĂ©taires d’hĂ©ritages achetĂ©s par un tiers avec nos deniers. La propriĂ©tĂ© rĂ©vocable peut autoriser l’action pĂ©titoire. 34° Ce qu’on doit rechercher pour intenter l’action pĂ©titoire. 33° Suite. 35° M * Dispositions du Code sur les biens et droits immobiliers. 35 ° ter Dispositions du mĂȘme Code sur les divers modes d’acquisition de la propriĂ©tĂ©. 30° PropriĂ©tĂ© en AlgĂ©rie et aux colonies. 37" Le demandeur au pĂ©titoire, aprĂšs s’ître assurĂ© de son droit de propriĂ©tĂ©, doit examiner si son action est recevable. 38° Suite. Non recevabilitĂ© de l’action pĂ©titoire avant jugement de l’action possessoire, et exĂ©cution complĂšte du jugement rendu sur cette action. — Dans quels cas et contre quelles personnes. 38 » ws Suite. DĂ©veloppements. 39° Suite. ArrĂȘts remarquables de la Cour d’Aix et de la Cour de cassation. 30° Observations sur ces arrĂȘts. 31° Autres applications du principe consacrĂ© par ces arrĂȘts. — 579 — 42° Transition. — Cas oĂč le pĂštitoire a Ă©tĂ© prĂ©cĂ©dĂ© du possessoire, et cas oĂč il n’en a pas Ă©tĂ© prĂ©cĂ©dĂ©. 43° Dans les deux cas, c’est au demandeur Ă  faire preuve de la propriĂ©tĂ© ou du droit qu’il rĂ©clame. —Le dĂ©fendeur reconnu possesseur par le seul fait qu’il y a action pĂštitoire n’a rien Ă  prouver. — Articles du Code civil. 44° Motifs de cette rĂšgle. 43° Citations puisĂ©es dans le droit romain. 36° Citations puisĂ©es dans le droit français; Bourjon, Pothier, Pi- geau et autres auteurs. ‱17° Articles du Code civil touchant la preuve de la propriĂ©tĂ© immobiliĂšre. 48° Preuves et actes Ă  produire par le demandeur. 49° La principale preuve est celle par titres. — Le dĂ©fendeur peut opposer leur nullitĂ©. — Point de prescription contre celui qui possĂšde. — Moyens divers en la forme et au fond. — Le demandeur doit prouver sa propriĂ©tĂ© mĂŽme dans la personne de ses vendeurs ou auteurs tant que la prescription n'est pas acquise. 30° DĂ©bats sur l’interprĂ©tation des titres respectifs. 5t° Cas oĂč le pĂštitoire est facile Ă  juger. — Titre consenti par le dĂ©fendeur. 32° Mais ordinairement, il y a plus de difficultĂ©s. — Actes Ă©manĂ©s de tiers. 33° Suite. Exemple. 54° Suite. Actes sous-seings privĂ©s n’avant pas date certaine. 55° Les actions pĂšlitoires portent en gĂ©nĂ©ral sur des immeubles accessoires dĂ©pendant d’autres fonds, et d’une importance plus ou moins mĂ©diocre. — Comment et par quelle preuve les juges peuvent-ils se dĂ©cider? — Jurisprudence de la Cour de cassation. 36° Cas oĂč il n’y a pas de litres, et oĂč il s’agit d’immeubles plus importants et sĂ©parĂ©s. — Nature des preuves; Boiceau, Danty, Argou, Pothier, Toullier, Merlin, Bonnier, Demanle. 57° Raisons qui doivent porter Ă  maintenir les principes malgrĂ© leur apparente rigueur. 38» Conclusion. 39° Le dernier Ă©tat de la jurisprudence de la Cour de cassation conforme Ă  l’opinion de l’auteur. 00° Suite. Observations. 61° Discussion des arrĂȘts contraires. — 580 — 62» Explication de quelques personnes sur la divergence des arrĂȘts. — RĂ©futation. 63° Les tribunaux pouvant se dĂ©terminer par des prĂ©somptions tempĂ©reront facilement ce que les principes auraient de rigoureux. 64° Les mĂȘmes principes et la mĂȘme solution applicables au dĂ©fendeur. 65° Cas oĂč les deux parties ont une possession Ă©gale. 66° Effet, quant au pĂ©titoire, de la sentence de maintenue en possession des haies, fossĂ©s, murs, constructions et plantations, canaux artificiels, etc. 67° MĂȘme solution relativement aux servitudes et Ă  l’accession. 68° Observations sur les choses du domaine public et les actions pĂšliloires dont elles peuvent ĂȘtre l’objet. 69° Jurisprudence textuelle de la Cour de cassation sur les preuves de la propriĂ©tĂ©. — Premier arrĂȘt. 70° Suite. DeuxiĂšme arrĂȘt. 71° Suite. TroisiĂšme arrĂȘt. 72° Suite. QuatriĂšme arrĂȘt. 30° Nous nous sommes occupĂ©, dans le chapitre prĂ©cĂ©dent, des actions en gĂ©nĂ©ral ; nous avons indiquĂ© leurs diffĂ©rentes espĂšces, puis dĂ©fini les actions pĂ©titoires en particulier, expliquĂ© leur nature, leur cause et leurs effets ; nous allons maintenant rechercher dans quels cas et surtout Ă  quelles conditions ces actions spĂ©ciales peuvent ĂȘtre intentĂ©es. 31° L’action pĂ©titoire Ă©tant la demande delĂ  propriĂ©tĂ©, la condition fondamentale, exigĂ©e de celui qui l’intente, est qu’il soit propriĂ©taire de la chose ou du droit qu’il revendique ou reprĂ©sentant de ce propriĂ©taire. 32° Nous avons dĂ©jĂ  indiquĂ©, n° h du chapitre prĂ©cĂ©dent, l’importance de la propriĂ©tĂ©. Nous devons revenir ici sur ce sujet avec quelques dĂ©veloppements. Il n’y a rien qui affecte si gĂ©nĂ©ralement l’imagina- — S81 tion et qui attache si fort le cƓur de l’homme que la propriĂ©tĂ©. » Blackstone, Lois anglaises, livre 2, chap. 1 er . Le bien public, dit Montesquieu, Esprit des lois, livre 26, chap. 14, est toujours que chacun conserve invariablement la propriĂ©tĂ© que lui donnent les lois civiles. » Il faut, disait le conseiller d’État Treilhard, dans l’exposĂ© des motifs de la loi relative Ă  la distinction des biens, il faut assurer le libre exercice de nos facultĂ©s, nous conserver le fruit de nos travaux et de notre industrie, il faut enfin garantir la propriĂ©tĂ© la propriĂ©tĂ© ! base fondamentale et l’un des plus puissants mobiles de la sociĂ©tĂ©. Qui pourrait, en effet, aspirer Ă  la qualitĂ© d’époux, dĂ©sirer celle de pĂšre, si en prolongeant notre existence au delĂ  du trĂ©pas, nous ne transmettions pas avec elle, les douceurs qui l’ont embellie ou du moins consolĂ©e? » Quelques Ă©crivains, disait M. Portalis, dans l’exposĂ© des motifs sur le titre de la propriĂ©tĂ©, supposent que les biens de la terre ont Ă©tĂ© originairement communs. Cette communautĂ©, dans le sens rigoureux qu’on y attache, n’a jamais existĂ© ni pu exister. MĂ©fions-nous des systĂšmes dans lesquels on ne semble faire de la terre la propriĂ©tĂ© commune de tous que pour se mĂ©nager le prĂ©texte de ne respecter les droits de personne. C’est par notre industrie que nous avons conquis le sol sur lequel nous existons ; c’est par elle que nous avons rendu la terre plus habitable, plus propre Ă  devenir notre demeure. La tĂąche de l’homme Ă©tait, pour ainsi dire, d’achever le grand ouvrage de la crĂ©ation. Or, que deviendraient l’agriculture et les arts sans la propriĂ©tĂ© — 58-2 — fonciĂšre, qui n’est que le droit de possĂ©der avec continuitĂ© la portion de terrain Ă  laquelle nous avons appliquĂ© nos pĂ©nibles travaux et nos justes espĂ©rances? En un mot, c’est la propriĂ©tĂ© qui a fondĂ© les sociĂ©tĂ©s humaines; c’est elle qui a vivifiĂ©, Ă©tendu, agrandi notre propre existence; c’estpar elle que l’industrie de l’homme, cet esprit de mouvement et de vie qui anime tout, a Ă©tĂ© portĂ© sur les eaux et a fait Ă©clore, sous les divers climats, tous les genres de richesse et de puissance. Loin que la division des patrimoines ait pu dĂ©truire la justice et la morale, c’est au contraire la propriĂ©tĂ©, reconnue et constatĂ©e par cette division, qui a dĂ©veloppĂ© et affermi les premiĂšres rĂšgles de la morale et de la justice. Car, pour rendre Ă  chacun le sien, il faut que chacun puisse avoir quelque chose. » u II est certain, disait le tribun Faure, dans son rapport au Tribunat sur la loi relative Ă  la propriĂ©tĂ©, que la propriĂ©tĂ© est la base de tout Ă©difice politique; qu’une des premiĂšres conditions du pacte social est de protĂ©ger et de maintenir la propriĂ©tĂ© ; que tout ce qui tient Ă  cet objet est de la plus grande influence sur le sort des peuples, et enfin que plus les lois sur la propriĂ©tĂ© sont justes et sages, plus l’État est florissant et heureux. » La propriĂ©tĂ©, dit Ballanche, a une source divine. On peut voir aussi ce que disent, Ă  ce sujet, M. Ch. Giraud dans ses Recherches sur la propriĂ©tĂ© chez les Grecs et les Romains; M. Pellat, de la PropriĂ©tĂ© en droit romain, M. Peinante, Cours de Code civil, et M. Thiers qui a publiĂ© vers la fin de 1848 un ouvrage trĂšs-remarquable sur la propriĂ©tĂ©, dont nous citerons quelques passages. La propriĂ©tĂ©, dit M. Thiers, est un droit, un droit sacrĂ©, comme la libertĂ© d’aller, de venir, de penser et d’écrire; elle est aussi indispensable Ă  l’existence de l’homme que la libertĂ© elle-mĂȘme. La propriĂ©tĂ© est un fait constant, universel, de tous les temps et de tous les pays sans exception, croissant et non dĂ©croissant; il est le plus respectable, le plus fĂ©cond de tous, le plus digne d’ĂȘtre appelĂ© un droit; car c’est par lui que Dieu a civilisĂ© le monde et menĂ© l’homme du dĂ©sert h la citĂ©, de la cruautĂ© Ă  la douceur, de l’ignorance au savoir, de la barbarie Ă  la civilisation. Le travail est le vrai fondement de la propriĂ©tĂ©. L’ardeur au travail vient en grande partie de la facultĂ© de transmettre la propriĂ©tĂ©. La propriĂ©tĂ© n’est complĂšte que par la facultĂ© de la transmettre Ă  titre onĂ©reux ou gratuit, Ă  titre de donation ou d’hĂ©rĂ©ditĂ©. Sans la propriĂ©tĂ© mobiliĂšre, il n’y aurait pas mĂȘme de sociĂ©tĂ©; sans la propriĂ©tĂ© immobiliĂšre, il n’y aurait pas de civilisation. La sociĂ©tĂ©, les lois doivent garantir et protĂ©ger la propriĂ©tĂ©, en assurer la libre possession et la libre transmission. » Le droit de propriĂ©tĂ©, dit Proudhon, TraitĂ© du domaine public, n° 42 , doit ĂȘtre considĂ©rĂ© comme la base de la sociĂ©tĂ©, le fondement de la civilisation et le plus ferme appui de toutes nos institutions politiques, puisque c’est par rapport Ă  lui que la sociĂ©tĂ© a reçu son organisation, et qu’on ne pourrait cesser de le respecter, sans tomber de suite dans l’anarchie et le chaos de toutes les passions humaines *. » ‱ Comme on le voit, les doctrines du professeur de Dijon diffĂšrent totalement de celles de son homonyme, avec lequel il ne doit pas ĂȘtre confondu. — 584 — La propriĂ©tĂ© est l’Ɠuvre de la sociĂ©tĂ© constituĂ©e, l’expression des besoins de stabilitĂ© que la civilisation dĂ©veloppe; elle est l’élĂ©ment le plus vivant, le plus essentiel de toute sociĂ©tĂ©. On ne peut espĂ©rer ni ordre ni prospĂ©ritĂ© lĂ  oĂč elle n’est pas protĂ©gĂ©e. » Dalloz aĂźnĂ©, Armand Dalloz, Dictionnaires , V° PropriĂ©tĂ©. La propriĂ©tĂ© est le fruit du travail, de l’économie, de la bonne conduite; l’oisivetĂ© est au contraire la mĂšre de tous les vices, et les vices enfantent les crimes. Les particuliers, dit l’art. 537 du Code NapolĂ©on, ont la libre disposition des biens qui leur appartiennent, sous les modifications Ă©tablies par les lois. La propriĂ©tĂ©, d’aprĂšs l’art, 544, est le droit de jouir et disposer des choses de la maniĂšre la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibĂ© par les lois ou par les rĂšglements. » 33° On n’est pas propriĂ©taire d’une chose, et l’on n’a pas droit de la revendiquer, par cela seul quelle a Ă©tĂ© achetĂ©e avec des deniers qui nous appartiennent lorsque le contrat d’acquisition est passĂ© non pas en notre nom, mais au nom et en faveur de celui qui Ă©tait dĂ©positaire de nos deniers. Nous avons seulement action contre ce dernier, en restitution des deniers et mĂȘme en payement de dommages-intĂ©rĂȘts, s’il n’a pas accompli la mission que nous lui avions donnĂ©e. Loi 6, c. de llei vind. Pothier, Molitor; arrĂȘt du Parlement de Paris, du 7 mai 1782, Merlin, Rep. V° Revendication. Pellat, p. 424. Ce dernier auteur cite trois exceptions en faveur 1“ du militaire; 2° du pupille; 3° du conjoint qui, admises par le droit romain, ne le sont pas chez nous. Les art. 1435 et 1553 du Code civil ne sont pas contraires Ă  notre solution; car ils supposent l’un et l’autre — 585 — que le mari a dĂ©clarĂ© acquĂ©rir des deniers de la femme pour servir d’emploi ou de remploi, et que l’acquisition a Ă©tĂ© acceptĂ©e par elle. Une propriĂ©tĂ© imparfaite, temporaire, rĂ©soluble, peut autoriser l’action pĂ©titoire, tant que l’évĂ©nement qui doit faire cesser cette propriĂ©tĂ© n’est pas arrivĂ©. Ainsi, qu’un immeuble soit grevĂ© de substitution, ait Ă©tĂ© acquis Ă  rĂ©mĂ©rĂ© ou doive ĂȘtre restituĂ© en cas de non payement du prix Ă  un terme plus ou moins Ă©loignĂ© accordĂ© par le vendeur ; dans ces diverses hypothĂšses ou autres semblables, les juges ne pourraient refuser d’accueillir l’action. Loi 66, ff. de Iiei vind. Pothier, Molitor, Pellat. Mais les substituĂ©s ou les vendeurs ne pourraient, avant l’évĂ©nement, exercer cette action, puisque jusque- lĂ  ils n’auraient aucun droit de propriĂ©tĂ©. Le nu-propriĂ©taire, l’usufruitier, celui qui aurait droit d’usage, d’habitation, l’emphytĂ©ote, l’engagiste, l’an- tichrĂ©siste pourraient aussi intenter cette action, dans la mesure de leurs droits et de leurs intĂ©rĂȘts. Lorsque la chose a pĂ©ri en partie, le droit de propriĂ©tĂ© ne subsistant pas moins sur la portion qui en reste, quelque minime quelle soit, cette portion peut ĂȘtre l’objet d’une action pĂ©titoire, sauf Ă  y joindre, s’il y a lieu, toute demande en indemnitĂ© et dommages-intĂ©rĂȘts. 34° Celui qui veut intenter l’action pĂ©titoire doit donc commencer par bien examiner et s’assurer s’il peut prouver qu’il est propriĂ©taire de l’immeuble ou du droit foncier qu’il veut rĂ©clamer en justice. Son attention doit porter sur quatre points essentiels 1° S’agit-il d’un immeuble? 2° En a-t-il la propriĂ©tĂ©? 3“ Son action est-elle recevable? 4° Son action est-elle fondĂ©e? ou, en d’autres termes, peut-il fournir la preuve de sa propriĂ©tĂ©? A vrai — 586 — dire, le deuxiĂšme et le dernier se confondent en un seul. 35° Avant de nous occuper de la recevabilitĂ© de l’action et de la preuve de la propriĂ©tĂ©, reproduisons les dispositions du Code civil sur la distinction des biens et sur les divers modes d’acquĂ©rir la propriĂ©tĂ©. 35 ° Ms Les immeubles et droits fonciers Ă©tant seuls l’objet des actions pĂ©titoires, il importe de rappeler les articles de loi, qui nous disent quels sont les biens et droits qui ont ce caractĂšre. Art. 517. Les biens sont immeubles, ou par leur nature, ou par leur destination, ou par l’objet auquel ils s’appliquent. Art. 518. Les fonds de terre et les bĂątiments sont immeubles par leur nature. Art. 519. Les moulins Ă  vent ou Ă  eau, fixĂ©s sur piliers, et faisant partie du bĂątiment, sont aussi immeubles par leur nature. Art. 520. Les rĂ©coltes pendantes par les racines et les fruits des arbres non encore recueillis, sont pareillement immeubles, etc., etc. Art. 521. Les coupes ordinaires des bois taillis ou de futaies, mises en coupes rĂ©glĂ©es, ne deviennent meubles qu’au fur et Ă  mesure que les arbres sont abattus. Art. 522. Les animaux que le propriĂ©taire du fonds livre au fermier ou mĂ©tayer pour la culture, estimĂ©s ou non, sont censĂ©s immeubles tant qu’ils demeurent attachĂ©s au fond3 par l’effet de la convention, etc. Art. 523. Les tuyaux servant Ă  la conduite des eaux, dans une maison ou autre hĂ©ritage, sont immeubles et font partie du fonds auquel ils sont attachĂ©s. Art. 52A-525. Objets mobiliers devenus immeubles par destination. Voyez ces articles. — 587 — Art. 526. Sont immeubles par l’objet auquel ils s’appliquent l’usufruit des choses immobiliĂšres, les servitudes ou services fonciers, les actions qui tendent Ă  revendiquer un immeuble. Art. 529. Sont meubles les obligations, les actions ou intĂ©rĂȘts dans les compagnies de finance, de commerce ou d’industrie, etc. Les rentes perpĂ©tuelles ou viagĂšres, soit sur l’État, soit sur des particuliers. Art. 530. Toute rente Ă©tablie Ă  perpĂ©tuitĂ© pour le prix de la vente d’un immeuble, ou comme condition de la cession d’un fonds immobilier, est Ă©galement meuble. Art. 531. Les bateaux, bacs, navires, moulins et bains sur bateaux, et gĂ©nĂ©ralement toutes usines non fixĂ©es par des piliers, et ne faisant point partie de la maison, sont meubles. Art. 532. Les matĂ©riaux provenant de la dĂ©molition d’un Ă©difice, ceux assemblĂ©s pour en construire un nouveau sont meubles jusqu’à ce qu’ils aient Ă©tĂ© employĂ©s dans une construction. 35 “ ltT Nous allons maintenant rapporter les dispositions relatives Ă  la maniĂšre dont la propriĂ©tĂ© peut s’acquĂ©rir. Art. 711. La propriĂ©tĂ© des biens s’acquiert et se transmet, par succession, par donation entre vifs ou testamentaire, et par l’effet des obligations. Art. 712. La propriĂ©tĂ© s’acquiert aussi par accession ou incorporation et par prescription. Art. 713. Les biens qui n’ont pas de maĂźtre, appartiennent Ă  l’État. Art. 714. Il est des choses qui n’appartiennent Ă  personne, et dont l’usage est commun Ă  tous. Art. 538. Les chemins, routes et rues Ă  la charge de 'État, les fleuves et riviĂšres navigables ou flottables, les — 588 — rivages, lais et relais de la mer, les ports, les havres, les rades, et gĂ©nĂ©ralement toutes les parties du territoire français qui ne sont pas susceptibles d’une propriĂ©tĂ© privĂ©e, sont considĂ©rĂ©es comme des dĂ©pendances du domaine public. Art. 539. Tous les biens vacants et sans maĂźtre, et ceux des personnes qui dĂ©cĂšdent sans hĂ©ritiers, ou dont les successions sont abandonnĂ©es, appartiennent au domaine public. Art. 5/i0. Les portes, murs, fossĂ©s, remparts des places de guerre et des forteresses, font aussi partie du domaine public. Art. 5Al. Il en est de mĂŽme des terrains des fortifications et remparts qui ne sont plus places de guerre ; ils appartiennent Ă  l’État, s’ils n’ont Ă©tĂ© valablement aliĂ©nĂ©s , ou si la propriĂ©tĂ© n’en a pas Ă©tĂ© prescrite contre lui. Art. 542. Les biens communaux sont ceux Ă  la propriĂ©tĂ© ou au produit desquels les habitants d’une ou plusieurs communes ont un droit acquis. Art. 543. On peut avoir sur les biens ou un droit de propriĂ©tĂ©, ou un simple droit de jouissance, ou seulement des services fonciers Ă  prĂ©tendre. Art. 546. La propriĂ©tĂ© d’une chose, soit mobiliĂšre, soit immobiliĂšre, donne droit sur tout ce quelle produit et sur ce qui s’y unit accessoirement, soit naturellement, soit artificiellement. Ce droit s’appelle droit d’accession. Art. 549. Le simple possesseur ne fait les fruits siens que dans le cas oĂč il possĂšde de bonne foi ; dans le cas contraire, il est tenu de rendre les produits avec la chose, au propriĂ©taire qui la revendique. Art. 551. Tout ce qui s’unit et s’incorpore Ă  la chose — 389 — appartient au propriĂ©taire suivant les rĂšgles qui seront ci-aprĂšs Ă©tablies. Art. 552. La propriĂ©tĂ© du sol emporte la propriĂ©tĂ© du dessus et du dessous, etc., etc. Art. 553. Toutes constructions, plantations et ouvrages, sur un terrain ou dans l’intĂ©rieur, sont prĂ©sumĂ©s faits par le propriĂ©taire, Ă  ses frais et lui appartenir, si le contraire n’est prouvĂ©; sans prĂ©judice, etc. Voyez, en outre, les art. et 555. Art. 556. Les atterrissements et accroissements qui se forment successivement et imperceptiblement aux fonds riverains d’un fleuve ou d’une riviĂšre, s’appellent alluvion. L’alluvion profite au propriĂ©taire riverain, soit qu’il s’agisse d’un fleuve ou d’une riviĂšre navigable, flottable ou non ; Ă  la charge dans le premier cas lorsque la riviĂšre est navigable ou flottable de laisser le marchepied ou chemin de halage conformĂ©ment aux rĂšglements. Art. 557. Il en est de mĂȘme des relais que forme l’eau courante qui se retire insensiblement de l’une de ses rives en se portant sur l’autre. Le propriĂ©taire de la rive dĂ©couverte profite de l’alluvion, sans que le riverain du cĂŽtĂ© opposĂ© y puisse venir rĂ©clamer le terrain qu’il aperdu. Ce droit n’a pas lieu Ă  l’égard des relais de la mer. Art. 560. Les Ăźles, Ăźlots, atterrissements qui se forment dans le lit des fleuves ou des riviĂšres navigables ou flottables appartiennent Ă  l’État, s’il n’y a titre ou prescription contraire. Art. 561. Les Ăźles et atterrissements qui se forment dans les riviĂšres non navigables et non flottables appartiennent aux propriĂ©taires riverains du cĂŽtĂ© oĂč l’üle s’est formĂ©e si l’üle n’est pas formĂ©e d’un seul cĂŽtĂ©, elle appartient aux propriĂ©taires riverains des deux cĂŽtĂ©s, Ă  — 590 — partir de la ligne qu’on suppose tracĂ©e au milieu de la riviĂšre. Art. 562. Si une riviĂšre ou un fleuve, en se formant un bras nouveau, coupe et embrasse le champ d’un propriĂ©taire riverain et en fait une Ăźle, ce propriĂ©taire conserve la propriĂ©tĂ© de son champ, encore que l’üle se soit formĂ©e dans un fleuve ou dans une riviĂšre navigable ou flottable. Art. 563. Si un fleuve ou une riviĂšre navigable, flottable ou non, se forme un nouveau cours en abandonnant son ancien lit, les propriĂ©taires des fonds nouvellement occupĂ©s prennent, Ă  titre d’indemnitĂ©, l’ancien lit abandonnĂ©. Art. 57S. L’usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la propriĂ©tĂ© comme le propriĂ©taire lui- mĂȘme, mais Ă  la charge d’en conserver la substance. Art. 579. L’usufruit est Ă©tabli par la loi * ou par la volontĂ© de l’homme. Voyez sur les droits de l’usufruitier, depuis l’art. 582 usques et y compris l’art. 599. Art. 625. Les droits d’usage et d’habitation s’établissent et se perdent de la mĂȘme maniĂšre que l’usufruit. Art. 628-629. Ces droits se rĂšglent par le titre qui les Ă©tablit, ou dans le silence du titre par la loi. Voyez art. 630 Ă  636. Art. 639. La servitude dĂ©rive ou de la situation naturelle des lieux, ou des obligations imposĂ©es par la loi, ou des conventions entre les propriĂ©taires. On peut voir le titre du Code NapolĂ©on, relatif aux * L’art. 381 confĂšre aux pĂšre et mĂšre ou au survivant d’eux l’usufruit des biens de leurs enfants jusqu’à dix-huit ans, ou jusqu’à leur Ă©mancipation. L’art. 73i leur confĂšre aussi un usufruit Ă  titre hĂ©rĂ©ditaire. — 591 servitudes, c’est-Ă -dire l’art. 640 jusques et y compris l’art. 710, dont il serait trop long de rapporter ici les nombreuses dispositions. On peut voir aussi les lois spĂ©ciales des 29 avril 1845 et 11 juillet 1847, relatives aux droits de passage des eaux, et d’appui de barrage sur les fonds d’autrui. Nous renvoyons au commentaire que nous avons publiĂ© sur ces deux lois. Art. 723. La loi rĂšgle l’ordre de succĂ©der entre les hĂ©ritiers lĂ©gitimes Ă  leur dĂ©faut, les biens passent aux enfants naturels, ensuite Ă  l’époux survivant, et s’il n’y en a pas, Ă  l’Etat. Art. 724. Les hĂ©ritiers lĂ©gitimes sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du dĂ©funt, sous l’obligation d’acquitter toutes les charges de la succession les enfants naturels, l’époux survivant et l’Etat doivent se faire envoyer en possession par justice dans les formes qui seront dĂ©terminĂ©es. Voyez tout le titre 1 er du livre 3 du Gode civil, pour connaĂźtre les droits des divers hĂ©ritiers, les formes et les effets du partage des biens. Art. 893. On ne pourra disposer de ses biens, Ă  titre gratuit, que par donation entre vifs ou par testament dans les formes ci-aprĂšs Ă©tablies. Art. 894. La donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dĂ©pouille actuellement et irrĂ©vocablement de la chose donnĂ©e en faveur du donataire qui l’accepte. Art. 895. Le testament est un acte par lequel le testateur dispose pour le temps oĂč il n’existera plus de tout ou partie de ses biens, et qu’il peut rĂ©voquer. Voyez tout le titre 2 du livre 3. Art. 1101. Le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s’obligent envers une ou plu- — 592 sieurs autres, Ă  donner, Ă  faire ou Ă  ne pas faire quelque chose. Art. 113 h. Les conventions lĂ©galement formĂ©es tiennent lieu de loi Ă  ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent ĂȘtre rĂ©voquĂ©es que de leur consentement mutuel ou pour des causes que la loi autorise. Elles doivent ĂȘtre exĂ©cutĂ©es de bonne foi. Art. 1165. Les conventions n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes ; elles ne nuisent point au tiers et elles ne lui profitent que dans le cas prĂ©vu par l’art. 1121. Art. 1265. La cession de biens est l’abandon qu’un dĂ©biteur fait de tous ses biens Ă  ses crĂ©anciers lorsqu’il se trouve hors d’état de payer ses dettes. Art. 1266. La cession de biens est volontaire ou judiciaire. Art. 1376. Celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dĂ», s’oblige Ă  le restituer Ă  celui de qui il l’a indĂ»ment reçu. Art. 1379. Si la chose indĂ»ment reçue est un immeuble ou un meuble corporel, celui qui l’a reçue s’oblige Ă  la restituer en nature, si elle existe, ou sa valeur si elle est pĂ©rie ou dĂ©tĂ©riorĂ©e par sa faute ; il est mĂȘme garant de sa perte par cas fortuit, s’il l’a reçue de mauvaise foi. Art. 1380. Si celui qui a reçu de bonne foi a vendu la chose, il ne doit restituer que le prix de la vente. Art. 1582. La vente est une convention par laquelle l’un s’oblige Ă  livrer une chose, et l’autre Ă  la payer. Elle peut ĂȘtre faite par acte authentique ou sous-seing privĂ©. Art. 1583. Elle est parfaite entre les parties, et la propriĂ©tĂ© est acquise de droit Ă  l’acheteur Ă 'l’égard du ven- — 593 — deur, dĂšs qu’on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’ait pas encore Ă©tĂ© livrĂ©e ni le prix payĂ©. Art. 1588. La vente faite Ă  l’essai est toujours prĂ©sumĂ©e faite sous une condition suspensive. Art. 1589. La promesse de vente vaut vente, lorsqu’il y a consentement rĂ©ciproque des deux parties. Art. 1590. Si la promesse de vendre a Ă©tĂ© faite avec des arrhes, chacun des contractants est maĂźtre de s’en dĂ©partir ; Celui qui les a donnĂ©es, en les perdant, et celui qui les a reçues, en restituant le double. Art. 1598. Tout ce qui est dans le commerce peut ĂȘtre vendu, lorsque des lois particuliĂšres n’en ont pas prohibĂ© l’aliĂ©nation. Art. 1599. La vente de la chose d’autrui est nulle ; elle peut donner lieu Ă  des dommages-intĂ©rĂȘts lorsque l’acheteur a ignorĂ© que la chose fĂ»t Ă  autrui. Art. 1600. On ne peut vendre la succession d’une personne vivante, mĂȘme de son consentement. Art. 1601. Si au moment de la vente, la chose vendue Ă©tait pĂ©rie en totalitĂ©, la vente serait nulle. Si une partie seulement de la chose est pĂ©rie, il est au choix de l’acquĂ©reur d’abandonner la vente, ou de demander la partie conservĂ©e, en faisant dĂ©terminer le prix par la ventilation. Art. 1602. Le vendeur est tenu d’expliquer clairement ce Ă  quoi il s’oblige. Tout pacte obscur ou ambigu s’interprĂȘte contre le vendeur. Art. 1614. La chose doit ĂȘtre dĂ©livrĂ©e en l’état oĂč elle se trouve au moment de la vente. Depuis ce jour, tous les fruits appartiennent Ă  l’acquĂ©reur. Art. 1615. L’obligation de dĂ©livrer la chose comprend 38 — 594 — ses accessoires et tout ce qui a Ă©tĂ© destinĂ© Ă  son usage perpĂ©tuel. Art. 1702. L’échange est un contrat par lequel les parties se donnent respectivement une chose pour une autre. Art. 1703. L’échange s’opĂšre par le seul consentement de la mĂȘme maniĂšre que la vente. Nota. La propriĂ©tĂ© peut aussi rĂ©sulter d’un contrat de sociĂ©tĂ©. Voyez le titre 9 du livre 3. Art. 2044. La transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation nĂ©e ou prĂ©viennent une contestation Ă  naĂźtre. Ce contrat doit ĂȘtre rĂ©digĂ© par Ă©crit. Art. 2052. Les transactions ont entre les parties l’autoritĂ© de la chose jugĂ©e en dernier ressort. Elles ne peuvent ĂȘtre attaquĂ©es pour cause d’erreur de droit, ni pour cause de lĂ©sion. Art. 2219. La prescription est un moyen d’acquĂ©rir ou de se libĂ©rer par un certain laps de temps et sous les conditions dĂ©terminĂ©es par la loi. Art. 2226. On ne peut prescrire le domaine des choses qui ne sont point dans le commerce. Art. 2227. L’État, les Ă©tablissements publics et les communes sont soumis aux mĂȘmes prescriptions que les particuliers, et peuvent Ă©galement les opposer. Art. 2262. Toutes les actions, tant rĂ©elles que personnelles, sont prescrites par trente ans, sans que celui qui allĂšgue cette prescription soit obligĂ© d’en rapporter un titre ou qu’on puisse lui opposer l’exception dĂ©duite de la mauvaise foi. Art. 2265. Celui qui acquiert de bonne foi, et par juste titre, un immeuble, en prescrit la propriĂ©tĂ© par dix — 595 — ans, si le vĂ©ritable propriĂ©taire habite dans le ressort de la Cour impĂ©riale dans l’étendue de laquelle l’immeuble est situĂ© ; et par vingt ans, s’il est domiciliĂ© hors dudit ressort. Art. 2266. Si le vĂ©ritable propriĂ©taire a eu son domicile en diffĂ©rents temps, dans le ressort et hors du ressort, il faut pour complĂ©ter la prescription ajouter Ă  ce qui manque aux dix ans de prĂ©sence, un nombre d’annĂ©es d’absence double de celui qui manque pour complĂ©ter les dix ans de prĂ©sence. Art. 2267. Le titre nul par dĂ©faut de forme ne peut servir de base Ă  la prescription. Art. 717. du Code de procĂ©dure civile, titre de la saisie immobiliĂšre l’adjudication ne transmet Ă  l’adjudicataire d’autres droits Ă  la propriĂ©tĂ© que ceux appartenant au saisi. Voyez le surplus de cet article, relatif Ă  la demande en rĂ©solution de la vente pour dĂ©faut de payement du prix. 36° Les dispositions qui prĂ©cĂšdent ne sont qu’en partie applicables Ă  l’AlgĂ©rie. La propriĂ©tĂ©, dans cette contrĂ©e, a Ă©tĂ© depuis la conquĂȘte qui a eu lieu en 1830, dans un vĂ©ritable Ă©tat d’incertitude et de confusion. La conquĂȘte avait rendu le gouvernement français propriĂ©taire du territoire ; mais des exceptions avaient Ă©tĂ© faites en faveur des particuliers indigĂšnes qui Ă©taient restĂ©s paisibles. Des proclamations de3 chefs militaires avaient promis que les personnes et les propriĂ©tĂ©s seraient respectĂ©es. Des ordres du jour, des arrĂȘtĂ©s rĂšglementaires des diffĂ©rents gouverneurs, des ordonnances royales, notamment celles des 1" octobre 1844, 31 octobre 1845, et 21 juillet 1846, avaient consacrĂ© une 596 — foule de dispositions, de mesures qui, ne pouvant ĂȘtre que provisoires, augmentaient encore les difficultĂ©s et les inquiĂ©tudes et paralysaient la propriĂ©tĂ©. L’AlgĂ©rie est un pays magnifique. Le climat y est fort doux, et les terres sont riches et trĂšs-productives. Il avait trop d’importance pour ne pas provoquer la sollicitude du lĂ©gislateur. La constitution du 4 novembre 1848 portait, art. 109 Le territoire de l’AlgĂ©rie et des colonies est dĂ©clarĂ© territoire français, et sera rĂ©gi par des lois particuliĂšres, jusqu’à ce qu’une loi spĂ©ciale les place sous le rĂ©gime de la prĂ©sente constitution. » Le 16 juin 1851, il est intervenu une loi sur la constitution de la propriĂ©tĂ© en AlgĂ©rie. Cette loi, en 23 articles, est beaucoup trop Ă©tendue pour trouver place ici en entier. Nous dirons seulement qu’elle renferme des dispositions spĂ©ciales et exceptionnelles ; qu’elle renvoie en partie au droit musulman que nous nous dispenserons de reproduire, et rend enfin applicables, quelques- unes des lois ou des dispositions qui rĂ©gissent la mĂ©tropole. La loi est composĂ©e de cinq titres 1° du domaine national ; 2° du domaine dĂ©partemental et du domaine communal; 3° de la propriĂ©tĂ© privĂ©e; 4° de l’expropriation et de l’occupation temporaire pour cause d’utilitĂ© publique ; 5° dispositions gĂ©nĂ©rales. Nous rapporterons quelques dispositions relatives Ă  la propriĂ©tĂ© privĂ©e. Art. 10. La propriĂ©tĂ© est inviolable, sans distinction, entre les possesseurs indigĂšnes et les possesseurs français ou autres. Art. 11. Sont reconnus tels qu’ils existaient au moment de la conquĂȘte, ou tels qu’ils ont Ă©tĂ© maintenus, — 597 — rĂ©glĂ©s ou constituĂ©s postĂ©rieurement par le gouvernement français, les droits de propriĂ©tĂ© et les droits de jouissance appartenant aux particuliers, aux tribus et aux fractions de tribus. Art. 12. Sont validĂ©es vis-Ă -vis de l’État les acquisitions d’immeubles en territoire civil, faites plus de deux annĂ©es avant la promulgation de la prĂ©sente loi, et Ă  l’égard desquelles aucune action en revendication n’a Ă©tĂ© intentĂ©e par le domaine, etc. Art. 1 4. Chacun a le droit de jouir et de disposer de sa propriĂ©tĂ© de la maniĂšre la plus absolue, en se conformant Ă  la loi. NĂ©anmoins, aucun droit de propriĂ©tĂ© ou de jouissance portant sur le sol du territoire d’une tribu ne pourra ĂȘtre aliĂ©nĂ© au prolit de personnes Ă©trangĂšres Ă  la tribu, etc. Art. 15. Sont nulles de plein droit, mĂȘme entre les parties contractantes, toutes aliĂ©nations ou acquisitions faites contrairement Ă  la prohibition portĂ©e au § 2 de l’article prĂ©cĂ©dent, etc. Art. 16. Les transmissions de biens de musulman Ă  musulman continueront Ă  ĂȘtre rĂ©gies par la loi musulmane. Entre toutes autres personnes, elles seront rĂ©gies par le Code civil. Art. 22. Continueront Ă  ĂȘtre exĂ©cutĂ©es 1° Les dispositions de l’ordonnance du 21 juillet 1846, relatives Ă  la vĂ©rification des titres de propriĂ©tĂ© jusqu’à l’achĂšvement des opĂ©rations actuellement commencĂ©es; 2° L’ordonnance du 31 octobre 1845, relative au sĂ©questre des biens appartenant Ă  des indigĂšnes, jusqu’à ce qu’une loi en ait autrement ordonnĂ©. Du reste, nous ferons observer, en terminant sur ce point, que la lĂ©gislation de la mĂ©tropole constitue le droit — 598 — commun, applicable toutes les fois qu’il n’existe pas de lois contraires. Les colonies ont toujours Ă©tĂ© soumises Ă  un rĂ©gime Ă  part ; elles ont une organisation, une administration particuliĂšre et sont rĂ©gies par des lois civiles ou criminelles spĂ©ciales. La Charte de 1814, les Constitutions de 1830, de 1848, celles de 1852, le disent expressĂ©ment. Un sĂ©- natus-consulte doit prochainement rĂ©gler la Constitution des colonies. Les lois de la mĂ©tropole constituent le droit des colonies lorsqu’elles y ont Ă©tĂ© promulguĂ©es ou exĂ©cutĂ©es depuis longtemps. On peut voir les lois des 24 avril 1833 et 18 juillet 1845, et les autres lois, dĂ©crets, ordonnances royales, citĂ©s en note sur la premiĂšre de ces lois, dans la collection de MM. Devilleneuve et Carette, t. II, p. 64, et dans les rĂ©pertoires de jurisprudence de MM. Dalloz aĂźnĂ© et Armand Dalloz, V" Colonies. Nous ne reproduirons pas ici les dispositions lĂ©gislatives existantes qui peuvent ĂȘtre prochainement modifiĂ©es; on pourra en prendre connaissance dans les recueils que nous venons de citer, dans ceux plus anciens de MM. Petit, Durand-Molard et Moreau de Saint-MĂ©ry et dans le Bulletin des lois. Nous ferons seulement remarquer en passant que les esclaves de la Martinique, de la Guadeloupe, de la Guyane, de l’üle Bourbon et de leurs dĂ©pendances, peuvent acquĂ©rir et transmettre les propriĂ©tĂ©s mobiliĂšres et immobiliĂšres, par tous les moyens que notre Code civil autorise, avec cette restriction cependant qu’ils sont assimilĂ©s aux mineurs Ă©mancipĂ©s, sous la curatelle de leurs maĂźtres ou de toutes autres personnes nommĂ©es par l’autoritĂ© judiciaire. Art. 4 de la loi du 18 juillet 1845. — 599 — 37° Celui qui veut intenter l’action pĂ©titoire, aprĂšs s’ĂȘtre assurĂ© de son droit de propriĂ©tĂ©, doit examiner si son action est recevable. Or, deux cas peuvent se prĂ©senter 38° Ou l'action pĂ©titoire a Ă©tĂ© prĂ©cĂ©dĂ©e d’une action possessoire ou elle n’en a pas Ă©tĂ© prĂ©cĂ©dĂ©e. Dans le premier cas, il faut sous-distinguer. Tant qu’il n’est pas intervenu jugement, l’action pĂ©titoire est non recevable de la part du dĂ©fendeur. Le demandeur lui mĂȘme serait non recevable Ă  l’intenter puisqu’il est dĂ©fendu de cumuler le possessoire et le pĂ©titoire, ce qui s’entend de l’existence simultanĂ©e des deux actions, soit devant le mĂȘme juge, soit devant des juges diffĂ©rents; mais il pourrait, en se dĂ©sistant de son action possessoire et en payant tous les frais occasionnĂ©s par cette action, se pourvoir au pĂ©titoire. 11 se trouverait dans la mĂȘme position que s’il n’avait pas agitĂ© le possessoire ou s’il y avait succombĂ©. Ce dĂ©sistement profiterait bien entendu au dĂ©fendeur qui pourrait Ă©galement se pourvoir au pĂ©titoire. S’il est intervenu un jugement dĂ©finitif sur le possessoire, l’action pĂ©titoire est encore non recevable aprĂšs ce jugement, tant qu’il n’a pas reçu son entiĂšre exĂ©cution de la part du dĂ©fendeur qui a Ă©tĂ© condamnĂ© ; car le demandeur qui aurait succombĂ© n’est pas frappĂ© par la loi de la mĂȘme prohibition. L’action pĂ©titoire peut mĂȘme ĂȘtre intentĂ©e par le demandeur ou le dĂ©fendeur qui a rĂ©ussi au possessoire. Le premier a pu vouloir obtenir une dĂ©cision prompte et peu coĂ»teuse qui le maintĂźnt ou le rĂ©intĂ©grĂąt dans sa possession, et il peut avoir intĂ©rĂȘt Ă  faire dĂ©cider la question de propriĂ©tĂ© pour Ă©viter la dĂ©prĂ©ciation ou les entraves Ă  la disposition libre et avantageuse — 600 — occasionnĂ©es par les doutes rĂ©pandus sur sa propriĂ©tĂ©, ou pour obvier au dĂ©pĂ©rissement des preuves, Ă  la privation de tĂ©moins fort ĂągĂ©s, ou pour obtenir des restitutions de fruits, des indemnitĂ©s de dĂ©gradations que le juge de paix n’aurait pu lui accorder. 38° h* Nous avons dĂ©jĂ  dit en traitant des actions pos- sessoires, I re part., p. 48S, qu’aux termes de l’art. 27 du Code de procĂ©dure civile, le dĂ©fendeur au possessoire ne pouvait se pourvoir au pĂ©titoire qu’aprĂšs l’exĂ©cution pleine et entiĂšre de toutes les condamnations principales et accessoires prononcĂ©es contre lui par le jugement rendu au possessoire, c’est-Ă -dire aprĂšs le payement des dommages-intĂ©rĂȘts et dĂ©pens, le rĂ©tablissement des lieux dans leur ancien Ă©tat ou la remise de la chose litigieuse en la possession de son adversaire. L’observation rigoureuse de cette disposition est d’une haute gravitĂ©, d’une extrĂȘme importance. Si les tribunaux n’y tenaient pas la main, les actions possessoires n’atteindraient pas leur but et seraient sans utilitĂ©. Les usurpateurs et les gens violents Ă©chapperaient Ă  la rĂ©pression qu’ils ont bien mĂ©ritĂ©e et conserveraient les fruits de leurs mĂ©faits ; que signifierait un jugement restĂ© Ă  l’état de lettre morte? D'un autre cĂŽtĂ©, si la totalitĂ© des condamnations n’était pas exĂ©cutĂ©e, si les tribunaux se relĂąchaient sur quelques points, sur quelque partie des condamnations, il n’y aurait pas de raison pour que la tolĂ©rance ne s’étendĂźt Ă  tous les chefs. Aussi l’ordonnance de 1587 contenait-elle dĂ©jĂ  une disposition semblable Ă  celle que nous retrouvons dans l’art. 27 du Code de procĂ©dure, et tous les auteurs qui ont Ă©crit, soit sur l’ordonnance, soit sur le Code, n’hĂ©si- sent-ils pas Ă  signaler comme nous l’importance de cette — 601 — disposition et Ă  insister sur la nĂ©cessitĂ© de sa scrupuleuse application. Du reste, les tribunaux sont bien pĂ©nĂ©trĂ©s de cette importance et de cette nĂ©cessitĂ© ; et tout rĂ©cemment ils en ont donnĂ© une nouvelle preuve dans une espĂšce trĂšs- remarquable. Nous croyons devoir, par cette raison, reproduire avec quelque Ă©tendue l’espĂšce et les motifs des dĂ©cisions intervenues. 39° Les Ă©poux Cliiris et d’autres riverains du cours d’eau de la Connnandaule avaient appuyĂ© un barrage sur la rive droite de ce cours d’eau. Le sieur Martin, propriĂ©taire de cette rive, ayant intentĂ© action en rĂ©pression du trouble apportĂ© Ă  sa possession et en suppression du barrage, il intervint jugement qui accueillit sa demande, et accorda toutefois un dĂ©lai de quatre mois pour dĂ©molir le barrage. Avant l’expiration des quatre mois, avant d’avoir dĂ©moli le barrage, payĂ© ou consignĂ© les dĂ©pens dont les offres avaient Ă©tĂ© refusĂ©es comme insuffisantes, les Ă©poux Chiris et consorts se pourvurent devant le Tribunal de Draguignan pour ĂȘtre autorisĂ©s Ă  appuyer un barrage sur la propriĂ©tĂ© du sieur Martin, conformĂ©ment Ă  la loi du 11 juillet 1847. Le sieur Martin opposa l’art. 27 du Code de procĂ©dure; il soutint que la demande fondĂ©e sur la loi du 11 juillet 1847 constituait une action pĂ©titoire qui ne pouvait ĂȘtre formĂ©e avant l’entiĂšre exĂ©cution des condamnations prononcĂ©es sur la complainte. Jugement qui repousse la fin de non recevoir, parce qu’il ne s'agit plus de la mĂȘme chose, que les sieurs Chiris et consorts demandent, non le maintien du barrage qui a fait l’objet de la complainte, mais l’usage — 60'2 d’une facultĂ© Ă  eux accordĂ©e par la loi du 11 juillet 1847 ; qu’ils ont offert de le dĂ©molir Ă  l’expiration des quatre mois et de payer les dĂ©pens. Appel par le sieur Martin devant la Cour d’Aix, et le 27 mai 1850 arrĂȘt infirmatif, ainsi conçu ConsidĂ©rant que, d’aprĂšs l’art. 27 du Code de procĂ©dure, le dĂ©fendeur au possessoire qui a succombĂ© ne peut se pourvoir au pĂ©titoire qu’aprĂšs avoir pleinement satisfait aux condamnations prononcĂ©es contre lui ; qu’il suit de lĂ  que Claris et consorts, dĂ©fendeurs au possessoire, ayant succombĂ© dans l’action intentĂ©e contre eux par Martin, ne pouvaient se pourvoir au pĂ©titoire qu’aprĂšs avoir pleinement satisfait aux condamnations contre eux prononcĂ©es par le jugement du 21 dĂ©cembre 1849, c’est-Ă -dire 1° Avoir payĂ© les dĂ©pens de premiĂšre instance et d’appel concernant l’action possessoire; 2° avoir dĂ©moli le barrage en maçonnerie par eux construit sur le bord de la propriĂ©tĂ© de Martin, riverain de la Commandaule, et avoir rĂ©tabli les lieux dans leur ancien Ă©tat ; considĂ©rant, en ce qui touche les dĂ©pens, que, par exploit du 29 janvier 1850, Chiris et consorts ont offert Ă  ce sujet une somme de 80 fr. que Martin a refusĂ©e ; que les offres n’ont Ă©tĂ© ni dĂ©clarĂ©es bonnes et valables, ni consignĂ©es ; qu’elles n’ont donc pu libĂ©rer les dĂ©biteurs; que, dĂšs lors, le jugement dĂ©finitif sur le possessoire n’a pas Ă©tĂ© exĂ©cutĂ© quant aux dĂ©pens ; considĂ©rant, en ce qui touche la dĂ©molition du barrage en maçonnerie et le rĂ©tablissement des lieux dans leur ancien Ă©tat, que le jugement accordait un dĂ©lai de quatre mois pour y procĂ©der ; que cette disposition, bien qu'elle ne soit ni justifiĂ©e ni justifiable, n’a point Ă©tĂ© attaquĂ©e par les voies lĂ©gales ; qu’elle devait donc ĂȘtre exĂ©cutĂ©e — 603 — en ce sens que, tant que le dĂ©lai accordĂ© n’était point expirĂ©, Martin n’aurait pu contraindre Chiris et consorts Ă  dĂ©molir le barrage et Ă  rĂ©tablir les lieux dans leur ancien Ă©tat ; mais que s’ils voulaient se pourvoir au pĂ©ti- toire avant l’expiration des quatre mois, ils Ă©taient tenus de renoncer au dĂ©lai qui leur avait Ă©tĂ© octroyĂ©, et d’exĂ©cuter le jugement du 21 dĂ©cembre, puisque autrement il faudrait dire que les magistrats les avaient autorisĂ©s Ă  se pourvoir au pĂ©titoire avant d’avoir pleinement satisfait aux condamnations prononcĂ©es contre eux par le mĂȘme jugement, et Ă  violer ainsi manifestement les dispositions prohibitives de l’art. 27, Code de procĂ©dure civile, ce qu’il n’est pas permis de supposer; considĂ©rant qu’il est Ă©tabli que les demandeurs au possessoire n’avaient point satisfait aux condamnations prononcĂ©es contre eux par le jugement du 21 dĂ©cembre, ni quant aux dĂ©pens, ni quant aux travaux Ă  exĂ©cuter, soit lorsqu’ils se sont pourvus au pĂ©titoire par exploit du 29 janvier 1850, soit mĂȘme lorsque le jugement dont est appel a Ă©tĂ© rendu le 25 fĂ©vrier suivant ; qu’ils doivent donc ĂȘtre dĂ©clarĂ©s non recevables dans leur action pĂ©titoire, conformĂ©ment Ă  l’art. 27, Code de procĂ©dure civile; considĂ©rant que les premiers juges, sans mĂ©connaĂźtre les dispositions de cet article qu’ils reproduisent dans leur dĂ©cision, ont refusĂ© de les appliquer Ă  la cause, parce que, suivant eux, la demande au pĂ©titoire n’a pas pour objet la chose mĂȘme sur laquelle il y a eu litige au possessoire ; considĂ©rant que le fait qui a donnĂ© lieu Ă  l’action possessoire est la construction par Chiris et consorts dans le lit de la riviĂšre de Commandaule, d’un barrage en maçonnerie dont l’extrĂ©mitĂ©, aboutissant Ă  la rive droite, Ă©tait appuyĂ©e sur une propriĂ©tĂ© appartenant au — 604 — sieur Martin ; considĂ©rant que l’action pĂ©titoire intentĂ©e par Cliiris et consorts a pour objet, suivant leurs conclusions transcrites dans les qualitĂ©s du jugement dont est appel, d’ĂȘtre autorisĂ©s Ă  appuyer sur la rive droite de la Commandaule, tenant au fonds de Martin, un barrage en bĂątisse, etc. » Pourvoi en cassation, par les Ă©poux Chiris et consorts, pour fausse application de l’art. 27 du Code de procĂ©dure et violation de l’art. 1 er de la loi du 11 juillet 18/i7, en ce que l’arrĂȘt attaquĂ© a considĂ©rĂ© comme une action pĂ©titoire, rĂ©gie par l’art. 27 du Code de procĂ©dure, la demande tendant Ă  ĂȘtre autorisĂ© Ă  exercer, moyennant indemnitĂ©, le droit confĂ©rĂ© par l’art. 1 er de la loi du 11 juillet 1847. On soutenait pour les demandeurs que l’art. 1 er de la loi du 11 juillet 1847, qui donne Ă  tout riverain la facultĂ© d’appuyer, moyennant indemnitĂ©, des ouvrages d’art sur la propriĂ©tĂ© du riverain opposĂ©, ne confĂ©rait pas ce droit d’une maniĂšre absolue et Ă  titre de droit de propriĂ©tĂ©, puisqu’il exige une indemnitĂ©; d’oĂč l’on concluait que le recours Ă  la loi du 11 juillet 1847 n’était pas une action pĂ©titoire, dans le sens de l’art. 27 du Code de procĂ©dure, et que dĂšs lors la demande Ă©tait recevable, bien que les condamnations prononcĂ©es au possessoire n’eussent pas Ă©tĂ© exĂ©cutĂ©es. ArrĂȘt. — La Cour; attendu qu’aux termes de l’art. 27 du Code de procĂ©dure civile, ledĂ©fendeur au possessoire qui a succombĂ© ne peut se pourvoir au pĂ©titoire qu’aprĂšs avoir pleinement satisfait aux condamnations prononcĂ©es contre lui ; que, sur la demande du dĂ©fendeur en cassation, afin d’ĂȘtre maintenu dans la possession annale du terrain, dont les demandeurs en cassation s’étaient emparĂ©s pour l’établissement d’un barrage en maçonnerie — 605 — sur la rive droite de la Commandaule, un jugement dĂ©finitif rendu par le Tribunal civil de Draguignan, le 21 dĂ©cembre 1849, avait condamnĂ© lesdits demandeurs en cassation, dĂ©fendeurs au possessoire, Ă  rĂ©tablir les lieux dans leur ancien Ă©tat ; que l’action intentĂ©e par ces derniers, le 29 janvier 1850, Ă©tait une action pĂ©titoire, puisqu’elle tendait Ă  faire consacrer le droit qu’ils rĂ©clamaient d’appuyer un barrage en maçonnerie sur la propriĂ©tĂ© de leur adversaire, droit qu’ils fondaient sur un titre, c’est-Ă -dire sur la loi du 11 juillet 1847 ; que cette action pĂ©titoire s’appliquait au mĂȘme objet que la voie de fait qui avait donnĂ© lieu Ă  l’action possessoire; attendu qu’il est dĂ©clarĂ©, en fait, par l’arrĂȘt attaquĂ©, que les demandeurs n’avaient pas pleinement satisfait aux condamnations prononcĂ©es contre eux, par le jugement sur le possessoire, lorsqu’ils se sont pourvus au pĂ©titoire ; d’oĂč il suit qu’en les dĂ©clarant non recevables dans leur demande au pĂ©titoire, la Cour d’appel, par l’arrĂȘt attaquĂ©, n’a pas commis d’excĂšs de pouvoir, n’a pas violĂ© l’art. 1 er de la loi du 11 juillet 1847, et a fait une juste application de l’art. 25 du Code de procĂ©dure civile, rejette, etc. *. 40° Nous insisterons sur les circonstances de fait de cette affaire qui Ă©taient bien favorables au demandeur au pĂ©titoire, mais qui n’ont pas fait et ne pouvaient pas faire flĂ©chir le principe gĂ©nĂ©ral nous dirons mĂȘme d’ordre public consacrĂ© par l’art. 27 du Code de procĂ©dure. En effet, nous avons vu qu’un dĂ©lai de quatre mois avait Ă©tĂ© accordĂ© aux dĂ©fendeurs Ă  la complainte pour dĂ©molir le barrage, qu’ils avaient fait offres rĂ©elles pour ' AmH du 25 aoĂ»t 1852, chambre civile. 606 — les frais et offert en outre de dĂ©molir le barrage Ă  l’expiration des quatre mois. Il paraĂźt bien aussi que le premier barrage avait Ă©tĂ© construit antĂ©rieurement Ă  la loi du 11 juillet 1847, et que le nouveau ne devait pas ĂȘtre Ă©tabli au mĂȘme emplacement que le premier. La question avait paru grave ; elle avait Ă©tĂ© dĂ©cidĂ©e dans un sens, par le Tribunal de Draguignan, et dans un sens diffĂ©rent par la Cour d’Aix. Enfin la Chambre des requĂȘtes de la Cour de cassation avait admis le pourvoi ; mais la Chambre civile, aprĂšs une discussion contradictoire, l’a rejetĂ©, et nous sommes trĂšs-convaincu que sa dĂ©cision et celle de la Cour d’Aix sont tout Ă  fait dans les vrais principes de la matiĂšre. 41° Ainsi donc, si un particulier, aprĂšs avoir succombĂ© dans une instance possessoire Ă  lui intentĂ©e, et lors de laquelle il aurait prĂ©tendu ĂȘtre en possession d’un droit de passage sur le fonds d’autrui, ou d’un droit d’y faire passer les eaux qu’il destinait Ă  l’exploitation de ses hĂ©ritages ou mĂȘme aux besoins de sa maison, aux besoins des hommes et des animaux, ou d’appuyer un barrage de prise d’eau, sur la rive opposĂ©e Ă  son hĂ©ritage, voulait plus tard demander le passage en cas d’enclave, le droit d’aqueduc ou d’appui de barrage de prise d’eau, il serait dans l’indispensable nĂ©cessitĂ© d’exĂ©cuter au prĂ©alable et de la maniĂšre la plus complĂšte toutes les condamnations prononcĂ©es par le jugement possessoire, et cela lors mĂȘme qu’il ne demanderait pas Ă  exercer ces divers droits de servitude sur le mĂȘme emplacement que celui dont il s’est agi dans l’instance possessoire ; car dĂšs que ce serait le mĂȘme fonds, la loi serait Ă©videmment applicable ; autrement il suffirait pour — 607 — en Ă©luder l’application de changer un peu l’emplacement de la servitude, mĂȘme en le rappelant prĂšs de l’ancien. Enoncer un pareil rĂ©sultat, c’est rĂ©futer suffisamment le systĂšme qui le produit et en dĂ©montrer toute l’injustice. 42° Dans les numĂ©ros qui prĂ©cĂšdent, nous avons raisonnĂ© en gĂ©nĂ©ral dans l’hypothĂšse oĂč il y aurait eu jugement de maintenue ou de rĂ©intĂ©grande en faveur du demandeur ; mais il se peut aussi, et mĂȘme il arrivera frĂ©quemment que l’action pĂ©titoire n’ait pas Ă©tĂ© prĂ©cĂ©dĂ©e d’une action possessoire, ou qu’elle ait Ă©tĂ© repoussĂ©e. 43° Dans tous les cas, c’est au demandeur au pĂ©titoire Ă  dĂ©montrer, Ă  prouver sa propriĂ©tĂ© d’une maniĂšre claire, Ă©vidente, soit par des titres, soit par la loi, soit par la prescription. Il ne lui suffirait pas de contester les droits du dĂ©fendeur, d’établir mĂȘme qu’il n’en a aucun; car prouver que le dĂ©fendeur n’est pas propriĂ©taire, ce n’est pas prouver que le demandeur l’est lui-mĂȘme, et le dĂ©fendeur ne doit ĂȘtre Ă©vincĂ© que par le vrai propriĂ©taire qui seul a le droit de l’attaquer ; il lui suffit de dire possideo quia possideo; en l’assignant au pĂ©titoire, on a reconnu sa possession au moins actuelle. Or, melior est causa possidentis. On est toujours, dit l’art. 2230, censĂ© possĂ©der pour soi et Ă  titre de propriĂ©taire, s’il n’est prouvĂ© qu’on a possĂ©dĂ© pour un autre; le demandeur doit donc prouver que son adversaire n’a pas possĂ©dĂ© pour lui et Ă  titre de propriĂ©taire, en dĂ©montrant que la propriĂ©tĂ© lui appartient. C’est au surplus ce que disent l’art. 1315, qui impose la preuve Ă  tout demandeur, et l’art. 1352, portant que la prĂ©somption lĂ©gale dispense de toute preuve, celui au profit duquel elle existe. Or, nous avons vu que la pos- — 608 — session Ă©tablit prĂ©cisĂ©ment une prĂ©somption lĂ©gale de propriĂ©tĂ© en faveur du dĂ©fendeur. 44° Il y a donc deux raisons dĂ©cisives de cette solution ; d’abord en l’assignant au pĂ©titoire, on avoue en gĂ©nĂ©ral sa possession, sauf le cas, fort rare d’ailleurs, oĂč le demandeur au pĂ©titoire aura prĂ©alablement obtenu un jugement possessoire, et, comme nous l’avons dit, il y a prĂ©somption que celui qui possĂšde a la propriĂ©tĂ©. Ensuite, c’est que tout demandeur est tenu d’établir sa demande, ses droits particuliers, sans pouvoir, nous le rĂ©pĂ©tons, se borner Ă  allĂ©guer, Ă  prouver mĂȘme que son adversaire n’en a aucuns. C’est ce que nous allons dĂ©montrer Ă  l’aide de textes du droit romain ou de l’opinion des commentateurs. 45° lies aliĂ©nas possidens, licet justam tenendi causant nullatn habeat, non nisi snarn intentionem implenti restituera cogitur. L. 28, Code de rei vindicat. Melior est causapossidentis.L. 126. ff. deregulisjuris. Jn pari causa posscssor potior haberi debet L. 128 ibid. qui accusare volunt, probationes habere debent cum neque juris, neque ĂŠquitatis ratio permittat, ut alienorum ins- trumentorum inspiciendorum polestas fiei'i debeat. Adore enim non probante, qui convenitur etsi niliil ipse prĂŠstat, obtinebit. L. h, C. de Edendo. Et incumbit probatio, ei qui dicit, non ei qui negat. L. 2, ff. de prob. et prƓsomp. Quant adores habentur. L. 125, ff. de R. fur. Favorabiliores rei potius semper nĂ©cessitas probandi incumbit illi qui agit L. 21 eodem. 46“ Bourjon, t. II, p. 515, s’exprime ainsi Quant aux actes qui doivent fonder cette poursuite, les titres de propriĂ©tĂ© forment sa base; c’est la propriĂ©tĂ© qu’on y revendique; il faut donc la justifier par des titres qui — 609 — prouvent qu’elle rĂ©side dans la personne de celui qui l’exerce et celui qui l’a intentĂ©e, c’est-Ă -dire le demandeur au pĂ©titoire, doit le premier justifier de ses titres ; c’est Ă  quoi tout demandeur est assujetti; en effet, sans une telle justification, la demande tomberait d’elle-mĂȘme comme n’ayant aucun appui; c’est droit commun; c’est le fondement de cette action, sans lequel elle croulerait d’elle-mĂȘme. En effet, le dĂ©fendeur ayant pour lui la prĂ©somption qui rĂ©sulte de sa possession, encore qu’elle n’eĂ»t pas subsistĂ© pendant tout le temps requis pour acquĂ©rir prescription, n’est obligĂ© de justifier des siens que pour se dĂ©fendre et pour balancer ceux qu’on lui oppose ; ce n’est donc qu’en second qu’il doit justifier de ses titres; par consĂ©quent, si le demandeur au pĂ©titoire ne justifie pas de titres suffisants, il doit ĂȘtre dĂ©boutĂ© de sa demande, encore que le dĂ©fendeur n’en fasse apparoir aucun ; de lĂ  il rĂ©sulte que celui qui n’a aucun titre ne peut former cette action ni poursuivre un possesseur pour justifier de son titre, parce que cette action n’est pas une action publique, et que celui qui n’a pas de titre, ne peut fouiller dans ceux d’un autre ni les critiquer, ce qui le rend Ă  cet Ă©gard, sans action ; l’équitĂ© comme le maintien de l’ordre public ont conduit lĂ . Il y a grande diffĂ©rence entre les actions pĂ©titoire et possessoire. L’action pĂ©titoire n’a pour objet que la propriĂ©tĂ©, au lieu que la complainte n’a pour objet que la possession, ce qui diffĂ©rencie beaucoup l’une de l’autre; de lĂ  il suit que l’action pĂ©titoire n’apporte aucun trouble dans la possession, puisqu’elle ne tend qu’à faire juger dans la personne de qui la propriĂ©tĂ© de la chose rĂ©side ; ce que l’on a dĂ©jĂ  observĂ©, et qu’il est bon de 39 — 610 — reprendre ici pour les consĂ©quences. En effet, on ne considĂšre pas dans cette action, la possession de l’hĂ©ritage dont la propriĂ©tĂ© est contestĂ©e ; le juge ne fonde sa dĂ©cision que sur les titres de propriĂ©tĂ© ; ce sont les titres seuls qui peuvent dĂ©terminer dans la personne de qui rĂ©side la propriĂ©tĂ©, au lieu que dans la complainte on ne considĂšre que la possession Ă  laquelle cet examen ne donne aucune atteinte; c’est de la propriĂ©tĂ© dont il s’agit; ce sont les titres de propriĂ©tĂ© qui dĂ©cident. » Pigeau, ProcĂ©dure du ChĂątelet, t. I er , p. 110 et 117, s’exprime ainsi Chacun ayant intĂ©rĂȘt de jouir de ce qui lui appartient, on doit prĂ©sumer, jusqu’à la preuve contraire, qu’il n’abandonne guĂšre son bien, et que, par consĂ©quent, tout possesseur est propriĂ©taire. C’est sur cette prĂ©somption qu’est fondĂ©e la maxime Possession vaut titre, jusqu’à la preuve du contraire. » La prĂ©somption Ă©tant plus pour le dĂ©tenteur que pour celui qui rĂ©clame, et la prĂ©somption devant seule guider, tant que l’on n’a pas encore de preuve, on doit laisser la possession de la chose plutĂŽt au premier qu’au second, jusqu’à ce que les juges en ordonnent autrement. a De ces deux maximes que possession vaut titre, jusqu’à la preuve du contraire, et qu’il n’est pas permis de se faire justice Ă  soi-mĂȘme, s’est formĂ©e une troisiĂšme que nous dĂ©velopperons ici, qui est, que les parties doivent rester avec les mĂȘmes avantages qu’avant le procĂšs, jusqu’à ce que la justice en ait autrement disposĂ©. » Le mĂȘme auteur, page 42, dit encore Tout demandeur doit prouver sa prĂ©tention, actori incumbit onus probandi, sinon sa demande est rejetĂ©e, suivant cet — 611 — axiome vulgaire Actore non probante, reus absolvitur. » L’auteur reproduit la mĂȘme doctrine dans son Cours de procĂ©dure civile. On peut ajouter, aux autoritĂ©s qui prĂ©cĂšdent, quelques-unes de celles par nous citĂ©es dans le chapitre prĂ©cĂ©dent. Aux n° 320 et 321, de la Revendication, Pothier dit encore AprĂšs que le dĂ©fendeur, qui par l’exploit de demande est reconnu possĂ©der l’hĂ©ritage pour lequel il est assignĂ©, a dĂ©fendu Ă  la demande, le procĂšs s’instruit et se dĂ©cide par l’examen des titres respectifs des parties. Lorsque ceux produits par le demandeur ne sont pas suffisants pour justifier le domaine de propriĂ©tĂ© qu’il prĂ©tend avoir de l’hĂ©ritage revendiquĂ©, le dĂ©fendeur n’a besoin d’en produire aucuns. Le dĂ©fendeur ne doit pas ĂȘtre dĂ©possĂ©dĂ© pendant le procĂšs; il doit continuer de jouir librement de l’hĂ©ritage revendiquĂ©, jusqu’à ce qu’il intervienne une sentence dĂ©finitive dont il n’y ait pas d'appel qui juge que l’hĂ©ritage appartient au demandeur et qui condamne le dĂ©fendeur Ă  le lui dĂ©laisser. Si le possesseur Ă©tait appelant de cette sentence, il continuerait de jouir librement de l’hĂ©ritage jusqu’à l’arrĂȘt dĂ©finitif. » 47° Nous arrivons plus spĂ©cialement au mode de preuve de la propriĂ©tĂ© ou du droit foncier objet du litige. Voyons sur cela les dispositions du Code NapolĂ©on. Art. 1315. Celui qui rĂ©clame l’exĂ©cution d'une obligation doit la prouver. RĂ©ciproquement, celui qui se prĂ©tend libĂ©rĂ© doit justifier le payement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation. — 612 — Art. 1316. Les rĂšgles qui concernent la preuve littĂ©rale, la preuve testimoniale, les prĂ©somptions, l’aveu de la partie et le serment, sont expliquĂ©es dans les sections suivantes Art. 1317. L’acte authentique est celui qui a Ă©tĂ© reçu par officiers publics, ayant le droit d’instrumenter dans le lieu oĂč l’acte a Ă©tĂ© rĂ©digĂ© et avec les solennitĂ©s requises. Art. 1318. L’acte qui n’est point authentique par l’incompĂ©tence ou l’incapacitĂ© de l’officier ou par un dĂ©faut de forme, vaut, comme Ă©criture privĂ©e, s’il a Ă©tĂ© signĂ© des parties. Art. 1319. L’acte authentique fait pleine foi de la convention qu’il renferme entre les parties contractantes et leurs hĂ©ritiers ou ayant-cause. NĂ©anmoins, en cas de plainte en faux principal, l’exĂ©cution de l’acte arguĂ© de faux sera suspendue par la mise en accusation; et en cas d'inscription de faux, faite incidemment, les tribunaux pourront, suivant les circonstances, suspendre provisoirement l’exĂ©cution de l’acte. Art. 1320. L’acte, soit authentique, soit sous-seing privĂ©, fait foi entre les parties, mĂȘme de ce qui n’y est exprimĂ© qu’en termes Ă©nonciatifs, pourvu que l’énonciation ait un rapport direct Ă  la disposition. Les Ă©nonciations Ă©trangĂšres Ă  la disposition ne peuvent servir que d’un commencement de preuve. Art. 1321. Les contre-lettres ne peuvent avoir leur effet qu’entre les parties contractantes elles n’ont point d’effet contre les tiers. Art. 1322. L’acte sous-seing privĂ©, reconnu par celui auquel on l’oppose, ou lĂ©galement tenu pour reconnu, a, — 613 — entre ceux qui l’ont souscrit, et entre leurs hĂ©ritiers et avant-cause, la mĂȘme foi que l’acte authentique. Art. 1323. Celui auquel on oppose un acte sous-seing privĂ© est obligĂ© d’avouer ou de dĂ©savouer formellement son Ă©criture ou sa signature. Ses hĂ©ritiers ou ayant-cause peuvent se contenter de dĂ©clarer qu’ils ne connaissent point l’écriture ou la signature de leur auteur. Art. 132/j. Dans le cas oĂč la partie dĂ©savoue son Ă©criture ou sa signature, et dans le cas oĂč ses hĂ©ritiers ou ayant-cause dĂ©clarent ne les point connaĂźtre, la vĂ©rification en est ordonnĂ©e en justice. Art. 1325. Les actes sous-seing privĂ© qui contiennent des conventions synallagmatiques, ne sont valables qu’autant qu’ils ont Ă©tĂ© faits en autant d’originaux qu’il y a de parties ayant un intĂ©rĂȘt distinct. Il suffit d’un original pour toutes les personnes ayant le mĂȘme intĂ©rĂȘt. Chaque original doit contenir la mention du nombre des originaux qui en ont Ă©tĂ© faits. NĂ©anmoins, le dĂ©faut de mention que les originaux ont Ă©tĂ© faits doubles, triples, etc., ne peut ĂȘtre opposĂ© par celui qui a exĂ©cutĂ© de sa part la convention portĂ©e dans l’acte. Art. 1326. Le billet ou la promesse sous-seing privĂ©, par lequel une seule partie s’engage envers l’autre Ă  lui payer une somme d’argent ou une chose apprĂ©ciable, doit ĂȘtre Ă©crit en entier de la main de celui qui le souscrit ; ou du moins il faut qu’outre sa signature il ait Ă©crit de sa main un bon ou un approuvĂ©, portant en toutes lettres la somme ou la quantitĂ© de la chose ; ExceptĂ© dans le cas oĂč l’acte Ă©mane de marchands, eu — artisans, laboureurs, vignerons, gens de journĂ©e et de service. Art. 1328. Les actes sous-seing privĂ© n’ont de date contre les tiers que du jour oĂč ils ont Ă©tĂ© enregistrĂ©s, du jour de la mort de celui ou de l’un de ceux qui les ont souscrits, ou du jour oĂč leur substance est constatĂ©e dans des actes dressĂ©s par des officiers publics, tels que procĂšs-verbaux de scellĂ© ou d’inventaire. Art. 1330. Les livres des marchands font preuve contre eux ; mais celui qui en veut tirer avantage ne peut les diviser en ce qu’ils contiennent de contraire Ă  sa prĂ©tention. Art. 1334. Les copies, lorsque le titre original subsiste, ne font foi que de ce qui est contenu au titre, dont la reprĂ©sentation peut toujours ĂȘtre exigĂ©e. Voyez aussi les art. 1335 et 1336 sur la force des copies, quand le titre original n’existe plus, et sur celle des transcriptions d’actes dans un registre public. Voyez, en outre, les art. 1337 et 1338 sur les actes de confirmation ou ratification. Art. 1339. Le donateur ne peut rĂ©parer par aucun acte confirmatif les vices d’une donation entre vifs; nulle en la forme, il faut qu’elle soit refaite en la forme lĂ©gale. Art. 1340. La confirmation, ou ratification, ou exĂ©cution volontaire d’une donation par les hĂ©ritiers ou ayant- cause du donateur aprĂšs son dĂ©cĂšs emporte leur renonciation Ă  opposer, soit les vices de forme, soit toute autre exception. Art. 1341. Il doit ĂȘtre passĂ© acte devant notaires ou sous signature privĂ©e, de toutes choses excĂ©dant la somme ou valeur de cent cinquante francs, mĂȘme pour — 615 — dĂ©pĂŽts volontaires; et il n’est reçu aucune preuve par tĂ©moins contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allĂ©guĂ© avoir Ă©tĂ© dit avant, lors ou depuis les actes, encore qu’il s’agisse d’une somme ou valeur moindre de cent cinquante francs; Le tout sans prĂ©judice de ce qui est prescrit dans les lois relatives au commerce. Art. 1348. Elles reçoivent encore exception toutes les fois qu’il n’a pas Ă©tĂ© possible au crĂ©ancier de se procurer une preuve littĂ©rale de l’obligation qui a Ă©tĂ© contractĂ©e envers lui. Cette seconde exception s’applique 1° Aux obligations qui naissent des quasi-contrats et des dĂ©lits ou quasi-dĂ©lits; 2“ Aux dĂ©pĂŽts nĂ©cessaires faits en cas d’incendie, ruine, tumulte ou naufrage, et Ă  ceux faits par les voyageurs en logeant dans une hĂŽtellerie, le tout suivant la qualitĂ© des personnes et les circonstances du fait ; 3° Aux obligations contractĂ©es en cas d’accidents imprĂ©vus oĂč l’on ne pourrait pas avoir fait des actes par Ă©crit ; 4° Au cas oĂč le crĂ©ancier a perdu le titre qui lui servait de preuve littĂ©rale, par suite d’un cas fortuit, imprĂ©vu et rĂ©sultant d’une force majeure. Art. 1349. Les prĂ©somptions sont des consĂ©quences que la loi ou le magistrat tire d’un fait connu Ă  un fait inconnu. Art. 1350. La prĂ©somption lĂ©gale est celle qui est attachĂ©e par une loi spĂ©ciale Ă  certains actes ou Ă  certains faits. Tels sont 1° Les actes que la loi dĂ©clare nuis, comme prĂ©sumĂ©s faits en fraude de ses dispositions, d’aprĂšs leur seule qualitĂ©; 1 — 616 — 2° Les cas dans lesquels la loi dĂ©clare la propriĂ©tĂ© ou la libĂ©ration rĂ©sulter de certaines circonstances dĂ©terminĂ©es; 3° L’autoritĂ© que la loi attribue Ă  la chose jugĂ©e ; h° La force que la loi attache Ă  l’aveu de la partie ou Ă  son serment. Art. 1351. L’autoritĂ© de la chose jugĂ©e n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. 11 faut que la chose demandĂ©e soit la mĂȘme ; que la demande soit fondĂ©e sur la mĂȘme cause ; que la demande soit entre les mĂȘmes parlies, et formĂ©e par elles et contre elles en la mĂȘme qualitĂ©. Art. 1352. La prĂ©somption lĂ©gale dispense de toute preuve celui au profit duquel elle existe. Nulle preuve n’est admise contre la prĂ©somption de la loi, lorsque, sur le fondement de cette prĂ©somption, elle annulle certains actes ou dĂ©nie l’action en justice, Ă  moins qu’elle n’ait rĂ©servĂ© la preuve contraire, et sauf ce qui sera dit sur le serment et l’aveu judiciaires. Art. 1353. Les prĂ©somptions qui ne sont point Ă©tablies par la loi, sont abandonnĂ©es aux lumiĂšres et Ă  la prudence du magistrat, qui ne doit admettre que des prĂ©somptions graves, prĂ©cises et concordantes, et dans les cas seulement oĂč la loi admet les preuves testimoniales, Ă  moins que l’acte ne soit attaquĂ© pour cause de fraude ou de dol. 48° Les textes de loi ainsi reproduits, voyons l’application dont ils sont suscepiibles. Le demandeur au pĂ©ti- toire peut ĂȘtre propriĂ©taire Ă  titre hĂ©rĂ©ditaire, ou en vertu d’une donation entre vifs ou testamentaire, d’une vente, d’un Ă©change, d'une sociĂ©tĂ©, de l’accession, de l’incorporation, de la seule force de la loi ou de la prĂšs- — 617 — cription. Celui qui demande la propriĂ©tĂ© ou la copropriĂ©tĂ© d’un immeuble ou un droit d’usufruit, d’usage, d’habitation, de servitude sur un immeuble doit donc produire, soit les actes de l’Etat civil et autres actes qui Ă©tablissent sa gĂ©nĂ©alogie et son degrĂ© de parentĂ© avec celui de la succession duquel il s’agit, soit l’acte de donation, de testament, de vente, d’échange, de sociĂ©tĂ©, de transaction ou invoquer la prescription, l’accession, les articles de loi sur lesquels il se fonde et prouver les faits qui, Ă  dĂ©faut de titres, appuient et justifient ses droits. Remarquons en passant que deux arrĂȘts de la Cour de cassation, des 5 avril 1837 et 1 er dĂ©cembre 1840 Devil. et Carr., 1S37-1-434, 1847-1-200, ont dĂ©cidĂ© de la maniĂšre la plus formelle que la prescription ne court pas contre celui qui possĂšde et qui peut toujours, quel que ‱f soit le laps de temps Ă©coulĂ©, opposer la nullitĂ© d’un acte en vertu de la maxime quƓ sunt temporalia ad agendum, sunt perpĂ©tua ad excipiendum. 49° La preuve que l’on a toujours considĂ©rĂ© comme la principale et qui est la plus ordinaire, est celle par titres, autrement dite preuve littĂ©rale. Le dĂ©fendeur contre lequel des titres sont invoquĂ©s, peut opposer qu’ils sont nuis, soit pour vice de forme comme s’il s’agit d’une donation entre vifs faite par acte sous-seing privĂ©, soit pour incapacitĂ© de la personne qui les a souscrits comme s’ils l’ont Ă©tĂ© par une femme mariĂ©e non autorisĂ©e, par un mineur, par un interdit, soit enfin qu’ils Ă©manent Ă  non domino. 11 serait par trop facile en effet au premier aventurier venu de dĂ©pouiller un possesseur ou dĂ©tenteur, d’échapper Ă  l’obligation imposĂ©e Ă  tout demandeur de justifier sa prĂ©tention, et de se faire dĂ©clarer propriĂ©taire par la — 618 — justice en se faisant souscrire de pareils actes qu’on obtiendrait facilement de la faiblesse ou de la collusion des personnes que nous avons dĂ©signĂ©es. Nous croyons mĂȘme, relativement Ă  l’acte souscrit Ă  non domino , que si cet acte ne faisait aucune mention des titres de propriĂ©tĂ© dans la personne du demandeur au pĂ©titoire, et si celui-ci ne justifiait pas de l’existence du droit de propriĂ©tĂ© en la personne de son auteur, il devrait ĂȘtre dĂ©boutĂ© de sa demande, puisque l’aliĂ©nation de la chose d’autrui est nulle ; que c’est Ă  lui de faire toutes les justifications nĂ©cessaires; que le dĂ©fendeur ne doit pas ĂȘtre tenu de prouver un fait nĂ©gatif, non pas parce qu’il serait impossible de prouver un fait de cette nature *, mais parce qu’il est plus facile de prouver une affirmation, et qu’il est plus naturel et plus juste que celui qui fait l’affirmation comme base de son droit soit tenu de la justifier. Ces principes seraient applicables lors mĂȘme que l’auteur serait une commune, un dĂ©partement ou l’Etat ; il n’y aurait d’exception, quant Ă  l’Etat, que s’il s’agissait de biens nationaux dont, comme on sait, la vente est valable lors mĂȘme qu’elle comprend le bien d’autrui. Ainsi donc le demandeur est obligĂ© de justifier de son droit de propriĂ©tĂ© non-seulement dans sa personne, mais encore dans celle de son auteur ou mĂȘme des prĂ©dĂ©cesseurs de celui-ci, tant que la prescription de dix ou vingt ans, avec bonne foi, Ă©tablie par les art. 2200, 2265 et 2267 du Code civil, n’est point accomplie ; autrement il suffirait de s’entendre avec un tiers complaisant qui * M. le professeur Bonnier, dans son remarquable ouvrage sur la nature des preuves judiciaires, dĂ©montre en effet qu’une preuve nĂ©gative n’est pas impossible. — 619 — n’aurait aucun titre pour se faire crĂ©er par lui des droits qu’il n’avait pas lui-mĂȘme. Nous n’admettons pas les dispositions de la loi romaine la loi publicienne, qui accordait l’action en revendication Ă  celui qui, Ă  un titre nul ou Ă©manĂ© du non-propriĂ©taire, joignait une possession de l’objet litigieux antĂ©rieure Ă  la possession actuelle d’un tiers, et quoi qu’il n’eĂ»t point encore acquis la prescription ou l’usucapion. Cette loi lui donnait la prĂ©fĂ©rence sur le possesseur actuel, parce que s’il n’avait pas acquis ou prescrit, il Ă©tait en voie, en chemin d’acquĂ©rir. Mais la loi française a voulu Ă©tablir une rĂšgle absolue, et la gĂ©nĂ©ralitĂ© de ses expressions dans les articles par nous citĂ©s, dĂ©montre de la maniĂšre la plus pĂ©remptoire, qu’elle repousse l’exception tirĂ©e de la loi publicienne. 50“ IndĂ©pendamment de la contestation que le dĂ©fendeur peut Ă©lever sur la validitĂ© et la force des titres produits par le demandeur, contestation que celui-ci peut Ă©galement Ă©lever sur ceux qui seraient invoquĂ©s par le dĂ©fendeur, un dĂ©bat sĂ©rieux peut naĂźtre entre les parties sur l’interprĂ©tation et l’application de leurs titres respectifs. Un dĂ©bat de cette nature est entiĂšrement abandonnĂ© aux lumiĂšres et Ă  la consciencieuse apprĂ©ciation des magistrats qui, dans leur dĂ©cision Ă  cet Ă©gard, se conformeront aux rĂšgles d’interprĂ©tation tracĂ©es par notre Code civil. On conçoit que l’extrĂȘme diversitĂ© des espĂšces, la variĂ©tĂ© infinie des stipulations, des expressions techniques ou de localitĂ© et des usages des diffĂ©rents pays oĂč les conventions ont pu ĂȘtre passĂ©es, nous dispensent et nous empĂȘchent d’entrer sur ce point dans des dĂ©veloppements ou mĂȘme dans la citation de quelques exemples qui seraient d’ailleurs san6 utilitĂ©. — 6-20 — 51° Lorsque le demandeur invoque un titre d’acquisition Ă©manĂ© de la personne contre laquelle son action pĂ©- titoire est dirigĂ©e, ou de celui quelle reprĂ©sente, le procĂšs est ordinairement facile Ă  juger. I,c demandeur ne peut eu effet avoir de titre plus pĂ©remptoire, et il ne peut plus guĂšre y avoir de dĂ©bat que sur le sens ou l’interprĂ©tation des conventions des parties, Ă  moins que l’acte ne soit attaquĂ© incidemment par le dĂ©fendeur pour une des causes dĂ©terminĂ©es par la loi. 52° Mais il est rare que la situation soit aussi simple, aussi nette que dans l’hypothĂšse que nous venons de prĂ©senter. Le plus ordinairement, les actes produits Ă©maneront de tiers dont le dĂ©fendeur ne sera pas le reprĂ©sentant, et alors la difficultĂ© sera plus grande pour que la justice puisse en admettre l’efficacitĂ© contre le dĂ©fendeur, puisque, comme nous l’avons dĂ©jĂ  dit, avec l’art. 1165, les conventions n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes. 53° La premiĂšre hypothĂšse Ă  prĂ©voir est celle-ci il se pourra que le demandeur et le dĂ©fendeur aient acquis le mĂȘme immeuble, le mĂȘme droit foncier, de la mĂȘme personne. Dans ce cas les lois romaines, sans s’attacher Ă  la date des actes, accordaient la prĂ©fĂ©rence Ă  celui qui avait Ă©tĂ© mis en possession, parce que ces lois ne reconnaissaient la transmission de la propriĂ©tĂ© que du jour de la tradition ; mais chez nous la vente Ă©tant parfaite du jour du contrat, quoiqu’il n’y ait eu encore ni tradition, ni payement du prix art. 1583, l’acquĂ©reur, le premier en date, serait prĂ©fĂ©rĂ©, quoique le second acquĂ©reur eĂ»t Ă©tĂ© mis en possession ; cette dĂ©cision s’entend toutefois sauf les cas de fraude qui font toujours exception. — 651 — 54° 11 y aurait exception dans le cas oĂč le premier acte serait sous-seing privĂ© et n’aurait pas acquis date certaine, de Tune des maniĂšres spĂ©cifiĂ©es dans l’art. 1328 du Code civil, avant le second. Si celui-ci Ă©tait authentique ou si Ă©tant sous-seing privĂ© il avait acquis date certaine avant le premier, il serait prĂ©fĂ©rĂ© et la partie qui voudrait invoquer ce premier acte ne serait pas fondĂ©e, pour le faire valoir, Ă  opposer que le second acquĂ©reur en avait connaissance, mĂȘme qu’il avait Ă©tĂ© exĂ©cutĂ© en partie ; car un acte sous-seing privĂ© ne peut avoir de date certaine, d’existence Ă  l’égard des tiers que par l’un des modes Ă©noncĂ©s dans l’article prĂ©citĂ©, dont les dispositions sont limitatives *. 55° La plupart des actions pĂ©titoires portent sur des objets accessoires Ă  des immeubles et d’une importance plus ou moins mĂ©diocre, comme une avenue, un terrain vague, un sentier d’exploitation, des fossĂ©s ou aqueducs, des caves, de petits bĂątiments. Nous en voyons des exemples dans les espĂšces de divers arrĂȘts de la Cour de cassation. Ainsi par arrĂȘt du 18 avril 1831, HĂ©mas contre Patu- rel, il y a eu rejet du pourvoi ; les tribunaux avaient adjugĂ© Ă  Paturel la propriĂ©tĂ© d’un petit terrain existant entre les hĂ©ritages respectifs, en se fondant notamment sur des circonstances de localitĂ© qui Ă©tablissaient que ce terrain Ă©tait une dĂ©pendance de son fonds. DĂ©cision semblable dans l’espĂšce d’un arrĂȘt du 31 juillet 1832, commune de Pressigny contre le sieur Perrot, C ArrĂȘt de la Cour de cassation, du 27 mai 1823. Voyez aussi la nouvelle collection d’arrĂȘts do MM. de Villeneuve et Carette, et les dictionnaires de MM. Dalloz aĂźnĂ© et Armand Dalloz, V° Actes sous-seing privĂ© , oĂč ils citent de nombreux arrĂȘts de Cours d’appel conformes. — 622 — auquel un petit terrain vague, appelĂ© Butte du chĂąteau, avait Ă©tĂ© adjugĂ© comme dĂ©pendance de ce chĂąteau. TroisiĂšme dĂ©cision semblable dans l’espĂšce d’un arrĂȘt du 20 novembre 183Ăą, entre les sieurs Michaud et Laroche. Les tribunaux ont adjugĂ© au sieur Michaud la propriĂ©tĂ© d’un petit terrain, comme dĂ©pendance des fonds de celui-ci, auxquels il Ă©tait contigu, tandis qu’il Ă©tait sĂ©parĂ© par une riviĂšre des hĂ©ritages du sieur Laroche. Nous concevons que dans ces cas, quoique les contrats ne s’expliquent pas positivement sur ces objets, et que mĂȘme la possession propre Ă  faire acquĂ©rir la prescription ne puisse pas ĂȘtre constatĂ©e d’une maniĂšre certaine, les tribunaux en adjugent la propriĂ©tĂ© Ă  l’une ou l’autre des parties mĂȘme au demandeur dĂ©jĂ  reconnue propriĂ©taire de la chose principale, en interprĂ©tant les titres, les circonstances de localitĂ© auxquelles le lĂ©gislateur a attachĂ© une certaine importance, puisqu’il a, par le Code de procĂ©dure, consacrĂ©, comme moyens d’instruction et de preuve, les visites de lieux par la justice et les expertises; nous comprenons aussi qu’ils se dĂ©terminent par la rĂšgle de l’accession, par celle des accessoires ou dĂ©pendances de la chose principale, pourvu toutefois qu’on ne fasse usage de tous ces moyens de dĂ©cision qu’avec rĂ©serve, et sans jamais en abuser. 11 arrive mĂȘme assez communĂ©ment que les contrats, aprĂšs avoir dĂ©signĂ© la chose principale qui en fait l’objet, ajoutent la clause gĂ©nĂ©rale des circonstances et dĂ©pendances. Les juges doivent ĂȘtre autorisĂ©s Ă  rechercher en quoi elles consistent. On ne peut pas dire en ce cas qu’ils ont transgressĂ© le principe qui impose au demandeur la nĂ©cessitĂ© de la preuve de sa propriĂ©tĂ©, par titre, par la loi, par la prescription, et qui rĂ©putĂ© le dĂ©fendeur pro- — 623 — priĂ©taire tant que son adversaire n’a point prouvĂ© sa propriĂ©tĂ© d’une maniĂšre lĂ©gale. 56° Mais la solution ne doit-elle pas ĂȘtre diffĂ©rente lorsque le dĂ©bat roule sur des immeubles importants et isolĂ©s, et lorsqu’il est reconnu que le demandeur n’a pas de titres, ou, ce qui revient au mĂȘme, qu’ils sont insignifiants ou nuis, qu’il ne peut invoquer ni la rĂšgle des accessoires, des circonstances et dĂ©pendances, ni des dispositions lĂ©gales comme celles relatives Ă  l’usufruit des pĂšre et mĂšre sur les biens de leurs enfants mineurs, aux servitudes sur les fonds voisins, lorsque le dĂ©bat s’élĂšve Ă  l’occasion d’un domaine, d’un bois, d’une maison d’une certaine importance et entiĂšrement sĂ©parĂ©s des autres propriĂ©tĂ©s des parties, et qu’enfin, la seule ressource qui puisse lui rester est d’invoquer la prescription de trente ans sans titre ou de dix et vingt ans, avec titre et bonne foi? Dans ce cas, les juges peuvent-ils, en se fondant sur ce qu’aucune des parties n’a de titres, comme cela est dĂ©jĂ  arrivĂ© et comme nous en verrons des exemples dans l’espĂšce des arrĂȘts que nous citerons tout Ă  l’heure, sur ce que le demandeur a une possession plus ancienne que le dĂ©fendeur, accueillir l’action pĂ©titoire sans dĂ©clarer formellement qu’il a une possession constitutive de la prescription ? Nous ne le pensons pas et nous ne pouvons donner notre assentiment aux arrĂȘts qui renferment de semblables dĂ©cisions. Nous l’avons dĂ©jĂ  dit, les auciens principes, les articles 1315 et 1341 du Code civil, imposent au demandeur le fardeau de la preuve, veulent qu’il soit passĂ© acte de toutes choses ou valeurs excĂ©dant cent cinquante francs, — au — dĂ©fendent dans ce cas la preuve par tĂ©moins ou par prĂ©somptions, et interdisent pour toute valeur la preuve contre et outre le contenu aux actes ; ce n’est donc pas seulement, par la raison qu’une action pĂ©titoire est un aveu de la possession de celui qu’on attaque, que le demandeur est tenu de prouver par titre sa propriĂ©tĂ© ; c’est aussi et principalement parce que c’est lĂ  un principe gĂ©nĂ©ral, une obligation imposĂ©e Ă  tout demandeur, dans tous les procĂšs de quelque nature qu’ils soient. Sans doute, il y a une exception pour les faits dont on n’a pu se procurer la preuve, ou qui n’ont pu ĂȘtre constatĂ©s par Ă©crit. Il est mĂȘme assez gĂ©nĂ©ralement reconnu que l'art. 13/jl ne s’applique qu’aux choses qui font ordinairement la matiĂšre des conventions, ou Ă  ceux qui y ont Ă©tĂ© parties, mais non aux faits. Une possession de trente, de dix ou vingt ans, une construction, une plantation, sont dans ce cas ; mais si alors la loi admet la preuve testimoniale et les prĂ©somptions simples, toujours est-il indispensable que la preuve soit faite. Il faut en effet distinguer entre le mode de preuve et la chose Ă  prouver. La dispense, l’exception ne porte que sur le mode, mais non sur la preuve en elle-mĂȘme. La loi ayant consacrĂ© formellement les diverses maniĂšres d’acquĂ©rir la propriĂ©tĂ©, et l’énonciation quelle en fait Ă©tant nĂ©cessairement limitative, les tribunaux ne pourraient s’en Ă©carter pas plus pour y ajouter que pour en retrancher. Voyez Boiceau, Danty, Argon, Pothier, Toul- lier, Merlin, Damante et Bonnier, sur les cas oĂč la preuve testimoniale et les prĂ©somptions sont admises. On ne pourrait admettre en effet que les tribunaux eussent la facultĂ© de dĂ©clarer propriĂ©taire le demandeur parce qu’il aurait une possession sans titre antĂ©rieure Ă  — 625 — celle du dĂ©fendeur, ou mĂȘme une semblable possession avec titre Ă©manĂ© Ă  non domino, mais qui n’aurait pas durĂ© pendant le temps voulu pour constituer la prescription. Nous avons dĂ©jĂ  dit que la possession, pour constituer un droit, devait non-seulement ĂȘtre antique, mais avoir les caractĂšres lĂ©gaux, sans quoi elle ne constituait qu’une usurpation ; que la loi publicienne n’était pas admise parmi nous ; que les articles du Code sur les divers modes d’acquĂ©rir la propriĂ©tĂ©, et spĂ©cialement ceux relatifs Ă  l’acquisition par le moyen de la prescription proscrivaient positivement la dĂ©cision de la loi publicienne. Nous savons bien que Pothier, du Domaine de propriĂ©tĂ©, et tout rĂ©cemment Molitor, qui ont suivi les interprĂštes du droit romain, veulent nous ramener Ă  l’application de la publicienne; que Pothier, aprĂšs avoir dit que le dĂ©fendeur Ă  la revendication Ă©tait par la demande mĂȘme reconnu possesseur, n’avait rien Ă  prouver et n’avait aucun titre Ă  produire lorsque le demandeur n’en produisait pas d’efficaces, va jusqu’à prĂ©tendre que le demandeur qui a une possession antĂ©rieure Ă  celle du dĂ©fendeur, doit rĂ©ussir dans sa prĂ©tention ; mais on se convaincra aisĂ©ment d’une part qu’il rĂšgne dans l’ouvrage de Pothier sur la revendication une certaine confusion et des contradictions plus ou moins graves, inconvĂ©nients dans lesquels Molitor nous paraĂźt ĂȘtre tombĂ© Ă  son tour, et d’un autre cĂŽtĂ© que notre Code qui a voulu les Ă©viter, en Ă©tablissant des rĂšgles simples, gĂ©nĂ©rales, uniformes, a entendu proscrire sans retour l’application de la loi publicienne. . 57° Je n’ignore pas que, dans certaines circonstances, l’application de la rĂšgle gĂ©nĂ©rale tracĂ©e par le Code pourra sembler rigoureuse ; que, par exemple, il pourra 10 — 626 — arriver qu’il ne manquera au demandeur que peu de temps pour accomplir la prescription de trente annĂ©es ou celle de dix ou vingt ans, et que le dĂ©fendeur n’aura Ă  invoquer que l’aveu tacite de sa possession rĂ©sultant de l’action dirigĂ©e contre lui; mais je rĂ©ponds que s’il Ă©tait permis de s’écarter de la loi, Ă  cause du faible espace de temps qui manquerait au demandeur, il n’y aurait plus de rĂšgle, plus de limite, qu’on pourrait s’en Ă©carter Ă  peu prĂšs constamment et pour tout le temps exigĂ©, et se contenter d’une possession de quelques semaines antĂ©rieure Ă  la demande ; que le demandeur ne peut imputer qu’à lui-mĂȘme la position fausse et dĂ©savantageuse oĂč il se trouve et oĂč il s’est mis eu ne prenant pas d’abord la voie possessoire qu’il est si important de ne pas nĂ©gliger ; qu’il n’a Ă  s’en prendre qu’à lui, s’il s’est mis dans l’impossibilitĂ© d’intenter cette action prĂ©alable, en laissant son adversaire jouir de la chose pendant une annĂ©e, par une possession paisible, publique, non Ă©quivoque et Ă  titre de propriĂ©taire; que toute la faveur doit ĂȘtre pour celui-ci, car il n’est pas prĂ©sumable que son adversaire l’eĂ»t laissĂ© jouir de la chose en maĂźtre, s’il n’eĂ»t Ă©tĂ© convaincu de son droit, chacun ayant l’Ɠil fort ouvert sur ses intĂ©rĂȘts et n’étant pas disposĂ© Ă  abandonner Ă  autrui les avantages que sa propre chose peut produire. 58° Ainsi, aprĂšs avoir bien balancĂ© les avantages et les inconvĂ©nients des deux systĂšmes que nous discutons, nous devons reconnaĂźtre que la loi a eu de trĂšs-bons, de trĂšs-sages motifs pour se prononcer comme elle l’a fait, et nous rĂ©pĂ©terons, en terminant, une raison qui dispense de toutes les autres; c’est que ainsi l’a voulu le lĂ©gislateur, auquel on peut appliquer ce qui a Ă©tĂ© dit pour une autre circonstance Sic volo, sic jubeo, sic pro ratione voluntas. 59° Nous trouvons mĂȘme dans la jurisprudence de la Cour de cassation, et parmi des dĂ©cisions qui nous paraissent contradictoires, un arrĂȘt de la chambre civile, du 22 novembre 1847, rendu sur le pourvoi du sieur Renault contre la commune de Velizy, qui, en cassant un arrĂȘt de la Cour de Paris, confirmatif d’un jugement du tribunal de Versailles, a consacrĂ© les vrais principes, et nous semble avoir fait cesser les incertitudes et les variations de la jurisprudence. Nous croyons qu’on aurait tort d’opposer Ă  cette dĂ©cision un arrĂȘt des requĂȘtes postĂ©rieur * comme Ă©tant venu jeter de nouveaux nuages sur une doctrine dont nous croyons pourtant qu’il importe de proclamer la justice et d’assurer le maintien, dans l’intĂ©rĂȘt si grave et si sacrĂ© de la propriĂ©tĂ©. 60° Ce dernier arrĂȘt, dont les motifs ne nous semblent pas Ă  l’abri de la critique sur tous les points, n’est cependant pas opposĂ© Ă  nos principes sur la nĂ©cessitĂ© de la constatation de la possession et de la dĂ©claration formelle de la prescription. A la vĂ©ritĂ©, l’arrĂȘt de la Cour d’appel, dont les motifs paraissent incomplĂštement rapportĂ©s dans les recueils de jurisprudence, semble s’ĂȘtre bornĂ© Ă  constater l’existence de la possession en faveur de la commune de Fos, depuis 1762 jusqu’en 1813, c’est-Ă -dire pendant plus de trente ans, sans ajouter quelle avait acquis la propriĂ©tĂ© des pĂąturages litigieux par la prescription ; mais l’arrĂȘt de rejet des requĂȘtes se fonde sur ce que la Cour d’appel ,' 9 juin 1832. SĂ©guin contre commune de Fos. — 628 — avait constatĂ© une possession ayant durĂ© de 1762 Ă  1813 et constitutive de la prescription. Cet arrĂȘt conteste le principe que l’action pĂ©titoire emporte reconnaissance de la possession actuelle du dĂ©fendeur; mais, d’une part, c’est lĂ  une erreur attestĂ©e par les lois romaines, par les nombreux auteurs que nous avons citĂ©s dans le premier chapitre et dans celui-ci, et par M. Pardessus, des Servitudes, t. II, p. 226, qui proclament unanimement le principe mĂ©connu par l’arrĂȘt; d’autre part, l’examen et la dĂ©cision de la chambre des requĂȘtes sur ce point Ă©taient complĂštement inutiles dans l’espĂšce, puisqu’elle reconnaissait l’existence de la prescription acquise avant l’action, en faveur de la commune deFos; que l’objet litigieux n’était pas compris dans le contrat d’acquisition de ses adversaires, et qu’enfin on pouvait mĂȘme soutenir que ceux-ci Ă©taient rĂ©ellement les demandeurs originaires, puisqu’ils avaient fait dresser un procĂšs-verbal par leur garde contre un habitant de la commune, pour avoir coupĂ© du bois sur l’immeuble litigieux que ce procĂšs-verbal disait leur appartenir, et qu’ils avaient traduit cet habitant devant le Tribunal de police correctionnelle, qui avait renvoyĂ© les parties Ă  fins civiles pour faire statuer sur la question prĂ©judicielle de propriĂ©tĂ© rĂ©sultant des dĂ©bats respectifs. Cet arrĂȘt n’est donc pas contraire Ă  nos principes, et nous pourrions en invoquer d’autres antĂ©rieurs Ă  celui Renault contre commune de Velizv qui y est conforme. Nous nous bornerons Ă  en citer un du 8 fĂ©vrier I8/3, rendu dans l’espĂšce suivante La commune de Revonnas a formĂ© coutre le sieur Duport de Rivoire une demande en revendication d’un terrain vain et vague; elle a articulĂ© possession im- — 6-29 — mĂ©moriale constitutive de prescription en sa faveur. EnquĂȘte sur la possession et jugement qui accueille la demande de la commune. Mais sur l’appel, la Cour de Lyon infirme et maintient le sieur Duport de Rivoire dans la propriĂ©tĂ© de l’objet litigieux, par le motif que celui-ci Ă©tait au moment de l’action intentĂ©e par la commune en possession exclusive, depuis ving-huit ans, de cet objet, et que l’enquĂȘte n’a nullement prouvĂ© la possession trentenaire antĂ©rieure Ă  celle du sieur de Rivoire, que la commune Ă©tait tenue de prouver d’aprĂšs sa propre demande. La Cour de cassation a rejetĂ© et dĂ» rejeter ce pourvoi *, puisque la commune demanderesse au pĂ©titoire n’avait pas prouvĂ© l’acquisition de la propriĂ©tĂ© par la prescription au moyen d’une possession trentenaire ; elle eĂ»t dĂ» juger ainsi lors mĂȘme que le sieur Duport de Ri- voire n’aurait pas eu une possession de vingt-huit annĂ©es antĂ©rieurement Ă  l’action. 61° Mais il y a notamment deux arrĂȘts, des 18 juin 1838 et 26 aoĂ»t 1839, qui nous paraissent s’ĂȘtre Ă©cartĂ©s des bonnes doctrines. Dans l’espĂšce du premier, en l’absence de tous titres en faveur des parties, d’aucune possession de la part du demandeur, les tribunaux ont adjugĂ© la propriĂ©tĂ© Ă  celui-ci, en se fondant sur ce que depuis un grand nombre d’annĂ©es le terrain Ă©tait inscrit sous son nom, au rĂŽle du cadastre, Ă  celui de la contribution fonciĂšre, et qu’il en avait payĂ© les impĂŽts. Si les tribunaux eussent constatĂ© que ces faits avaient durĂ© trente ans avant l’instance et y eussent puisĂ© la P ArrĂȘt du 8 fĂ©vrier 1843. — 630 — preuve d’une possession acquisitive de prescription, nous n’aurions rien Ă  dire, puisque des prĂ©somptions peuvent, d’aprĂšs les art. 1351, 1358, remplacer la preuve testimoniale, et que la loi n’a pu dĂ©terminer les faits constitutifs de la possession et de la prescription, dont par consĂ©quent l’apprĂ©ciation appartient aux tribunaux; mais Ă©noncer que les faits existent depuis un grand nombre d’annĂ©es, c’est Ă©videmment ne rien dire, et ce vague serait un moyen facile d’éluder la loi. Les faits existaient- ils depuis trente ans ou seulement depuis vingt-huit ans, quinze ans, neuf ans? C’est ce que nous ignorons. Dans l’espĂšce du deuxiĂšme arrĂȘt, commune de Serres contre Lafont, l’erreur nous paraĂźt avoir Ă©tĂ© plus grave encore puisque la propriĂ©tĂ© a Ă©tĂ© adjugĂ©e au demandeur, en se fondant uniquement sur une ancienne possession. Les prĂ©somptions ne sont pas un mode d’acquisition de la propriĂ©tĂ©, mais un mode de preuve de cette acquisition. 11 faut donc constater formellement la condition dont les prĂ©somptions doivent prouver l’existence. 62° Quelques personnes ont essayĂ© d’expliquer la divergence que l’on regrette de rencontrer dans la jurisprudence de la Cour de cassation, par la considĂ©ration que cette Cour ne connaĂźt pas des faits ; que l’apprĂ©ciation qu’en ont faite les Cours d’appel Ă©chappe Ă  sa censure; qu’en trouvant dans les dĂ©cisions de ces Cours la reconnaissance ou dĂ©claration formelle de la propriĂ©tĂ© en faveur du demandeur, elle a pu penser que le vƓu du lĂ©gislateur Ă©tait satisfait. Quant Ă  nous, nous ne pouvons admettre ces raisons qui nous paraissent plus spĂ©cieuses que solides, et nous pensons que les dĂ©cisions judiciaires doivent exprimer avec soin et prĂ©cision la rĂ©union de ces deux conditions, 631 — la dĂ©claration de la propriĂ©tĂ© et la cause d’oĂč elle dĂ©coule. La Cour rĂ©gulatrice a la mission de ramener les tribunaux Ă  l’exacte et uniforme application de la loi. Or, la loi, loin de laisser le jugement de la propriĂ©tĂ© au pouvoir discrĂ©tionnaire des juges, ayant dĂ©terminĂ© avec prĂ©cision les divers modes d’acquĂ©rir la propriĂ©tĂ© et de prouver qu’elle a Ă©tĂ© en effet acquise, une dĂ©cision n’est lĂ©gale et Ă  l’abri de la censure de la Cour rĂ©gulatrice, qu’autant que les juges qui l’ont rendue ont constatĂ© l’existence de ces conditions et qu’ils en ont fait dĂ©couler, comme consĂ©quence, la preuve de la propriĂ©tĂ© en faveur du demandeur. Ainsi, lorsque la prescription de trente, de dix ou vingt ans a Ă©tĂ© invoquĂ©e, ils doivent dĂ©clarer l’existence de la possession pendant le temps voulu par la loi, et par suite l’acquisition de la propriĂ©tĂ© par la prescription. La dĂ©claration de la possession, mĂȘme pendant le temps lĂ©gal, ne suffirait pas s’il n’était en mĂȘme temps constatĂ© par la reconnaissance de la prescription, qu’elle a les caractĂšres exigĂ©s; la possession peut en effet exister sans ĂȘtre publique, paisible, non Ă©quivoque et Ă  titre de propriĂ©tĂ©. La Cour rĂ©gulatrice devrait annuler un arrĂȘt qui ne serait pas motivĂ© ou appuyĂ© sur une base lĂ©gale. C’est au surplus ce qu’elle a fait par l’arrĂȘt dĂ©jĂ  citĂ©, rendu entre Renault et la commune de Yelizy. 63° Du reste, les tribunaux pouvant se dĂ©terminer, comme nous l’avons dĂ©jĂ  dit, par des prĂ©somptions simples, dans tous les cas oĂč la preuve testimoniale est autorisĂ©e, et par consĂ©quent lorsque la possession et la prescription sont invoquĂ©es, auront par cela mĂȘme une grande latitude qui attĂ©nuera aisĂ©mentceque la rĂšgle par nous posĂ©e pourrait parfois prĂ©senter d’un peu rigoureux. — 632 — 64° Les mĂȘmes principes et la mĂȘme solution s’appliqueraient au dĂ©fendeur qui, pour repousser des titres, invoquerait soit des titres contraires, soit une possession constitutive de prescription, ce qui aurait lieu lorsqu’il aurait besoin de ces moyens et notamment dans le cas oĂč il rĂ©clamerait une servitude. De dĂ©fendeur, il deviendrait demandeur, reus in excipiendo fit actor; et il serait tenu d’établir sa propriĂ©tĂ© de la mĂȘme maniĂšre que s’il avait Ă©tĂ© demandeur originaire. 65° Il arrive quelquefois que sur les articulations respectives de possession et de prescription, ou sur les enquĂȘtes et contre-enquĂȘtes, le juge est laissĂ© dans le doute sur la possession, ou mis Ă  mĂȘme de reconnaĂźtre que les deux parties ont une propriĂ©tĂ© Ă©gale, une possession commune ou promiscue ; dans le premier cas, il doit repousser la demande purement et simplement, puisqu’elle n’est pas suffisamment justifiĂ©e et que la provision est due au dĂ©fendeur qui possĂšde ; dans le second cas, il doit dĂ©clarer que l’objet litigieux est une propriĂ©tĂ© commune et indivise entre les parties, et les maintenir en possession dans ces termes jusqu’à ce qu’elles jugent Ă  propos ou l’une d’elles de procĂ©der Ă  un partage. La rĂšgle tantum prƓscriptum quantum possessum ne laisse aucun doute sur ce point. Evidemment un particulier peut acquĂ©rir par la prescription un simple droit de communautĂ© ou d’indivision dans un immeuble. 56° Pour les haies, les fossĂ©s, les murs, les constructions et plantations, le canal artificiel conduisant les eaux Ă  un moulin, Ă  une usine, la loi Ă©tablit en principe gĂ©nĂ©ral une prĂ©somption de propriĂ©tĂ© commune ou mitoyenne, quant aux trois premiers objets, ou une propriĂ©tĂ© entiĂšre et exclusive relativement aux autres, sauf — 633 — les exceptions rĂ©sultant de certains faits, des titres et de la prescription. La sentence de maintenue en possession exclusive des haies, fossĂ©s, murs, n’a d’autre effet que d’en assurer la possession provisoire Ă  celui qui l’a obtenue, et qui peut en avoir acquis la pleine propriĂ©tĂ© par titre ou par prescription ; mais de mĂȘme que le demandeur au pĂ©titoire peut invoquer un titre Ă©crit ou la prescription, de mĂȘme aussi il peut invoquer la prĂ©somption de la loi qui forme un vĂ©ritable titre; et son adversaire peut Ă  son tour combattre cette prĂ©somption, soit par titre, soit par prescription, soit mĂȘme par des prĂ©somptious contraires. La Cour de cassation l’a ainsi jugĂ© pour la baie, par arrĂȘts des 13 dĂ©cembre 1836 et 17 janvier 1838, et la solution qu’elle a donnĂ©e par ces arrĂȘts, s’appliquerait Ă©galement aux fossĂ©s et aux murs. 67" Nous en dirons autant relativement aux servitudes, Ă  celles qui ne peuvent s’acquĂ©rir que par titres, comme Ă  celles qui peuvent s’acquĂ©rir eu outre par la possession. Le propriĂ©taire du fonds que l’on prĂ©tend asservi, et qui a succombĂ© au possessoire, ayant un titre de propriĂ©tĂ© qui rĂ©clame toujours en sa faveur, devra rĂ©ussir dans son action pĂ©titoire, si son adversaire ne prouve pas son droit de servitude par titre ou par prescription ; celui-ci aura toujours eu l’avantage de jouir de la servitude jusqu’à la dĂ©cision au pĂ©titoire. Il en serait de mĂȘme, et par la mĂȘme raison, dans le cas oĂč le juge de paix aurait constatĂ© une possession immĂ©moriale, ainsi que nous l’avons dĂ©jĂ  dit, en nous Ă©tayant d’un arrĂȘt de la Cour de cassation, du 31 juillet 1831. Il est Ă©vident que lorsque le demandeur au pĂ©titoire a prouvĂ© qu’il est propriĂ©taire du fonds, c’est Ă  son adversaire Ă . Ă©tablir — 634 — qu’il a un droit de servitude, d’usufruit ou d’usage sur ce mĂȘme fonds; car la franchise des hĂ©ritages est toujours prĂ©sumĂ©e comme Ă©tant de droit commun, et c’est Ă  celui qui invoque une exception et qui devient demandeur Ă  en prouver l’existence. Les mĂȘmes principes s’appliqueraient aux divers cas oĂč les lois dĂ©clarent la propriĂ©tĂ© rĂ©sulter des rĂšgles sur l’accession ; que l’on eĂ»t succombĂ© ou rĂ©ussi sur l’action relative Ă  la possession des choses qui en sont l’objet, la question de propriĂ©tĂ© resterait entiĂšre et devrait se rĂ©soudre d’aprĂšs ces rĂšgles, sauf la preuve contraire rĂ©sultant de titres, de prĂ©somptions ou de prescription. 68° Nous ne terminerons pas ce chapitre sans faire une observation relative aux choses appartenant au domaine public et consacrĂ©es Ă  un service public. Nous avons dĂ©jĂ  dit dans nos TraitĂ©s des eaux, des chemins, des actions possessoires et dans le chapitre prĂ©cĂ©dent, que ces choses sont hors du commerce, Ă  quels signes ou caractĂšres on pouvait les reconnaĂźtre, comment elles pouvaient rentrer dans le commerce, devenir aliĂ©nables et prescriptibles comme tous les domaines de l’Etat. Art. 2227, Code civil. Nous avons ajoutĂ© que c’était au pouvoir administratif Ă  reconnaĂźtre et dĂ©clarer l’étendue du domaine public, et que si les actes de ce pouvoir laissaient intacte en principe la question de propriĂ©tĂ©, cependant en fait ils la tranchaient presque toujours, de telle sorte que l’appel Ă  la juridiction ordinaire devenait trĂšs-souvent illusoire. Nous ne pouvons que confirmer ce que nous avons dit Ă  cet Ă©gard, en renvoyant aux ouvrages citĂ©s, afin d’éviter d’inutiles rĂ©pĂ©titions. 69 Nous terminerons ce chapitre, en rapportant tex- — 035 — tuellement quatre arrĂȘts de la Cour de cassation, que nous avons citĂ©s et qui nous semblent fortifier et confirmer les principes sur la nĂ©cessitĂ© de la preuve de propriĂ©tĂ© Ă  faire par celui qui intente l’action pĂ©litoire. Nous ferons prĂ©cĂ©der chacun de ces arrĂȘts d’une analyse des faits et de la discussion. PREMIER ARRÊT. Commune de Revonnas, contre Ăźle Rivoire. En 1834, la commune de Revonnas a formĂ©, contre le sieur Duport de Rivoire, une demande en revendication d’un terrain vain et vague, dont le dĂ©fendeur avait la possession, au moins Ă  partir de 1806. A l’appui de sa demande, la commune de Revonnas articulait que de temps immĂ©morial, et jusqu’en 1807, elle avait eu la possession paisible, publique, non Ă©quivoque et Ă  titre de propriĂ©taire du terrain litigieux. Une enquĂȘte eut lieu sur ce point, en suite de laquelle il intervint, le 12 janvier 1836, un jugement du Tribunal de Bourg, qui accueillit la demande de la commune. Appel par le sieur Duport de Rivoire ; et le 19 mai 1841, arrĂȘt de la Cour royale de Lyon, qui infirme et maintient l’appelant dans la propriĂ©tĂ© du terrain contestĂ© attendu qu’il est Ă©tabli au procĂšs qu’en 1806, le sieur de Rivoire, dont les auteurs et lui s’étaient toujours considĂ©rĂ©s comme propriĂ©taires d’une portion d’un terrain inculte appelĂ© le Burlatet, l’a fait dĂ©fricher, y a plantĂ© un bois et en a joui paisiblement, jusqu’au mois de mai 1834, Ă©poque oĂč la commune de Revonnas l’a revendiquĂ©; que pour justifier sa demande en revendication, la commune de Revonnas a Ă©tĂ© admise, par un — 636 jugement du 30 juin 183/i, Ă  prouver divers faits Ă©tablissant qu’elle a joui comme propriĂ©taire du terrain contestĂ©, pendant trente ans, antĂ©rieurement Ă  1806; — attendu qu’aux termes de l’art. 2229, Code civil, pour qu’une jouissance constitue un droit Ă  la propriĂ©tĂ©, il faut qu’elle ait Ă©tĂ© paisible, publique, continue et non Ă©quivoque; qu’il ne rĂ©sulte pas des enquĂȘte et contre- enquĂȘte auxquelles il a Ă©tĂ© procĂ©dĂ©, que la possession de la commune de llevonnas ait eu ce caractĂšre, et qu’elle ait durĂ© pendant le temps nĂ©cessaire pour Ă©tablir son droit de propriĂ©tĂ© sur le terrain litigieux. » Pourvoi en cassation, par la commune de llevonnas, pour fausse application de l’art. 2262, Code civil, et excĂšs de pouvoir, en ce que la Cour royale a attribuĂ© la propriĂ©tĂ© du terrain en litige au sieur de Rivoire, bien qu’il ne produisĂźt aucun titre, et qu’il n’eĂ»t pas en sa faveur une possession trentenaire. ArrĂȘt. — La Cour, attendu qu’il rĂ©sulte de l’arrĂȘt attaquĂ© qu’au moment oĂč la demande en revendication a Ă©tĂ© formĂ©e par le maire de la commune de llevonnas, de Rivoire Ă©tait au moins depuis vingt-huit ans en possession de l’objet revendiquĂ©; — attendu que celui-ci devait en ĂȘtre prĂ©sumĂ© propriĂ©taire tant que la commune n’aurait point justifiĂ©, ainsi qu’elle avait Ă©tĂ© admise Ă  le faire, qu’elle avait joui du terrain contestĂ© Ă  titre de propriĂ©taire, pendant plus de trente ans avant 1806; que l’arrĂȘt constate encore que cette preuve n’a point Ă©tĂ© faite par la commune; qu’en cet Ă©tat, la Cour royale, en dĂ©clarant mal fondĂ©e l’action dirigĂ©e contre de Rivoire, s’est conformĂ©e Ă  la loi ; — rejette, etc. » Du 8 fĂ©vrier 1843.—Ch. req. — 637 70° DEUXIEME ARRÊT. L’Élat contre Cognez et consorts. L’administration des ponts et chaussĂ©es ayant fait abattre et vendre des arbres plantĂ©s sur la route royale de ChĂąlons Ă  Metz, les sieurs Cognez et consorts, qui se prĂ©tendaient propriĂ©taires de ces arbres, ont formĂ© une demande en restitution du prix. Ils soutenaient que ces arbres avaient Ă©tĂ© plantĂ©s par leurs auteurs, et Ă©taient lors de la confection de la route en dehors et Ă  deux mĂštres des fossĂ©s de cette route, qu’on avait depuis Ă©largie aux dĂ©pens des propriĂ©tĂ©s riveraines; enfin, que chaque riverain avait exclusivement, publiquement et sans aucune opposition recueilli les fruits et profitĂ© de l’ébranchage des arbres. L’administration des domaines rĂ©pondit que ces arbies Ă©tant plantĂ©s sur le sol mĂȘme de la route, Ă©taient, aux termes de la loi du 12 mai 1825, rĂ©putĂ©s la propriĂ©tĂ© de l’État, et que la revendication n’en pourrait ĂȘtre admise qu’autant que les riverains prouveraient, soit qu’ils les avaient acquis Ă  titre onĂ©reux, soit qu’ils les ont plantĂ©s Ă  leurs frais, preuve qui ne rĂ©sultait pas de leurs allĂ©gations. Du 2 h aoĂ»t 1843. Jugement du tribunal de ChĂąlons- sur-Marne, qui accueille la demande des sieurs Cognez et consorts — Attendu, porte ce jugement, que les talus, fossĂ©s et accotements de la route en sont les accessoires, et appartiennent, comme la route elle-mĂȘme, Ă  l’Etat, pourquoi on doit supposer que le terrain sur lequel ils reposent a Ă©tĂ© acquis au mĂȘme titre que le sol de viabilitĂ©; — qu’il peut seulement y avoir lieu, dans — 638 certains cas donnĂ©s, Ă  faire rĂ©gler par l’autoritĂ© compĂ©tente, la largeur et l’étendue de ces talus, fossĂ©s et accotements; — attendu que, dans l’espĂšce, il est reconnu que plusieurs des arbres vendus Ă©taient plantĂ©s sur des talus et dĂ©pendances du chemin public, et que la propriĂ©tĂ© n’en peut ĂȘtre attribuĂ©e aux propriĂ©taires riverains, conformĂ©ment Ă  la loi du 12 mai 1825, que lorsqu’ils justifient les avoir plantĂ©s; — attendu qu’il rĂ©sulte de l’aspect des lieux et des profils qui les reprĂ©sentent, que les arbres vendus par l’Etat, comme lui appartenant, sur la route de l’Epine, Ă©taient plantĂ©s rĂ©guliĂšrement en ligne droite ; que la plupart Ă©taient en essence de noyer, qu’on n’y comptait que 2 ormes, essence de bois dur, et 37 frĂȘnes;—que l’Etat ne contestant pas aux riverains la propriĂ©tĂ© d’un grand nombre de ces arbres alignĂ©s, reconnaĂźt ainsi qu’il n’a pas de moyen de justifier qu’il a plantĂ© les autres; — qu’on doit conclure que les riverains qui ont plantĂ© sur leurs terrains ont continuĂ© leurs plantations sur les talus pour prolonger l’alignement des arbres sans interruption ; — que la nature des arbres dĂ©montre encore qu’ils ont Ă©tĂ© plantĂ©s par les riverains, l’Etat n’étant pas dans l’habitude de planter le long des routes des arbres fruitiers ou de bois tendre ; qu’enfin le sol de la route ayant Ă©tĂ© successivement rehaussĂ©, et, par suite, les talus et accotements s’étant Ă©tendus de mĂȘme, un certain nombre d’arbres vendus par l’Etat comme Ă©tant sur ces talus, devaient se trouver, avant cet Ă©tat de choses, en dehors de ces talus, et sur le sol des riverains ; que ces prĂ©somptions sont de nature Ă  Ă©tablir le droit de propriĂ©tĂ© des riverains sur tous les arbres qui longeaient cette partie de la route de l’Epine. » — 639 — Pourvoi en cassation par le prĂ©fet de la Marne au nom de l’administration des domaines, pour violation des art. 558, 1302, 1353 du Code civil, et 1 er de la loi du 12 mars 1825, en ce que le jugement attaquĂ© pour dĂ©cider que les arbres n’étaient pas la propriĂ©tĂ© de l’Etat, qui en Ă©tait prĂ©sumĂ© propriĂ©taire, aux termes de la loi du 1 er mai 1825, s’était fondĂ© non sur un acte Ă©crit, qui seul pouvait ĂȘtre admis pour combattre et contredire les droits de l’Etat, mais sur de simples prĂ©somptions dĂ©pourvues de tout caractĂšre lĂ©gal. ArrĂȘt. — La Cour, attendu que tout en Ă©tablissant une prĂ©somption de propriĂ©tĂ© en faveur de celui sur le terrain duquel des constructions ou plantations ont Ă©tĂ© faites, l’art. 553 du Code civil rĂ©serve la preuve contraire; attendu que la mĂȘme disposition se trouve dans l’art. 1 er de la loi du 12 mai 1825, relativement aux arbres plantĂ©s sur et le long des grandes routes, puisqu’il autorise les riverains Ă  en rĂ©clamer la propriĂ©tĂ©, s’ils Ă©tablissent ou qu’ils les ont acquis Ă  titre onĂ©reux, ou qu’ils les ont plantĂ©s Ă  leurs frais ; attendu que la preuve autorisĂ©e par ces articles ne doit pas, sauf le cas d’acquisition, Ă  titre onĂ©reux, rĂ©sulter nĂ©cessairement d’un acte Ă©crit, et que cette preuve peut ĂȘtre faite par tous les moyens que la loi autorise; que lorsqu’il est question d’établir un fait, la preuve testimoniale est admissible; qu’ainsi, aux termes de l’art. 1353, on peut admettre des prĂ©somptions, pourvu qu’elles soient graves, prĂ©cises et concordantes; attendu que les tribunaux ont le droit d’apprĂ©cier souverainement les faits et de statuer sur la gravitĂ©, la prĂ©cision et la concordance des prĂ©somptions ; attendu que le jugement attaquĂ© a jugĂ© en fait, et en s’appuyant sur diverses prĂ©somptions dĂ©- — 640 — veloppĂ©es dans ses motifs, que les dĂ©fendeurs ont prouvĂ© que les arbres, dont le prix a Ă©tĂ© revendiquĂ©, ont Ă©tĂ© plantĂ©s Ă  leurs frais; attendu, dĂšs lors, qu’en leur attribuant le prix des arbres vendus par l’administration, ce jugement s’est conformĂ© Ă  l’art. 1 er de la loi du 12 mai 1825, et n’a violĂ© ni l’art. 553 du Code civil, ni aucunes autres dispositions du Code relatives aux prĂ©somptions lĂ©gales; rejette, etc. » Du 24 fĂ©vrier 1845, Chambre civile. 71 " TROISIÈME ARRÊT *. Renault contre la commune de Velizy. Un sieur Renault Ă©tait propriĂ©taire de la ferme de VĂ©lizy, d’origine nationale, sise commune de ce nom, arrondissement de Versailles, qu’il avait acquise de M“' Guillaume, qui elle-mĂȘme la tenait de celui qui en Ă©tait devenu adjudicataire. Un terrain traversant une des dĂ©pendances de la ferme avait Ă©tĂ© possĂ©dĂ© par le sieur Renault et ses prĂ©dĂ©cesseurs, lorsqu’en 1834 la commune l’inscrivit sur le tableau de ses chemins vicinaux, en reconnaissant toutefois expressĂ©ment la possession du sieur Renault, et en lui rĂ©servant la question de propriĂ©tĂ©, et peu de temps aprĂšs assigna ce particulier devant le Tribunal de Versailles pour se faire dĂ©clarer propriĂ©taire de ce terrain, faire condamner le sieur Renault Ă  lui en restituer la possession et Ă  lui payer des dommages-intĂ©rĂȘts Ă  raison de la jouissance que lui et ses auteurs en avaient eue. Elle prĂ©tendait que ce terrain avait toujours eu le carac- ' ArrĂȘt trĂšs-important, trĂšs-remarquable. — 641 — tĂšre de chemin public, invoquait le classement et la vente nationale qui suivant elle excluait ce terrain litigieux de la vente. Le sieur Renault repoussa cette prĂ©tention, soutenant que, bien avant l’adjudication nationale, ce terrain avait Ă©tĂ© incorporĂ© Ă  la ferme, et Ă©tait considĂ©rĂ© comme en faisant partie intĂ©grante ; qu’il Ă©tait compris dans l’adjudication nationale ; que ses vendeurs et lui en avaient eu constamment la possession, lui en avaient transmis la propriĂ©tĂ©, et que le classement n’avait pu l’en priver. Un premier jugement renvoie les parties devant l’administration pour l’interprĂ©tation de la vente. 11 est dĂ©clarĂ© que ses termes sont insuffisants pour juger la question qui ne peut ĂȘtre dĂ©cidĂ©e que par les anciens titres et autres moyens du droit commun. Les parties en revinrent au Tribunal de Versailles qui adjugea la propriĂ©tĂ© Ă  la commune, tout en reconnaissant la possession de M. Renault, et refusa d’allouer une indemnitĂ© pour les fruits, attendu que ce dernier avait possĂ©dĂ©, de bonne foi. La Cour d’appel de Paris confirma en adoptant les motifs des premiers juges. Le sieur Renault s’étant pourvu en cassation, en se fondant sur ce qu’étant en possession de l’objet litigieux et dĂ©fendeur, la commune ne pouvait obtenir gain de cause qu’en prouvant sa propriĂ©tĂ© ; qu’il ne suffisait pas de dire qu’il n’avait pas prouvĂ© sa propriĂ©tĂ©, et d’invoquer le classement ou la vente nationale, dĂ©clarĂ©e insuffisante, il intervint le 22 novembre 1847 Deville- neuve et Carette, 1848-1 -24, arrĂȘt de cassation dans lequel on lit les motifs suivants Vu l’art. 1315 du Code civil ; attendu que pour Ă©carter le bĂ©nĂ©fice de la possession et de la bonne foi de Re- 41 042 — nault, quant Ă  la propriĂ©tĂ© du terrain litigieux, l’arrĂȘt attaquĂ© s’est fondĂ© uniquement sur les plans, enquĂȘtes et actes administratifs qui ont dĂ©terminĂ© le classement du terrain comme chemin vicinal, lesquels n’ont pu avoir pour objet que la destination donnĂ©e par l’autoritĂ© audit terrain, sans rien prĂ©juger sur la question du procĂšs, rĂ©servĂ©e par l’arrĂȘtĂ© mĂȘme de classement, Ă  savoir la propriĂ©tĂ© antĂ©rieure de ce terrain et les indemnitĂ©s qui pouvaient en ĂȘtre la consĂ©quence ; attendu, sur cette question du procĂšs, que ledit arrĂȘt s’est bornĂ© Ă  dĂ©clarer que Renault ne justifiait pas de sa propriĂ©tĂ© antĂ©rieure, sans Ă©tablir que cette propriĂ©tĂ© antĂ©rieure appartint Ă  la commune de VĂ©lizv, autrement qu’en se rĂ©fĂ©rant aux actes de vente nationale mentionnĂ©s ci-dessus, dĂ©clarĂ©s insuffisants sur ce point par l’autoritĂ© qui Ă©tait compĂ©tente pour les interprĂ©ter ; attendu en droit qu’aux termes de l’art, prĂ©citĂ© du Code civil, ce n’était pas Ă  Renault qui Ă©tait dĂ©fendeur, et avait la possession, qu’incombait l’obligation de prouver le droit de propriĂ©tĂ©, mais bien Ă  la commune qui le revendiquait, par l’action quelle avait intentĂ©e contre lui ; d’oĂč il suit qu’en dĂ©cidant comme il l’a fait, ledit arrĂȘt a formellement mĂ©connu le principe Ă©crit dans l’article 1315 du Code civil, qui impose Ă  tout demandeur l’obligation de justifier de son droit, et qu’en consĂ©quence, il a expressĂ©ment violĂ© ledit article ; casse. » 72° QUATRIÈME ARRÊT. SĂ©guin contre commune de Fos. Le 9 octobre 1839, les sieurs SĂ©guin frĂšres se rendirent adjudicataires des marais Paludset JoncquiĂšres, si- — 643 — tuĂ©s au terroir de la commune de Fos, de la contenance de l,93Zi hectares environ, appartenant, est-il dans l’acte, pour moitiĂ© aux hoirs de feu Charles-Michel-Anne d’Ar- cussia, et pour l’autre moitiĂ© Ă  la dame de Renaud d’Allen, tous reprĂ©sentant le sieur de Porcellet, leur ancĂȘtre. Le 25 juin 1848, le garde particulier des sieurs SĂ©guin dressa procĂšs-verbal, constatant qu’il avait trouvĂ© le sieur Joseph Aymard, propriĂ©taire, coupant du bois sur le coussou, au pĂąturage dit de Guignonnet, appartenant aux sieurs SĂ©guin. Le sieur Aymard ayant Ă©tĂ© citĂ© en police correctionnelle, la commune de Fos intervint pour prendre son fait et cause, et demanda Ă  ĂȘtre renvoyĂ©e Ă  fins civiles, afin d’établir ses droits Ă  la propriĂ©tĂ© du coussou du Guignonnet. Ce renvoi ayant Ă©tĂ© prononcĂ©, la question de propriĂ©tĂ© fut portĂ©e devant le Tribunal civil d’Aix, et la commune, agissant comme demanderesse, conclut Ă  ĂȘtre dĂ©clarĂ©e seule et lĂ©gitime propriĂ©taire des terrains communaux dont il s’agit, et dĂ©nommĂ©s du Grand-PĂątis et de Guignonnet, et Ă  ce que, en consĂ©quence, dĂ©fense fĂ»t faite aux sieurs SĂ©guin de la troubler Ă  l’avenir dans la propriĂ©tĂ© et jouissance entiĂšre desdits coussous, etc. — La commune reconnaissait qu’elle n’avait pas de titres Ă  l’appui de sa demande, mais elle prĂ©tendait qu’elle avait acquis la chose revendiquĂ©e par une possession trentenaire Ă  titre de propriĂ©taire. 17 aoĂ»t 1849, jugement qui dĂ©clare la commune mal fondĂ©e dans sa demande, attendu que cette commune Ă©tant usagĂšre des biens revendiquĂ©s, n’a pu en prescrire la propriĂ©tĂ©, et qu’elle n’a ni titre ni possession. Appel par la commune, qui a soutenu qu’elle avait — GU — possĂ©dĂ© Ă  titre de propriĂ©taire, et que les objets litigieux n’avaient pas Ă©tĂ© compris dans l’adjudication du 9 octobre 1839, au profit des sieurs SĂ©guin. 12 juin 1850, arrĂȘt de la Cour d’Aix, qui ordonne l’application sur les lieux des titres des sieurs SĂ©guin, et aprĂšs cette application faite, 1 er aoĂ»t 1851, arrĂȘt dĂ©finitif qui dĂ©cide d’abord que les pĂąturages litigieux n’ont pas Ă©tĂ© compris dans l’adjudication consentie aux sieurs SĂ©guin en 1839, et qui ensuite s’exprime en ces termes — Attendu, quant Ă  la possession annale, que les intimĂ©s n’en ont pas la saisine, n’ont rien fait pour l’obtenir, et n’allĂšguent aucun fait Ă  l’appui d’une telle prĂ©tention, et qu’il suit de lĂ  que les intimĂ©s sont non recevables Ă  contester Ă  la commune la possession, si elle en fournit la preuve contre eux ; — attendu, quant Ă  cette preuve de possession de la commune, qu’il lui a Ă©tĂ© certainement facultatif de prendre fait et cause de l’un de ses communistes, poursuivi correctionnellement pour avoir coupĂ© du bois dans une propriĂ©tĂ© possĂ©dĂ©e par elle, Ă  l’exclusion des intimĂ©s, et de renoncer ainsi Ă  l’action possessoire qui aurait pu lui compĂ©ter ; — attendu qu’il est de doctrine et de rĂšgle de droit que, sans une juste cause, la dĂ©tention n’est qu’une usurpation c’est ce qu’enseigne Domat, et avec la loi romaine, il enseigne aussi que c’est encore en vue de la possession, si elle a commencĂ© par un mauvais titre comme dans l’espĂšce, que, si la question de possession se trouvait douteuse, ne paraissant pas assez de fondement pour maintenir l’un des possesseurs, le possessoire serait jugĂ© en faveur de celui qui aurait le titre le plus apparent, ou l’on ordonnerait que la chose litigieuse serait mise en sĂ©questre jusqu’à ce que la question de propriĂ©tĂ©, ou — 645 celle de la possession, aurait Ă©tĂ© jugĂ©e; il enseigne encore que la troisiĂšme cause de la dĂ©tention est l’usurpation par voie illicite, et cette maniĂšre de dĂ©tention ne mĂ©rite pas le nom de possession. Ainsi, ajoute-t-il, c’est par la cause de la dĂ©tention qu’il faut juger si une dĂ©tention est une possession ou seulement une usurpation ; il enseigne encore que la vraie possession est celle du maĂźtre Proprietas apossessione separari non potest, etc., ff. de acq. vel. amitt; toutes maximes qui repoussent les exceptions et la possession des intimĂ©s ; — et quant Ă  la possession de la commune ; — attendu qu’il rĂ©sulte d’actes nombreux, authentiques et non contestĂ©s, quant Ă  leur contenu, que, Ă  partir de 1762 jusqu’en 1813, la commune de Fos a pris et continuĂ© la possession des deux coussous litigieux, et cela sans opposition dont il apparaisse ; — attendu en dernier lieu, qu’il rĂ©sulte des laits de la cause que la commune a interverti son titre d’usage par la contradiction formelle et constante qu’elle a opposĂ©e au droit de propriĂ©taire... — Par ces motifs, dĂ©clare que la commune de Fos est seule et lĂ©gitime propriĂ©taire des terrains situĂ©s dans ladite commune, et dĂ©signĂ©s sous les noms de du Grand-PĂątis et de coussou du Guignonnet, » Pourvoi en cassation par les sieurs SĂ©guin, pour violation de l’art. 26 du Gode de procĂ©dure, et des principes consacrĂ©s par les art. 1315, 1352 et 2230 du Code NapolĂ©on, et pour fausse application des art. 2228, 2238 et 2262 du mĂȘme Code, en ce que l’arrĂȘt attaquĂ© a attribuĂ© la propriĂ©tĂ© des objets litigieux Ă  la commune de Fos, bien quelle n’eĂ»t aucun titre, et qu’en agissant par voie d’action pĂŽtitoire, elle eĂ»t reconnu qu’elle n’avait pas la possession. — 646 — ArrĂȘt. — La cour, attendu que si, aux termes de l’art. 26 du Code de procĂ©dure, l’introduction d’une instance au pĂ©titoire a pour consĂ©quence d’empĂȘcher celui qui l’a engagĂ©e de recourir ultĂ©rieurement Ă  l’action pos- sessoire, et s’il se trouve ainsi privĂ© de l’avantage qu’il aurait eu Ă  se dĂ©fendre du trouble apportĂ© Ă  sa poursuite par la seule force de la possession annale, et sans avoir besoin d’établir son droit de propriĂ©tĂ© par titre ou par prescription, il ne rĂ©sulte nĂ©anmoins, ni du texte dudit art. 26, ni de l’ensemble des dispositions de la loi sur cette matiĂšre, que l’art. 26 puisse ĂȘtre entendu en ce sens, que la demande au pĂ©titoire implique nĂ©cessairement de la part du demandeur, soit un aveu tacite que la possession appartient Ă  son adversaire, soit une renonciation Ă  se prĂ©valoir lui-mĂȘme de cette possession comme servant de base Ă  la prescription ; — attendu, dĂšs lors, que la Cour d’appel d’Aix, ayant constatĂ© en fait que la possession des immeubles litigieux appartenait, au moment oĂč la demande a Ă©tĂ© formĂ©e, non Ă  SĂ©guin frĂšres et consorts, mais Ă  la commune de Fos, a pu sans violer l’art. 26 du Code de procĂ©dure, ni aucune des dispositions du Code NapolĂ©on sur la prescription et la possession, et quoique la commune figurĂąt au procĂšs comme demanderesse au pĂ©titoire, ordonner d’abord par son arrĂȘt du 12 juin 1850, l’application aux lieux contentieux des titres produits au procĂšs, et notamment du procĂšs-verbal d’adjudication en vertu duquel lesdits SĂ©guin frĂšres et consorts se prĂ©tendaient propriĂ©taires, et dĂ©cider ensuite dans son arrĂȘt dĂ©finitif du 1 er aoĂ»t 1851, et par une apprĂ©ciation souveraine des faits et actes de la cause, d’une part, que la commune de Fos justifiait, Ă  l’égard des immeubles litigieux, d’une possession Ă  titre 647 — de propriĂ©taire, non interrompue depuis 1762 jusqu’à l’origine du procĂšs, et capable de fonder la prescription ; et, d’autre part, que les titres produits par les frĂšres SĂ©guin et consorts Ă©taient insuffisants, non-seulement pour contrebalancer la possession de la commune, mais encore pour donner aux frĂšres SĂ©guin et consorts le droit de contester l’existence et le caractĂšre de cette possession ; rejette, etc. » Du 9 juin 1852. — Ch. req. — 648 — CHAPITRE TROISIÈME. DES INSTANCES SUR LES ACTIONS TÊTITOIKES. — DES JUGEMENTS ET DES VOIES DE RECOURS DONT ILS PEUVENT ÊTRE L’OBJET. SOMMAIRE 73° En gĂ©nĂ©ral, il doit y avoir essai de conciliation avant l’action pĂ©titoire. — Juge de paix compĂ©tent. 74° Dans les actions contre l’État, les dĂ©partements, les communes, il y a lieu au dĂ©pĂŽt prĂ©alable d’un mĂ©moire Ă  la prĂ©fecture. — Jurisprudence de la Cour de cassation sur l’exĂ©cution de cette formalitĂ©. 75" Mais cette formalitĂ© est inapplicable au cas oĂč l’État, les dĂ©partements, les communes sont demandeurs contre des par- liculiers. — Secus Ă  l'Ă©gard des procĂšs de l’État, des dĂ©partements, des communes entre eux. 76° AprĂšs l’essai infructueux de conciliation, ou l’observation des formalitĂ©s et l’expiration des dĂ©lais prescrits par les lois de 90, 1837 et 1838, le demandeur doit rechercher quel est le Tribunal compĂ©tent. 77° Les juges de paix ne connaissent jamais des actions pĂ©titoires. 78° Les tribunaux civils d’arrondissement connaissent seuls de ces actions en premiĂšre instance. — Lorsque l’action est purement rĂ©elle, le Tribunal de la situation de l’objet litigieux est seul compĂ©tent. — En cas d'action mixte, le demandeur a le choix entre le Tribunal de la situation et celui du domicile du dĂ©fendeur. — En quels cas les actions sont rĂ©elles ou mixtes. — Dissentiment avec Pothier, RodiĂšre, Chauveau, sur quelques points. Quid des actions pour servitudes naturelles ou lĂ©gales? 79° Immeubles par destination considĂ©rĂ©s en eux-mĂ©mes ne peuvent donner lieu Ă  l’action pĂ©titoire; secus avec l’objet principal. — Actions en payement de champart, complanl, d’un cens, d'une rente fonciĂšre en argent, en dĂ©claration d’hypothĂšque, en dĂ©laissement ne sont pas pĂ©titoires. — 649 80° Exceptions Ă  la compĂ©tence du Tribunal de la situation ou du domicile du dĂ©fendeur, en matiĂšre de sociĂ©tĂ©, de faillite, de partage de succession ou en cas d’élection de domicile. 81° De ceux qui ont capacitĂ© pour intenter les actions pĂštitoircs ou pour y dĂ©fendre, et de ceux qui sont reprĂ©sentĂ©s par des tiers mineurs, interdits, Ă©mancipĂ©s, femmes mariĂ©es, État, dĂ©partements, communes, liste civile, Ă©trangers, crĂ©anciers, etc., etc. 82° Comment l’objet litigieux doit ĂȘtre dĂ©signĂ© dans l’exploit d’ajournement. 83° Action doit ĂȘtre dirigĂ©e contre le possesseur ou dĂ©tenteur en cas de dĂ©possession ou de trouble dans la possession ou la propriĂ©tĂ©. — DiffĂ©rence entre l’un et l’autre. — ConsĂ©quences. — Opinion de Joccotton. 84° Action en cas de propriĂ©tĂ© commune et de possession promis- cue. — DĂ©possession. — Partage. 83» Cas de dĂ©nĂ©gation de possession ou de trouble par le dĂ©fendeur, ou de dĂ©fense Ă  l’action comme s’il Ă©tait possesseur quoique ne l’étant pas. 86° Cas de perte de la possession par le dĂ©fendeur, avant le jugement. 87" Cas oĂč l’action pĂ©titoire peut ĂȘtre intentĂ©e contre les hĂ©ritiers, pour le fonds et les fruits. 88" Vente et mise en possession simulĂ©es n’empĂȘchent pas l’action contre le vrai propriĂ©taire et possesseur et contre le complice de la simulation. 89" Le demandeur doit ĂȘtre propriĂ©taire au moment de l’action et du jugement; quid, s’il ne l’était devenu que depuis l’action? 90° Justification Ă  faire par le demandeur. 91° Marche Ă  suivre par le dĂ©fendeur et ses obligations ; ses droits jusqu’à la dĂ©cision. — SĂ©questre par exception. 92° Immeuble ayant pĂ©ri avant ou pendant la litiscontestalion. 93° Voies de recours contre le jugement, de deux sortes ordinaires, extraordinaires. 94° Appel; dans quels cas. PremiĂšre condition que le jugement soit en premier ressort. 93° Cas oĂč le jugement est en premier ressort; cas oĂč il est en dernier ressort. — Fin de non recevoir, tirĂ©e du dernier ressort, est d’ordre public et peut ĂȘtre suppléée d’office par les juges. — 630 — 96° Tout ce qui est dit dans le prĂ©sent chapitre s’applique Ă  la pĂ©tition d’hĂ©rĂ©ditĂ©. — Ch. Dumoulin. — Explications. 97“ Renvoi au Code de procĂ©dure pour la requĂȘte civile, la tierce opposition, la prise Ă  partie. — DĂ©finition de la compĂ©tence et des attributions de la Cour de cassation. 73° La premiĂšre chose Ă  faire relativement Ă  l’instance sur l’action pĂ©titoire, c’est de la faire prĂ©cĂ©der du prĂ©liminaire de conciliation art. 48 du Code de procĂ©dure civile, Ă  moins que l’affaire ne se trouve dans l’un des cas d’exception Ă©noncĂ©s en l’art. 49 du mĂȘme Code. Le juge de paix, compĂ©tent sur ce prĂ©liminaire, est toujours celui du domicile du dĂ©fendeur, bien que l’action soit nĂ©cessairement rĂ©elle et quelquefois mixte. 74° Mais il est des cas oĂč, malgrĂ© la dispense de l’essai de conciliation, le demandeur au pĂ©titoire est soumis Ă  une formalitĂ© prĂ©alable. Ainsi en matiĂšre domaniale, celui qui veut attaquer l’Etat doit, aux termes de l’art. 15 du titre 3, de la loi du 28 octobre — 5 novembre 1790, adresser prĂ©alablement au prĂ©fet du dĂ©partement, un mĂ©moire expositif de la demande, Ă  peine de nullitĂ©. D’aprĂšs l’art. 37 de la loi du 10 mai 1838, aucune action ne peut ĂȘtre intentĂ©e contre un dĂ©partement Ă  peine de nullitĂ©, avant le dĂ©pĂŽt Ă  la prĂ©fecture d’un semblable mĂ©moire. MalgrĂ© la peine de nullitĂ© prononcĂ©e par la premiĂšre de ces lois, la Cour de cassation, Chambre des requĂȘtes, a dĂ©cidĂ©, les 20 aoĂ»t 1833 et 20 janvier 1845, que l’assignation pouvait ĂȘtre donnĂ©e avant dĂ©pĂŽt du mĂ©moire, pourvu que ce dĂ©pĂŽt eĂ»t lieu avant toute procĂ©dure de la part du demandeur et de la part de l’Etat. On jugerait — 651 probablement de mĂȘme pour les affaires dĂ©partementales, puisque la loi de 1838 est conçue dans des termes identiques Ă  ceux de la loi de 90. Toutefois, en prĂ©sence des dispositions trĂšs-formelles de ces deux lois, nous croyons que la jurisprudence pourrait changer et qu’il est plus sĂ»r de dĂ©poser le mĂ©moire, d’attendre la rĂ©ponse du prĂ©fet ou l’expiration des dĂ©lais fixĂ©s par les lois prĂ©citĂ©es, avant d’intenter l’action. Deux autres arrĂȘts de la mĂȘme Cour, des 26 dĂ©cembre 1836 et 31 mai 1837, ont dĂ©cidĂ© que la loi de 1790 ne s’applique pas aux demandes formĂ©es en exĂ©cution de l’art. 58 du Code forestier, par des concessionnaires d’affectations dans les bois de l’Etat qui veulent faire reconnaĂźtre, par les tribunaux, la rĂ©gularitĂ© de leurs titres. Enfin l’art. 51 de la loi du 18 juillet 1837 exige aussi le dĂ©pĂŽt prĂ©alable d’un mĂ©moire adressĂ© au prĂ©fet, avant d’intenter un procĂšs Ă  une commune ou section de commune, et quoique cette loi ne prononce pas la peine de nullitĂ© en cas d’infraction, que consĂ©quemment la jurisprudence de la Cour de cassation soit ici Ă©galement applicable, nous croyons, d’aprĂšs les termes impĂ©ratifs de la loi du 18 juillet, que nos observations sur cette jurisprudence doivent aussi s’appliquer aux procĂšs contre les communĂ©s. 75° Mais le dĂ©pĂŽt du mĂ©moire et les autres formalitĂ©s ou dĂ©lais prescrits par les lois prĂ©citĂ©es, ne sont pas applicables Ă  l’Etat, aux dĂ©partements et communes qui intentent des actions contre des particuliers, c’est-Ă -dire qui seraient demandeurs. ArrĂȘt de la Cour de cassation, du 6 janvier 1852. Cependant l’Etat, le dĂ©partement, la commune, qui intenteraient l’un contre l’autre une action — 652 — pĂ©titoire, seraient tenus Ă  l’observation de ces formalitĂ©s. 76° AprĂšs l’essai infructueux de conciliation , lorsque l’affaire n’en est pas dispensĂ©e, ou l’observation des formalitĂ©s et dĂ©lais prescrits par les lois de 90,1837,1838, le demandeur doit rechercher avec soin quel est le Tribunal compĂ©tent, pour connaĂźtre de son action au fond. 77° Les juges de paix ne peuvent jamais connaĂźtre, comme nous l’avons dĂ©jĂ  dit n° 18, des actions pĂ©titoires. Quelque minime que soit la valeur de l’immeuble ou du droit immobilier qui fait l’objet du litige, le Tribunal civil de l’arrondissement est seul compĂ©tent. Cette solution s’appliquerait Ă  un terrain de quelques pieds vain et vague, ne rapportant rien et d’un usage nul ou bien affermĂ© un franc par an. En effet, la loi du 2/i avril 1790, celles des 11 avril et 25 mai 1838, ne dĂ©fĂšrent aux juges Ăźle paix que les actions personnelles mobiliĂšres, jusqu’à une somme modique, et quant aux actions immobiliĂšres, que celles relatives Ă  la possession, Ă  des indemnitĂ©s et dommages-intĂ©rĂȘts,Ă des opĂ©rations purement matĂ©rielles. 78° D’aprĂšs l’art. 59 du Code de procĂ©dure, titre des ajournements, en matiĂšre rĂ©elle, le dĂ©fendeur doit ĂȘtre assignĂ© devant le Tribunal de la situation de l’objet litigieux, et en matiĂšre mixte devant le juge de la situation de l’objet litigieux ou devant le juge du domicile du dĂ©tendeur ; ainsi en matiĂšre mixte, le demandeur a le choix entre deux tribunaux. Or, l’action pĂ©titoire tendant Ă  obtenir la propriĂ©tĂ© d’un immeuble ou d’un droit foncier sur un immeuble est toujours rĂ©elle ; quelquefois elle est rĂ©elle et personnelle, c’est-Ă -dire mixte. S’il n’y a pas obligation personnelle du dĂ©fendeur, elle devra ĂȘtre portĂ©e devant le juge de la situation. Mais parfois, une obligation per- sonnelle se joindra Ă  la possession de l’immeuble, soit qu’il ait Ă©tĂ© vendu, Ă©changĂ©, donnĂ© par le dĂ©fendeur qui en aura indĂ»ment conservĂ© la possession et perçu les fruits, soit que ces faits remontent Ă  son auteur dont il serait hĂ©ritier Ă  titre universel car l’obligation personnelle de l’auteur passe Ă  ses hĂ©ritiers Ă  titre universel, Pothier, RodiĂšre. Et alors le demandeur, comme nous l’avons dĂ©jĂ  dit, pourra assigner Ă  son choix ou devant le juge de la situation, ou devant celui du domicile du dĂ©fendeur. Nous pensons qu’à moins de raisons particuliĂšres, il devra opter pour le premier ; le procĂšs sera ainsi moins coĂ»teux, plus facile et plus prompt Ă  juger dans les cas d’enquĂȘte, de visite de lieux, d’expertise, et les magistrats devront mieux connaĂźtre la cause. Mais si l’action pĂ©dtoire Ă©tait dirigĂ©e contre un tiers qui n’aurait pas contractĂ© d’obligation personnelle, relativement Ă  l’immeuble revendiquĂ©, et qui ne serait pas hĂ©ritier de celui qui l’aurait donnĂ©, vendu ou Ă©changĂ©, alors cette action ne serait pas mixte, lors mĂȘme qu’elle conclurait Ă  des comptes et restitutions de fruits, Ă  des indemnitĂ©s de dĂ©gradations, car ces rĂ©clamations accessoires ne pourraient changer la nature de l’action principale ; au contraire, elles doivent en suivre la nature, d’aprĂšs la maxime accessorium sequitur vicem rei princi- palis; le demandeur n’aurait donc pas le choix entre le Tribunal de la situation de l’immeuble et celui du domicile du dĂ©fendeur ; il serait obligĂ© des’ adresser au premier. Lorsqu’il s’agit de faire exĂ©cuter par le donateur, le vendeur ou l’échangiste, l’acte d’aliĂ©nation qu’il a souscrit en faveur du demandeur au pĂ©titoire, ou de la part des premiers de faire annuler ou rĂ©soudre ces actes, de faire rĂ©duire les donations comme excĂ©dant la portion 654 — disponible, et de se faire remettre en possession des immeubles, l’obligation personnelle est pour ainsi dire l’objet principal du dĂ©bat. On veut la faire juger et apprĂ©cier pour parvenir Ă  avoir la possession de l’immeuble, comme consĂ©quence de la dĂ©cision sur cette obligation personnelle. La dĂ©livrance de l’immeuble n’est que secondaire, les fruits et indemnitĂ©s de dĂ©gradations ne sont Ă  leur tour qu’un accessoire de la dĂ©livrance de l’immeuble. L’action est personnelle dans son point de dĂ©part, dans son principe, et dirigĂ©e contre la chose, dans son but ou sa fin ; elle est personnelle et contre la chose, perĂżonalis in rem scripta ; elle est donc mixte et le demandeur peut choisir entre le Tribunal de la situation et celui du domicile du dĂ©fendeur. Quand, au contraire, le possesseur de l'immeuble n’est pas personnellement obligĂ©, l’action est dirigĂ©e principalement contre la chose. Si le demandeur ne peut se la faire dĂ©livrer qu’en prouvant qu’il en est propriĂ©taire, ce n’est pas toutefois dans une obligation souscrite par le dĂ©fendeur qu’il puise cette preuve; par consĂ©quent alors, la chose est l’objet principal de la demande, et nous pensons contrairement Ă  l’opinion de Pothier, de la Revendication, que les fruits, les dommages-intĂ©rĂȘts n’en Ă©tant que les accessoires, ne peuvent ĂȘtre pris en considĂ©ration pour le rĂšglement de la compĂ©tence qui appartient exclusivement au Tribunal de la situation ; c’est aussi l’opinion de M. RodiĂšre, professeur de procĂ©dure Ă  Toulouse, t. I, p. lie, et c’est dans ce sens que la Cour de cassation s’est prononcĂ©e *. L’action par laquelle le vendeur d’un immeuble de- 0 ArrĂȘt du 3 aoĂ»t 1847; Devil. et Car. 1847-1-802. — 655 — manderait que l’acheteur fĂ»t tenu de rĂ©aliser le contrat de vente, de payer le prix, avec offre de dĂ©livrer la chose, ne pourrait ĂȘtre considĂ©rĂ©e, ni comme une action pĂ©ti- toire, ni mĂȘme comme une action rĂ©elle. Le demandeur en effet ne rĂ©clame pas la propriĂ©tĂ© ; au contraire il reconnaĂźt qu’elle appartient Ă  son adversaire et son action n’a d’autre but que de lui faire obtenir le prix consistant en numĂ©raire, en vertu de l’obligation personnelle con- contractĂ©e par l’acquĂ©reur *. Mais il en serait diffĂ©remment dans les cas oĂč il s’agirait de l’exĂ©cution d’un acte d’échange d’immeubles, puisque l’action tendrait Ă  se faire reconnaĂźtre propriĂ©taire d’un immeuble et Ă  s’en faire mettre en possession. M. llodiĂšre, professeur Ă  Toulouse, t. I, p. 115, tout en disant que rien n’est plus difficile Ă  dĂ©terminer que la nature et les conditions des actions mixtes, tend Ă  les multiplier singuliĂšrement contre l’opinion de son collĂšgue M. Chauveau, professeur de la mĂȘme facultĂ©. En effet, tandis que celui-ci va mĂȘmejusqu’à nier l’existence des actions mixtes, le premier reconnaĂźt le caractĂšre et donne le nom de ces actions aux demandes en nullitĂ©, rĂ©vocation ou rĂ©duction des divers actes d’aliĂ©nation dont nous avons parlĂ©, intentĂ©es contre les tiers acquĂ©reurs, tout comme si elles l’étaient contre les acquĂ©reurs primitifs, ne mettant ainsi aucune diffĂ©rence entre les unes et les autres. Nous ne saurions admettre une semblable opinion. Nous ne pouvons voir dans l’acquisition des tiers cette obligation personnelle tacite qu’y trouve M. RodiĂšre, obligation qui n’existe pas et qui d’ailleurs ne saurait * 5 mars 1850, mĂȘme Cour, mĂȘme recueil 1830-1—160. — 636 — suffire pour dĂ©roger Ă  la simple rĂ©alitĂ©, qui oblige Ă  saisir le Tribunal de la situation exclusivement. Nous considĂ©rons avec M. RodiĂšre, comme purement rĂ©elles, les demandes qui n’ont trait qu’à des servitudes dĂ©rivant de la situation des lieux ou de l’autoritĂ© de la loi, parce que les parties ne peuvent ĂȘtre Ă  cet Ă©gard respectivement obligĂ©es, qu’à raison des immeubles qu’elles dĂ©tiennent, ce qui exclut toute idĂ©e de lien personnel. On peut voir aussi le trĂšs-bon TraitĂ© des actions civiles de M. Joccotton. 79° Les objets mobiliers que la loi dĂ©clare immeubles par destination, ne nous paraissent pas pouvoir donner lieu Ă  une action pĂ©titoire, lorsqu’ils sont seuls l’objet d’une demande de la part de celui qui n’élĂšverait aucune prĂ©tention Ă  l’objet principal. La demande ne pourrait ĂȘtre immobiliĂšre et pĂ©titoire que lorsqu’elle comprendrait la chose principale, et les objets mobiliers accessoires comme consĂ©quence de la propriĂ©tĂ©. Les actions en payement d’un champart, d’un com- plant, d’un cens, d’une rente fonciĂšre en argent, en dĂ©claration d’hypothĂšque, quoique pouvant ĂȘtre considĂ©rĂ©es comme rĂ©elles et assujetties aux formalitĂ©s prescrites par l’article 64 du Code de procĂ©dure *, ne sont pas des actions pĂ©titoires, et nous n’avons pas Ă  nous en occuper. Nous en dirons autant de l’action en dĂ©laissement intentĂ©e contre un tiers dĂ©tenteur. Code civil, 2166 Ă  2179. 80° Ru reste, il y a exception Ă  la rĂšgle que nous avons posĂ©e sur la compĂ©tence du Tribunal de la situation de l’immeuble ou du domicile du dĂ©fendeur, en matiĂšre de ‱ 6 juin 1848, mCmcs Cour et recueil 1848-1-496. — G57 — sociĂ©tĂ©, tant qu’elle existe, en matiĂšre de faillite, de par- tagede succession, en cas d’élection de domicile. Ces exceptions sont Ă©noncĂ©es en l’art. 59 du Code de procĂ©dure auquel nous renvoyons. On trouvera en outre dans les diffĂ©rents commentateurs du Code de procĂ©dure, que nous avons dĂ©jĂ  eu occasion de citer, et dans le traitĂ© assez rĂ©cent de M. Joccotton sur les actions civiles, tous les dĂ©veloppements propres Ă  bien faire saisir le sens et la portĂ©e des exceptions que nous venons de signaler. 81° Dans bien des cas, les actions pĂ©titoires sont intentĂ©es non par les propriĂ©taires personnellement, mais par des reprĂ©sentants lĂ©gaux, des administrateurs, des crĂ©anciers exerçant les droits de leurs dĂ©biteurs pour parvenir Ă  la conservation des droits ou au payement de leurs crĂ©ances. Cela n’est point contraire au principe posĂ© n" 31, que la premiĂšre condition, pour intenter l’action pĂ©titoire, est d’ître propriĂ©taire de la chose rĂ©clamĂ©e, puisque ces diverses personnes sont des mandataires ou reprĂ©sentants, et que le propriĂ©taire agit par leur entremise. Les actions pĂ©titoires qui intĂ©ressent des mineurs ou des interdits, ne peuvent ĂȘtre intentĂ©es que par leurs tuteurs ou contre eux, et si le tuteur est demandeur, il doit ĂȘtre prĂ©alablement autorisĂ© par le conseil de famille. Il peut dĂ©fendre sans autorisation, mais non acquiescer Ă  la demande. Art. 464, 465, 509 du Code civil. Quant aux actions pĂ©titoires qui intĂ©ressent un mineur Ă©mancipĂ©, elles peuvent ĂȘtre intentĂ©es par lui et contre lui, mais avec l’assistance de son curateur. L’autorisation du conseil de famille ne serait nĂ©cessaire que pour y acquiescer ; car la loi dĂ©fend au mineur Ă©mancipĂ© de transiger, d’aliĂ©ner ses immeubles et de faire aucun -t-2 autre que ceux de pure administration, sans observer les formes prescrites au mineur non Ă©mancipĂ©. Art. 481, 482, 483, 484 du Code civil. Or, acquiescer Ă  une demande pĂ©titoire, ce serait au moins transiger et quelquefois aliĂ©ner en totalitĂ©. Nous appliquerions ces principes mĂȘme au mineur Ă©mancipĂ© qui ferait le commerce, avec l’autorisation de ses pĂšre ou mĂšre ou du conseil de famille art. 2, 3, 6 du Code de commerce, et lors mĂȘme qu’il s’agirait d’une manufacture, d’une usine oĂč le mineur exercerait son industrie et qu’il pourrait avoir achetĂ©e. Quant Ă  ceux qui sont pourvus d’un conseil judiciaire, ils peuvent plaider, soit en demandant, soit en dĂ©fendant, mĂȘme acquiescer Ă  une demande pĂ©titoire, sans autorisation du conseil de famille, mais avec l’assistance de leur conseil. Art. 513. Les actions pĂ©titoires qui intĂ©ressent les femmes mariĂ©es doivent ĂȘtre intentĂ©es par elles ou contre elles, soit qu’elles soient mariĂ©es sous le rĂ©gime de la communautĂ©, de la dotalitĂ© ou de la paraphernalitĂ©. Art. 1428, 1549, 1576. Mais le mari doit Ă©galement figurer dans la procĂ©dure, ne fĂ»t-ce que pour autoriser sa femme ; la femme mĂȘme marchande publique, non commune ou sĂ©parĂ©e de biens, ne peut ester en jugement sans l’autorisation de son mari ou de la justice. Art. 215, 217 du Code civil; 4, 5 ,7 du Code de commerce. Mais si un immeuble de la femme avait Ă©tĂ© ameubli et qu’il fĂ»t l’objet de l’action, quoiqu’il fĂ»t toujours immeuble en rĂ©alitĂ©, cependant il ferait partie de la communautĂ© et le mari pourrait seul intenter l’action ou y dĂ©fendre comme Ă  l’égard de tous les immeubles de la communautĂ©. Art. 1421 et 1507 du Code civil. — 659 — Les actions qui concernent les communes ou sections, doivent ĂȘtre intentĂ©es par ou contre les maires ; ceux-ci doivent ĂȘtre autorisĂ©s par les conseils de prĂ©fecture, soit Ă  intenter l’action, soit Ă  y dĂ©fendre. A Paris, les actions qui intĂ©ressent la ville sont dirigĂ©es par ou contre le prĂ©fet de la Seine. L’autorisation du conseil de prĂ©fecture est Ă©galement nĂ©cessaire. Quelquefois un contribuable peut intenter l’action Ă  ses frais et risques, avec autorisation du conseil de prĂ©fecture ; mais le jugement doit ĂȘtre rendu au profit de la commune, et l’habitant ne pourrait changer les termes de l’assignation, pour se faire dĂ©clarer personnellement propriĂ©taire ; il devrait intenter une nouvelle action. ArrĂȘt de la Cour de cassation, du 28 juillet 1851. Du reste, pour les actions auxquelles les communes, les sections de communes sont intĂ©ressĂ©es, soit qu’elles aient lieu entre elles, soit qu’elles soient dirigĂ©es par des particuliers ou contre eux, il faut se reporter au titre 5 de la loi du 18 juillet 1837, et aux art. 69, 70 du Code de procĂ©dure. Les actions relatives aux hospices et autres Ă©tablissements publics dĂ©pendant des communes, seraient soumises aux mĂȘmes conditions et formalitĂ©s. Les actions relatives au dĂ©partement sont intentĂ©es par ou contre les prĂ©fets, avec les autorisations et les formalitĂ©s prescrites par les art. 36 et 37 de la loi du 30 juin 1838. Le prĂ©fet peut dĂ©fendre, en vertu d’une simple dĂ©libĂ©ration du conseil gĂ©nĂ©ral. En cas d’urgence il peut mĂȘme agir en demandant et en dĂ©fendant, sans dĂ©libĂ©ration du conseil gĂ©nĂ©ral ni autorisation. MĂȘmes articles. Les actions qui intĂ©ressent le domaine de l’Etat sont — C 60 — intentĂ©es par ou contre le prĂ©fet, qui n’a besoin d’aucune autorisation pour plaider, en demandant et en dĂ©fendant. Cour de cassation, 9 avril 1834. En cas de litige entre l’Etat et un dĂ©partement, l’action est intentĂ©e ou soutenue pour le dĂ©partement par le membre du conseil de prĂ©fecture le plus ancien en fonctions. Article 59, n° 1 du Code de procĂ©dure, art. 36 de la loi du 30 juin 1838. L’action et la procĂ©dure seraient nulles, si l’Etat n’avait pas Ă©tĂ© reprĂ©sentĂ© par le prĂ©fet et le dĂ©partement, par le plus ancien conseiller de prĂ©fecture, ou en cas d’empĂȘchement par celui qui vient aprĂšs dans l’ordre des nominations. Cour de cassation, ch. civ., 20 juillet 1842. Les actions concernant la dotation de la couronne et le domaine privĂ©, sont dirigĂ©es par ou contre l’administrateur de cette dotation et de ce domaine. Cet administrateur n’a besoin d’aucune autorisation pour agir en demandant ou en dĂ©fendant. Voyez le sĂ©natus-consulte du 12 dĂ©cembre 1852, art. 22. Mais les biens de la dotation Ă©tant domaniaux, ceux qui ont des actions pĂ©titoires Ă  intenter contre l’administrateur de ces biens, sont tenus de remplir les formalitĂ©s prescrites par la loi du 5 novembre 1790, et que nous avons indiquĂ©es n° 74, p. 650. Quant aux actions qui intĂ©ressent des Ă©trangers, des hĂ©ritiers qui n’ont pas encore pris qualitĂ© et qui sont dans les dĂ©lais pour faire inventaire et dĂ©libĂ©rer, des hĂ©ritiers apparents, des successeurs irrĂ©guliers et lĂ©gataires, des hĂ©ritiers bĂ©nĂ©ficiaires, des successions vacantes, des absents, des faillis, des crĂ©anciers ayant intĂ©rĂȘt Ă  exercer les droits de leur dĂ©biteur, des sociĂ©tĂ©s civiles ou commerciales, des individus condamnĂ©s Ă  des peines Sr. — 661 — afllictives ou infamantes, ou qui sont l’objet de poursuites criminelles ou qui sont frappĂ©s de mort civile, on peut voir ce que nous disons premiĂšre partie, p. /23 et suiv., relativement Ă  l’action possessoire. Les principes que nous y avons posĂ©s, les solutions que nous y avons donnĂ©es, s’appliquent Ă©galement au pĂ©titoire. Lorsque des immeubles sont saisis, les tiers qui s’en prĂ©tendent propriĂ©taires forment ordinairement ce que l'on appelle une demande incidente en distraction, qui, aux termes de l’art. 725 du Code de procĂ©dure, doit ĂȘtre dirigĂ©e contre le saisi, le saisissant et le crĂ©ancier premier inscrit ; mais ils pourraient aussi former une action principale contre le saisi seul. Celui-ci pourrait dĂ©fendre et mĂȘme intenter une action pĂ©titoire relativement aux immeubles saisis, sauf la facultĂ© qu’aurait le saisissant et le crĂ©ancier premier inscrit, d’intervenir et sauf aussi le droit de tierce opposition en faveur des tiers intĂ©ressĂ©s. 82° IndĂ©pendamment des formalitĂ©s communes Ă  tous les exploits, les assignations au pĂ©titoire doivent contenir copie de l’acte de non-conciliation ou de non-comparution, Ă©noncer la nature de l’hĂ©ritage revendiquĂ©, la commune et autant qu’il est possible la partie de la commune oĂč il est situĂ© et deux au moins des tenants et aboutissants; s’il s’agit d’un domaine, corps de ferme ou mĂ©tairie, ilsufiil d’en dĂ©signer le nom et la situation, le tout Ă  peine de nullitĂ©. La copie des titres est prescrite, mais non sous la mĂȘme peine. Art. 6/i, 05, Code de procĂ©d. 83° L’action pĂ©titoire doit ĂȘtre dirigĂ©e contre celui qui possĂšde ou dĂ©tient la chose dont on se prĂ©tend propriĂ©taire, ou qui a seulement troublĂ©, contestĂ© la possession ou la propriĂ©tĂ©. V. Joccotton, Actions civiles, cassation 3 octobre 1810, et ci-dessus, n° 10. — 662 Nous disons qui possĂšde ou dĂ©tient, car il arrive assez communĂ©ment que nous possĂ©dons par des tiers, fermief, locataire, sĂ©questre et ceux-ci n’ont que la simple dĂ©tention. Ils ne possĂšdent pas; ceux dont ils tiennent la location ou le sĂ©questre sont les vĂ©ritables possesseurs. Sans doute, lorsque ceux pour lesquels ils possĂšdent sont connus du demandeur au pĂ©titoire, il fera bien de diriger son action contre eux, et de comprendre les dĂ©tenteurs dans son assignation pour faire prononcer sur la propriĂ©tĂ©, sur les rĂ©siliations de contrats de bail ou de sĂ©questre, les dĂ©guerpissements et se faire adjuger les loyers et fermages qui pourraient ĂȘtre dus, ou les fruits perçus ; mais il peut arriver aussi que ceux pour lesquels la dĂ©tention a lieu ne soient pas connus. Dans tous les cas, le demandeur peut s’adresser au seul dĂ©tenteur ; et celui-ci doit dĂ©signer celui pour lequel il possĂšde, justifier des conventions faites entre eux si elles ont Ă©tĂ© constatĂ©es par Ă©crit. Lorsque le vĂ©ritable possesseur intervient, prend le fait et cause du dĂ©tenteur, ou que du moins il est reconnu que celui-ci n’est que son ayant-cause, il doit ĂȘtre mis hors d’instance, s’il le requiert avant le premier jugement. Toutefois, ce dĂ©tenteur peut avoir intĂ©rĂȘt Ă  ĂȘtre prĂ©sent; il a donc toujours la facultĂ© d’assister au procĂšs pour la conservation de ses droits, et le demandeur originaire exiger qu’il y reste pour la conservation des siens et pour obtenir contre lui, suivant les circonstances, des condamnations rĂ©sultant de ses engagements ou de ses faits personnels. C’est lĂ  une saine application de la loi 9 ff. de Rei vind., et des art. 1727 du Code civil, 182, 183 du Code de procĂ©dure, combinĂ©s. 84° Celui qui Ă©tant propriĂ©taire en commun avec un — 663 — autre, et par moitiĂ©, vient Ă  perdre la possession parle fait d’un tiers qui se substitue ainsi Ă  sa possession pro- miscue, ne peut intenter d’action qu’à ce tiers; il ne doit point attaquer celui qui possĂ©dant avec lui trĂšs- lĂ©gitimement a continuĂ© de possĂ©der avec l’usurpateur. Mais s’il y avait eu fraude ou collusion de la part du copossesseur pour exclure le communiste lĂ©gitime, celui-ci pourrait Ă©videmment comprendre aussi le premier dans son assignation et faire prononcer contre tous deux les rĂ©parations qui lui seraient dues. La solution serait la mĂȘme si le copossesseur avait fait avec l’usurpateur un partage de l’immeuble qui aurait attribuĂ© Ă  chacun d'eux des parts distinctes, ce partage Ă©tant res inter alios acta qui ne peut avoir aucun effet Ă  l’égard du communiste dĂ©pouillĂ© art. 1165, Code civil, celui-ci serait fondĂ© Ă  revendiquer sa propriĂ©tĂ© indivise contre les deux auteurs de ce partage illĂ©gal, qui n’a pu lui faire perdre la part qui lui appartient dans tout l’hĂ©ritage et dans les diffĂ©rentes parties dont il se compose est tolum in toto et in qualibet parte. L. 8 ff. de Rei vind. 85° Si celui contre lequel l’action pĂ©titoire est dirigĂ©e nie la possession ou le trouble articulĂ©s par le demandeur, et que la preuve n’en rĂ©sulte pas des documents existants au procĂšs, la justice doit ordonner les justifications nĂ©cessaires par enquĂȘte, visite de lieux, expertise. Si le demandeur ne prouve pas les faits par lui articulĂ©s, le dĂ©fendeur est renvoyĂ© de la demande, non pas Ă  la vĂ©ritĂ© parce que le premier n’est point propriĂ©taire, mais parce qu’il ne prouve pas que celui qu’il a attaquĂ© ait portĂ© atteinte Ă  sa possession ou Ă  sa propriĂ©tĂ©. Lorsque le dĂ©fendeur, quoique ne possĂ©dant pas l’hĂ©ritage, est assignĂ©, conteste et soutient le procĂšs comme s’il le possĂ©dait rĂ©ellement, il faut distinguer ou il est de bonne foi, et alors il ne doit ĂȘtre condamnĂ© qu’aux dĂ©pens ; mais s’il est de mauvaise foi, s’il n’v a pas erreur de sa part, s’il n’a gardĂ© le silence que pour empĂȘcher le demandeur de connaĂźtre le vĂ©ritable possesseur et de poursuivre celui-ci en temps opportun, afin que par ce moyen il pĂ»t acquĂ©rir la prescription, le dĂ©fendeur doit ĂȘtre en ce cas condamnĂ© aux dommages-intĂ©rĂȘts du demandeur auquel par cette fraude il aurait fait perdre sa propriĂ©tĂ©. Si le dĂ©fendeur, qui possĂ©dait ou dĂ©tenait au moment de l’action, venait Ă  perdre la dĂ©tention ou la possession, qu’il y eĂ»t ou non faute de sa part, il y aurait lieu d’appeler en cause le nouveau possesseur. L’ancien devrait y rester Ă  cause des frais et dĂ©pens, des restitutions de fruits et des indemnitĂ©s dont il pourrait ĂȘtre passible. L’action pĂ©titoire Ă©tant une action rĂ©elle ne peut ĂȘtre intentĂ©e aux hĂ©ritiers du possesseur qu’autant que ces hĂ©ritiers sont eux-mĂȘmes possesseurs de la chose qui en fait l’objet. Ils sont Ă  l’abri de toute action, si un tiers non hĂ©ritier s’en est emparĂ© ou l’a acquise. Par consĂ©quent, chaque hĂ©ritier n’est tenu de l’action que pour la part qu’il possĂšde dans l’immeuble, et non pour celle qu’il amende dans la succession ; de maniĂšre que si par le partage, fait entre les hĂ©ritiers, la chose litigieuse Ă©tait Ă©chue pour le total Ă  l’un d’eux, l’action devrait ĂȘtre intentĂ©e contre celui-ci seulement Ă  l’exclusion des autres. Mais il en serait diffĂ©remment pour la restitution des fruits perçus; il y aurait une obligation personnelle. Dans ce cas l’action, quant aux fruits, procĂ©derait bien contre tous les hĂ©ritiers sans distinction. 665 — Une vente simulĂ©e, une mise en possession qui en serait la consĂ©quence et aurait le mĂȘme caractĂšre ne nous paraĂźtraient pas devoir empĂȘcher l’action contre l’auteur de ces actes qui, en les faisant, avait probablement pour but d’induire son adversaire en erreur et de se soustraire Ă  ses poursuites ; il y a ici dol, et c’est le cas d’appliquer ces principes qui dolo desiit possidere pro possidente damnatur ; quia dolus pro possessione est. Semper qui dolo fecit quominus habei'et pro eo habendus est ac si haberet. Lois 131 et 157, ff. de Reg. juris. Mais celui-ci pourrait avoir intĂ©rĂȘt Ă  mettre simultanĂ©ment en cause les deux individus qui auraient colludĂ©, et nous ne voyons pas de motifs pour que les tribunaux infirmassent une semblable procĂ©dure. Argument de la loi 27, § 3, de Rei vind. des lois 131 et 150, ff. de Regulis juris. 80° Le demandeur au pĂ©titoire doit ĂȘtre propriĂ©taire de la chose qui fait l’objet de sa demande, non-seulement au moment oĂč elle est intentĂ©e, mais encore Ă  la date du jugement. Il est Ă©vident que si sa propriĂ©tĂ© avait cessĂ© depuis l’action, par vente, donation, Ă©change, ou de toute autre maniĂšre, l’instance devrait ĂȘtre reprise et continuĂ©e avec son successeur; mais ce serait au dĂ©fendeur Ă  prouver que le demandeur a cessĂ© d’ĂȘtre propriĂ©taire. Que si n’étant pas propriĂ©taire au moment de l’action, il l’était devenu pendant l’instance et l’était lors du jugement, nous croyons que la justice devrait lui adjuger la propriĂ©tĂ© sans l’assujettir Ă  intenter une nouvelle action, Ă  recommencer toute la procĂ©dure, parce qu’il faut toujours autant que possible abrĂ©ger, Ă©viter les procĂšs. C’est la dĂ©cision du droit canon que nous prĂ©fĂ©rons Ă  celle des lois 23 ff. de Judic. 7, § 7, ff. ad exhibendum. — 666 — expliquĂ©es par M. Pellat, TraitĂ© de la propriĂ©tĂ©, p. 226 Ă  231. La raison sur laquelle se fonde le savant professeur, avec M. de Savigny, que si l’on ne recommençait pas l’action et la procĂ©dure, la dĂ©fense pourrait ĂȘtre Ă©tranglĂ©e, ne nous touche point; car les tribunaux laisseront certainement au dĂ©fendeur la mĂȘme latitude pour discuter les nouveaux titres que s’ils avaient Ă©tĂ© produits et signifiĂ©s avec la demande originaire. Que si ces titres ne sont pas valables, ou s’ils ne sont pas concluants, le dĂ©fendeur s’estimera fort heureux d’ĂȘtre sur-le-champ tirĂ© d’affaire au lieu d’ĂȘtre soumis Ă  un nouveau procĂšs, et qu’enfin les juges pourront tout concilier, s’ils adjugent la propriĂ©tĂ© au demandeur, en mettant Ă  sa charge tous les dĂ©pens faits jusqu’au moment de la production des nouveaux titres de propriĂ©tĂ©. Nous nous croyons d’autant plus fondĂ© Ă  Ă©mettre cette opinion que les lois 18, § 1, ff. de lier. pet. , 27, § 1 er , ff. de Rei vind. 7, § /i, ad exhibend. et les auteurs que nous venons de citer dĂ©cident sans hĂ©siter, et avec raison, que le dĂ©fendeur qui ne possĂ©dait pas lors de l’introduction de l’instance, mais qui viendrait Ă  possĂ©der la chose litigieuse pendant son cours et au moment du jugement ne pourrait repousser la demande et exiger qu’il en fĂ»t intentĂ© une nouvelle; que le juge devrait le condamner Ă  la rendre au propriĂ©taire. Telle paraĂźt ĂȘtre aussi la dĂ©cision de VoĂ«t, ad pandectas de Rei vind. 90° Nous avons dĂ©jĂ  dit, n° Zi3 et suiv., que le demandeur Ă©tait tenu de justifier sa demande par des titres, par la loi, par le moyen de l’accession ou incorporation, par la prescription ; nous ne reviendrons pas sur ce sujet. Les dĂ©veloppements dans lesquels nous sommes entrĂ©, nous dispensent de toute nouvelle explication Ă  cet Ă©gard. — 667 — Nous ajouterons seulement qu’il est obligĂ© de prouver la propriĂ©tĂ© totale, et que la preuve ou l’aveu de son adversaire qu’il en a la moitiĂ© 11 e le dispenserait pas de prouver qu’il est propriĂ©taire du surplus. 91° Le dĂ©fendeur peut se contenter de contester les titres ou les faits invoquĂ©s, et cette dĂ©fense peut lui suffire ; il est mĂȘme possible qu’il n’en ait pas d’autre. Mais il peut avoir des faits ou des titres contraires Ă  opposer Ă  son adversaire, et si celui-ci a dans ceux qu’il invoque des moyens suffisants pour faire accueillir son action pĂ©- titoire dans le cas oĂč ils ne seraient pas dĂ©truits par les faits et les titres que possĂšde le dĂ©fendeur, celui-ci a un intĂ©rĂȘt Ă©vident Ă  s’en servir et ne doit pas nĂ©gliger cette ressource. D’un autre cĂŽtĂ©, les tribunaux ne doivent pas perdre de vue que ce n’est que subsidiairement, et dans le seul but de combattre les titres ou les faits invoquĂ©s par le demandeur, que le dĂ©fendeur produit les siens ; de sorte que si ni les uns ni les autres ne prouvaient la propriĂ©tĂ©, le dĂ©fendeur devrait triompher et l’action du demandeur devrait ĂȘtre repoussĂ©e. Nous n’entrerons pas ici dans les dĂ©tails, dans tous les incidents que la marche d’une procĂ©dure longue et compliquĂ©e peut entraĂźner. Nous n’avons pas pour but de faire un traitĂ© de procĂ©dure. Nous devons nous borner aux rĂšgles spĂ©ciales, aux actions pĂ©titoires, en renvoyant aux traitĂ©s gĂ©nĂ©raux, aux commentaires sur la procĂ©dure applicable Ă  toutes les actions. D’aprĂšs les principes que nous avons rappelĂ©s, le dĂ©fendeur doit rester jusqu’au jugement dĂ©finitif dans la position oĂč il se trouvait lors de l’introduction de l’instance ; il doit conserver la possession pleine et entiĂšre de — 008 — la chose en litige et continuer Ă  en percevoir tous les fruits, sans qu’on puisse mĂȘme l’obliger Ă  donner caution. Si cependant il abusait de la chose, s’il y commettait des dĂ©gradations, dĂ©molissait des bĂątiments, faisait des extractions de pierres des carriĂšres, des coupes de bois, d’une maniĂšre inusitĂ©e, et qu’il y eĂ»t lieu de craindre qu’il ne pĂ»t indemniser le demandeur qui serait plus tard reconnu propriĂ©taire ; alors le demandeur pourrait solliciter, et la justice ordonner la mesure du sĂ©questre autorisĂ©e par les art. 1955, 1901, 62 et 63 du Code civil. Nous ne saurions trop insister sur ce point que les tribunaux devront en gĂ©nĂ©ral s’abstenir de prescrire une pareille mesure Ă  laquelle il n’y a lieu de recourir que par exception, et dans des circonstances particuliĂšres, comme celles que nous venons d’énoncer. 92° Lorsque la chose a pĂ©ri en totalitĂ© ou en partie, sans la faute et le dol du possesseur, par un cas fortuit ou de force majeure, l’action pĂ©titoire ne peut pas ĂȘtre intentĂ©e s’il n’en reste rien, ou ne peut avoir lieu que pour ce qui en reste, et ce possesseur ne peut ĂȘtre condamnĂ© Ă  en payer la valeur totale ou partielle, sans distinguer s’il possĂ©dait de bonne ou de mauvaise foi. Cette solution s’appliquerait par exemple aux cas de guerre, d’incendie, d’inondation, de feu du ciel; car, en fait, le dĂ©fendeur n’est pour rien dans l’évĂ©nement, ce n’est pas lui qui a causĂ© le prĂ©judice qui serait Ă©galement arrivĂ© lors mĂȘme que la chose eĂ»t Ă©tĂ© en la possession du propriĂ©taire. Art. 1302 du Code NapolĂ©on. I’ellat, p. 175. Nous appliquerions les mĂȘmes principes au cas oĂč la chose aurait pĂ©ri pendant le litige sur l’action pĂ©titoire. f — 669 — Le dĂ©fendeur, dans les hypothĂšses que nous venons de prĂ©senter, n’encourrait aucune responsabilitĂ©. 93° Lorsqu’il est intervenu jugement sur l’action pĂ©- titoire, il peut y avoir lieu Ă  faire rĂ©former ce jugement, soit par les juges mĂȘmes qui l’ont rendu, soit par des juges supĂ©rieurs, c’est-Ă -dire par les Cours impĂ©riales et par la Cour de cassation. Quelques-unes des voies d’attaque ou de rĂ©formation des jugements sont appelĂ©es ordinaires, les autres sont appelĂ©es extraordinaires. La premiĂšre catĂ©gorie des voies de recours se compose de l’opposition et de l’appel ; la seconde, de la tierce opposition, de la requĂȘte civile, de la prise Ă  partie et du pourvoi en cassation. L’opposition a lieu lorsque le jugement a Ă©tĂ© rendu par dĂ©faut soit contre le dĂ©fendeur, soit contre le demandeur lui-mĂȘme. Nous renvoyons au titre du Code de procĂ©dure sur les jugements par dĂ©faut et oppositions, ceux qui voudront savoir dans quels cas un jugement est par dĂ©faut, et quels sont les dĂ©lais, les formes et les conditions des oppositions. 9/i° Pour user de la voie de l’appel contre le jugement contradictoire ou par dĂ©faut, mais non susceptible d’opposition, la premiĂšre condition est qu’il soit en premier ressort, et ensuite qu’on n’y ait pas acquiescĂ©, qu’on n’ait pas laissĂ© expirer les dĂ©lais. Nous ne nous occuperons ici que de la premiĂšre condition. 95° La loi sur l’organisation judiciaire, du 2A aoĂ»t 1790, titre /t, art. 5, portait que les juges de district tribunaux de premiĂšre instance d’arrondissement connaĂźtraient en premier et dernier ressort de toutes les — 670 — affaires personnelles et mobiliĂšres jusqu’à la valeur de 1,000 livres de principal, et des affaires rĂ©elles *, dont l’objet principal Ă©tait de 50 livres de revenu dĂ©terminĂ©, soit en rente, soit par prix de bail. La loi du 11 avril 1838 a changĂ© ces dispositions au fond, et cette rĂ©daction qu’elle a amĂ©liorĂ©e; elle porte art. 1" que les tribunaux civils de premiĂšre instance connaĂźtront, en dernier ressort, des actions personnelles et mobiliĂšres jusqu’à la valeur de 1,500 francs de principal, et des actions immobiliĂšres jusqu’à 60 francs de revenu dĂ©terminĂ© soit en rente, soit par prix de bail; que ces actions seront instruites et jugĂ©es comme matiĂšres sommaires. L’article 2 ajoute que lorsqu’il sera formĂ© une demande reconventionnelle ou en compensation, si elle est dans les limites du dernier ressort, il sera statuĂ© sur le tout en dernier ressort; mais que si l’une des demandes est de premier ressort» toutes seront sujettes Ă  l’appel; que nĂ©anmoins il sera statuĂ© en dernier ressort sur les demandes en dommages-intĂ©rĂȘts, lorsqu’elles seront fondĂ©es exclusivement sur la demande principale. Ainsi, pour les actions pĂ©titoires, la loi s’attache uniquement au revenu, abstraction faite de la valeur de la chose, pour dĂ©cider si le jugement est eu premier ou en dernier ressort. Lors mĂȘme qu’il s’agirait de la demande en dĂ©livrance d’une partie de la chose vendue pour une somme bien moindre de 1,500 francs de prix total, le jugement n’en serait pas moins en dernier ressort s’il n’apparaissait d’un bail ou d’un arrentement fixant le revenu Ă  60 francs ou au-dessous. La Cour de cassa- * La loi a voulu dire immobiliĂšres. — 671 — tion l’a ainsi plusieurs fois jugĂ©, etnotamment le 17 janvier 1848, dans une affaire oĂč une piĂšce de terre avait Ă©tĂ© vendue 300 francs, et dont l’acquĂ©reur rĂ©clamait huit ares comme complĂ©ment des vingt-quatre qui faisaient l’objet de la vente *. La loi veut que le revenu soit dĂ©terminĂ© par rente ou prix de bail, sans exiger un Ă©crit. Il y a une foule de locations, soit de terres, soit de maisons, surtout celles de peu d’importance et d’une courte durĂ©e, qui sont faites verbalement ; elles n’en sont pas moins valables. L’écriture n’est pas de l’essence de ces conventions; elle est seulement exigĂ©e pour la preuve ; mais lorsque les conventions sont avouĂ©es, constantes entre les parties, elles doivent ĂȘtre prises par la justice pour base du premier ou du dernier ressort. Nous pouvons nous autoriser des dispositions de la loi du 25 mai 1838, qui pour fixer la compĂ©tence du juge de paix, se fondent sur des locations verbales ou par Ă©crit. M. RodiĂšre, tome I er , p. 179, exclut le bail et le contrat de rente passĂ©s avec les tiers, et n’admet que ceux communs aux deux parties litigantes. Nous pensons que cette distinction, contraire Ă  la gĂ©nĂ©ralitĂ© de la loi, ne saurait ĂȘtre accueillie, et que le contrat passĂ© avant le procĂšs entre le dĂ©fendeur et un tiers, fermier ou censitaire doit valablement servir Ă  dĂ©terminer la vĂ©ritable valeur du litige contre le demandeur et le dĂ©fendeur. La fraude seule ferait exception. La loi du 11 avril J 838 ayant retranchĂ© les mots objet principal, qu’on lisait dans celle de 90, il en rĂ©sulte que les redevances accessoires devraient ĂȘtre prises en con- * Dalloz 184H-1-180 et autres arrĂȘts citĂ©s. C72 — sidĂ©ration, et que si Ă  la rente ou au prix de bail de 60 francs par an en argent, les conventions ajoutaient des redevances en grains, fourrages, beurre, volaille, l’action pĂ©titoire ne pourrait plus ĂȘtre jugĂ©e qu’en premier ressort. Quand la loi parle d’un revenu de 60 francs, il est Ă©vident que c’est par annĂ©e. Le revenu qui serait de 120 fr., payable tous les deux ans ou de 60 francs par trimestre, rendrait le jugement en dernier ressort dans le premier cas, et susceptible d’appel dans le second. Que dĂ©cider dans le cas oĂč la rente, le prix du bail sont en fruits ou denrĂ©es soit d’une quantitĂ© dĂ©terminĂ©e, soit d'une quotitĂ©? Pourra-t-on prendre les mercuriales pour base d’estimation au moment du jugement, et dĂ©cider d’aprĂšs cela si le jugement est en premier ou dernier ressort? La valeur des fruits et des denrĂ©es varie frĂ©quemment; il en est de mĂȘme du produit de la terre. Quelque peu considĂ©rable que soit la quantitĂ© ou la quotitĂ© stipulĂ©e, il y aura des moments d’abondance, de disette, de vilitĂ© ou d’élĂ©vation excessive des prix; comment alors prendre pour base de la valeur de l’immeuble litigieux, le revenu, les mercuriales au moment du jugement, lorsque quinze jours aprĂšs, il y aura peut-ĂȘtre une grande diffĂ©rence? La loi a rejetĂ© une base aussi variable, aussi peu Ă©quitable, et s’est uniquement arrĂȘtĂ©e Ă  la base en numĂ©raire. S’il y avait alternative d’un prix ou d’une quantitĂ© ou quotitĂ© de denrĂ©es au choix du bailleur ou du preneur, nous pensons que le chiffre pĂ©cuniaire servirait seul Ă  dĂ©terminer le premier ou le dernier ressort. La base de l’impĂŽt, le prix stipulĂ© dans des contrats — 673 — de vente, les conclusions mĂȘmes des parties qui fixeraient le principal au-dessus ou au-dessous de 1,500 fr., le revenu au-dessus ou au-dessous de 60 francs, ne seraient pas des rĂšgles de dĂ©cision. La loi n’a admis qu’une base unique et exclusive, le revenu fixĂ© ou dĂ©terminĂ© comme nous l’avons vu. Les juges devraient ou admettre l’appel, ou le dĂ©clarer non recevable, mĂȘme d’office, d’aprĂšs les rĂšgles que nous avons tracĂ©es, et lors mĂȘme que la partie intĂ©ressĂ©e ne ferait pas valoir l’exception du dernier ressort, exception qui est d’ordre public *. Lorsque le terrain n’est pas affermĂ© ou arrentĂ©, que le propriĂ©taire en jouit lui-mĂȘme ou en laisse jouir gratuitement des tiers, la valeur de l’objet litigieux est indĂ©terminĂ©e, et quelque minime quelle soit, encore mĂȘme qu’il semble Ă©vident qu’elle n’est pas Ă  beaucoup prĂšs d’un capital de 1,500 francs, ou d’un revenu de 60 francs, la dĂ©cision qui intervient est en premier ressort. Nous ne saurions trop insister sur ce point que la loi s’attache uniquement au revenu, en rente, ou par prix de bail, et ne se prĂ©occupe pas du capital lors mĂȘme qu’il serait Ă©noncĂ© dans des actes authentiques d’aliĂ©nation. Le jugement rendu sur une action pĂ©titoire qui aurait Ă©tĂ© intentĂ©e contre plusieurs copropriĂ©taires ou cohĂ©ritiers, possesseurs par indivis d’un immeuble dont le revenu excĂ©derait 60 fr., serait en premier ressort Ă  l’égard de toutes les parties, bien qu’on pĂ»t dire que la division du revenu entre tous les dĂ©fendeurs ne prĂ©senterait pour chacun d’eux qu’un chiffre infĂ©rieur Ă  60 fr. ; Ă  plus forte raison en serait-il de mĂȘme dans le cas oĂč le revenu ne serait pas fixĂ© comme le veut la loi. ' ArrĂȘt de cassation, 20 mai 1850; Dalloz 1850. 43 Il faudrait en dire autant du cas oĂč l’action pĂ©titoire serait intentĂ©e dans des circonstances semblables par plusieurs personnes se prĂ©tendant propriĂ©taires en commun contre un seul dĂ©tenteur ou possesseur. La jurisprudence a Ă©tabli en principe que lorsque incidemment Ă  une action pĂ©titoire, il s’élĂšve une question sur la qualitĂ© des parties, sur leur Ă©tat, sur le point de savoir si elles sont hĂ©ritiĂšres, enfants lĂ©gitimes, si un mariage est valable, cette question prĂ©judicielle Ă  la solution de laquelle peut ĂȘtre subordonnĂ©e la dĂ©cision de la cause, quoique Ă©tant par elle-mĂȘme d’une valeur indĂ©terminĂ©e, est cependant dĂ©cidĂ©e en premier ou en dernier ressort, suivant la valeur de l’objet matĂ©riel rĂ©clamĂ©, parce que alors son importance et son effet ne s’étendent pas au delĂ  de cette derniĂšre valeur. Cour de cassation, 18 nivĂŽse an xii, 2 h mars 1812, 9 mars 182A. Quant Ă  nous, nous admettons cette solution, mĂȘme sans distinguer si la question d’État est incidente ou principale; une pareille distinction nous paraĂźt plus subtile que solide. Dans tous les cas, l’importance de la question d’État est relative et limitĂ©e Ă  l’objet immobilier qui est revendiquĂ©, et n’a d’autre valeur que celle de cet objet mĂȘme. A l’égard des demandes en revendication d’usufruit, d’usage, d’habitation, qui sont indĂ©terminĂ©es par elles- mĂȘmes, nous pensons que si la chose sur laquelle portent ces droits est louĂ©e, affermĂ©e ou donnĂ©e Ă  rente, moyennant 10 francs, le jugement sera en dernier ressort; mais qu’il sera en premier ressort, si l’immeuble est louĂ© ou arrentĂ© plus de 60 francs, ou si son revenu n’est pas dĂ©terminĂ© comme l’a dit la loi. Les demandes en reconnaissance de franchise des 675 — fonds ou nĂ©gatoires de servitudes, celles dites confes- soires, qui sont Ă©galement indĂ©terminĂ©es, nous paraĂźtraient devoir ĂȘtre dĂ©cidĂ©es en dernier ressort, si le fonds dominant et le fonds servant n’étaient affermĂ©s ou ar- rentĂ©s que 60 francs chacun; mais si l’un des deux dĂ©passait en revenu 60 francs, la dĂ©cision serait en premier ressort Ă  l’égard des deux parties; nous n’admettons donc pas absolument l’opinion de M. RodiĂšre. Si la concession de la servitude, de l’usage, de l’usufruit avait eu lieu, moyennant une rente annuelle, ce serait le chiffre de cette rente qui servirait Ă  dĂ©cider la question du premier ou dernier ressort. Supposons que le demandeur au pĂ©titoire d’une chose louĂ©e moins de 60 francs y ajoute une demande infĂ©rieure Ă  1,500 francs pour restitution de fruits, indemnitĂ©s de dĂ©gradations, la dĂ©cision sera-t-elle en dernier ressort? Nous le croyons, parce que les juges manqueront d’élĂ©ments lĂ©gaux pour fixer la valeur du litige, et que l’un et l’autre chefs pris isolĂ©ment doivent recevoir dĂ©cision de dernier ressort. Nous croyons pouvoir argumenter, par analogie, des dispositions des lois de compĂ©tence des 11 avril et 25 mai 1838, relatives aux demandes reconventionnelles ou en compensation. Mais si la demande en restitution de fruits ou en indemnitĂ©s de dĂ©gradations est indĂ©terminĂ©e et Ă  donner par Ă©tat ou est supĂ©rieure Ă  1,500 francs, alors tous les chefs sont indistinctement susceptibles d’appel. La demande seule des fruits et indemnitĂ©s, dans l’hypothĂšse prĂ©sentĂ©e la propriĂ©tĂ© de l’immeuble n’étant pas contestĂ©e, serait dĂ©cidĂ©e seulement en premier ressort; Ă  plus forte raison doit-il en ĂȘtre ainsi lorsqu’elle est jointe Ă  un chef relatif Ă  la propriĂ©tĂ©. — 676 — Remarquons, du reste, que ce n’est pas d’aprĂšs la chose adjugĂ©e, mais d’aprĂšs celle demandĂ©e, que le premier ou le dernier ressort doit ĂȘtre fixĂ©, et que c’est le dernier Ă©tat de la contestation qui la dĂ©termine; si donc il y a quelque chef ajoutĂ© par le demandeur dans le cours de l’instance, on doit le prendre en considĂ©ration * ; s’il y a un chef abandonnĂ© par le demandeur, le litige se trouve restreint Ă  ce qui est demandĂ© et contestĂ©, sans s’occuper des termes de l’assignation ou de conclusions antĂ©rieures. Mais l’abandon qui n’aurait lieu que sur l’appel ne pourrait autoriser le demandeur originaire Ă  prĂ©tendre que cet appel est non-recevable **. L’appel est Ă©videmment recevable, tant de la part du demandeur que de la part du dĂ©fendeur, quoique le dĂ©fendeur ait fait des offres qui rĂ©duisent le surplus de la demande au taux du dernier ressort, si ces offres n’ont pas Ă©tĂ© acceptĂ©es ***. Lorsque le dĂ©fendeur forme une demande reconventionnelle ou en compensation Ă  raison, par exemple, des impenses, augmentations, de deux choses l’une ou la demande principale doit ĂȘtre jugĂ©e en premier ressort seulement, et alors, quelque minime que soit celle reconventionnelle ou en compensation, elle n’est Ă©galement dĂ©cidĂ©e qu’en premier ressort ; ou elle est susceptible du dernier ressort, et alors il faut distinguer ou la demande reconventionnelle est aussi d’une valeur de dernier ressort, et alors les deux demandes sont jugĂ©es sans appel, * ArrĂȘt de la Cour de cassation, du 11 avril 1S31 et autres; Dalloz 31-1-110. ** ArrĂȘt de la mĂȘme Cour, 20 mars 1H13 ; Devilleneuve et Carette 1813-1-161. ** ArrĂȘts de la mĂȘme Cour, 26 fĂ©vrier 1838, 30 juiD, 20 juillet 1841, 27 juin 1842; mĂȘme recueil 1842-1-760. — 677 — ou bien elle est de premier ressort, et alors les deux demandes sont susceptibles d’appel. Mais lorsque la demande reconventionnelle ou en compensation prend sa source dans la demande principale elle-mĂȘme, elle suit le sort de cette demande principale Ă  quelque chiffre que s’élĂšve celle incidente. Ainsi qu’un dĂ©fendeur attaquĂ© en nullitĂ© d’une vente, d’une concession de servitude, d’un revenu de 60 francs, pour cause de dol ou de violence demande 20,000 de dommages- intĂ©rĂȘts, tant pour la diffamation que parce que l’action principale l’aura empĂȘchĂ© de disposer avantageusement de sa propriĂ©tĂ©, ce jugement sera en dernier ressort sur tous les chefs. Ce rĂ©sultat, qui paraĂźt bien rigoureux, pourra ĂȘtre Ă©vitĂ© si le dĂ©fendeur forme une demande principale au lieu d’une demande incidente. Gela a Ă©tĂ© reconnu dans la discussion delĂ  loi. Nous pensons que des parties pourraient consentir valablement Ă  ĂȘtre jugĂ©es en dernier ressort dans une contestation qui serait susceptible par son importance d’ĂȘtre portĂ©e en appel; mais qu’elles ne pourraient convenir d’user de la voie d’appel dans une matiĂšre qui doit ĂȘtre dĂ©cidĂ©e en dernier ressort, puisque la fin de non-recevoir comme nous l’avons vu, est d’ordre public et doit ĂȘtre suppléée d’office par les juges. 96° Tout ce que nous avons dit, dans le prĂ©sent chapitre, s’applique Ă  l’action que les lois romaines et les anciens auteurs connaissaient sous le nom de pĂ©tition d’hĂ©rĂ©ditĂ© ; Dumoulin sur le titre de la Coutume de Paris, relatif Ă  la complainte, assimile aussi la pĂ©tition d’hĂ©rĂ©ditĂ© Ă  l’action pĂ©titoire *. * Dumoulin, loco citato , met encore les actions confcssoircs et nĂ©gatoires, relatives aux servitudes, dans la classe des actions pĂ©titoires. — 678 — Toutefois quelques explications sont ici nĂ©cessaires. La pĂ©tition d’hĂ©rĂ©ditĂ©, comme nous l’avons dĂ©jĂ  dit, page 553, est l’action qui a pour but de se faire reconnaĂźtre hĂ©ritier, et de se faire en consĂ©quence remettre les biens de la succession ; nous la considĂ©rons comme pĂ©titoire, Ă  moins qu’il ne soit Ă©tabli que la succession est purement mobiliĂšre, et que par suite la demande ne porte que sur des objets mobiliers. La succession ne doit- elle pas ĂȘtre prĂ©sumĂ©e de droit, comprendre aussi des immeubles ou des droits immobiliers? Du reste, il arrivera trĂšs-rarement que la demande agitĂ©e entre les divers prĂ©tendants Ă  la succession se bornera Ă  la rĂ©clamation du titre d’hĂ©ritier. Ce sera la cause ou le motif de la demande ; mais on y joindra toujours des conclusions Ă  fin de compte et partage des meubles et des immeubles, ou de vente par licitation de ces derniers biens. TrĂšs-souvent mĂȘme le titre d’hĂ©ritier sera l’objet non d’une demande directe et principale, mais d’une contestation incidente, Ă©levĂ©e Ă  l’occasion d’une action en revendication d’un ou plusieurs immeubles possĂ©dĂ©s, soit par un tiers qui n’aura aucune prĂ©tention Ă  la succession, soit par un cohĂ©ritier qui disputera au demandeur la qualitĂ© dans laquelle il agit. 97° Nous avons dit, n° 309, p. 93, que les voies extraordinaires de recours contre les jugements rendus au pĂ©titoire Ă©taient la requĂȘte civile, la tierce opposition, la prise Ă  partie, le pourvoi en cassation. Nous ne nous occuperons pas des trois premiĂšres qui sont expliquĂ©es au Code de procĂ©dure. Quant Ă  la derniĂšre, nous nous bornerons Ă  dire que la Cour de cassation ne connaĂźt pas du fond des affaires, et n’a point Ă  rĂ©viser les dĂ©clarations de faits, les apprĂ©ciations — 679 de ces faits et des actes Ă©manĂ©s des tribunaux de premiĂšre instance et des Cours d’appel ; que les jugements en dernier ressort et les arrĂȘts dĂ©finitifs ne peuvent ĂȘtre attaquĂ©s que pour excĂšs de pouvoir, incompĂ©tence ou violation d’un texte de loi. Ceux qui voudront avoir des notions plus Ă©tendues sur le pourvoi en cassation, ses dĂ©lais, ses formes et ses effets pourront recourir aux ouvrages spĂ©ciaux de MM. TarbĂ© et Godard de Saponay, et aux articles Cassation et Cour de cassation des ouvrages de MM. Dalloz et Devilleneuve. — 680 — CHAPITRE QUATRIÈME. DE L’EXÉCUTION DU JUGEMENT QUI ACCUEILLE L’ACTION PÉTITOIRE. — DES RESTITUTIONS DE FRUITS, INDEMNITÉS DE PERTES OU DÉGRADATIONS. — DU REMROURSEMENT DES IMPENSES OU AMÉLIORATIONS. — DES INTÉRÊTS. SOMMAIUE 08° ExĂ©cution du jugement qui accueille l’action pĂ©litoirc. — Divers modes d’exĂ©cution volontaire ou forcĂ©e.—DĂ©lais que les juges peuvent accorder. — Contrainte par corps. 99° Le propriĂ©taire rentrant dans la possession du fonds n’est point obligĂ© de rembourser le prix d’acquisition Ă  son adversaire ni de lui payer des dommages-intĂ©rĂȘts. 100° La bonne foi ne fait pas Ă  elle seule acquĂ©rir la propriĂ©tĂ©; elle est un des moyens d’y arriver; elle fait acquĂ©rir les fruits perçus, et sert Ă  obtenir un remboursement plus favorable des impenses. — Ces principes applicables Ă  l’hĂ©ritier apparent. — Actes qu’il peut faire valablement. 101° Le possesseur Ă©vincĂ© ne peut retenir la possession de l’immeuble jusqu’à payement des impenses. — Exceptions. 102° La propriĂ©tĂ© n’a d?prix que par la possession, par la perception des fruits; le dĂ©fendeur doit donc en gĂ©nĂ©ral ĂȘtre condamnĂ© Ă  les restituer avec le fonds qui les a produits. 103" Suite.; La restitution des fruits est une consĂ©quence de la propriĂ©tĂ©. Ce ne peut ĂȘtre que par exception que la restitution des fruits n’a pas lieu. 103° Exception en faveur du possesseur de bonne foi. — Quand y a-t-il bonne foi? 106° Suite. Bonne foi existe quand le possesseur ignore les vices de son titre ; que le mot titre ne suppose pas nĂ©cessairement un acte Ă©crit, ou contrat, une piĂšce matĂ©rielle; qu’il comprend aussi les dispositions lĂ©gales. — 81 107° Bonne foi toujours prĂ©sumĂ©e; celui qui allĂšgue la mauvaise foi doit la prouver. Les tribunaux doivent en gĂ©nĂ©ral dĂ©clarer d’une maniĂšre expresse l’existence de la mauvaise foi pour justifier la restitution des fruits; mais vice toujours rĂ©putĂ© connu, quand il rĂ©sulte du titre mĂȘme ou de la loi. 108° Suite. Jurisprudence. — ArrĂȘts de plusieurs Cours d’appel et de la Cour de cassation. 109° Exception spĂ©ciale prononcĂ©e dans certains cas en faveur des communes, par la loi du 9 ventĂŽse an xn, Ă  la rĂšgle qui assujettit le possesseur de mauvaise foi Ă  la restitution des fruits. — Mais point d’exception en faveur du possesseur maintenu sur action possessoire. 1 10" Le Code NapolĂ©on ne distingue pas entre les fruits consommĂ©s et ceux extants ou existants encore lors de l’action pĂ©litoire ; ils appartiennent tous au possesseur de bonne foi dĂšs qu’ils sont recueillis. — Quand les fruits sont-ils recueillis ou perçus? BornĂąt, Bourjon.—Lois romaines. — Quid, de ceux cueillis avant la maturitĂ©, ou des loyers et fermages? 111” Les fruits perçus par un possesseur de mauvaise foi doivent ĂȘtre restituĂ©s par son hĂ©ritier quoique celui-ci soit de bonne foi, parce qu’il est successeur in universum jus et causam defuncti. 1L2° Mais, dans notre droit actuel, les fruits perçus personnellement par cet hĂ©ritier de bonne foi lui appartiennent et ne doivent pas ĂȘtre restituĂ©s. — Auteurs qui se sont expliquĂ©s sur la question dans l'ancien droit. — Auteurs modernes et arrĂȘt de la Cour de cassation. H3° Cas de cessation de bonne foi, et de cessation de mauvaise foi. 114° La mauvaise foi peut donc exister et ĂȘtre prouvĂ©e avant toute action. 115° La recherche et la constatation de la bonne ou de la mauvaise foi ne sont nĂ©cessaires que pour le rĂšglement des fruits perçus avant l’action pĂ©litoire. —Motifs de cette solution. 116° L’action pĂ©litoire comprend de plein droit demande des fruits Ă  Ă©choir, mais non de ceux antĂ©rieurs. —Une demande expresse et spĂ©ciale est nĂ©cessaire, relativement Ă  ceux-ci; elle peut ĂȘtre formĂ©e dans le cours de l’instance, mĂŽme aprĂšs jugement ordonnant la remise de l’immeuble, et. malgrĂ© le dĂ©faut de rĂ©serves. — 682 — 117° L'action pĂ©titoire serait plus rĂ©guliĂšre avec la copie des titres qui la justifient; mais Ă©tant valable sans la copie de ces titres et pouvant d’ailleurs ĂȘtre intentĂ©e sans qu’il en existe, cette action donne toujours ouverture Ă  la restitution des fruits. 118° Mais si le demandeur laissait pĂ©rimer l’instance ainsi introduite, l’action serait considĂ©rĂ©e comme non avenue et sans effet, soit quant Ă  l’objet principal, soit relativement aux fruits ; cependant, si elle contenait copie des titres, elle vaudrait comme sommation et constituerait le possesseur en mauvaise foi. 119° La citation en conciliation donne droit Ă  la restitution des fruits, pourvu qu’elle soit suivie de la demande dans le mois de la non-conciliation ou de la non-comparution. 120“ Mais le mĂ©moire prĂ©sentĂ© au prĂ©fet en matiĂšre domaniale, et dans les procĂšs contre les dĂ©partements et les communes, ne peut ĂȘtre assimilĂ© Ă  une citation en conciliation, Ă  une demande judiciaire, ni avoir pour effet d’ouvrir le droit Ă  la restitution des fruits. 121“ Restitution due par le possesseur Ă©vincĂ©, des sommes qu’il a reçues. — Droit de critiquer les traitĂ©s et d’en faire prononcer la nullitĂ©, d’obtenir des dommages-intĂ©rĂȘts contre les tiers. — Maintien des baux. — Dans quels cas. — ConsĂ©quences. 122° Les principes dĂ©veloppĂ©s dans les numĂ©ros prĂ©cĂ©dents, applicables dans notre droit actuel, diffĂšrent en cela du droit ancien au possesseur de bonne foi ou de mauvaise foi, Ă  titre hĂ©rĂ©ditaire, comme au possesseur Ă  tout autre titre. 123° La restitution des fruits doit comprendre les fruits civils comme les fruits naturels, ceux qui ont Ă©tĂ© perçus comme ceux qui auraient pu l’ĂȘtre, mais qui ne l’ont pas Ă©tĂ© par la faute ou la nĂ©gligence du possesseur, par suite de la prescription qu’il a laissĂ© accomplir, ou une indemnitĂ© pour les choses d’agrĂ©ment qui ne sont pas susceptibles de fruits proprement dits, et dont le possesseur a joui par lui-mĂȘme. — Quid lorsque la nue-propriĂ©tĂ© est seule revendiquĂ©e? 12-4° La prescription de cinq ans, fixĂ©e par l’art. 2277, Code civil, est inapplicable aux restitutions de fruits Ă  faire par le possesseur de mauvaise foi au vrai propriĂ©taire. — C83 — 125° Cas oĂč le vĂ©ritable propriĂ©taire de l’immeuble n'a pas d’action contre le possesseur, acquĂ©reur de bonne foi, soit pour le fonds, soit pour les fruits; mais a action contre le vendeur. — Nature et consĂ©quences de celte action. — Bourjon, arrĂȘt de la Cour de cassation. 126° LĂ©gataire d’un usufruit dĂ©clarĂ© dĂ©chu en vertu d’une clause du testament, tenu Ă  la restitution des fruits et des intĂ©rĂȘts. 127» En cas de rescision pour cause de lĂ©sion, l’acquĂ©reurpeutĂȘtre considĂ©rĂ© comme Ă©tant de bonne foi, et n’ĂȘtre condamnĂ© Ă  payer les fruits et les intĂ©rĂȘts qu’à partir de la demande. 128° Le possesseur de bonne foi ne doit l’intĂ©rĂȘt des fruits que pour ceux postĂ©rieurs Ă  l’action pĂ©titoire. — Le possesseur de mauvaise foi les doit pour les fruits antĂ©rieurs, mĂȘme avant liquidation, et en gĂ©nĂ©ral Ă  partir de la demande de ces fruits. — Cas auxquels il les devrait Ă  partir d'une Ă©poque antĂ©rieure.— Fruits et intĂ©rĂȘts dus par un cohĂ©ritier qui rapporte, ou en cas de rĂ©duction pour excĂšs sur la portion disponible, ou en cas de legs. — IntĂ©rĂȘts du supplĂ©ment de prix en cas de rescision pour cause de lĂ©sion. 129° Pas d’intĂ©rĂȘts des intĂ©rĂȘts de fruits. 130° Liquidation des fruits. — Mode de procĂ©der et compĂ©tence des tribunaux qui doivent opĂ©rer la liquidation. 131° Transition. — Impenses, augmentations, amĂ©liorations, dĂ©gradations. — DĂ©finition. — Lois romaines relatives aux impenses. — Code NapolĂ©on sur le mĂȘme sujet; tous les travaux, censĂ©s faits par le propriĂ©taire; les ouvrages lui appartiennent de plein droit Ă  moins de preuve contraire. — Quand et comment les impenses et travaux doivent ĂȘtre remboursĂ©s. — Le Code ne distingue pas entre les diverses dĂ©penses nĂ©cessaires, utiles, voluptuaires. — Dispositions du Code sur le remboursement des impenses, dĂ©gradations, dans les divers cas de bonne ou de mauvaise foi du possesseur. 132» Suite. DĂ©veloppements. 133° Suite. Nouveaux dĂ©veloppements. — Avant le Code civil, on admettait la compensation des fruits avec la valeur des amĂ©liorations et intĂ©rĂȘts de ces amĂ©liorations. Domat, Bourjon, Pothier, Loyseau, Deni/.art, Merlin. — MĂȘme dĂ©cision sous le Code. 134“ Suite. Jurisprudence sur ce point. 135» Conclusion. 136° État dans lequel doit ĂȘtre remis au vrai propriĂ©taire l’immeuble objet du jugement au pĂ©titoire ; il doit ĂȘtre rendu dans l’état oĂč il Ă©tait lorsque le propriĂ©taire en a Ă©tĂ© dĂ©pouillĂ©. 137° La prescription de cinq ans, rĂ©glĂ©e par l’art. 2277 du Code civil, inapplicable aux fruits perçus par le possesseur de bonne foi, ainsi qu’aux amĂ©liorations, dĂ©gradations et aux intĂ©rĂȘts des unes et des autres. 98* Lorsqu’il est intervenu jugement qui a condamnĂ© le dĂ©fendeur Ă  dĂ©laisser un fonds de terre, une maison, Ă  souffrir l’exercice d’une servitude, et que ce jugement est devenu dĂ©finitif par acquiescement, expiration des dĂ©lais d’appel ou confirmation ou qu’un arrĂȘt a infirmĂ© un jugement qui avait repoussĂ© l’action pĂ©titoire, la partie ainsi condamnĂ©e satisfait Ă  la dĂ©cision en laissant le fonds vacant, en livrant les clefs des bĂątiments Ă  son adversaire, en laissant celui-ci faire les travaux nĂ©cessaires Ă  l’usage de la servitude, en payant les fruits ou leur valeur s’il est condamnĂ© Ă  les rendre, les dommages-intĂ©rĂȘts et dĂ©pens ; et lorsque le dĂ©fendeur est condamnĂ© Ă  cesser l’exercice d’une servitude, il exĂ©cute la dĂ©cision en s’abstenant d’en user et en dĂ©truisant les ouvrages qu’il avait fait faire pour en jouir *. Si le dĂ©fendeur n’exĂ©cute pas volontairement le jugement ou l’arrĂȘt, il peut y ĂȘtre contraint par la force, c’est-Ă -dire que les portes peuvent ĂȘtre ouvertes, que le Un arrĂȘt de la Cour de cassation, du 10 janvier 1812, a dĂ©cidĂ© que lorsqu’il rĂ©sulte des faits, des circonstances de localitĂ©s que deux propriĂ©taires jouissent en commun, depuis trente ans, d’un terrain nĂ©cessaire Ă  l’exploitation de leurs fonds, la justice a pu considĂ©rer cet Ă©tat de choses comme constituant une servitude rĂ©ciproque qu’aucun des communistes ne peut faire cesser par une demande en partage, et dont ils doivent continuer de jouir en commun. — 685 — dĂ©tenteur peut ĂȘtre expulsĂ© des lieux par un officier de justice, de police, assistĂ© de la force armĂ©e. L’art. 2061 du Code civil autorise dans ce cas l’emploi de la contrainte par corps, qui est prononcĂ©e par un deuxiĂšme jugement et exĂ©cutĂ©e aprĂšs les dĂ©lais fixĂ©s par cet article. Il existait dans l’ordonnance de 1667, titre 27 de l'exĂ©cution des jugements, des dispositions analogues et mĂȘme plus sĂ©vĂšres, puisque, indĂ©pendamment de la contrainte par corps, cette ordonnance prononçait une amende de 200 francs pour inexĂ©cution des condamnations dans la quinzaine de la signification du jugement. Quoique l’art. 2061 semble s’appliquer plus spĂ©cialement aux fonds de terre, cependant il comprend aussi les maisons. Nous pensons que la disposition de cet article ne s’oppose pas Ă  ce que les juges accordent au dĂ©fendeur condamnĂ© Ă  dĂ©guerpir un dĂ©lai quelconque pour quitter les lieux, retirer les meubles qui peuvent s’y trouver. Le dĂ©lai fixĂ© par l’article prĂ©citĂ© ne doit donc ĂȘtre observĂ© que dans le cas oĂč les juges n’en ont pas accordĂ© un autre. 99° Le demandeur rentrant dans la possession du fonds, qui est sa propriĂ©tĂ©, n’est point obligĂ© de tenir compte Ă  son adversaire acquĂ©reur a non domino, qu’il soit de bonne ou de mauvaise foi, du prix de son acquisition, ni de lui payer des indemnitĂ©s ou dommages-intĂ©rĂȘts. Cet acquĂ©reur n’a de recours que contre son vendeur. Le vĂ©ritable propriĂ©taire ne peut souffrir d’un fait qui lui est Ă©tranger s’il Ă©tait obligĂ© de tenir compte du prix d’achat ou de donner un dĂ©dommagement quelconque, son action pĂ©titoire pourrait devenir inutile et sa propriĂ©tĂ© purement nominale et nulle. La bonne foi seule — 686 — n’est pas rangĂ©e au nombre des moyens lĂ©gaux d’acquĂ©rir la propriĂ©tĂ© des immeubles. 100° Le titre avec bonne foi ne suffit donc pas, comme nous l’avons dĂ©jĂ  vu, pour rendre Ă  l’instant mĂȘme l’acquĂ©reur propriĂ©taire; son effet est de donner un moyen d’acquĂ©rir la propriĂ©tĂ© en y ajoutant une possession prolongĂ©e pendant dix ou vingt ans art. 2265 Ă  2469. La bonne foi sert Ă  l’acquisition des fruits produits par l’immeuble et au remboursement plus favorable, plus Ă©tendu de certaines impenses ou amĂ©liorations; mĂȘme en matiĂšre de succession, l’hĂ©ritier apparent et de bonne foi ne peut faire valablement que les actes d’administration, de l’administration la plus Ă©tendue si l’on veut. L’aliĂ©nation qu’il aurait faite des biens de la succession, des immeubles qui s’y trouveraient, pourrait ĂȘtre annulĂ©e sur la demande du vĂ©ritable hĂ©ritier qui se prĂ©senterait plus tard, et l’acquĂ©reur de bonne foi n’aurait de recours que contre son vendeur. Un arrĂȘt de cassation, du 26 aoĂ»t 1833, rendu sur notre plaidoirie, l’a ainsi dĂ©cidĂ© pour la vente de l’hĂ©rĂ©ditĂ©, des droits successifs. Nous pensons qu’il en serait de mĂȘme de la vente particuliĂšre d’un immeuble de la succession. 101° Iu reste le dĂ©fendeur ne pourrait refuser d’abandonner l’immeuble avant que le demandeur ne lui eĂ»t payĂ© les dĂ©penses, frais ou impenses qu’il y aurait faites. Les juges ne pourraient l’autoriser Ă  en conserver la possession jusqu’à ce qu’il fĂčtremboursĂ©de ceux mĂȘme qu’ils auraient liquidĂ©s. Le Code de procĂ©dure n’a pas reproduit la disposition de l’art. 9, titre 27 de l’ordonnance de 1667 sur l’exĂ©cution des jugements; les art. 867,1673 du Code civil sont les seules dispositions de notre droit actuel qui admettent une semblable mesure, qui se conçoit, puis- qu’il s’agit, dans ces articles, d’un immeuble rachetĂ© par \ le vendeur Ă  rĂ©mĂ©rĂ© ou rapportĂ© par un cohĂ©ritier, auquel il avait Ă©tĂ© valablement donnĂ© et qui a au moins un droit , indivis dans cet immeuble et dans les fruits qu’il peut produire ; encore le lĂ©gislateur a-t-il senti la nĂ©cessitĂ© de dispositions expresses et spĂ©ciales. ArrĂȘt de la Cour de cassation, du 12 mai 1840, Dalloz, 1840-1-225. 102° La propriĂ©tĂ©, dont nous avons expliquĂ©, p. 580 et suivantes, les conditions, la nature et les effets, et que ; Ballanche trouve d’une importance et d’une moralitĂ© ; telles, qu’il va mĂȘme jusqu’à la considĂ©rer comme l’uni- que fondement de la sociĂ©tĂ© actuelle, la propriĂ©tĂ©, disons-nous, n’a cependant de prix que par la possession, par la jouissance, par les fruits qu’elle produit. 1 Si le possesseur illĂ©gitime gardait les fruits, par lui 1 perçus avant l’action pĂ©titoire, la propriĂ©tĂ© aurait Ă©tĂ© I stĂ©rile pour le vĂ©ritable propriĂ©taire, pendant tout le r temps de la possession de son adversaire ; l’avantage h n’en existerait pour lui que dans l’avenir, et seulement Ă  partir de la demande mĂȘme. Le dĂ©fendeur doit donc ĂȘtre condamnĂ© Ă  rendre, non i seulement le fonds, mais encore les fruits de ce fonds, i 103° En effet, la propriĂ©tĂ© est le droit de disposer des choses de la maniĂšre la plus absolue. Art 544, Code civil. La propriĂ©tĂ© d’une chose, soit mobiliĂšre, soit immobiliĂšre donne droit sur tout ce qu’elle produit et ! sur ce qui s’y unit accessoirement, soit naturellement, soit artificiellement. Art. 540. Les fruits naturels ou industriels de la terre, les fruits civils, le croĂźt des animaux, appartiennent au propriĂ©taire par droit d’accession. Art. 547. Ainsi, rĂšgle gĂ©nĂ©rale, tous lesfruits naturels et indus- — 688 — triels ou civils appartiennent de plein droit au propriĂ©taire de la chose ou de l’objet qui les produit ; c’est une consĂ©quence, un des Ă©lĂ©ments du droit de propriĂ©tĂ©. 10/i° Ce ne peut donc ĂȘtre que par exception que les fruits peuvent quelquefois cesser de lui appartenir, et ĂȘtre attribuĂ©s Ă  un tiers; et, en effet, nous allons voir qu’il en est ainsi. Mais cette dĂ©rogation au principe gĂ©nĂ©ral, comme toutes les exceptions, doit ĂȘtre renfermĂ©e dans d’étroites limites. Il faut donc bien se pĂ©nĂ©trer de l’esprit de la loi et bien peser ses termes pour n’en pas sortir. 105° L’ordonnance de 1539, art. 9/j, portait que, en toutes matiĂšres rĂ©elles, pĂ©titoires et personnnelles, intentĂ©es pour hĂ©ritages et choses immeubles, s’il y avait restitution de fruits, ils seraient adjugĂ©s, non-seulement depuis la contestation en cause, mais aussi depuis le temps que le condamnĂ© avait Ă©tĂ© en demeure et mauvaise foi auparavant ladite contestation. D’aprĂšs les art. 5/i9 et 550, le simple possesseur ne fait les fruits siens que dans le cas oĂč il possĂšde de bonne foi ; dans le cas contraire, il est tenu de rendre les fruits avec la chose au propriĂ©taire qui la revendique. Le possesseur est de bonne foi quand il possĂšde comme propriĂ©taire, en vertu d'un titre translatif de ‱propriĂ©tĂ©, dont il ignore les vices. Il cesse d’ĂȘtre de bonne foi du moment oĂč ces vices lui sont connus. 100" Ainsi le lĂ©gislateur distingue entre le possesseur de bonne foi et le possesseur de mauvaise foi ; il autorise le premier seul Ă  conserver les fruits. Remarquons bien que quand la loi parle d’un titre translatif, elle entend, non-seulement un contrat, un acte d’aliĂ©nation, comme une vente ou donation, un tes- — 689 — tament, un Ă©change, mais aussi une transmission hĂ©rĂ©ditaire, un droit fondĂ© sur une disposition lĂ©gale; en un mot le moyen d’acquĂ©rir. Art. 711. L’expression titre est gĂ©nĂ©rale; ainsi un hĂ©ritier qui trouverait dans la succession un immeuble n’appartenant pas rĂ©ellement Ă  son auteur pourrait invoquer les art. 549, 550. Du reste, il faut bien faire attention au texte du Code, plus clair, plus explicite que l’ordonnance del539. Il ne se borne pas Ă  dire d’une maniĂšre vague ou gĂ©nĂ©rale que le possesseur est de bonne foi quand il possĂšde en vertu d’un titre translatif de propriĂ©tĂ© quelconque. La loi est plus prĂ©cise et plus exigeante, elle veut que si le titre est vicieux, le possesseur en ignore les vices, qu’il puisse le croire valable et penser qu’il acquiĂšre lĂ©gitimement du vĂ©ritable propriĂ©taire. Bona fides, dit Pothier, Pandectes, t. 11, p. 149, n° 77, nihil aliud est quamjusta opinio quĂŠsiti dominii. Bona fides, dit VoĂ«t, ad Pandect. de Usucap. , n° 6, est illƓsa conscientia putantis rem suam esse. Qui a quolibet Ă©mit, porte la loi 27, ff. de Contr, empt., rem quam putat ipsius esse, bona fide Ă©mit. 107° Sans doute la mauvaise foi ne se prĂ©sume pas, et la preuve qui en doit ĂȘtre faite par celui qui l’allĂšgue article 2268, Code civil ne donnera lieu en gĂ©nĂ©ral qu’à une discussion et Ă  un jugement de fait. Mais lorsque l’acte translatif de propriĂ©tĂ© est entachĂ© du vice ou matĂ©riel ou lĂ©gal qui rend ce titre nul, le possesseur ne peut prĂ©tendre qu’il l’ignorait, et la preuve qu’il en avait connaissance rĂ©sulte de l’acte lui-mĂȘme ; cette solution s’applique surtout au cas oĂč l’acte est nul pour vice de forme ou pour toute autre contravention Ă  une disposition lĂ©gale ; car personne ne peut trouver une excuse et la source d’un droit, dans son ignorance de la loi. -u 690 — Aussi, une foule d'arrĂȘts ont-ils dĂ©cidĂ© qu’il suffisait pour que le possesseur ait Ă©tĂ© valablement condamnĂ© Ă  la restitution des fruits, que les tribunaux eussent constatĂ© que le contrat auquel l’acquĂ©reur avait concouru renfermait le vice qui le rendait nul, ou que ce vice fĂ»t fondĂ© sur une disposition de la loi. Nous n’admettons pas l’interprĂ©tation donnĂ©e au § G de la loi 25 de IJered. pet., loi toute spĂ©ciale. Nous invoquons au contraire le principe gĂ©nĂ©ral juris crvor nulliprodest du § 15,1. 2 ,ff. prĂŽ-emptore, et celui tout Ă  fait identique mmquam errdr juris possessori prodest, Ă©crit dans la loi 31 ,ff. de Usucap. Autrement, il faudrait rayer l’art. 550 du Code civil; il ne produirait presque jamais d’effet, et les tribunaux pourraient le laisser de cĂŽtĂ© Ă  l’aide d’une dĂ©claration vague de bonne foi ou d’ignorance des vices de la part du possesseur. La loi ayant dĂ©fini la bonne foi, a par lĂ  mĂȘme limitĂ© le pouvoir du juge du fait qui est tenu de se renfermer dans cette limite, dans cette dĂ©finition. 108° Nous avons parlĂ© de la jurisprudence, nous allons l’exposer. Nous mentionnerons d’abord un arrĂȘt de la Cour de cassation, du 28 fĂ©vrier 1825 Sirey 1825-1-426 portant, rejet d’un pourvoi formĂ© contre un airĂȘt de la Cour de Toulouse, qui adjugeait les fruits Ă  une femme mtt*- riĂ©e sous le rĂ©gime dotal, pour ses biens aliĂ©nĂ©s par son mari, du jour du dĂ©cĂšs de ce dernier et non du jour de la demande. Cependant l'arrĂȘt n’avait pas constatĂ© par une dĂ©claration formelle que l’acquĂ©reur fĂ»t de mauvaise foi ; mais il Ă©tait Ă©vident qu’il connaissait le vice de son acquisition; il ne pouvait ignorer la loi qui dĂ©clare les immeubles dotaux inaliĂ©nables. Voici une espĂšce remarquable dans laquelle le mĂȘme — G91 — principe a Ă©tĂ© consacrĂ©. Le 22 octobre 1803, acte authentique passĂ© devant notaire, par lequel Jean Paris et Anne Chalopin sa femme, se font mutuellement don de l’usufruit de tous les biens dont ils se trouveront saisis Ă  leur dĂ©cĂšs pour le survivant en jouir pendant sa vie. Cette donation Ă©tait nulle aux termes de l’art. 1097 du Code civil, qui interdit toute donation mutuelle entre Ă©poux par un seul et mĂŽme acte. En 1806, dĂ©cĂšs d’Anne Chalopin, sans enfants; son mari signifie aussitĂŽt aux hĂ©ritiers collatĂ©raux de la dĂ©funte, copie de l’acte du 22 octobre 1803, en lui donnant la date du 22 octobre 1802, conformĂ©ment Ă  l’expĂ©dition qui lui en avait Ă©tĂ© dĂ©livrĂ©e par le notaire. Or, au 22 octobre 1802, le Code civil n’existait pas encore, et la lĂ©gislation antĂ©rieure permettait les donations mutuelles par un seul et mĂŽme acte. Jean Paris se mit en possession des biens de sa femme, et en jouit sans trouble jusqu’en 1830, c’est-Ă -dire pendant vingt-quatre ans. Mais Ă  cette Ă©poque les hĂ©ritiers de sa femme, ayant dĂ©couvert l’erreur de date de l’expĂ©dition, intentĂšrent contre le mari une demande en nullitĂ© de l’acte, en revendication des biens d’Anne Chalopin, et en restitution des fruits depuis le dĂ©cĂšs de celle-ci. Le. mari reconnut la nullitĂ© fondĂ©e sur l’art. 1097 du Code civil. Mais il refusa de restituer les fruits, prĂ©tendant qu’il avait possĂ©dĂ© de bonne foi, qu’il ignorait le vice de l’acte de donation, puisque l’expĂ©dition lui donnait une date antĂ©rieure au Code civil; les hĂ©ritiers de sa femme rĂ©pondirent que Jean Paris Ă©tant partie dans l’acte en connaissait la date vĂ©ritable, et que la nullitĂ© Ă©tant fondĂ©e sur la loi que personne n’est censĂ© ignorer excluait pĂ©remptoirement l’exception de bonne foi. — 692 — Cependant, en premiĂšre instance, cette exception de bonne foi fut admise par le Tribunal de ChĂąteauroux; mais en appel, elle fut Ă©cartĂ©e par la Cour de Bourges en ces termes ConsidĂ©rant que nul n’est censĂ© ignorer la loi ; que dĂšs lors Paris est censĂ© avoir connu l’art. 1097, Code civil, qui interdit aux Ă©poux de se faire aucune donation par un seul et mĂŽme acte ; qu’ayant figurĂ© dans l’acte du 22 octobre 1803, il ne pouvait pas ignorer la date de cette donation ; qu’ainsi il Ă©tait aux termes de droit Ă©vident pour lui que le titre, en vertu duquel il prenait possession des biens de son Ă©pouse, Ă©tait nul, et ne pouvait produire aucun effet ; qu’il ne peut dĂšs lors invoquer sa bonne foi, et doit restituer toutes les jouissances par lui indĂ»ment perçues. » Sirey-Devilleneuve, annĂ©e 183Ă», partie 2 e , p. 38. Un autre arrĂȘt de la mĂȘme Cour, en date du 11 mars 1837, a dĂ©cidĂ© que celui qui achĂšte sciemment un inj- meuble appartenant Ă  un mineur sans l’accomplissement des formalitĂ©s prescrites par les lois ne peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme possesseur de bonne foi, et ĂŒ ce titre faire les fruits siens La Cour, considĂ©rant qu’il rĂ©sulte en fait des Ă©nonciations et des prĂ©visions de l’acte de vente que l’acquĂ©reur connaissait l’état de minoritĂ© de Jacquette Briteau; qu’en droit, il ne pouvait ignorer que la vente des biens des mineurs n’était valable qu’aprĂšs des prĂ©liminaires indispensables et avec des formes spĂ©ciales; considĂ©rant que la promesse d’une ratification faite audit acte par la mineure Ă©tait, Ă  dĂ©faut de capacitĂ©, aussi nulle que la vente elle-mĂȘme; qu’ainsi l’acquĂ©reur, prĂ©venu qu’il courait la chance d’ĂȘtre Ă©vincĂ©, et l’éviction Ă©tant pour — 693 lui sans cesse imminente, ne peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme possesseur de bonne foi; dit mal jugĂ© au chef qui borne la restitution des jouissances Ă  celles Ă©chues depuis la demande; Ă©mendant et faisant ce que les premiers juges auraient dĂ» faire, ordonne qu’elle comprendra toutes celles Ă©chues depuis l’acte de vente, du 14 dĂ©cembre 1820, sous la distraction comme pour celles allouĂ©es par les premiers juges, des contributions et rĂ©parations proportionnelles, etc. Devilleneuve et Carette 1838, 2' partie, p. 75. » Un arrĂȘt de la chambre des requĂȘtes, du 25 mars 1840 Devilleneuve et Carette 1840-1-456 consacre le mĂȘme principe dans l’espĂšce suivante La dame de Boisroger-Dumuy, Ă©migrĂ©e,est dĂ©cĂ©dĂ©e Ă  Paris, le 29 messidor an xm. Ses hĂ©ritiers renoncĂšrent alors Ă  sa succession ; mais lorsque intervint la loi du 27 avril 1825, relative Ă  l’indemnitĂ© des Ă©migrĂ©s, ils profitĂšrent du bĂ©nĂ©fice de cette loi, et acceptĂšrent sous bĂ©nĂ©fice d’inventaire la succession Ă  laquelle ils avaient prĂ©cĂ©demment renoncĂ©. Ces hĂ©ritiers Ă©taient alors reprĂ©sentĂ©s par les hĂ©ritiers deForbin La Barben d’une part, et d’autre part par les hĂ©ritiers lloziĂšres de Joran. Peu aprĂšs, et par acte du 9 juin 1826, les hĂ©ritiers r»oziĂšres de Joran, revenant sur leur acceptation sous bĂ©nĂ©fice d’inventaire, dĂ©clarĂšrent renoncer de nouveau Ă  la succession de la dame de Boisroger. La liquidation de l’indemnitĂ© fut en cet Ă©tat poursuivie par les hĂ©ritiers de Forbin, qui traitĂšrent ensuite avec les crĂ©anciers de la succession. Les traitĂ©s ayant Ă©tĂ© favorables, et un supplĂ©ment d’indemnitĂ©, obtenu par les hĂ©ritiers de Forbin, les ayant mis Ă  mĂȘme de rĂ©aliser des — GDI — bĂ©nĂ©fices sur la liquidation de la succession de Roisro- ger, les hĂ©ritiers de UoziĂšres de Joran ont alors formĂ© contre eux une demande Ă  fin de compte de l’indemnitĂ© qu’ils avaient touchĂ©e, et en partage de ce qui restait, toutes dettes payĂ©es, avec restitution des intĂ©rĂȘts perçus. Les hĂ©ritiers de Forbin ont opposĂ© aux demandeurs leur renonciation du 9 juin 1826. A quoi les hĂ©ritiers de RoziĂšres ont rĂ©pondu que ayant acceptĂ©, sous bĂ©nĂ©fice d’inventaire, ils n’avaient pu valablement renoncer, d’aprĂšs la maxime semel hccres, sim per hƓres, et que personne n'Ă©tant censĂ© ignorer la loi, les hĂ©ritiers de Forbin sachant dĂšs lors que leurs adversaires avaient des droits Ă©gaux aux leurs, n’avaient pu gagner les fruits et Ă©taient tenus de les restituer. Jugement de premiĂšre instance, et arrĂȘt de la Cour d’appel de Paris, qui accueillent la demande. Quant Ă  la restitution des fruits, la Cour d’appel considĂšre que la renonciation Ă©tait nulle par l’acceptation antĂ©rieure, laquelle avait Ă©tĂ© connue de tous les hĂ©ritiers ; que dĂšs lors les appelants hĂ©ritiers Forbin ne pouvaient prĂ©tendre avoir possĂ©dĂ© de bonne foi. Le pourvoi en cassation contre cette dĂ©cision a Ă©tĂ© rejetĂ© par l’arrĂȘt prĂ©citĂ©. Voici une espĂšce dans laquelle la Cour rĂ©gulatrice a posĂ© les principes d’une maniĂšre bien plus positive encore, puisqu’elle a cassĂ© un arrĂȘt qui avait admis la bonne foi, malgrĂ© la nullitĂ© d’une vente prononcĂ©e par la loi. Un maire s’était rendu adjudicataire de biens nppar tenant Ă  sa commune, et avait joui pendant plusieurs annĂ©es de ces biens. La commune demanda la nullitĂ© de la vente, en se fondant sur l’art. 1596 du Code civil, et la restitution des — 695 — fruits Ă  partir de l’entrĂ©e en possession. Jugement de premiĂšre instance qui accueille complĂštement les con- clu ions de la commune, mais sur l’appel, arrĂȘt de la Cour de Pau qui, tout en maintenant la nullitĂ© de la vente, n’ordonne la restitution des fruits qu’à partir de, l’assignation en justice. Attendu que le maire paraĂźt avoir agi de bonne foi en acquĂ©rant les biens communaux; qu’il Ă©tait d’autant plus excusable de n’avoir pas supposĂ© lors de la vente qu’il fĂ»t incapable d’acquĂ©rir, d’aprĂšs les dispositions de l’art. 1596 du Code civil, qu’il avait Ă©tĂ© en quelque sorte encouragĂ© par l’administration elle-mĂȘme Ă  concourir Ă  cette acquisition aux enchĂšres, et que cette mĂȘme adjudication lui fut donnĂ©e par le notaire, sur la rĂ©quisition de l’adjoint, assistĂ© du sous-prĂ©fet de l’arrondissement; qu’ainsi il est juste de dĂ©clarer que le maire ne sera tenu de la restitution des fruits que du jour de la demande. » Certes, l’arrĂȘt rĂ©unit bien des considĂ©rations favorables et d’une trĂšs-grande force; mais la loi est encore plus forte cl bien supĂ©rieure Ă  ces considĂ©rations. Le maire ne pouvait valablement allĂ©guer avoir ignorĂ© le vice de son acquisition, puisqu’il rĂ©sultait de la disposition gĂ©nĂ©rale et absolue de la loi; aussi sur le pourvoi en cassation cet arrĂȘt fut-il annulĂ© en ces termes Vu les art. 5/i9 et 550 ; considĂ©rant que le possesseur n’est rĂ©putĂ© de bonne foi qu’autant qu’il possĂšde, comme propriĂ©taire, en vertu d’un titre de propriĂ©tĂ©, dont il ignore les vices, et qu’en aucun cas l’ignorance des vices du titre ne peut ĂȘtre allĂ©guĂ©e par celui qui achĂšte contre la prohibition formelle de la loi; attendu que tel a Ă©tĂ© le cas de Poymiro qui, maire de la commune, dont les immeubles Ă©taient en vente, s’en est rendu adjudicataire, — 696 — malgrĂ© la disposition prohibitive de l’art. 1596 du Code civil ; qu'il a donc connu les vices de son titre Ă  son origine mĂȘme; qu’il devait dĂšs lors ĂȘtre tenu de la restitution des fruits Ă  compter du jour de son adjudication, et que par consĂ©quent l’arrĂȘt attaquĂ© en ne le condamnant Ă  cette restitution qu’à compter du jour de la demande a ouvertement violĂ© ledit art. 550, Code civil 11 janvier 18/13; Dalloz 1843, l r " partie, p. 1/19. » Dans une autre affaire, Audicq contre la commune de Brain, la Cour de Rennes avait dispensĂ© cette commune d’une restitution de fruits attendu que les divers Ă©lĂ©ments de la cause se rĂ©unissaient pour Ă©tablir que la commune qui avait depuis des siĂšcles la possession fondĂ©e sur plusieurs anciens titres avait continuĂ© Ă  possĂ©der de bonne foi les biens vendus Ă  Damour par acte Ă©manĂ© de l’autoritĂ© administrative, le 27 fĂ©vrier 1812, depuis le 22 thermidor an iv, jusqu’à l’époque de cette vente. » Mais, sur le pourvoi, arrĂȘt de cassation, du Ă  fĂ©vrier 1845, attendu entre autres motifs Que la commune de Brain ne pouvait pas invoquer sa bonne foi pour prĂ©tendre qu’elle avait le droit de s’approprier les fruits, puisque indĂ©pendamment de ce que nul n’est admis Ă  prĂ©texter son ignorance de la loi, la dĂ©possession lĂ©gale de la commune remontait au jour du versement fait par le sieur Damour des trois quarts de son prix d’acquisition, et qu’à dater de ce jour les fruits Ă©taient acquis au soumissionnaire; d’oĂč il suit que la Cour royale de Rennes, qui s’est fondĂ©e sur cette exception de bonne foi, pour dispenser la commune de rapporter ces fruits, a violĂ© les lois sus Ă©noncĂ©es, et fait une fausse application des art. 549 et 550 du Code civil. De- villeneuve et Carette 1845, l rc partie, p. 220. » — 697 — Un autre arrĂȘt de la mĂȘme Cour, du 3 avril 1845 mĂȘme recueil 1845-1-423, rejette le pourvoi d’un acquĂ©reur de bien dotal, condamnĂ© Ă  la restitution des fruits du jour de son entrĂ©e en possession, en se fondant sur ce qu’il rĂ©sultait, tant de l’acte de vente que des faits de la cause que l’acquĂ©reur savait qu’il achetait un immeuble dotal, ce qui l’avait constituĂ© en Ă©tat de mauvaise foi. Un autre arrĂȘt, du 20 janvier 1835 Dalloz 1835-1- 49, a dĂ©cidĂ© que pour ordonner la restitution des fruits, il n’était pas nĂ©cessaire de dĂ©clarer, en propres termes, l’existence de la mauvaise foi ; que la dĂ©claration que c’était par abus sans droit ni qualitĂ© qu'une partie s’était emparĂ©e d’une propriĂ©tĂ©, Ă©quivalait Ă  celle de mauvaise foi. Enfin, un arrĂȘt, du 25 avril 1842 Devilleneuve 1842- 1-542 a rejetĂ© le pourvoi contre un arrĂȘt de la Cour de Rouen, qui, en dĂ©clarant nulle la vente d’un bien dotal, avait ordonnĂ© la restitution des fruits Ă  la femme, non pas seulement du jour de la demande, mais bien du jour du dĂ©cĂšs du mari ; aucun motif, tirĂ© de la mauvaise foi de l’acquĂ©reur, n’était donnĂ© Ă  l’appui de cette restitution. Le silence de l’arrĂȘt est remarquable. Le pourvoi contre cet arrĂȘt a Ă©tĂ© rejetĂ© par le motif suivant attendu que l’arrĂȘt attaquĂ© ayant dĂ©clarĂ© que l'acquĂ©reur avait connu le vice de la vente, a pu ordonner qu’il serait tenu de restituer Ă  la femme les fruits de l’immeuble litigieux, depuis l’époque oĂč elle aurait dĂ» en jouir, si l’immeuble n’avait pas Ă©tĂ© aliĂ©nĂ©, et qu’en jugeant ainsi l’arrĂȘt attaquĂ© n’a violĂ© aucune loi. » 109° Il y a une exception Ă  la rĂšgle que le possesseur de mauvaise foi doit la restitution des fruits par lui perçus. Les communes dĂ©possĂ©dĂ©es de biens qu’elles dĂ©- tenaient mal Ă  propos Ă  titre de communaux, ou les particuliers qui sont Ă  leur lieu et place Ă  titre de partage, de vente, d’échange, ne peuvent ĂȘtre condamnĂ©s Ă  la restitution des fruits en faveur des tiers rĂ©intĂ©grĂ©s qu’à compter du jour delademandern justice, quoique la possession soit rĂ©putĂ©e de mauvaise foi. effet, l’art. 9 * de la loi du 9 ventĂŽse an XII est trĂšs-formel ; il dĂ©roge au droit commun, ainsi que cela rĂ©sulte du langage do l’orateur du gouvernement, qui a prĂ©sentĂ© le projet de loi Ă  la sanction du Corps lĂ©gislatif. Voyez aussi Merlin, Questions de droit, V" Fruits, § 5, n° 1 et 2, et deux arrĂȘts de la Cour de cassation, des 19 mars 1810 et 13 fĂ©vrier 1820. Mais nous ne croyons pas qu’une exception semblable puisse exister en faveur du possesseur maintenu par jugement rendu au possessoire. Nous croyons qu’il pourrait ĂȘtre condamnĂ© mĂȘme Ă  la restitution des fruits perçus pendant l’annĂ©e qui aurait prĂ©cĂ©dĂ© le trouble et jusqu’à l’action petiloire; mais une dĂ©claration trĂšs expresse de mauvaise foi serait alors nĂ©cessaire; Ă  plus forte raison une pareille dĂ©claration pour les annĂ©es antĂ©rieures entraĂźnerait la restitution. 110 3 Notre Code ne distingue pas comme le faisait le droit romain , les fruits consommĂ©s, de ceux extans ou encore existants lors de l’action. Il suffit qu’ils aient Ă©tĂ© perçus, cueillis ou recueillis pour qu’ils soient acquis au possesseur de bonne foi, qui n’est tenu de restituer que ' Cet article 9 est ainsi conçu Il ne sera prononcĂ© do restitution de fruits ou jouissance, ni par les tribunaux, en faveur des tiers, dans le cas des rĂ©pĂ©titions prĂ©vues par l’article prĂ©cĂ©dent, ni par les conseils de prĂ©fecture on faveur des commune- 1 , dans celui mentionnĂ© en l’art. 5. qu’à compter du jour de la demande pour les particuliers, Ă  compter du 1 er vendĂ©miaire au xiu, pour les communes. — 699 — ceux non perçus lors de l’action et ceux Ă  Ă©choir fructus pendentes pars furnli videntur. L. kk, ff. de IĂźei vind.. Nous considĂ©rons comme perçus tous les fruits qui sont dĂ©tachĂ©s du sol ou des arbres qui les produisent, quoiqu’ils soient restĂ©s dĂ©posĂ©s sur le champ et non encore transportĂ©s dans les granges ou dans les greniers ; mais non ceux qui sont encore adhĂ©rents au sol ou sur les arbres, quoiqu’ils soient parvenus Ă  leur maturitĂ©. C’est aussi l’opinion de Bourjon, t. II, p. 518, 519, n M 3 et 5, de Dornat, p. 239, n° 7 ; voyez encore L. 13, ff. Quibus modis nsusfructus vcl usus amilt. L. ĂčS. ff. de Âcq. rer. dom. et la loi 78, in fine. ff. de Itei vind. Dornat, Ă  l’endroit citĂ©, s’exprime dans les termes suivants Si un possesseur de bonne foi est assignĂ© Ă  la veille de la rĂ©colte par le maĂźtre du fonds, pour s’en dĂ©sister et rendre les fruits, et que par l’évĂ©nement il soit condamnĂ©, il sera tenu de rendre les fruits de cette rĂ©colte ; car n’étant pas encore cueillis lors de la demande, ils faisaient partie du fonds et la demande avait fait cesser le droit que ce possesseur avait de jouir. Mais si les fruits Ă©taient cueillis avant la demande, quoiqu’ils n’eussent pas Ă©tĂ© emportĂ©s encore et qu’ils fussent restĂ©s dans le champ, ils appartiendront Ă  ce possesseur. Car les ayant cueillis et sĂ©parĂ©s du fonds, ils ont Ă©tĂ© Ă  lui ; et on ne peut plus lui en ĂŽter la propriĂ©tĂ©, ni l’empĂȘcher d’emporter ce qui lui est acquis. » Voici l’opinion de Bourjon, t. II, p. 518, 519, n°* 3 ct5. 3. Tous les fruits cueillis avant la demande appartiennent au possesseur de bonne foi, encore qu’ils fussent sur le champ, lorsque la demande au pĂ©tiloire a Ă©tĂ© formĂ©e; la sĂ©paration du fonds, jointe Ă  la bonne foi, les a faits — 700 siens; en effet, par cette sĂ©paration, ils ne font plus partie du fonds ; ils lui appartiennent donc ; c’est un pur mobilier non sujet Ă  suite que la loi et la bonne foi ont rendu sien ; mais ceux qui tiennent encore au fonds en font partie. 5. Voyons les fruits que l’action contre un tel possesseur embrasse nonobstant la bonne foi. Tous les fruits qui se trouvent pendants par les racines au jour de la demande contre lui formĂ©e au pĂ©titoire, ne lui appartiennent pas; ils appartiennent au vrai maĂźtre ; ils font partie du fonds qui ne lui appartient pas; la demande a fait cesser sa bonne foi ; ces fruits appartiennent donc au propriĂ©taire, et ce, indĂ©pendamment de la durĂ©e de l’instance. Il y a plus cela aurait lieu, encore que la demande eĂ»t Ă©tĂ© formĂ©e la veille de la rĂ©colte ; cette proximitĂ© n’affaiblit en rien le fait constant que les fruits Ă©tant encore pendants par les racines, font partie du fonds qui ne lui appartient pas. » L’annotateur ajoute les observations suivantes Ce qui est conforme Ă  nos usages ainsi qu’à l’équitĂ©. Je l’ai entendu ainsi juger au ChĂątelet, et c’est le droit commun. » Ces dĂ©cisions nous paraissent d’autant plus justes et d’autant plus applicables aujourd’hui, que les art. 5Ăą8, 5/i9 et 550, pour dĂ©cider que les fruits appartiennent au possesseur de bonne foi, ne s’attachent qu’au fait matĂ©riel, de la perception, sans tenir aucun compte de leur consommation ou de leur existence, ni de leur matinitĂ© plus ou moins avancĂ©e, et que, comme il s’agit d’une exception au droit de propriĂ©tĂ© , il est indispensable, comme nous l’avons dĂ©jĂ  dit, de la renfermer dans les termes prĂ©cis de la loi. Cependant si un possesseur s’était hĂątĂ© de recueillir les fruits avant leur maturitĂ©, et cela d’une maniĂšre af- — 701 — fectĂ©e et inusitĂ©e, avec l’intention trĂšs-prĂ©sumable de se soustraire Ă  la restitution, et parce qu’il aurait pu avoir connaissance du projet, des intentions du demandeur de l’attaquer ; si l’action pĂ©titoire, d’aprĂšs l’époque oĂč elle a Ă©tĂ© formĂ©e, les eĂ»t conservĂ©s au demandeur dans le cas oĂč ils n’eussent Ă©tĂ© recueillis qu’à leur maturitĂ©, nous pensons qu’alors il y aurait fraude, peut- ĂȘtre mĂȘme mauvaise foi; que les juges devraient condamner le possesseur Ă  les restituer avec d’autant plus de raison que nous avons de la peine Ă  donner le titre de fruits Ă  des produits non encore parvenus Ă  leur maturitĂ©. Les loyers ou fermages dont le payement aurait Ă©tĂ© ajournĂ© Ă  une Ă©poque postĂ©rieure Ă  la demande appartiendraient au demandeur, quoiqu’ils reprĂ©sentassent une jouissance antĂ©rieure Cour de cassation , 30 juin I8Z1O; Dalloz, 18Z0-1 -261 car ils n’appartiennent au possesseur que par le double fait de l’écbĂ©ance et de la perception ; Ă  plus forte raison en serait-il de mĂȘme des loyers ou fermages payĂ©s d’avance, comme Ă  Paris les 0 mois des marchands. L’art. 586 est inapplicable ici. 111° Les fruits perçus par un possesseur de mauvaise foi doivent ĂȘtre restituĂ©s par son hĂ©ritier, quoique celui- ci soit de bonne foi, parce qu’ils Ă©taient dus personnellement par son auteur, et qu’il succĂšde Ă  ses obligations comme Ă  ses droits. Il est successor in uniuersnm jus et causant defuncli. 112° Mais nous pensons que l’hĂ©ritier dans ce cas fait siens les fruits qu’il a perçus, puisque l’acquisition des fruits est attachĂ©e au fait de la perception de bonne foi. Que la perception est toute personnelle, se compose de faits isolĂ©s et ne peut ĂȘtre rĂ©gie par les principes relatifs Ă  la prescription du fonds mĂȘme. Domat, Bourjon, Po- — 702 — thier, se fondant sur le droit romain et sur des raisons qui nous semblent plus subtiles que solides, ne tenaient aucun compte de la bonne foi personnelle de l’hĂ©ritier, lui infligeaient la peine de la restitution des fruits, non- seulement pour ceux perçus par son auteur, mais encore pour ceux qu’il avait perçus lui-mĂȘme de bonne foi; mais nous n’admettons pas cette solution , et l’on peut voir d’.ailleurs, Ă  l’appui de notre sentiment, Duranton, ZachariĂŠ, Ilennequin, MarcadĂ©, Uliavot, Pellat, Molitor et Demante Cours de droit civil, et un arrĂȘt de la Cour de cassation, 24 mai 1848. 113° Celui qui aurait commencĂ© Ă  possĂ©der de bonne foi et qui viendrait Ă  avoir connnaissance des vices de son titre, cesserait du jour oĂč cette connaissance lui serait venue de profiter des fruits; celui qui, ayant commencĂ© Ă  possĂ©der de mauvaise foi, aurait plus tard un juste motif de se considĂ©rer comme propriĂ©taire, par exemple s’il se croyait seul hĂ©ritier, s'il y avait un testament qu’il pouvait croire valable, ferait les fruits siens depuis le commencement de sa bonne foi et pour tout le temps de sa durĂ©e. Les mĂȘmes solutions s’appliqueraient aux diverses alternatives de bonne ou de mauvaise foi dans lesquelles un possesseur pourrait successivement se trouver. 114° Il rĂ©sulte de tout ce qui prĂ©cĂšde, que la mauvaise foi peut exister et ĂȘtre prouvĂ©e avant toute action pĂ©titoire, avant toute contestation en cause. Un possesseur peut dĂ©couvrir les vices de son titre, l’existence et la validitĂ© des titres d’autrui. De quelque maniĂšre que cela arrive, le possesseur est constituĂ© en mauvaise foi, et, par consĂ©quent, en demeure de restituer les fruits. L’ordonnance de 1539 le dĂ©cidait ainsi trĂšs-positive- 703 — ment, et les art. 5/i9, 550 ne sont pas moins formels puisqu’ils imposentla restitution d’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale du jour oĂč les vices du contrat sont connus. 115° Du reste, la recherche et la constatation de la bonne foi ne sont nĂ©cessaires que pour le rĂšglement des fruits antĂ©rieurs Ă  l’action pĂ©titoire, car ceux re^ cueillis depuis doivent ĂȘtre restituĂ©s en vertu du principe qui fait courir les fruits, les intĂ©rĂȘts des immeubles, des choses mobiliĂšres, des capitaux, du jour mĂȘme de la demande faite en justice, de ces diverses choses. 116° La demande pĂ©titoire ne comprend pas de plein droit celle en restitution des fruits Ă©chus antĂ©rieurement. Une demande expresse est Ăč cet Ă©gard nĂ©cessaire ; si elle n’a pas Ă©tĂ© comprise dans l’action pĂ©titoire, elle peut ĂȘtre ajoutĂ©e par des conclusions incidentes; mais il serait plus rĂ©gulier d’en faire l’objet d’une demande nouvelle et principale. Nous pensons que cette demande des fruits peut avoir lieu, mĂȘme aprĂšs jugement dĂ©finitif sur le fonds ; et quoiqu’il n’v ait eu aucune rĂ©serve sur ce point, ni dans les conclusions, ni dans le jugement, aucune fin de non recevoir ne pourrait rĂ©sulter de ce silence. La renonciation Ă  un droit ne se prĂ©sume pas et doit ĂȘtre exprimĂ©e en termes formels. ArrĂȘt de la Cour de Cassation, du 13 dĂ©cembre 1830. Dalloz, 1831. Mais la demande en dĂ©livrance de l’immeuble entraĂźne et comprend, par voie de consĂ©quence, celle en restitution des jouissances postĂ©rieures. 117° Nous pensons qu’une demande, dans laquelle le demandeur aurait omis de copier ses litres ne donnerait pas moins droit, en sa faveur, Ă  la restitution des fruits Ă©chus depuis. Vainement dirait-on que faute de connaĂźtre les titres — 704 — du demandeur, le possesseur continue d’ĂȘtre de bonne foi ; nous ne pouvons admettre cette consĂ©quence, avec laquelle on irait jusqu’à prĂ©tendre que le dĂ©fendeur ne doit les fruits que du jour oĂč il est certain des droits de son adversaire, et que cela rĂ©sulte seulement de la dĂ©cision dĂ©finitive des tribunaux sur le fond du litige. D’ailleurs, nous l’avons dĂ©jĂ  dit, l’assignation a un effet particulier, un effet de mise en demeure et d’avertissement indĂ©pendant de son influence sur la bonne ou la mauvaise foi, et les art. 61, 64, 65 du Code de procĂ©dure n’exigent pas, Ă  peine de nullitĂ© de l’action, la signification des titres. Sans doute il est plus rĂ©gulier d’en donner copie dans l’ajournement mĂȘme, et nous conseillons de ne pas omettre cette formalitĂ© ; mais la seule peine attachĂ©e par la loi Ă  son inobservation , Ă©tant le refus d’allouer en taxe les frais des copies de titres signifiĂ©s dans le cours du procĂšs, il en rĂ©sulte que l’action donnĂ©e sans ces copies, saisit valablement le Tribunal, interrompt la prescription, et l’on ne verrait pas pourquoi l’acte par lequel le Tribunal est lĂ©gitimement mis Ă  mĂȘme de juger le principal n’aurait pas la mĂȘme vertu pour les consĂ©quences, pour les accessoires. TrĂšs-souvent le demandeur invoquera la prescription, des faits de construction, de plantation, prĂ©tendra que la rĂ©serve hĂ©rĂ©ditaire a Ă©tĂ© entamĂ©e, mĂ©connaĂźtra, ou dira qu’il ne connaĂźt pas la signature apposĂ©e par son auteur ou par l’auteur de son adversaire, Ă  un acte sous seing- privĂ©, s’inscrira en faux contre un acte authentique supposĂ© passĂ© au nom des auteurs respectifs des parties, ce qu’il offrira de prouver, par expertises, par enquĂȘtes. PrĂ©tendra-t-on que les fruits ne devront ĂȘtre restituĂ©s que du jour oĂč les tribunaux auront dĂ©clarĂ© qu’il rĂ©- - 703 — suite des expertises, des enquĂȘtes, que les actes sont faux, que le demandeur est propriĂ©taire, parce que c’est seulement de ce jour que le dĂ©fendeur a Ă©tĂ© certain qu’il n’avait pas de droit sur l'immeuble, et qu’il a commencĂ© Ă  ĂȘtre de mauvaise foi ? cela ne nous paraĂźtrait pas soutenable. Voyez d’ailleurs arrĂȘt de la Cour de cassation, du 8 mars 1852. 118° Mais si le demandeur laissait pĂ©rimer l’instance, l’action devrait ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme nulle et sans effet. Cependant, si avec son assignation, il avait signifiĂ© copie de ses titres, elle vaudrait comme sommation, comme constituant le possesseur en mauvaise foi. Une simple signification de titres, mĂȘme sans sommation de dĂ©guerpir, doit avoir cet effet, et, Ă  plus forte raison, lorsqu’il y a une semblable sommation. 119“ La citation en conciliation qui, en gĂ©nĂ©ral, doit prĂ©cĂ©der l’action pĂ©titoire, donne, comme l’action elle- mĂȘme, droit aux fruits, pourvu qu’elle soit suivie de cette action dans le dĂ©lai d’un mois de la non-conciliation ou de la non-comparution, car aux termes des articles 2245 du Code civil et 57 du Code de procĂ©dure, la citation, dans ce cas, interrompt la prescription et fait courir les intĂ©rĂȘts. Or, les fruits sont pour les immeubles ce que sont les intĂ©rĂȘts pour les capitaux pĂ©cuniaires. Si un particulier Ă©tait dĂ©positaire ou se croyait propriĂ©taire d’une somme d’argent, la citation ferait courir les intĂ©rĂȘts de cette somme. Pourquoi n’en serait-il pas de mĂȘme relativement aux fruits des immeubles? 120° Du reste, nous pensons et la Cour de cassation a dĂ©cidĂ©, par arrĂȘt du 23 dĂ©cembre 1840, que le mĂ©moire prĂ©sentĂ© au prĂ©fet en matiĂšre domaniale, aux termes de la loi du 5 novembre 1790, ne peut ĂȘtre assimilĂ© Ă  une 43 — 706 — demande; que s’il a pour effet d’interrompre la prescription il ne peut, comme la demande, faire courir le droit Ă  la restitution des fruits. Il faudrait en dire autant dans les affaires de communes et de dĂ©partements. 121“ Le dĂ©fendeur serait tenu de restituer les sommes qu’il aurait reçues pour service ou rachat de rentes, remboursement de capitaux, libĂ©ration de servitudes Ă©tablies en faveur de l’immeuble, et le demandeur aurait droit de critiquer ces opĂ©rations, d’en faire, en certains cas, prononcer la nullitĂ©, mĂȘme contre les tiers, si la prescription n’était pas acquise, ou de rĂ©clamer toutes indemnitĂ©s et tous intĂ©rĂȘts convenables du dĂ©fendeur, si les traitĂ©s Ă©taient onĂ©reux ou prĂ©judiciables surtout dans le cas oĂč celui-ci serait possesseur de mauvaise foi. Les baux que le possesseur de bonne ou de mauvaise foi aurait fait de l’immeuble revendiquĂ© Ă  un locataire ou fermier de bonne foi, devraient ĂȘtre maintenus et s’exĂ©cuter, soit pour neuf annĂ©es Ă  partir de l’action, s’ils avaient Ă©tĂ© faits pour un plus long temps, soit pour la pĂ©riode de neuf ans qui resterait encore Ă  courir Ă  partir de cette action. Le vĂ©ritable propriĂ©taire aurait seulement droit aux loyers et fermages; mais si le locataire ou fermier Ă©tait de mauvaise foi, si le prix et les conditions Ă©taient Ă©videmment dĂ©savantageux, le vrai propriĂ©taire pourrait faire annuler des actes qui auraient la fraude pour base. 122° Les principes ci-dessus dĂ©veloppĂ©s s’appliquent au possesseur de bonne foi ou de mauvaise foi, Ă  titre hĂ©rĂ©ditaire, comme Ă  celui qui possĂšde Ă  tout autre titre. Le droit romain L. 40, § 1, ff. de Hered petit., par application de la rĂšgle fruclus augent hereditatem , voulait que le possesseur de bonne foi d’une hĂ©rĂ©ditĂ© fĂ»t tenu — 707 — de compter Ă  celui qui la revendiquait et qui triomphait dans son action, des fruits perçus avant la litiscontesta- tion, mais seulement jusqu’à concurrence de ce qu’il s’était trouvĂ© en profiter et en ĂȘtre plus riche au moment de l’action. Pothier avait Ă©mis, non sans hĂ©sitation, et comme tempĂ©rament d’équitĂ©, l’opinion qu’on devait le dispenser de la restitution ; mais il ajoutait que dans notre pratique française, on exigeait de celui qui s’était mis en possession d’une succession, qu’il comptĂąt des fruits Ă  l’hĂ©ritier qui l’avait Ă©vincĂ©, ce que confirmaient Bourjon, t. II, p. 518, 519 et son annotateur, et Domat, p. 233, n° 9. Mais aujourd’hui aucune distinction n’est plus possible entre le possesseur de bonne foi d’un immeuble Ă  titre d'hĂ©ritier et le possesseur Ă  tout autre titre. Notre lĂ©gislation actuelle les assimile complĂštement. Les art. 549 et 550 sont conçus dans une gĂ©nĂ©ralitĂ© d’expressions qui exclut toute diffĂ©rence. Les motifs sont les mĂȘmes dans les deux cas. L’art. 138 nous en fournit un exemple ; il porte que tant que celui qui n’était pas prĂ©sent Ă  l’ouverture d’une succession ne se reprĂ©sente pas ou que l’action en pĂ©tition d’hĂ©rĂ©ditĂ© ou en revendication n’est pas exercĂ©e de son chef, ceux qui auront recueilli la succession gagneront les fruits par eux perçus de bonne foi. C’est aussi l’opinion de M. le professeur Bugnet dans ses notes sur le passage prĂ©citĂ© de Pothier et la dĂ©cision d’un arrĂȘt de la Cour de Cassation, du 21 janvier 1852. 123“ La restitution comprend tous les fruits, les fruits civils, comme ceux qui sont naturels ; et si le possesseur a joui par lui- mĂȘme au lieu d’affermer, de louer, s’il s’agit d’un immeuble de simple agrĂ©ment, d’une chose qui — 708 — n’est pas susceptible de produire des fruits, les juges apprĂ©cieront la valeur de ces avantages et condamneront le possesseur Ă  payer une indemnitĂ© ; car tout fait qui cause un dommage oblige son auteur Ă  une rĂ©paration. L. 64, ff. de Rei vind. et art. 1382 du Code civil. Les bois de haute futaie ne sont considĂ©rĂ©s comme fruits qu’autant qu’ils sont mis en coupes rĂ©glĂ©es, autrement les arbres sont un accessoire, une partie du fonds lui-mĂȘme. L. 7, § 12, ff. de Soluto matrim. Domat, Proudhon de 1,'Usufruit, art. 591, 592, du Code civil, et arrĂȘt, de la Cour de cassation, du 8 dĂ©cembre 1836. Si c’était la nue propriĂ©tĂ© qui fit l’objet de l’action pĂ©- titoire, le dĂ©fendeur ne pourrait ĂȘtre condamnĂ© Ă  la restitution des fruits que du jour oĂč l’usufruit aurait cessĂ© ; mais il pourrait ĂȘtre condamnĂ© Ă  des dommages-intĂ©rĂȘts pour le prĂ©judice qu’il aurait pu causer en empĂȘchant le demandeur de vendre cette nue propriĂ©tĂ©, par la contestation qu’il aurait Ă©levĂ©e sur les droits de ce dernier. Le possesseur de mauvaise foi, celui qui est traduit en justice sont tenus de restituer, non-seulement les fruits perçus, mais mĂȘme ceux qu’ils n’ont pas perçus par leur faute, leur nĂ©gligence ou en laissant pĂ©rir la chose, et que le demandeur administrant en bon pĂšre de famille eĂ»t perçus. L. 33, 62, § 1, ff. de Rei vind. L. 50, g 1, ff. /7ered-peh' serait de mĂȘme des fermages et loyers qu’ils auraient laissĂ© prescrire, ils ne devraient pas moins en tenir compte au propriĂ©taire. 124° Il est Ă©vident que le possesseur de mauvaise foi ne pourrait opposer au demandeur la prescription de cinq ans, rĂ©glĂ©e par l’art. 2277 du Code civil, car cet article suppose l’existence d’une convention, d’un bail ; il parle d’une dette payable par annĂ©e ou Ă  des termes — 709 — pĂ©riodiques plus courts. Sa disposition ne peut donc s’appliquer Ă  une restitution de fruits qui demeure sous l’empire des principes gĂ©nĂ©raux et se prescrit seulement par trente ans, ou dix ou vingt ans avec la chose principale, aux termes des art. 2262,2265 et 2266 du Code civ. Cour de cass. 13 dĂ©cembre 1830, Dalloz, 1831-1-8. 125° Il arrive quelquefois que le vĂ©ritable propriĂ©taire n’a pas d’action contre le possesseur actuel de son immeuble, et qu’il lui en reste une contre celui qui l’a aliĂ©nĂ©. Supposons en effet qu’un particulier ait vendu, donnĂ©, Ă©changĂ© une maison et que l’acquĂ©reur l’ait possĂ©dĂ©e pendant dix ans entre prĂ©sents, vingt ans entre absents, avec bonne foi, son acquisition sera devenue irrĂ©vocable ; mais le vendeur de la chose d’autrui, fĂ»t-il de bonne foi, mais sans titre ou avec un titre putatif, ce qui dans notre opinion revient au mĂȘme, sera au moins tenu, pendant trente ans, de la restitution du prix qu’il a tirĂ© de l’aliĂ©nation et des fruits ou de la valeur et des produits de l’immeuble, si la disposition a eu lieu Ă  titre gratuit. C’est aussi le sentiment de Bourjon qui s’exprime ainsi, t. II, p. 517 N° 10. Approfondissons l’effet de la prescription. L’effet de la possession relativement au dĂ©fendeur au pĂ©- titoire va encore plus loin ; s’il a pour lui la bonne foi, et qu’il ait acquis, par un titre de celui qu’il croyait propriĂ©taire de l’hĂ©ritage, et qu’il ait avec ce titre et la bonne foi, possĂ©dĂ© pendant dix ans entre prĂ©sents et vingt ans entre absents, les uns et les autres ĂągĂ©s et non privilĂ©giĂ©s, telle possession le met Ă  couvert de l’effet de l’action pĂ©titoire, parce qu’il a acquis prescription contre tout propriĂ©taire par ce seul intervalle de temps, lorsqu’il y a titre appa- — 710 — rent et bonne foi, rĂ©unis Ă  une telle possession; il faut tout ce concours; sans lui, il n’y aurait pas de prescription acquise par ce laps de temps, il en faudrait trente. N° 11. Mais en ce cas d’une prescription de dix ou vingt ans, le vrai propriĂ©taire a action pour rĂ©pĂ©ter le prix de son hĂ©ritage contre celui qui l’a indĂ»ment vendu, et qui n’a pu, par son fait, s’approprier le prix d’un bien qui ne lui appartenait pas; c’est la seule action qui lui reste, et il n’en a pas contre l’acquĂ©reur qui a joui dans les circonstances et pendant le temps marquĂ© ci-dessus ; du moins, elle est. rejetĂ©e. C’est salutaire disposition qui mĂ©nage tout juste intĂ©rĂȘt. » L’annotateur de Bourjon ajoute Ă  ce texte les observations suivantes On le juge ainsi au ChĂątelet, par rapport Ă  un tel vendeur, sur le fondement que la durĂ©e d’une telle action est de trente ans, et que la rĂ©duction de dix et de vingt ans n’est qu’en faveur de celui qui a titre et bonne foi; ce qu’on ne peut appliquer Ă  celui qui vend frauduleusement le bien d’autrui et qui par lĂ  fait naĂźtre une action directe et personnelle contre lui ; action qui a cette durĂ©e. » Cette doctrine a Ă©tĂ© consacrĂ©e par un arrĂȘt de la Cour de cassation, du 2 h mai 1848. Ajoutons que si le vendeur Ă©tait de mauvaise foi, il serait obligĂ© de tenir compte au vrai propriĂ©taire, non- seulement de la valeur de l'immeuble au moment de la vente, mais encore de la diffĂ©rence avec celle au moment de l’action si elle Ă©tait supĂ©rieure Ă  la premiĂšre, plus des fruits sur cette double base. ArrĂȘt de la Cour de cassation, du 20 juillet 1852. Un acquĂ©reur de mauvaise foi d’un bien dotal, con- — 711 damnĂ© Ă  rendre l’immeuble et les fruits, adroit aux intĂ©rĂȘts du prix que cet immeuble lui a coĂ»tĂ©. ArrĂȘt de la Gourde cassation, du 10 juillet 1849. 126° Il est Ă©vident que le lĂ©gataire d’un usufruit qui, aprĂšs avoir recueilli ce legs, en est dĂ©clarĂ© dĂ©chu, par application d’une clause ou condition du testament mĂȘme et est dĂšs lors tenu de restituer la chose lĂ©guĂ©e, doit ĂȘtre condamnĂ© Ă  restituer les fruits par lui perçus, mĂȘme quand il a possĂ©dĂ© de bonnefoi, puisque ces fruits constituent prĂ©cisĂ©ment la chose lĂ©guĂ©e; mais qu’il ne peut ĂȘtre tenu des intĂ©rĂȘts de ces fruits qu’à partir de la demande en justice et non Ă  compter de chaque perception. ArrĂȘt de la Cour de cassation, du 10 juillet 1849. 127° Un acquĂ©reur Ă  trop bas prix et attaquĂ© en rescision, pour cause de lĂ©sion, peut cependant ĂȘtre considĂ©rĂ© comme possesseur de bonne foi, et n’ĂȘtre tenu au payement de la valeur des fruits ou des intĂ©rĂȘts qu’à compter de la demande. Cour de cassation, du 15 dĂ©cembre 1830 ; Dalloz, 31-1-24. Dans les demandes en rescision, pour cause de lĂ©sion, l’acheteur a le choix, ou d’abandonner l’immeuble, ou de le retenir en complĂ©tant le juste prix. S’il prĂ©fĂšre le garder, il doit l’intĂ©rĂȘt du supplĂ©ment, du jour de la demande en rescision. S’il prĂ©fĂšre le rendre et recevoir le remboursement de son prix, il rend les fruits, du jour de la demande ; l’intĂ©rĂȘt du prix qu’il a payĂ© lui est aussi comptĂ© du jour de la mĂȘme demande ou du jour du payement, s’il n’a touchĂ© aucuns fruits. Art. 1081 et 1682 du Code civil. En cas de vente Ă  rĂ©mĂ©rĂ©, l’acquĂ©reur sur qui le rachat est exercĂ©, n’est tenu de restituer les fruits de l’immeuble qu’à compter du jour oĂč le rachat est consommĂ© — 712 — par le remboursement ou la consignation du prix de la vente. Les fruits se compensent avec les intĂ©rĂȘts du prix dont le vendeur a eu la jouissance. Merlin , Favard , V° FacultĂ© de rachat ; Duvergier, de la Vente, t. II, n°’ 29 et 59. Cour de cassation, 14 mai 1807. 128° Le possesseur de bonne foi ne doit jamais d’intĂ©rĂȘts pour les fruits antĂ©rieurs Ă  la demande, puisqu’il ne doit pas les fruits eux-mĂȘmes; il n’en doit que pour les fruits Ă©chus depuis l’action. MalgrĂ© la mauvaise foi du possesseur, celui-ci ne doit les intĂ©rĂȘts des fruits que du jour de la demande judiciaire Ă  fin de restitution de ces fruits, soit que le demandeur ait conclu Ă  ces intĂ©rĂȘts, soit qu’il ait seulement demandĂ© la restitution des fruits. Cependant, la mauvaise foi peut ĂȘtre accompagnĂ©e de circonstances tellement graves, que nous n’hĂ©siterions pas alors Ă  dĂ©cider que le possesseur doit un dĂ©dommagement si ce n’est sous le nom d’intĂ©rĂȘts, au moins comme partie intĂ©grante de la restitution des fruits. Les fruits peuvent ĂȘtre d’une telle importance que le possesseur aura non-seulement reçu, mais fait des Ă©conomies sur leur produit. Aux termesdes art. 1154,1155 du Code civil NapolĂ©on, les revenus, les fruits Ă©chus peuvent produire des intĂ©rĂȘts, soit par une convention, soit par une demande en justice. Lorsque le possesseur de mauvaise foi aura obtenu des intĂ©rĂȘts par convention ou par jugement, pourra-t-il les garder? nous ne le croyons pas, et nous pensons qu’il doit ĂȘtre condamnĂ© Ă  les restituer. Vainement objecterait-on qu’il aurait pu les consommer en vivant trĂšs-largement, nous rĂ©pondrions d’abord qu’alors il n’aurait pas touchĂ© d’intĂ©rĂȘts, et ensuite que, mĂȘme en ce cas, la justice pourrait, dans des fruits, prendre cette circonstance en con- — 713 — sidĂ©ration, pour en fixer la valeur Ă  un chiffre plus Ă©levĂ©. Faisons observer qu’aux termes de l’art. 856 du Code civil, les fruits et les intĂ©rĂȘts des choses sujettes Ă  rapport sont dus Ă  compter du jour de l’ouverture de la succession, qu’au cas de rĂ©duction de donation comme excĂ©dant la portion disponible, le donataire successible ou Ă©tranger doit la restitution des fruits de ce qui excĂšde cette portion, du jour du dĂ©cĂšs du donateur, si la demande en rĂ©duction a Ă©tĂ© faite dans l’annĂ©e, lors mĂȘme qu’il serait de bonne foi, sinon du jour de la demande art. 928 ; que le lĂ©gataire d’un immeuble n’a droit aux fruits que du jour de la demande en dĂ©livrance ou du jour oĂč elle a Ă©tĂ© volontairement consentie, sauf les cas prĂ©vus par l’art. 1015. Bourjon, t. II, p. 514 et 520, paraĂźt penser, quoiqu’il ne le dise que par forme de simple Ă©nonciation, que les intĂ©rĂȘts des fruits ne sont dĂ»s qu’à partir de leur apprĂ©ciation et liquidation, et seulement du jour de la demande en payement du montant de cette liquidation. Nous croyons que Bourjon est ici dans l’erreur; que la demande originaire en revendication de l’immeuble, en restitution et payement des fruits Ă  liquider, Ă  donner par Ă©tat, fait courir sur-le-champ les intĂ©rĂȘts de la somme qui sera ultĂ©rieurement fixĂ©e. Autrement le dĂ©fendeur profiterait d’une rĂ©sistance injuste, multiplierait les incidents pour retarder la liquidation, qui arrive toujours Ă  la fin et comme le dernier acte du procĂšs. Nos lois actuelles art. 1154,1155 du Code civil et le Code de procĂ©dure, font courir les intĂ©rĂȘts des fruits du jour oĂč ils sont demandĂ©s, sans distinction du cas oĂč ils sont liquidĂ©s et de celui oĂč ils ne le sont pas ubi lex non distinguit, nec nos distinguere debemus. — 714 — Le Camus d’Houlouve, dans son TraitĂ© des intĂ©rĂȘts, page 196, dit, Ă  la vĂ©ritĂ©, que le ChĂątelet de Paris avait pour jurisprudence, toutes les fois qu’il s’agissait de choses apprĂ©ciables restitution de fruits par un possesseur Ă©vincĂ©, dommages-intĂ©rĂȘts pour prĂ©judice causĂ©, fournitures de denrĂ©es et marchandises, travaux d'entrepreneurs, de n’en adjuger les intĂ©rĂȘts demandĂ©s qu’à compter du jour de la rĂ©itĂ©ration de cette demande par la requĂȘte en entĂ©rinement du procĂšs-verbal d’estimation et liquidation dressĂ© par les experts. Mais, ajoute notre auteur, la jurisprudence du Parlement de Paris est diffĂ©rente de celle du ChĂątelet. Cette Cour juge que, quoique des fruits, dont la restitution est ordonnĂ©e, ne soient pas liquidĂ©s, celui contre lequel cette restitution a Ă©tĂ© demandĂ©e avec intĂ©rĂȘts avant leur liquidation, ayant Ă©tĂ© mis en retard de les restituer au jour de cette demande, il en doit les intĂ©rĂȘts Ă  compter du mĂȘme jour, parce que ces intĂ©rĂȘts sont la juste indemnitĂ© du retard qu’il a fait Ă©prouver Ă  son crĂ©ancier. On suppose qu’à ce mĂȘme jour il ne lui a pas Ă©tĂ© impossible de se libĂ©rer envers son crĂ©ancier, puisqu’il pouvait lui faire des offres rĂ©elles Ă©quipollentes Ă  la valeur des fruits qu’il devait connaĂźtre pour les avoir perçus *, et sauf Ă  ajouter en cas d’insuffisance, ou Ă  diminuer en cas d’excĂ©dant, et sur le refus de son crĂ©ancier, consigner. C’est ce qui a Ă©tĂ© jugĂ© par un arrĂȘt rendu en la grand’chambre sur les conclusions de M. Seguier, avocat gĂ©nĂ©ral, le 28 juin 1760. Cette Cour, en confirmant une sentence du ChĂątelet de Paris, qui n’avait condamnĂ© la fabrique de la ' Ces raisons s’appliquent Ă©videmment Ă  toutes les demandes en payement pour objets ou causes dont le chiffre n’est pas fixĂ©. — 713 — Madeleine en la CitĂ©, aux intĂ©rĂȘts de choses sujettes Ă  apprĂ©ciation que du jour de la demande en entĂ©rinement du procĂšs-verbal d’estimation, a adjugĂ© ces intĂ©rĂȘts Ă  compter du jour de la demande originaire. Denizart, RĂ©pertoire , au mot IntĂ©rĂȘts, et dans son livre des Actes de notoriĂ©tĂ© du ChĂątelet, sur l’acte du 28 avril 1677, rappelle aussi la jurisprudence et l’arrĂȘt du Parlement de Paris, prĂ©citĂ©. Il cite en outre un arrĂȘt du grand Conseil, du 23 septembre 1758, qui avait dĂ©jĂ  jugĂ© en matiĂšre d’estimation de travaux faits par un entrepreneur de maçonnerie pour une communautĂ© religieuse , que les intĂ©rĂȘts du montant de son mĂ©moire couraient non pas seulement du jour de la demande en homologation du procĂšs-verbal d’estimation , mais bien du jour de la demande primitive ou originaire en payement de ces mĂȘmes travaux. Vainement opposerait-on que la compensation ne doit s’opĂ©rer qu’entre deux dettes Ă©galement liquides et exigibles, et qu’au moment oĂč les fruits et les impenses ou amĂ©liorations ont existĂ© simultanĂ©ment et constituĂ© des dettes et des crĂ©ances respectives, elles n’étaient liquides ni l’une ni l’autre; car, d’une part, lĂ  oĂč les positions sont Ă©gales, les exceptions Ă©tablies en faveur des parties se neutralisent ; d'un autre cĂŽtĂ©, en matiĂšre de fruits surtout, il y a souvent une base assurĂ©e de liquidation dans le cours des denrĂ©es, dans les mercuriales des marchĂ©s; la liquidation est mĂȘme facile Ă  dĂ©faut de mercuriales; et suivant le PrĂ©sident Favre, dans son Code, titre de CompensĂątionibus def. 7 et 26, ce qui est facile Ă  liquider doit ĂȘtre considĂ©rĂ© comme l’étant dĂ©jĂ . Ce magistrat met sur la mĂȘme ligne fructus liquidi vel brevi liqui- dandi; au titre de Actionibus empti et vendili, def. 6, n° 7, — 716 — in allegat, il assure que les fruits quoique non liquidĂ©s s’imputent sur le principal, fructus enim pignoris, cer- tum est impulari in sortem ; or, puisque cette imputation se fait de plein droit et par le ministĂšre de la loi, il faut que les fruits qui sont dus Ă©teignent la dette active de celui qui les doit ; cette extinction se fait par un payement rĂ©el, puisque le crĂ©ancier a reçu ce qui lui Ă©tait dĂ» en tout ou en partie par la perception des fruits qu’il n’avait pas le droit de s’approprier; enfin, nous en avons un exemple dans la loi 5, § 21, ff. Ut in pos- sessionetn legatorum vel ideicommissorum servandorum causa esse liceat. 129° Iu reste, il importe de remarquer que le propriĂ©taire qui obtient une restitution de fruits et qui a droit d’obtenir aussi les intĂ©rĂȘts du montant de ces fruits Ă  liquider ultĂ©rieurement, Ă  partir de la demande en restitution, ne peut valablement prĂ©tendre aux intĂ©rĂȘts des intĂ©rĂȘts de ces fruits. Une telle prĂ©tention pourrait avoir les consĂ©quences les plus graves, les plus onĂ©reuses pour le dĂ©fendeur, surtout dans une affaire de cette nature, dont la dĂ©cision peut n’intervenir qu’aprĂšs de longs dĂ©lais, Ă  raison des discussions difficiles et compliquĂ©es qu’elle entraĂźne, des enquĂȘtes et des expertises auxquelles elle peut donner lieu. Les fruits sont eux-mĂȘmes des intĂ©rĂȘts. Souvent ils consistent en loyers ou fermages pĂ©cuniaires. Presque toujours, d’ailleurs la restitution se fait en argent; avec le systĂšme que nous combattons, le demandeur au pĂ©titoire percevrait donc dans des proportions diffĂ©rentes, il est vrai, de triples intĂ©rĂȘts produits par le mĂȘme capital. La cour de Cassation a eu Ă  s’expliquer sur ce point dans une affaire oĂč le demandeur au pĂ©titoire avait conclu Ă  la remise d’un immeuble, Ă  la resti- — 717 tution des fruits, aux intĂ©rĂȘts de leur valeur et aux intĂ©rĂȘts de ces intĂ©rĂȘts. La Cour de Riom avait repoussĂ© cette derniĂšre prĂ©tention, et la Cour rĂ©gulatrice a, par arrĂȘt du 15 janvier 1839, rejetĂ© le pourvoi dont il a Ă©tĂ© l’objet par le motif que l’art 1154 du Code civil, relatif aux intĂ©rĂȘts susceptibles de produire des intĂ©rĂȘts dans le cas qu’il dĂ©termine, ne s’applique qu’aux intĂ©rĂȘts des intĂ©rĂȘts Ă©chus des capitaux; que l’art. 1155 relatif, entre autres choses, aux restitutions de fruits ne dit pas que les intĂ©rĂȘts Ă©chus de ces restitutions de fruits puissent eux-mĂȘmes produire des intĂ©rĂȘts; qu’ainsi en refusant de condamner les hĂ©ritiers du possesseur aux intĂ©rĂȘts des intĂ©rĂȘts des jouissances, l’arrĂȘt attaquĂ© n’avait violĂ© ni l’art. 1154, ni aucune autre loi. Journal du palais, 1839-1-169. Cette dĂ©cision est conforme h l’opinion de Le Camus d’Houlouve, TraitĂ© des intĂ©rĂȘts; aux pages 185 et 186, il dit qu’on peut demander des intĂ©rĂȘts, des dommages- intĂ©rĂȘts adjugĂ©s par la justice ou convenus par une transaction ; que ce n’est pas exiger des intĂ©rĂȘts d’intĂ©rĂȘts, mais de simples intĂ©rĂȘts du dĂ©dommagement adjugĂ© ou convenu ; que des dommages et intĂ©rĂȘts, quand ils sont liquidĂ©s, forment un capital qui tient lieu d’un bien rĂ©el Ă  celui Ă  qui ils sont dus ; que les fruits, dont la restitution est due ou a Ă©tĂ© ordonnĂ©e, doivent ĂȘtre rangĂ©s dans la classe des intĂ©rĂȘts lĂ©gaux; et l’auteur, aux pages204 et 205, section intitulĂ©e Des intĂ©rĂȘts d’intĂ©rĂȘts qui ne peuvent ĂȘtre adjugĂ©s, s’exprime dans les termes suivants On a vu, dans la prĂ©cĂ©dente section, qu’ il est de principe que des intĂ©rĂȘts lĂ©gaux ou de droit peuvent produire d’autres intĂ©rĂȘts sur une demande judiciaire suivie de — 718 — 'm condamnation, ou peuvent ĂȘtre convertis en principal, et devenir le prix d’une constitution de rente produisant des arrĂ©rages qui Ă©quipollent Ă  des intĂ©rĂȘts d’intĂ©rĂȘts. Un principe contraire, aussi constant, c’est que des intĂ©rĂȘts judiciaires ne peuvent jamais produire d’autres intĂ©rĂȘts, quand mĂȘme on en aurait formĂ© la demande en justice sur une mise en retard du dĂ©biteur de les payer. Nullo modo, usurƓ usurarum a debitore exiganhir. L. 18. Cod. de usur, et par la mĂȘme raison pareils intĂ©rĂȘts ne peuvent ĂȘtre convertis en principal et devenir le prix d’une constitution de rente. Cette diffĂ©rence entre des intĂ©rĂȘts lĂ©gaux et des intĂ©rĂȘts judiciaires, provient de ce que les premiers forment toujours un principal pour le crĂ©ancier auquel ils sont dus, et un principal indĂ©pendant de celui qui les a produits, au lieu que les derniers ne sont jamais qu’un accessoire du principal dont ils sont provenus; et qu’en pareil cas, des intĂ©rĂȘts des intĂ©rĂȘts seraient ce qu’on appelle en droit accessio accessionis, additamentum addi- tamenli, seu usitra usurƓ ; ce qui est expressĂ©ment prohibĂ© par les lois canoniques et civiles. » 130 3 D’aprĂšs l’art. 129 du Code de procĂ©dure civile, les jugements qui condamnent Ă  une restitution de fruits doivent ordonner qu’elle sera faite en nature pour la derniĂšre annĂ©e, et suivant les mercuriales pour les annĂ©es prĂ©cĂ©dentes ou Ă  dire d’experts Ă  dĂ©faut de mercuriales ; que si la restitution en nature est impossible pour la derniĂšre annĂ©e, elle se fera comme pour les annĂ©es prĂ©cĂ©dentes; l'art. 526 ajoute que celui qui sera condamnĂ© Ă  restituer des fruits en rendra compte dans la forme fixĂ©e par les articles suivants, et qu’il sera procĂ©dĂ© comme sur les autres comptes rendus en justice. Nous n’entre- — 719 — rons pas ici dans les dĂ©tails de ce compte; nous renvoyons, Ă  cet Ă©gard, au Code de procĂ©dure civile. Ainsi les juges ne peuvent fixer arbitrairement le montant des fruits, ni sans qu’il y ait eu prĂ©alablement un compte dans les formes prescrites par le Code ; ils ne peuvent non plu3 renvoyer purement et simplement devant experts. ArrĂȘts de la Cour de cassation, du 25 juin 1832 , 26 fĂ©vrier 1838 ; Dalloz, 32 - 1 - 246 - 38 - 1 - 125 , Journal du palais, 38 - 1 - 272 . Mais les parties ou l’une d’elles peuvent renoncer au mode lĂ©gal qui n’est pas d’ordre public, mais simplement d’intĂ©rĂȘt privĂ©, et si les juges ont fixĂ© eux-mĂȘmes la valeur des fruits, d’aprĂšs une dĂ©claration de la partie contre laquelle la restitution est prononcĂ©e, cette partie n’est pas recevable Ă  se plaindre de ce que l’évaluation n’a pas Ă©tĂ© faite dans la forme lĂ©gale. ArrĂȘt de la Cour de cassation, du 30 mars 1831 ; Dalloz, 1831 - 1 - 112 . Les juges peuvent donc aussi, aprĂšs compte rendu, en fixer la valeur d’aprĂšs les documents respectivement fournis par les parties, s’ils leur paraissent suffisants, sans ĂȘtre obligĂ©s de s’assujettir aux mercuriales des marchĂ©s ni d’ordonner une expertise. Cour de cassation, du 18 avril 1832 ; Dalloz, 1832 - 1 - 245 . Ainsi, encore la partie qui devant la Cour d’appel, au lieu de conclure Ă  l’application des mercuriales, a demandĂ© aux juges une Ă©valuation dont elle a elle-mĂȘme indiquĂ© le chiffre ou dont elle a demandĂ© que la Cour fixĂąt le montant, n'est pas recevable Ă  se faire un moyen de cassation de ce qu’il a Ă©tĂ© procĂ©dĂ© suivant ce mode d’évaluation. Cour de cassation, 15 janvier 1839 ; Journal du palais, 1839 - 1 - 169 . La Cour d’appel qui, en infirmant le jugement, or- — 720 — donne une restitution de fruits, doit renvoyer devant le Tribunal de premiĂšre instance, le compte Ă  faire pour arriver Ă  en fixer le montant. Ce compte constitue une instance nouvelle que la Cour ne peut retenir sans violer les rĂšgles des deux degrĂ©s de juridiction, et les principes particuliers aux redditions de compte. Cour de cassation, 26 fĂ©vrier 1838, Journal du palais , 1838-1-272. Mais les juges d’appel qui, aprĂšs avoir rĂ©tractĂ© sur requĂȘte civile, un prĂ©cĂ©dent arrĂȘt, ordonnent la restitution des fruits perçus en consĂ©quence de cet arrĂȘt, peuvent retenir la connaissance de ce compte. Cour de cassation, 5 juin 1839, Journal du palais, 1839-2-264. 131° Nous passons aux indemnitĂ©s pour impenses, amĂ©liorations, augmentations, et Ă  celles dues pour raison de dĂ©gradations ou destructions. Et d’abord, quoique nous paraissions distinguer, entre les divers travaux, entre les diverses causes de dĂ©penses et d’indemnitĂ©s, nous comprenons, sous le nom gĂ©nĂ©rique d'impenses, toutes les dĂ©penses faites par le possesseur sur ou pour la chose dont il est plus tard Ă©vincĂ© par le lĂ©gitime propriĂ©taire. D’aprĂšs le droit romain, et dans la rigueur des principes, celui qui bĂątissait ou exĂ©cutait des travaux sur le fonds d’autrui Ă©tait censĂ© donner au propriĂ©taire les dĂ©penses qu’il y faisait, et n’avait, par consĂ©quent, ni le droit de rĂ©pĂ©ter ces dĂ©penses ni celui d’enlever les matĂ©riaux. L. 7, § 12, ff. de Acq. rer dom. Cependant, comme personne ne doit s’enrichir aux dĂ©pens d’autrui, on adopta des dĂ©cisions plus conformes Ă  la justice et Ă  l’équitĂ©. On accorda le droit d’opposer l’exception doli, et par suite, celui de rĂ©pĂ©tition jusqu’à concurrence de la plus value apportĂ©e au fonds par les travaux ; celui de rĂ©tention de la chose jusqu’à payement des impenses. Lorsque le propriĂ©taire offrait de payer les matĂ©riaux, le possesseur devait les lui laisser pour le prix de l’estimation ; et lorsque le propriĂ©taire n’avait pas le moyen de payer la plus-value ou le prix des matĂ©riaux, le possesseur pouvait les enlever, Ă  la charge de rĂ©tablir l’immeuble dans son Ă©tat primitif ; que si les matĂ©riaux dĂ©placĂ©s, ou les travaux voluptuaires dĂ©truits comme les peintures, incrustations, sculptures, ne devaient ĂȘtre qu’une cause de dĂ©prĂ©ciation pour l’immeuble, sans aucun avantage pour lui, il lui Ă©tait dĂ©fendu de les enlever ou dĂ©truire, et il devait laisser les choses en l’état oĂč elles se trouvaient lors de la revendication, sans pouvoir rĂ©clamer aucun dĂ©dommagement. Il n’est pas sans intĂ©rĂȘt de reproduire le texte des diverses lois romaines qui consacraient ces principes. L. 13, ff. de Rei vind. Non solum autern rem restitui, verĂčm et si deterior res sit facta, rationem judex habere debebit. Non-seulement le juge doit ordonner la restitution, mais il doit encore, si la chose est dĂ©tĂ©riorĂ©e, en tenir compte. » L. 23, § 7, ff. eod. Titul. u Item, si quis ex alienis cĂŠmentis in solo suo Ɠdificave- rit, domum quidem vindicare poterit; cĂŠmenta autem re- soluta prior dominas vindicabit, eliamsi post tempus usu- capionis dissolutum sit Ɠdificium, postquam a bonĂŠ fidei emptore possessum sit; nec enim singula cĂŠmenta usuca- piuntur, si domus per tempoi’is spatium nostra fiat. De mĂȘme, si quelqu’un bĂątit avec les matĂ©riauxd’au- iO — 722 — trui sur son propre sol, il pourra revendiquer l’édifice; mais quant aux matĂ©riaux dĂ©tachĂ©s, c’est l’ancien maĂźtre qui les revendiquera, quand mĂŽme l’édifice, possĂ©dĂ© par un acheteur de bonne foi, auraitĂ©tĂ© dĂ©truit aprĂšs le temps de l’usucapion ; car chacun des matĂ©riaux en particulier n’est point usucapĂ©, bien que la maison nous soit acquise par un certain laps de temps. » L. 27, § 5, ff. de eod. TU. In rem petitam si possessor antĂš litem contestatam sumptus fecit, per doit mali exceptionem ratio eorum ha- beri debet, si persevcret actorpetere rem suarn, non reddilis sumptibus. Idem est etiam si . in area quĂŠ fuit petiloris, pererrorem insulam Ɠdificavit, nisi tamen para- tus sit petitor pati tollere eum Ɠdificium. Si le possesseur a fait sur la chose revendiquĂ©e des dĂ©penses avant la litiscontestation, il s’en fera tenir compte au moyen de l’exception de dol, si le demandeur persiste Ă  revendiquer sa chose, sans rembourser ces dĂ©penses. Il en est encore de mĂȘme, si le possesseur a bĂąti par erreur une maison sur un terrain qui Ă©tait au demandeur, Ă  moins toutefois que celui-ci ne soit disposĂ© Ă  souffrir que son adversaire enlĂšve l’édifice. » L. S7,ff. eod. TU. Julianus libro octavo Digestorum scribit Si in aliĂ©na area ĂŠdificassem, eu jus bonƓ fidei quidem emptor fui, ve- rum eo tempore ĂŠdificavi, quo jam sciebam alienam, vi- deamus an nihil mihi eaxeptio prosit; nisi forte quis dicat prodesse de damno sollicilo. Puto autem huic exceptionem non prodesse; nec enim debuit jam alienam certus, ĂŠdifi- — 723 — cium ponere. Sed hoc ei concedendum esl, ut sine dispendio domini areĂŠ tollat ĂŠdifcium quod posm l. Julien, livre 8 de son Digeste, Ă©crit Si j’ai bĂąti sur un terrain appartenant Ă  autrui, dont j’étais acheteur de bonne foi, mais que j’aie bĂąti dans un temps oĂč je savais dĂ©jĂ  qu’il Ă©tait Ă  autrui, voyons s’il n’est pas vrai que l’exception ne peut me servir, Ă  moins qu’on ne dise qu’elle doit servir Ă  celui qui cherche Ă  Ă©viter une perte. Pour moi, je pense que l’exception ne profite pas Ă  ce possesseur; car il n’a pas dĂ», sachant dĂ©jĂ  que ce terrain n’était pas Ă  lui, y construire un Ă©difice ; mais il faut lui accorder la facultĂ© d’enlever sans nuire au propriĂ©taire du terrain, le bĂątiment qu’il y a construit. » L. 38, ff. eod. Tit. In fundo alieno, quem imprudens emeras, Ɠdificasti aut conseruisti; deinde evincitur bonus judex varie ex personis causisque constituet. Finge et dominum eadem facturum fuisse reddat impensam, ut fundum recipiat, usque eo duntaxat quo pretiosior fƓtus est, et si plus pre- tio fundi accessit, solum quod impensum est. Finge pau- perem, qui si reddere id cogatur, laribus, sepulcris avitis carendum habeat ; sufficit tibi permitti tollereexhis rebus, quƓ possis, dwn ita ne deterior sit fundus, quam si initio non foret Ɠdificatum. Constituimus veto, ut si paratus est dominus tantum dare, quantum habiturus esl possessor, his rebus ablatis, fiat ei potestas. Neque malitiis indulgendum est, si tectorium, puta, quod induxeris, picturasque cor- radere velis, nihil laturus, nisi ut officias. Finge eam per- sonam esse domini, quƓ receptum fundum mox vinditura sit nisi reddit quantum prima parte reddi opportere dixi- mus, eo deducto, tu condemnandus es. — 724 — Vous avez bĂąti ou plantĂ© sur le fonds d’autrui que vous aviez achetĂ© par erreur; ensuite, vous en ĂȘtes Ă©vincĂ© un bon juge dĂ©cidera diversement suivant les personnes et les circonstances. Supposez que le maĂźtre eĂ»t fait les mĂȘmes constructions ou plantations il doit, pour recouvrer le fonds, rembourser la dĂ©pense jusqu’à concurrence seulement de l’augmentation de valeur qui en est rĂ©sultĂ©e ; et si la plus-value est supĂ©rieure Ă  la somme dĂ©pensĂ©e, il remboursera seulement cette somme. Supposez maintenant que le propriĂ©taire est pauvre et que, s’il Ă©tait forcĂ© de rembourser la dĂ©pense, il faudrait qu’il se privĂąt de ses lares et des sĂ©pulcres de ses ancĂȘtres il suffĂźt qu’on vous permette d’enlever ce que vous pouvez, Ă  la condition de ne pas mettre le fonds dans un Ă©tat pire que celui oĂč il se trouverait, si dans le principe on n’y eĂ»t pas bĂąti. Nous dĂ©cidons, au reste, que si le* propriĂ©taire est prĂȘt Ă  donner autant que le possesseur retirerait des constructions, en les emportant, il aura le pouvoir de le faire. Il ne faut pas se prĂȘter Ă  la mĂ©chancetĂ© ; par exemple, si vous vouliez racler le stuc ou les peintures dont vous avez ornĂ© les murs, n’en devant retirer d’autre avantage que le plaisir de nuire. Supposez, enfin, que le propriĂ©taire est disposĂ© Ă  vendre le fonds dĂšs qu’il l’aura recouvrĂ©; alors, s’il ne rembourse pas ce que nous avons dit ci-dessus qu’il devait rembourser, vous ne serez condamnĂ© que dĂ©duction faite de cette somme. » L. 39, ff. eod. TU. Redemptores qui suis cƓmentis Ɠdificant, statim cƓ- menta faciunt eorum in quorum solo Ɠdificant. Les entrepreneurs qui bĂątissent avec leurs matĂ©- riaux, en transportent aussitĂŽt la propriĂ©tĂ© Ă  ceux sur le sol desquels ils construisent. » L. 48, ff. eod. Tit. Sumptus in prƓdium quod alienum esse apparuit, a bonƓ fidei possessore facti neque ab eo qui prƓdium dona- vit, neque a domino peti possunt; verum exceptione doli posita, per ofjicium judicis Ɠquitatis ratione servantur, scilicet si fructuum ante litem conteslatam perceptorum summam excedant; etenim, admissa compensatione, super- fhium sumpium, meliore prƓdio facto, dominas restitucrc cogitur. » Les dĂ©penses faites par un possesseur de bonne foi sur un fonds qui a Ă©tĂ© reconnu appartenir Ă  autrui, ne peuvent ĂȘtre demandĂ©es ni Ă  celui qui a donnĂ© le fonds ni au propriĂ©taire; mais en opposant l’exception de dol, on les conserve, en vertu de l’office du juge, par une raison d’équitĂ©, en supposant que ces dĂ©penses excĂšdent la somme des fruits perçus avant la litiscontestation ; car, compensation faite, le maĂźtre est forcĂ© de restituer le surplus des dĂ©penses qui ont amĂ©liorĂ© le fonds. » L. 53, ff. eod. Tit. Si fundi possessor eum excoluisset sevisset ve, et pos- tea fundus evincatur, consita lollere nonpotest. Si le possesseur d’un fonds l’a cultivĂ© et plantĂ©, et qu’ensuite il en soit Ă©vincĂ©, il ne peut pas enlever ses plantations. » L. 65, ff. eod. Tit. u Emptor prƓdium quod a non domino Ă©mit, exceptione doli posita, non aliter restitucrc domino cogetur, quam si — 726 — pecuniam creditori ejus solutam, qui pignon datum prƓ- dium habuit, usurarumque medii temporis superfluum recuperaverit, scilicet si minus in fructibus ante litem per- ceptis fuit. Nam eos usuris novis duntaxat compensari, iumptuum in prƓdium factorum exemplo, Ɠquum est. Celui qui a achetĂ© un fonds de quelqu’un qui n’en est pas propriĂ©taire, devra, en opposant l’exception dĂ© dol, n’ĂȘtre forcĂ© de le restituer au propriĂ©taire, qu’aprĂšs avoir Ă©tĂ© remboursĂ© de la somme payĂ©e par lui au crĂ©ancier Ă  qui cĂšlui-ci avait hypothĂ©quĂ© le fonds, avec le surplus des intĂ©rĂȘts du temps intermĂ©diaire, en supposant que le montant des fruits perçus avant le procĂšs soit moindre ; car il est Ă©quitable que ces fruits soient compensĂ©s avec les intĂ©rĂȘts nouveaux seulement, Ă  l’exemple des dĂ©penses faites sur le fonds. » L. 38, ff. de Hered. petit. Plane in cĂŠteris necessariis et utilibus impensis passe skparari, ut bonĂŠ fidei quidem possessores has quoque imputent prƓdo autem de se queri debeat, qui sciens in rem alienam impendit. Sed benignius est in hujus quoque per- sona haberi rationem impensarum ‱ non enim dĂ©bet petitor ex aliĂ©na factura lucrum facere et idipsum officio judicis cĂ»ntinebitur nam nec exceptio doli mali desideratur. PlanĂ©, potest in eo diffrrentia esse, ut bonĂŠ fidei quidem possessor omni modo impensas dedmat, licet res non exstet in quam fecit; sicut tutor, vel curator consequunhir prƓdo autem non aliter, quam si res melior sit. A l’égard des autres dĂ©penses nĂ©cessaires et utiles, on peut faire une distinction, en sorte que le possesseur de bonne foi peut les porter en compte ; mais le possesseur de mauvaise foi doit s’imputer d’avoir fait de la — 727 — dĂ©pense pour une chose qu’il savait ĂȘtre Ă  un autre. Cependant, en s’attachant moins scrupuleusement Ă  la rigueur du droit, on pourra dire qu’on doit tenir compte mĂȘme au possesseur de mauvaise foi des dĂ©penses qu’il aura faites; puisque enfin le demandeur ne doit pas s’enrichir aux dĂ©pens d’un autre. Le juge doit statuer aussi Ă  cet Ă©gard, car le possesseur de mauvaise foi n’aura pas mĂȘme besoin de repousser le demandeur par l’exception doli mali. On pourra seulement admettre cette diffĂ©rence, que le possesseur de bonne foi dĂ©duira absolument ses dĂ©penses, quand mĂȘme la chose n’existerait plus, Ă  l’exemple des tuteurs et des curateurs; au lieu que le possesseur de mauvaise foi ne pourra les dĂ©duire qu’autant que la chose en aura Ă©tĂ© amĂ©liorĂ©e. » L. 7, § 12, ff. deAcq. rer. dom. Si quis in alieno solo sua materia Ɠdificaverit, illius fit Ɠdificium, cujus et solum est et si scit alienum solum esse, sua voluntate amisisse proprietatem materiƓ intelli- gitur; itaque neque diruto quidem Ɠdificio vindicatio ejus materiƓ competit. CertĂš si dominas soli petat Ɠdificium, nec solvat pretium materiƓ et mercedes fabrorum, poterit per exceptionem doli mali repelli utique si nescit, qui Ɠdi- ficavit, alienum esse solum, et tanquam in suo bona fide Ɠdifcavit; nam si scit, culpa ei objici potest, quod temerĂš Ɠdificavit in eo solo quod intelligent alienum. § 13. Si alienam plantam in meo solo posuero, mea erit. Ex diverso, si meam plantam in alieno solo posuero, illius erit si modo utroque casu radices egerit ; antequam enim radices agent, illius permanet, cujus et fuit. His conveniens est, quod si vicini arborem ita terra presserim ut in meum fundum radices egerit, meam effici arborem. — 728 — Rationem enim non permittere, ut altenus arbor intelli- gatur, quant cujus fundo radices egisset. Et ideo propc confinium arbor posita, si etiam in vicinum fundurn radices egerit, commuais est. » § 12. Si quelqu’un bĂątit avec ses matĂ©riaux sur le terrain d’autrui, l’édifice appartiendra Ă  celui Ă  qui appartient le sol. Et si celui qui bĂątit ainsi a connaissance que le sol est Ă  autrui, il est censĂ© consentir Ă  perdre la propriĂ©tĂ© de ses matĂ©riaux en sorte qu’il ne pourra pas les rĂ©clamer, mĂȘme aprĂšs la destruction de l’édifice. Cependant, si le maĂźtre du sol, n’étant pas en possession de l’édifice, intente une action pour l’avoir, sans offrir de payer les matĂ©riaux et les salaires des ouvriers, il sera dĂ©boutĂ© de sa demande, parce qu’on lui opposera la fin de non-recevoir, tirĂ©e de sa mauvaise foi ; en supposant que celui qui a bĂąti ait ignorĂ© que le sol Ă©tait Ă  autrui et ait cru de bonne foi bĂątir sur son terrain ; car s’il a eu connaissance que le terrain Ă©tait Ă  autrui, il doit s’imputer d’avoir bĂąti sur un sol qu’il savait ne lui pas appartenir. § 13. Si je plante dans mon terrain un arbrisseau appartenant Ă  autrui, l’arbre est Ă  moi, et, par la raison contraire, si je plante dans le terrain d’autrui un arbrisseau qui m’appartient, l’arbre sera Ă  lui. On suppose dans les deux cas que l’arbre ait poussĂ© des racines; car, avant ce temps, il ne cesse pas d’appartenir Ă  l’ancien propriĂ©taire. Il s’ensuit de lĂ  que si l’arbre de mon voisin s’est tellement dĂ©jetĂ© sur mon terrain qu’il y ait poussĂ© ses racines, cet arbre m’appartient; car la raison nous dicte qu’un arbre ne peut pas appartenir Ă  un autre qu’à celui dans le terrain duquel il a pris racine. Par la mĂȘme raison, un arbre placĂ© sur le bord des deux terres, qui aura poussĂ© une partie de ses racines sur — 7-29 — chaque terre, devient commun entre les propriĂ©taires. » On peut voir encore le § 30, aux Inst, de rer. div., les lois 2, 5, au Code de Rei vind. D’aprĂšs l’art. 546 ,du Code civil, dont nous avons dĂ©jĂ  rapportĂ© les termes, la propriĂ©tĂ© d’une chose donne droit Ă  tout ce qu’elle produit et Ă  ce qui s’y unit accessoirement, soit naturellement, soit artificiellement. La propriĂ©tĂ© du sol emporte la propriĂ©tĂ© du dessus et du dessous. 552. Toutes constructions, plantations et ouvrages sur un terrain ou dans l’intĂ©rieur, sont prĂ©sumĂ©s faits par le propriĂ©taire, Ă  ses frais, et lui appartenir, si le contraire n’est prouvĂ©. Art. 553. Cet art. 553, comme on le voit, est spĂ©cial aux constructions, plantations et ouvrages; mais cette derniĂšre expression est bien gĂ©nĂ©rale. Suivant la loi 5, Code, de Rei vind., le possesseur de mauvaise foi n’avait droit Ă  aucune rĂ©pĂ©tition d’impenses, autres que les nĂ©cessaires ; il pouvait seulement emporter les travaux utiles, sine lĂŠsione prioris status ; mais la loi 38 de Pet. her. et la loi 38 de Rei vind. que nous avons rapportĂ©es dĂ©cidaient benignius et Ɠquitate que ce possesseur devait, comme celui qui Ă©tait de bonne foi, obtenir le remboursement de ses dĂ©penses. Dans notre droit français, le propriĂ©taire du fonds peut contraindre le possesseur de mauvaise foi Ă  enlever, sans indemnitĂ©, les travaux, constructions et plantations qu’il y a faites. Celui-ci peut mĂȘme ĂȘtre condamnĂ© en des dommages-intĂ©rĂȘts envers le propriĂ©taire ; mais lorsque le possesseur est de bonne foi, il ne peut ĂȘtre condamnĂ© Ă  enlever ses plantations et constructions. Le propriĂ©taire est tenu de lui payer, Ă  son choix au choix du — 730 — propriĂ©taire, ou le prix des matĂ©riaux et de la main- d’Ɠuvre , ou une somme Ă©gale Ă  ce que les travaux ont apportĂ© d’augmentation de valeur au fonds, soit que les travaux aient Ă©tĂ© faits par le possesseur avec ses matĂ©riaux ou ceux d’autrui, soit que ce soit un tiers non possesseur qui les ait faits avec ses propres matĂ©riaux. La loi ne distingue pas entre les dĂ©penses nĂ©cessaires , utiles et voluptuaires. L’adjectif voluptuaires n’est mĂȘme employĂ© qu’une seule fois dans tout le Code civil ; c’est dans l’art. 1635, pour le cas de vente faite de mauvaise foi de la chose d’autrui. Alors toutes les dĂ©penses, mĂȘme voluptuaires, doivent ĂȘtre remboursĂ©es par le vendeur Ă  l’acquĂ©reur Ă©vincĂ©, lors mĂȘme qu’elles n’auraient procurĂ© au fonds aucun avantage. La gĂ©nĂ©ralitĂ© des termes de l’art. 555 en rend donc les dispositions applicables Ă  tous les ouvrages ; nous devons ajouter que dans le cas d’un possesseur de mauvaise foi, la loi accorde au propriĂ©taire le choix, ou d’obliger ce possesseur Ă  les enlever, ou de les conserver ; mais Ă  la charge de rembourser la valeur des matĂ©riaux et le prix de la main-d’Ɠuvre, sans Ă©gard Ă  l’augmentation de valeur. Il semble que le possesseur de mauvaise foi soit mieux traitĂ© que le possesseur de bonne foi, puisque ordinairement la valeur des matĂ©riaux et delĂ  main-d’Ɠuvre excĂšde celle de l’amĂ©lioration ; c’est en ce sens que l’on dit que trĂšs-souvent c’est une folie de bĂątir. Cependant le possesseur qui voudra Ă©viter d’ĂȘtre contraint Ă  enlever ses matĂ©riaux et Ă  des rĂ©parations avec dommages-intĂ©rĂȘts sera ordinairement d’une composition facile, qui placera le vrai propriĂ©taire dans une position au moins aussi avantageuse que s’il avait affaire Ă  un possesseur de bonne foi. Il est des dĂ©penses auxquelles ne s’applique pas l’ar- — 731 — ticle 555 et qui doivent toujours ĂȘtre remboursĂ©es; ainsi on doit tenir compte, mĂȘme au possesseur de mauvaise foi, de toutes les dĂ©penses nĂ©cessaires ou utiles qui ont Ă©tĂ© faites pour la conservation de la chose. Art. 1381. Ainsi encore l’art. 548 oblige le propriĂ©taire auquel les fruits appartiennent Ă  rembourser les frais des labours, travaux et semences. On peut y ajouter l’obligation de rembourser les impĂŽts, les frais d’assurance, les frais de transport de rĂ©coltes pour les vendre, les droits d’octroi, les rĂ©parations, les crĂ©ances que le possesseur a pu acquitter et les intĂ©rĂȘts de ces crĂ©ances, en un mot toutes les charges, puisqu’il ne profite pas des fruits. Un arrĂȘt de la Cour de cassation, du 15 janvier 1839 *, rendu sur notre plaidoirie, et qui a accueilli la doctrine que nous dĂ©veloppions, a dĂ©cidĂ© que l’art. 548 du Code civil avait eu plus particuliĂšrement en vue la restitution des fruits existant en nature ; qu’il Ă©tait Ă©nonciatif et non limitatif; que lorsqu’il s’agissait de la restitution, non des fruits eux-mĂȘmes, mais de leur valeur, on devait dĂ©duire non-seulement les frais des travaux, labours et semences , mais encore les frais de toute nature qui prĂ©cĂšdent la vente, et notamment les frais de transport et droits d’octroi ; que l’arrĂȘt attaquĂ© n’avait violĂ© ni l’art. 129 du Code de procĂ©dure civile ni l’art. 548 du Code civil en homologuant le rapport des experts, qui avait Ă©tĂ© d’avis d’allouer ces dĂ©penses au possesseur Ă©vincĂ©. Cette dĂ©cision est conforme Ă  l’opinion de Pothier, de la Revendication, et de Bourjon t. Il, p. 514, n 0 ’ 7 et 8. Quant au possesseur de bonne foi, il n’a pas droit au ‱ Journal du palais, 1839 - 1 - 169 . remboursement de ce qui est considĂ©rĂ© comme charges des fruits, puisqu’il les conserve. Mais les capitaux hypothĂ©quĂ©s qui grĂšvent l’immeuble ou la succession dont il dĂ©pend devraient lui ĂȘtre remboursĂ©s, avec les intĂ©rĂȘts, Ă  partir du jour oĂč il les aurait acquittĂ©s. Nous croyons devoir reproduire les autres dispositions du Code sur les impenses et dĂ©gradations. Art. 861. Dans tous les cas, il doit ĂȘtre tenu compte au donataire des impenses qui ont amĂ©liorĂ© la chose, eu Ă©gard Ă  ce dont la chose se trouve augmentĂ©e au temps du partage. Art. 862. Il doit ĂȘtre pareillement tenu compte au donataire des impenses nĂ©cessaires qu’il a faites pour la conservation de sa valeur, encore qu’elles n’aient point amĂ©liorĂ© le fonds. Art. 863. Le donataire, de son cĂŽtĂ©, doit tenir compte des dĂ©prĂ©ciations et dĂ©tĂ©riorations qui ont diminuĂ© la valeur de l’immeuble, par son fait ou par sa faute, etc. Art. 864. Dans le cas oĂč l’immeuble a Ă©tĂ© aliĂ©nĂ© par le donataire, les amĂ©liorations ou dĂ©gradations faites par l’acquĂ©reur doivent ĂȘtre imputĂ©es conformĂ©ment aux trois articles prĂ©cĂ©dents. Art. 1634. Le vendeur est tenu de rembourser ou de faire rembourser Ă  l’acquĂ©reur, par celui qui l’évince, toutes les rĂ©parations et amĂ©liorations utiles qu’il aura faites au fonds. Art. 1635. Si le vendeur avait vendu de mauvaise foi le fonds d’autrui, il sera obligĂ© de rembourser Ă  l’acquĂ©reur toutes les dĂ©penses, mĂȘme voluptuaires ou d’agrĂ©ment, que celui-ci aura faites au fonds. Art. 1673. Le vendeur qui use du pacte de rachat, doit rembourser non-seulement le prix principal, mais — 733 — encore les frais et loyaux coĂ»ts de la vente, les rĂ©parations nĂ©cessaires et celles qui ont augmentĂ© la valeur du fonds, jusqu’à concurrence de cette augmentation. Il ne peut entrer en possession qu’aprĂšs avoir satisfait Ă  toutes ces obligations. Art. 2175. Les dĂ©tĂ©riorations qui procĂšdent du fait ou de la nĂ©gligence du tiers dĂ©tenteur, au prĂ©judice des crĂ©anciers hypothĂ©caires ou privilĂ©giĂ©s, donnent lieu contre lui Ă  une action en indemnitĂ© ; mais il ne peut rĂ©pĂ©ter ses impenses et amĂ©liorations que jusqu’à concurrence de la plus-value rĂ©sultant de l’amĂ©lioration. Art. 2176. Les fruits de l’immeuble hypothĂ©quĂ© ne sont dus par le tiers dĂ©tenteur qu’à compter du jour de la sommation de payer ou de dĂ©laisser ; et si les poursuites commencĂ©es ont Ă©tĂ© abandonnĂ©es pendant trois ans Ă  compter de la nouvelle sommation qui sera faite. » Ainsi, il est bien entendu que toutes les augmentations , rĂ©parations, plantations et tous les travaux faits sur un fonds ou dans l’intĂ©rieur appartiennent de plein droit au propriĂ©taire de ce fonds et sont mĂȘme censĂ©s exĂ©cutĂ©s Ă  ses frais jusqu’à ce que le contraire soit prouvĂ©. Ce n’est que par exception et lorsqu’il est prouvĂ© que ces ouvrages ont Ă©tĂ© faits par un tiers et Ă  ses frais, que celui-ci a le droit non de les enlever, mais de rĂ©clamer du propriĂ©taire qui veut ou est tenu de les garder, une indemnitĂ© dont nous avons indiquĂ© les bases. En principe gĂ©nĂ©ral, la chose doit ĂȘtre restituĂ©e au vrai propriĂ©taire dans l’état oĂč elle Ă©tait lorsqu’il a cessĂ© de la possĂ©der car c’est Ă  cette chose qu’il a droit, et si le possesseur pouvait toujours la lui rendre, seulement dans l’état oĂč elle se trouverait au moment de l’action pĂ©titoire, le demandeur perdrait une partie de — 734 — son fonds, comme si le possesseur avait abattu des arbres de haute futaie, des bĂątiments, Ă©puisĂ© des mines ou carriĂšres, ou laissĂ© emporter une partie du fonds par une riviĂšre, faute d’en avoir garanti et dĂ©fendu les bords. Nous ne ferions pas de distinction entre le possesseur de bonne et de mauvaise foi. Quant aux intĂ©rĂȘts des sommes dĂ©boursĂ©es pour les impenses, labours, semences et autres frais, constructions, plantations, du jour oĂč elles ont Ă©tĂ© dĂ©pensĂ©es, nous convenons que c’est une question qui n’est pas sans difficultĂ©. Nous croyons cependant qu’en gĂ©nĂ©ral le possesseur quelconque a droit aux intĂ©rĂȘts par une Ă©quitable application des art. 1375 et 2001 du Code civil. Nous reviendrons bientĂŽt sur cette question, et nous donnerons Ă  notre opinion des dĂ©veloppements qui en feront mieux saisir la portĂ©e et connaĂźtre le mode d’application. 132° Les lois romaines *, parun tempĂ©rament d’équitĂ© ' Voici le texte des lois romaines Dig. de Hereditalis petitione. L. 39, GaĂźus, lib. 6, ad Ediclum provinciale. Utiles autem, necessariƓque sunl , veluti qvƓ fiunt reficiendorum Ɠdipciorum gratia, aut in novellata , aut cum servorum gratta litis ĂŠslimalio solvitar , cum id uUlius sit, quam ipsos dedi. Denique alias comptures ejusdemgencris esse impensas,manifeslum est. — § 1" Videa- mus tamen, ne et ad piclurarum quoque et marmorum, et cƓterarum voluptuariarum rerum impensas Ɠque proficiat nobis doit exceptio, si modo bonƓ fidei possessores simus nam pr ce dont probe dicelur , non debuisse in alienam rem, supcrvacuas impensas facere ; ut tamen po- teslas ei peret tollendorum eorum, quƓ sine detrimento ipsius rei tolli possunl. » Dig. de Verborum signipcatione. L. 79, Paulus, lib. G, ad Dlautium. ItnpensĂŠ necessariĂŠ sont quƓ si factƓ non sint, res aut peritura, aut deterior futura sit. — § I" Utiles impensas esse Fulcinius ait, quƓ meliorem dolem faciant, {non deteriorem esse non sinant; ex quibus reditus mulieri adquiratur sicuti arbusti pastinationes ultra quam accordaient, comme on l’a vu, mĂȘme au possesseur de mauvaise foi, le remboursement de ses augmentations et amĂ©liorations, des dĂ©penses nĂ©cessaires et utiles. Dumoulin, sur la Coutume de Paris , Bourjon, t. II, n° 9, p. 514, Pothier, Merlin donnaient une dĂ©cision identique en droit français. FerriĂšre, Dictionnaire de droit et de pratique V° Impenses, prĂ©tendait, par une erreur Ă©vidente, que jamais aucun possesseur n’avait droit de rĂ©pĂ©ter les dĂ©penses voluptuaires ; que le possesseur de bonne foi avait seul droit de rĂ©pĂ©ter tant les nĂ©cessaires que les utiles, et que le possesseur de mauvaise foi n’avait droit qu’aux premiĂšres, sauf Ă . enlever ce qui pouvait l’ĂȘtre sans inconvĂ©nient. La question est aujourd’hui tranchĂ©e par l’article 555, sauf le mode de remboursement des travaux qui varie suivant la bonne ou mauvaise foi de celui qui les a exĂ©cutĂ©s. Ainsi le possesseur de mauvaise foi a, comme le possesseur de bonne foi, droit au remboursement des impenses nĂ©cessaires ou utiles. Nous pensons mĂȘme, comme necesse ueral. Hem doctrinam puerorum quorum nomine onerari mu- licrem ignoranlem vel invilam non oportet ne cogatur fundo, aut mancipiis carere. In his impensis et pislrinum et horreum insulce do- tali adjeclum, plerumque dicemus. — § II. VoluptuariĂŠ sunt quƓ spe- ciem duntaxat ornant, non eliam fructum auqcnl, ut sunt viridia et aquƓ salientes, incrustaliones, loricationes, picturƓ. » Nous ne rapportons rien ici du titre de Impensis in rem dotalem faclis, parce qu’il serait difficile d’en prĂ©senter un extrait, et qu’il faudrait le transcrire en entier, ce qui serait beaucoup trop long. Il faut observer, dit Rousseaud de la Combe, V Impenses, n 3, que les dĂ©penses ou impenses, autres que celles qui sont faites 4 cause des fruits, sont les nĂ©cessaires, sans lesquelles la chose ou le fonds aurait pĂ©ri ou se serait dĂ©tĂ©riorĂ©. Les utiles, qui augmentent le revenu et la valeur de la chose ou du fonds, mais sans lesquelles il n’aurait point pĂ©ri et ne se serait point dĂ©tĂ©riorĂ©, et les voluptueuses, qui embellissent la chose ou le fonds, mais qui n’en augmentent point Je revenu ou la valeur. » On trouve les mĂȘmes dĂ©veloppements dans le Dictionnaire de FerriĂšre, V" Impenses. — 736 nous l’avons dĂ©jĂ  dit, p. 730, que la loi ne met aucune difi'Ă©rence entre les impenses et n’exclut pas celles vo- luptuaires ou d’agrĂ©ment qui peuvent aussi ĂȘtre plus ou moins avantageuses, mĂȘme parfois utiles. L’art. 555 soumet tous les ouvrages Ă  la mĂȘme rĂšgle, sans aucune distinction Ă  raison de leurs diffĂ©rentes espĂšces. Cependant, les tribunaux devront ĂȘtre sĂ©vĂšres dans l’apprĂ©ciation de la valeur de ces derniĂšres dĂ©penses surtout Ă  l’égard du possesseur de mauvaise foi. Pothier, de la Revendication, n° 352 et Bourjon, t. II, p. 515, n° 11, contestent au possesseur de mauvaise foi le droit au remboursement des dĂ©penses voluptuaires ; cependant ils lui accordent la facultĂ© d’enlever les ouvrages ou travaux, rĂ©sultat de ces dĂ©penses, s’il le peut faire avec quelque motif et sans dĂ©tĂ©rioration du fonds, en remettant les lieux dans l’état oĂč ils Ă©taient lorsqu’il est entrĂ© en possession. VoilĂ , ajoute Bourjon, tout son droit, autrement son fait aurait nui au lĂ©gitime propriĂ©taire qui, judicieusement, ne doit pas nĂ©anmoins profiter de telles dĂ©penses; c’est dans l’équitĂ©, dit encore Bourjon, matiĂšre Ă  composition. Pothier, loco citato, dĂ©cide, en se fondant sur la loi 38, ff. de Rei vind. , qu’il ne doit pas lui ĂȘtre permis d’effacer les peintures dont il a dĂ©corĂ© les appartements de la maison revendiquĂ©e, quoiqu’il offre de remettre les choses dans l’ancien Ă©tat. Quant Ă  nous, nous serons encore un peu plus favorable au possesseur Ă©vincĂ©. Il suffirait que les tribunaux de premiĂšre instance et d’appel eussent donnĂ© Ă  des impenses le nom d'amĂ©liorations pour qu’ elles dussent ĂȘtre considĂ©rĂ©es comme utiles et pour que le demandeur au pĂ©titoire ne pĂ»t refuser d’en tenir compte au possesseur Ă©vincĂ©, soit en contestant leur utilitĂ©, soit en prĂ©tendant les faire ranger dans la catĂ©gorie des dĂ©penses voluptuaires ou d’agrĂ©ment. 11 n’est pas toujours facile de distinguer les diverses catĂ©gories d'impenses. L’apprĂ©ciation dĂ©pendra des circonstances, de l’importance et de la nature de la propriĂ©tĂ© , de la position sociale ou de l’état de fortune des parties. Telle impense pourra sembler aux uns et dans un cas particulier, utile, nĂ©cessaire mĂȘme, qui, pour d’autres et dans des circonstances diffĂ©rentes, ne sera que vo- luptuaire ou d’agrĂ©ment ; avec les progrĂšs du luxe, les dĂ©penses d’agrĂ©ment peuvent paraĂźtre utiles; que l’immeuble soit un riche hĂŽtel ou une salle de concert, de danse, de spectacle, un cafĂ©, les peintures, dĂ©corations et ornements de luxe deviendront mĂȘme nĂ©cessaires. 11 rĂ©gnera toujours quelque arbitraire dans la dĂ©cision des tribunaux Ă  cet Ă©gard ; la loi n’a pu ni voulu l’éviter. Il ne lui Ă©tait pas possible de donner des dĂ©finitions, de faire des distinctions positives et invariables comme le faisait le droit romain, notamment la loi 39, ff. de Heredit. petitione, les diverses lois du titre de Impensis in res dotales factis, la loi 79, de Verbor. signifient. Le lĂ©gislateur français a d’autant mieux fait de s’en abstenir, qu’en droit toute dĂ©finition est dangereuse ; omnis definitio in jure pericu- losa; qu’en lisant les diffĂ©rentes lois que nous venons d’indiquer, on se convaincra aisĂ©ment qu’elles n’ont pas toute la prĂ©cision, toute la clartĂ© dĂ©sirable; qu’elles sont loin de satisfaire la raison, notamment en ce qui concerne les dĂ©penses utiles et leur diffĂ©rence avec les voluptuaires. Aussi l’art. 555 ne se prĂ©occupe-t-il pas, comme nous l’avons dĂ©jĂ  dit, de la nature des ouvrages ; il applique 47 la mĂȘme rĂšgle Ă  toutes les catĂ©gories. Le propriĂ©taire du fonds doit toujours les payer quand il en profite ; seulement, lorsque l’auteur des travaux est de mauvaise foi, le propriĂ©taire a le droit de le contraindre Ă  les enlever. La loi s’en est donc, par la force des choses, rapportĂ©e Ă  la conscience et aux lumiĂšres des magistrats qui ont la plus grande latitude pour faire leur apprĂ©ciation. Ce serait lĂ  une dĂ©cision en fait, sur laquelle la Cour de cassation ne pourrait exercer son droit de rĂ©vision comme elle l’a d’ailleurs reconnu par l’arrĂȘt du 15 janvier 1839 dĂ©jĂ  citĂ©, en rejetant un pourvoi formĂ© contre un arrĂȘt de la Cour de Riom , qui avait condamnĂ© le propriĂ©taire Ă  tenir compte, au possesseur Ă©vincĂ©, d’ouvrages qualifiĂ©s d’amĂ©liorations ; la Cour de cassation a dit dans se9 motifs que le mot amĂ©liorations indiquait par lui-mĂȘme futilitĂ© des dĂ©penses qu’elles avaient nĂ©cessitĂ©es. Lorsque le demandeur au pĂ©titoire a Ă©tabli sa propriĂ©tĂ© du sol, la preuve contraire, dont parle l’art. 553, pour les impenses, est Ă  la charge du possesseur, demandeur en exception, et peut se faire comme nous l’avons dĂ©jĂ  dit, n° 56, par titre, par tĂ©moins, expertise, visite de lieux et par de simples prĂ©somptions, quelque Ă©levĂ©e que soit la valeur des travaux. Nous en avons un exemple dans l’arrĂȘt de la Cour de cassation rapportĂ© n“ 70; le demandeur peut rĂ©pondre par les mĂȘmes moyens. Mais une fois cette preuve contraire faite, le dĂ©fendeur qui invoque sa bonne foi pour obtenir une dĂ©cision plus favorable sur ses impenses, n’a pa9 plus Ă  prouver cette bonne foi dans ce cas que dans celui oĂč il prĂ©tend avoir fait siens les fruits de l’objet litigieux ; la prĂ©somption de bonne foi est gĂ©nĂ©rale. Comme le disait M. Por- — 739 — talis sur le titre de la propriĂ©tĂ©, le possesseur est censĂ© ignorer les vices de son titre, tant qu’on ne constate pas qu’il les connaissait. C’est au demandeur a faire opĂ©rer cette constatation qui peut rĂ©sulter aussi du fait d’un tiers qui aurait fait connaĂźtre les titres du vrai propriĂ©taire, des enquĂȘtes et des prĂ©somptions, d’autant plus qu’il s’agit d'une preuve de fraude et de dol; cette solution s’appliquerait encore au cas oĂč il s’agirait de prouver la cessation de bonne foi, et nous ajouterons, comme exception Ă  la dispense en faveur du possesseur de l’obligation de prouver sa bonne foi, qu’il serait pourtant soumis Ă  cette obligation, dans le cas oĂč le demandeur au pĂ©titoire aurait prouvĂ© ou l’absence totale ou la cessation de la bonne foi de la part de son adversaire ; alors celui-ci qui voudrait dĂ©truire ce fĂącheux prĂ©cĂ©dent, et qui articulerait la survenance de la bonne foi, serait tenu de fournir la preuve du fait qu’il affirmerait. Du reste, l’hĂ©ritier qui serait personnellement de bonne foi, ne pourrait se soustraire aux consĂ©quences de la mauvaise foi de son auteur. Nous appliquons donc aux impenses les principes posĂ©s p. 701, quant Ă  la restitution des fruits ; ils sont les mĂȘmes dans tous les cas. Tout ce que nous avons dit sur les vices du titre, sur le droit personnel de l’hĂ©ritier, doit ĂȘtre admis ici. L’hĂ©ritier qui aurait fait des amĂ©liorations, des impenses, pourrait donc invoquer sa bonne foi ; il suffirait mĂȘme pour cela qu’elle eĂ»t existĂ© au moment des travaux, quoiqu’elle eĂ»t cessĂ© depuis. C’est d’ailleurs une rĂšgle gĂ©nĂ©rale. Mais un possesseur, serait-il de bonne foi et pourrait-il invoquer l’art. 555, s’il avait fait des constructions, plantations et ouvrages depuis un jugement ou arrĂȘt qui serait cassĂ© plus tard? Cette question devrait ĂȘtre encore rĂ©solue d’aprĂšs les principes sur la restitution des fruits. Or, plusieurs cas peuvent se prĂ©senter. Supposons que l'action pĂ©titoire ait Ă©tĂ© repoussĂ©e en premiĂšre instance et en appel, ou bien Ă  l’une ou Ă l’autre de ces juridictions, mais que la dĂ©cision ait Ă©tĂ© cassĂ©e et que la Cour de renvoi ait donnĂ© gain de cause au demandeur ; le dĂ©fendeur sera-t-il rĂ©putĂ© de bonne foi jusqu’à ce dernier arrĂȘt comme s’il n’y avait pas eu d’instance ou au moins jusqu’à l’arrĂȘt de la Cour de cassation ? Lorsqu’il s’agit d’une somme payĂ©e en vertu d’un arrĂȘt qui a Ă©tĂ© cassĂ© plus tard, le dernier Ă©tat de la jurisprudence fait courir les intĂ©rĂȘts du jour de la signification de l’arrĂȘt d’admission du pourvoi, parce que cette signification contient assignation devant la chambre civile , en restitution des sommes touchĂ©es. ArrĂȘt cassation, 29 avril 1839, Journal du palais, 39-1-M2. Nous disons le dernier Ă©tat de la jurisprudence, parce que la cour de cassation avait dĂ©cidĂ© la question en sens opposĂ©s. Par un premier arrĂȘt du 15 janvier 1812, elle avait jugĂ© d’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale et sans faire de distinction , que les intĂ©rĂȘts des sommes Ă  restituer aprĂšs cassation ne sont pas dus Ă  partir du jour du payement. Par un autre arrĂȘt du 11 novembre 1828, la Cour a jugĂ© au contraire et d’une maniĂšre non moins gĂ©nĂ©rale que la partie tenue Ă  restitution, aprĂšs cassation, doit ĂȘtre condamnĂ©e aux intĂ©rĂȘts du jour du payement des sommes qui doivent ĂȘtre restituĂ©es. Le dernier arrĂȘt adopte donc un terme moyen. Mais cette dĂ©cision, toute spĂ©ciale au cas de perception d’une somme en vertu d’un arrĂȘt de condamnation, ne peut s’appliquer aux fruits Ă  restituer. L’action origi- — 741 naire met le possesseur en demeure de restituer. De ce moment, il cesse donc de pouvoir les gagner, si la demande se trouve justifiĂ©e en dĂ©finitive; qu’elle ne le soit qu’aprĂšs des pĂ©ripĂ©ties ou des alternatives judiciaires diverses, plus ou moins multipliĂ©es, ce sont lĂ 'des incidents qui peuvent bien suspendre l'effet de l’action originaire, mais non l’empĂȘcher. Les jugements et arrĂȘts contraires sont affectĂ©s d’une condition rĂ©solutoire qui, lorsqu’elle s’accomplit, remet les choses au mĂȘme Ă©tat qu’auparavant et oblige celui qui a reçu Ă  restitution. Art. 1183, Code civil. La dĂ©cision dĂ©finitive a un effet rĂ©troactif qui remonte au jour de l’action ; c’est comme si elle avait pu ĂȘtre rendue et exĂ©cutĂ©e le jour mĂȘme de cette action. Le dĂ©fendeur savait que le demandeur au pĂ©titoire avait son droit d’appel, de recours en cassation par suite duquel la dĂ©cision pouvait ĂȘtre rĂ©formĂ©e. Supposons au contraire que le demandeur ait obtenu gain de cause en premiĂšre instance, en appel; mais que le dĂ©fendeur ait fait casser et ait obtenu gain de cause en dĂ©finitive devant la cour de renvoi. Le demandeur qui aurait perçu les fruits en vertu de l’arrĂȘt cassĂ© et qui aurait touchĂ© la valeur de ceux antĂ©rieurs, ou qui aurait fait des impenses dans l’intervalle des deux arrĂȘts, devrait rendre les fruits et mĂȘme les intĂ©rĂȘts de ceux liquidĂ©s par l’arrĂȘt, et cela du jour de la signification de l’arrĂȘt d’admission du pourvoi. Nous donnerions la mĂȘme solution dans le cas de rĂ©tractation de dĂ©cision, par suite de requĂȘte civile, ou de tierce opposition. Nous croyons que la mĂȘme doctrine serait applicable pour prĂ©ciser et dĂ©terminer les effets, les rĂ©sultats de ces dĂ©cisions. — 742 — Les amĂ©liorations et impenses faites sur un terrain ajoutĂ© par alluvion Ă  la propriĂ©tĂ© principale, pendant l’instance pĂ©titoire et mĂȘme antĂ©rieurement et depuis la dĂ©p^ossession du vĂ©ritable propriĂ©taire, devraient ĂȘtre aussi remboursĂ©es au possesseur de bonne ou de mauvaise foi. Le vrai propriĂ©taire ne pourrait se soustraire Ă  cette obligation sous prĂ©texte que les travaux n’ont pas Ă©tĂ© faits sur l’objet principal et en abandonnant au possesseur, contre son grĂ©, le terrain d’alluvion et les constructions et plantations; indĂ©pendamment de ce que cet abandon n’est autorisĂ© par la loi dans aucun cas, l’allu- vion n’appartient pas plus au possesseur que la chose principale; l’une et l’autre sont la propriĂ©tĂ© de la mĂȘme personne, forment les parties d’un tout, ainsi que nous l’avons Ă©tabli dans notre RĂ©gime des eaux, n° 2A3, et dans notre opuscule rĂ©cent sur le dĂ©cret de dĂ©centralisation administrative en matiĂšre de cours d’eau. Cette alluvion, quoique formĂ©e pendant la dĂ©possession du propriĂ©taire, ne doit pas moins lui ĂȘtre dĂ©livrĂ©e sur son action pĂ©titoire avec la chose principale et mĂȘme, lorsque le possesseur est de mauvaise foi, la restitution des fruits Ă  laquelle ce dernier est tenu doit comprendre ceux produits par l’alluvion comme tous les autres. L. 3A, ff. de Rei vind. Il y a une exception toute spĂ©ciale au droit du possesseur de rĂ©clamer une indemnitĂ© pour les impenses ; mais c’est lorsqu’il s’agit de simples amĂ©liorations; que ce possesseur est un usufruitier. L’art. 599 du Code civil porte en effet que l’usufruitier ne peut, Ă  la cessation de l’usufruit , rĂ©clamer aucune indemnitĂ© pour les amĂ©liorations qu’il prĂ©tendrait avoir faites, encore que la valeur de la chose en fĂ»t augmentĂ©e, que lui ou ses hĂ©ritiers — 743 — peuvent seulement enlever les glaces, tableaux et autres ornements qu’il aurait fait placer ; mais Ă  la charge de rĂ©tablir les lieux dans leur premier Ă©tat. Desgodets, Ldi-s des bĂątiments, page ÂŁ87, et son annotateur Goupy, ibid., posent la mĂȘme rĂšgle et disent que la douairiĂšre'ne peut rĂ©pĂ©ter contre les hĂ©ritiers de son mari, les amĂ©liĂŽ- riations, ajustements ou augmentations quelle aurait fait faire pendant sa jouissance. Goupy ajoute qu’il en est de ces amĂ©liorations comme de celles qu’un locataire ferait en une maison pour la rendre plus habitable et plus commode ; que le propriĂ©taire ne doit pas les rembourser Ă  son locataire. Gette rĂšgle s’appliquerait, suivant nous, Ă  des impenses de peu de valeur par exemple, Ă  des embellissements , Ă  des dĂ©corations, Ă  un mode de culture, d’engrais, d’irrigation, de drainage, de dessĂšchement qui rendrait la terre meilleure, plus productive; mais non Ă  des constructions, Ă  des plantations d’une certaine valeur, par exemple Ă  la construction d’une maison, d’une aile de bĂątiment, Ă  la transformation d’un terrain aride en vignes ou en bois. Ge cas nous paraĂźtrait rĂ©gi par l’art. 555 du Gode. Le locataire ou tout autre dĂ©tenteur ou possesseur qui n’a pas droit Ă  indemnitĂ© pour amĂ©liorations ne peut les altĂ©rer, ellacer, dĂ©truire, sans aucun profit pour lui ; Mali- tiis non est indulgendum. Un arrĂȘt du parlement de Paris, citĂ© par Lepage nouveau Desgodets, p. 2, ch. 3, art. 1 er , p. 188 et 189, a condamnĂ© avec raison Ă  des dommages- intĂ©rĂȘts, un locataire qui pour se venger de ce qu’un propriĂ©taire ne voulait pas l’indemniser, avait arrachĂ© ou sali les papiers, grattĂ© les peintures qu’il avait fait Ă©tablir. Il importe que les tribunaux rĂ©priment sĂ©vĂšrement de pareils mĂ©faits assez frĂ©quents de la part de certains locataires, qui, pour se venger des propriĂ©taires qui n’ont pas voulu cĂ©der Ă  leurs exigences ou ont Ă©tĂ© obligĂ©s de les congĂ©dier, ne manquent pas de tout salir ou dĂ©grader dans les locaux qu’ils quittent, et lors mĂȘme que les frais ont Ă©tĂ© faits par les propriĂ©taires qu’ils forcent ainsi Ă  des rĂ©parations coĂ»teuses pour remettre ces localitĂ©s en Ă©tat d’ĂȘtre habitĂ©es par d’autres personnes. Voyez en outre Pothier, Troplong, Duvergier, du Louage et arrĂȘt de la Cour de cassation, du 15 janvier 1849, Devill. et Car. 1849-1-95 Cet arrĂȘt reconnaĂźt aussi un principe important en dĂ©cidant que le silence du propriĂ©taire qui a laissĂ© exĂ©cuter les travaux, n’établit pas de fin de non-recevoir contre lui ; qu’il n’est pas tenu de s’opposer Ă  ces travaux pour conserver le droit consacrĂ© par l’art. 555 ; que tout ce qui rĂ©sulte de ce silence, c’est que le propriĂ©taire a consenti Ă  l’exĂ©cution, aux risques et pĂ©rils du possesseur ou dĂ©tenteur; et quoique cet arrĂȘt soit rendu dans un espĂšce ou il s’agissait de travaux faits par un fermier, il est Ă©vident que le principe posĂ© est commun Ă  tous les possesseurs et dĂ©tenteurs. 133° La valeur des amĂ©liorations doit se compenser, en principal et intĂ©rĂȘts, avec les fruits perçus par le possesseur de bonne ou de mauvaise foi. Telle Ă©tait, comme nous allons le voir, la dĂ©cision des lois romaines, notamment de la loi 48, ff. de Rei vitid., que nous avons rapportĂ©e, p. 725, et des auteurs les plus accrĂ©ditĂ©s qui ont Ă©crit avant le Code civil. Merlin pense que la mĂȘme doctrine, les mĂȘmes solutions sont encore applicables aujourd’hui, puisqu’il a Ă©crit sous l’empire du Code civil, et qu’il les reproduit, sans dire ni donner Ă  entendre que ce Code y ait dĂ©rogĂ©. — 745 — C’est aussi l’opinion de M. Troplong, des Priv. et hy., t. III, n° 839; M. Delvincourt, t. II, p. 3, etM. MarcadĂ©, dans son Commentaire, de l'art. 555, sont d’une opinion contraire; ils se fondent sur ce que les fruits appartiennent au possesseur de bonne foi, et que ce serait l’en priver que de le soumettre Ă  la compensation de ces fruits avec les impenses. Encore le premier admet-il une exception et une composition pour le cas oĂč le propriĂ©taire n’ayant pas le moyen d’acquitter les impenses, devrait vendre sa propriĂ©tĂ© pour se libĂ©rer; M. MarcadĂ© admet aussi une exception dans le cas oĂč il serait prouvĂ© que les fruits ont Ă©tĂ© employĂ©s aux amĂ©liorations ou impenses ; mais ces exceptions dĂ©truisent le principe par eux posĂ©; car si le possesseur est propriĂ©taire, comment peut-on le contraindre, dans ces derniers cas plus que dans le premier, Ă  la compensation de deux choses qui lui appartiennent Ă©galement? d’un autre cĂŽtĂ©, c’est bien toujours, au moins en partie, avec les fruits que le possesseur a fait les augmentations, au lieu de leur donner une autre destination ; enfin, comment constater d’une maniĂšre certaine que le vrai propriĂ©taire n’a pas moyen de payer sans vendre son immeuble? Ainsi, il n’y a pas de milieu, il faut admettre ou rejeter la compensation sans distinction, sans exception. La rĂ©daction de l’art. 555 fortifie notre sentiment; nous y lisons une phrase incidente assez significative il y est question de tiers qui n’aurait pas Ă©tĂ© condamnĂ© Ă  la restitution des fruits, attendu sa bonne foi. Pourquoi cette mention de non-restitution de fruits lorsqu’il est question du rĂšglement des impenses? En mĂȘlant l’une Ă  l’autre, le lĂ©gislateur a donc voulu que les deux objets eussent un rapport, une corrĂ©lation, une influence rĂ©ci- — 7-16 — proque; il a Ă©tĂ© dominĂ© par le principe des lois romaines Ă«t par la doctrine de Pothier qui prescrivaient la compensation ; l’on sait en effet, et les orateurs du gouvernement l’ont dit d’une maniĂšre formelle, que dans toute la partie du Code relative Ă  l’accession, le lĂ©gislateur a voulu suivre ce principe et cette doctrine. Qu’on pĂšse bien les termes du Code et l’on en sera de plus en plus convaincu. S’il avait eu l’intention de repousser la compensation, ne lui aurait-il pas suffi de dire si les travaux ont Ă©tĂ© faits par un possesseur de bonne foi? pourquoi y ajouter la mention qui n’aurait pas Ă©tĂ© condamnĂ© Ă , la restitution des fruits? pourquoi mĂȘme parler au conditionnel n’aurait pas Ă©tĂ© condamnĂ©? au lieu de parler au prĂ©sent, qui est dispensĂ© de la restitution ou qui ne peut ĂȘtre condamnĂ©, etc. La rĂ©daction indique donc que ce possesseur n’aurait pas Ă©tĂ© soumis Ă  la restitution s’il n’y avait pas eu d’impenses; mais que dĂšs qu’il en existe, il y a lieu Ă  un compte, Ă  une compensation. Rappelons-nous que le possesseur en gĂ©nĂ©ral n’a pas droit aux fruits; qu’ils appartiennent au propriĂ©taire du fonds ; qu’on ne les attribue au possesseur que par une exception toute particuliĂšre , comme une chose qui lui Ă©tait nĂ©cessaire, qu’il a consommĂ©e parce qu’il s’en croyait propriĂ©taire; qu’il serait trop dur et quelquefois ruineux de l’obliger Ă  les restituer; que plusieurs annĂ©es de fermages Ă©chues, mais encore dues parles locataires ou fermiers, lors de l’action, appartiennent au vrai propriĂ©taire. Or, lorsque le possesseur a fait des augmentations, il est Ă©vident qu’il les a payĂ©es avec des Ă©conomies faites sur les fruits, soit qu’il n’ait pas d’autre revenu, soit que les autres revenus lui aient suffi pour vivre; on peut dire, par une fiction aussi raisonnable que juste, qu’il n’a pas perçu ces fruits, — 747 — puisqu’ils sont employĂ©s en travaux qui en ont pris la place et se sont identifiĂ©s avec le sol. Il y a substitution d’une chose Ă  l’autre. Il ne peut avoir tout Ă  la fois les fruits employĂ©s en impenses et ces impenses. La diffĂ©rence seule lui appartient. Du reste, les fruits dont la compensation doit avoir lieu avec les impenses, sont les fruits naturels et industriels de l’immeuble, c’est-Ă -dire ceux qu’on obtient par le travail, par la culture, et les fruits civils, c’est-Ă -dire les loyers et fermages; mais non les produits qui rĂ©sulteraient du talent, de l’intelligence, des soins et travaux commerciaux ou industriels du possesseur qui se seraient exercĂ© ou auraient eu lieu dans ou sur la chose revendiquĂ©e. Ainsi le commerçant, l’usinier, le fabricant ou manufacturier n’auraient pas Ă  compter du produit de leur commerce ou de leur industrie, mĂȘme comme possesseurs de mauvaise foi. Au surplus, voici comment s’exprime Merlin, Rep., V° AmĂ©lioration, n° 2 Dans l’estimation des dĂ©penses faites par l’acquĂ©reur d’un hĂ©ritage pour l’amĂ©lioration, comme s’il y a plantĂ© un bois, une vigne, il faut dĂ©duire sur ces dĂ©penses les fruits provenus de l’amĂ©lioration, et qui auront augmentĂ© le revenu de l’hĂ©ritage; de sorte que si les jouissances des fruits acquittent le principal et les intĂ©rĂȘts des avances faites pour amĂ©liorer, il n’en sera point dĂ» de remboursement, parce qu’il suffit que l’acquĂ©reur ne souffre aucune perte ; mais si les jouissances sont moindres, on doit l’indemniser du surplus de ses avances, tant en principal qu’en intĂ©rĂȘts; si, au contraire, les jouissances excĂšdent ce que les amĂ©liorations ont pu coĂ»ter, le bĂ©nĂ©fice est pour l’acquĂ©reur, pourvu UH — nĂ©anmoins qu’il les ait perçus de bonne foi, et avant qu’on ait formĂ© contre lui aucune demande en justice. » Aux n° s 4 et 5, il se livre Ă  une discussion Ă©tendue, et conclut en dĂ©cidant que le possesseur de mauvaise foi a droit comme le possesseur de bonne foi au remboursement des impenses nĂ©cessaires ou utiles et des intĂ©rĂȘts, et que la compensation s’en fait mĂȘme avec les fruits de la chose principale. Les lois 48 et 65, au Digeste de Rei vindicatione, sont positives sur ce point Pothier, TraitĂ© du domaine de propriĂ©tĂ©, n° 343, s’exprime ainsi Lorsque sur l’action de revendication, le demandeur a justifiĂ© de son droit, le possesseur est condamnĂ© Ă  lui dĂ©laisser la chose revendiquĂ©e; mais dans certains cas, lorsque le possesseur a dĂ©boursĂ© quelque somme pour la conservation ou l’amĂ©lioration de la chose, le possesseur n’est condamnĂ© Ă  dĂ©laisser qu’à la charge par le demandeur de lui rembourser ce qu’il a dĂ©boursĂ© et de l’indemniser. » N° 344, il dit que le propriĂ©taire doit rembourser les impenses, Ă  l’exception de celles de simple entretien, et les intĂ©rĂȘts, en ce qu’ils excĂ©deraient les fruits que le possesseur a perçus depuis ledit temps, avec lesquels la compensation doit s’en faire. M. Bugnet, professeur Ă  la FacultĂ© de droit de Paris, dans ses notes sur Pothier, conteste les intĂ©rĂȘts. » En effet, il ne peut avoir les fruits provenant des amĂ©liorations et les intĂ©rĂȘts de la somme employĂ©e Ă  ces amĂ©liorations. Les n“ 345, 46, 47, 48, sont le dĂ©veloppement et l’application des principes ci-dessus. Au n° 349, Pothier dit ; La troisiĂšme limitation, qui doit ĂȘtre apportĂ©e au principe qui oblige le propriĂ©taire Ă  rembourser au possesseur de bonne foi les impenses — 7-19 — utiles qu’il a faites pour la chose qui fait l’objet de l’action en revendication, est que le propriĂ©taire n’est tenu de rembourser, au possesseur de bonne foi, la somme qui lui est due que sous la dĂ©duction de ce que ce possesseur s’en trouve dĂ©jĂ  remboursĂ© par les fruits qu’il a perçus. » A l’appui de son opinion, Pothier, sous chaque numĂ©ro, cite les lois romaines. Il est moins favorable au possesseur de mauvaise foi. Les auteurs du Nouveau Denizart, V° AmĂ©liorations, admettent la mĂȘme doctrine, et ajoutent, n° 5 Enfin, on peut demander si le propriĂ©taire est tenu des intĂ©rĂȘts des sommes employĂ©es par le possesseur aux amĂ©liorations. On pense que les intĂ©rĂȘts sont dus au possesseur de bonne foi ; mais les intĂ©rĂȘts se trouvent ordinairement compensĂ©s avec les fruits. Quant au possesseur de mauvaise foi, il doit les perdre *. » Loyseau, du DĂ©guerpissement, n° 14, s’exprime ainsi On ne doute pas qu’en point de droit, sur les amĂ©liorations que doit retirer le possesseur de bonne foi, on ne lui prĂ©compte et rabatte les fruits qu’il a perçus de l’hĂ©ritage mĂȘme avant contestation, suivant la loi sump- tus et la loi emptor, Dig. de Rei vindicatione. » Mais ces deux lois parlent du simple possesseur de bonne foi, qui, n’étant pas seigneur de l’hĂ©ritage, gagne les fruits seulement par une considĂ©ration d’équitĂ© contre les rĂšgles de droit, et ne se peuvent adapter au vrai seigneur de l’hĂ©ritage qui gagne les fruits jure dominii. » Domat, Lois civiles, p. 239, n° h, dit que tous ceux qui jouissent * Nous avons dĂ©jĂ  Ă©mis, p. 734, une opinion contraire, quant aux intĂ©rĂȘts. — 750 — de mauvaise foi sont tenus de restituer la valeur de toutes les jouissances, quoiqu’ils n’aient Ă©tĂ© troublĂ©s par aucune demande ; » et au n° 17 de la p. h 5, il dĂ©cide qu’il faut compenser les fruits perçus par le possesseur de bonne foi avec le prix des amĂ©liorations qu’il a faites, et de sorte que si ces fruits acquittent le principal et les intĂ©rĂȘts des amĂ©liorations, il n’en sera point dĂ» de remboursement, parce qu’il suffit que le possesseur ne perde rien. » Ainsi, avant le Code civil, c’était un principe incontestable que les fruits perçus mĂȘme par le possesseur de bonne foi venaient en dĂ©duction de la valeur des amĂ©liorations et des intĂ©rĂȘts de ces amĂ©liorations; cela Ă©tait d’autant plus juste qu’ainsi que le dit Loyseau le vrai propriĂ©taire du fonds avait en principe seul droit aux fruits produits par la chose, comme Ă  la chose mĂȘme ; et que ce n’était que par un tempĂ©rament d’équitĂ©, par une dĂ©rogation aux principes que le possesseur de bonne foi gardait ces fruits; mais lorsqu’il avait fait des amĂ©liorations, il ne pouvait retenir tout Ă  la fois les fruits, le prix et les intĂ©rĂȘts des amĂ©liorations; c’eĂ»t Ă©tĂ© ruiner le propriĂ©taire; et comme nous l’avons dit, p. 7&/i, 7Æ5, le Code civil, art. 5Ă 9, 550, 555, nous paraĂźt conçu dans le mĂȘme esprit. Lorsqu’il attribue tous les fruits au possesseur de bonne foi, il suppose Ă©videmment une chose qui appartient entiĂšrement Ă  celui qui la revendique, et que le possesseur lui remettra sans dĂ©duction de sa valeur, sans charge aucune ; mais du moment oĂč il y a des amĂ©liorations et augmentations, la compensation doit s’opĂ©rer entre les deux dettes, jusqu’à due concurrence aux termes des art. 1189 et suiv. du Code civil, et les deux dettes sont alors Ă©teintes. La compensation doit — 751 — donc avoir lieu, et si les amĂ©liorations excĂšdent les fruits perçus, ou si les fruits perçus excĂšdent les amĂ©liorations, le possesseur de bonne foi profite de l’excĂ©dant; c’est aussi ce qui rĂ©sulte de la jurisprudence. 134° lin arrĂȘt de la Cour de cassation, du 6 novembre 1838 Sirey-Villeneuve 1839-1-202, a rejetĂ© le pourvoi formĂ© contre un arrĂȘt de la Cour d’appel de Rouen, qui avait dĂ©boutĂ© un possesseur maintenu sur action possessoire d’une demande en payement d’amĂ©liorations plantations, par le motif qu’il avait perçu les fruits pendant vingt ans, qu’on ne l’avait pas condamnĂ© 4 restituer ces fruits dans lesquels il trouvait l’indemnitĂ© de ses plantations. C’est lĂ , comme on voit, la compensation admise par les lois romaines et par les auteurs. Un autre arrĂȘt, de la mĂȘme Cour, du 9 dĂ©cembre 1839 *, renferme une dĂ©cision fondĂ©e sur les mĂȘmes principes, et justifiant notre opinion. Le sieur Leconte avait Ă©pousĂ© la demoiselle Jolienne. AprĂšs avoir fait prononcer, en l’an vi, l'interdiction de sa femme, puis le divorce en l’an vu, le sieur Leconte contracta un second mariage ; prĂ©alablement auquel il rĂ©gla avec sa premiĂšre femme, relevĂ©e de son interdiction et mariĂ©e au sieur Robert, la liquidation de la communautĂ© qui avait existĂ© entre eux. Il est Ă  remarquer qu’on omit de comprendre dans cette liquidation, une maison sise Ă  Paris, rue du Rocher, et'qui faisait partie de la communautĂ©. Le 29 aoĂ»t 1810, le sieur Leconte vendit cette maison aux sieur et dame Dethan, moyennant 18,000 francs, et sans le concours de sa premiĂšre femme. En 1829, la dame Robert, ayant dĂ©couvert l’omission * Journal du palais , 1840-l-ttĂŻ. qui avait eu lieu Ă  son prĂ©judice, lors de la liquidation de sa communautĂ© avec le sieur Leconte, forma, contre les Ă©poux Dethan, une demande en revendication de la moitiĂ© qui lui appartenait dans la maison par eux acquise en 1810, avec restitution .de la moitiĂ© des loyers que l’immeuble avait produits pendant leur indue possession. Cette demande, sur laquelle les sieur et dame Dethan appelĂšrent en garantie la dame Courtin, hĂ©ritiĂšre du sieur Leconte alors dĂ©cĂ©dĂ©, donna lieu Ă  une instance, en suite de laquelle intervint un arrĂȘt de la Cour royale de Paris, le 19 juin 1830, qui accueillit les demandes de la dame Robert, et qui, attendu que les Ă©poux Dethan Ă©taient jugĂ©s avoir possĂ©dĂ© de mauvaise foi, les condamna Ă  restituer la moitiĂ© des loyers. De plus, comme les Ă©poux Dethan avaient fait des amĂ©liorations et constructions considĂ©rables pour la conservation desquelles optait la dame Robert, la Cour condamna celle-ci Ă  leur tenir compte de la moitiĂ© de la plus-value rĂ©sultant de ces amĂ©liorations et constructions. Un jugement du Tribunal de la Seine rĂ©gla Ă  176,081 fr. 51 c., la dĂ©pense faite par les sieurs et dame Dethan, en constructions et amĂ©liorations, dont la dame Robert devait leur rembourser la moitiĂ©, et Ă  114,920 fr. 17 c. la recette des loyers, dont les Ă©poux Dethan devaient restituer la moitiĂ© Ă  la dame Robert. Sur l’appel, les acquĂ©reurs demandĂšrent les intĂ©rĂȘts de la moitiĂ© de la valeur des constructions et amĂ©liorations, et soutinrent que ces intĂ©rĂȘts devaient entrer en compensation avec les fruits ou revenus produits par l’immeuble; arrĂȘt de la Cour d’appel de Paris, du 7 janvier 1837, qui le dĂ©cide ainsi. — 753 — Mais, le 9 dĂ©cembre 1839, il intervint arrĂȘt qui cassa en se fondant sur ce que les fruits produits par l’immeuble, dans son Ă©tat antĂ©rieur aux amĂ©liorations et constructions, comme cet immeuble lui-mĂȘme devaient rester intacts entre les mains de la dame Robert, sans aucune dĂ©duction du prix ou des intĂ©rĂȘts de ces amĂ©liorations et augmentations; que ces intĂ©rĂȘts ne pouvaient affecter que les fruits produits par les augmentations et amĂ©liorations, et venir en dĂ©duction de ces fruits. Qu’ainsi les intĂ©rĂȘts qui sont ceux de la somme dĂ©pensĂ©e pour les matĂ©riaux et la main-d’Ɠuvre ou de l'augmentation de valeur, suivant les cas, ne peuvent ĂȘtre pris que sur les revenus des augmentations et amĂ©liorations, et se trouveront rĂ©duits et diminuĂ©s si ces fruits ne peuvent y faire face en totalitĂ©. L’arrĂȘt dĂ©cide aussi que l’art. 2001 du Code civil Ă©tait inapplicable; que les juges ont pu allouer des intĂ©rĂȘts, mais limitĂ©s comme on l’a vu. Du reste, il a Ă©tĂ© reconnu que les fruits des amĂ©liorations et augmentations appartiennent, comme ceux de l’immeuble dans son Ă©tat primitif, au propriĂ©taire de celui-ci, parce qu’il est propriĂ©taire intĂ©gral. Enfin, nous avons vu, d’aprĂšs l’opinion de Loyseau, de Merlin, de Troplong, du Nouveau Denizart, et celle de Pothier, que mĂȘme le possesseur de bonne foi Ă©tait tenu de supporter la compensation, non-seulement des revenus des amĂ©liorations et augmentations, mais mĂȘme des revenus de l’immeuble dans son Ă©tat antĂ©rieur avec le prix et les intĂ©rĂȘts de ces travaux. A plus forte raison, un possesseur de mauvaise foi y est-il tenu. Il y a mĂȘme entre l’un et l’autre cette diffĂ©rence que comme le possesseur de bonne foi fait les fruits siens, il aurait droit aux fruits qui pourraient excĂ©der la 48 — 7K4 — valeur des travaux en capital et intĂ©rĂȘts, tandis que l’autre serait tenu de restituer cet excĂ©dant, et ne pourrait d’ailleurs prendre sur les fruits de l’immeuble dans son Ă©tat primitif, ni les impenses, ni les intĂ©rĂȘts de ces impenses, qui, contestĂ©s par plusieurs auteurs, ne sont pas dus d’une maniĂšre absolue, et que les juges ont seulement la facultĂ© d’allouer par un tempĂ©rament d’équitĂ©, suivant les circonstances, et en faisant le compte des fruits, des amĂ©liorations. S’ils allouent au demandeur au pĂ©titoire les fruits provenant de ces amĂ©liorations, il paraĂźt fort juste d’accorder au possesseur au moins l’intĂ©rĂȘt proportionnel et Ă©quivalent Ă  ces fruits, des sommes qu’il a dĂ©boursĂ©es. Évidemment le systĂšme qui tendrait Ă  allouer au possesseur de bonne foi l’intĂ©gralitĂ© des fruits, des impenses et intĂ©rĂȘts serait souverainement injuste ; supposons, par exemple, un immeuble valant 50,000 fr., le possesseur y fait pour 50,000 fr. de travaux. AprĂšs vingt ans, le vĂ©ritable propriĂ©taire revendique sa chose ; si le possesseur a Ă©tĂ© de bonne foi, il aura tous les fruits, plus, pour les amĂ©liorations 50,000 fr., et vingt ans d’intĂ©rĂȘt, total 100,000 fr. Le vĂ©ritable propriĂ©taire devra donc vendre son immeuble pour se libĂ©rer, et si les circonstances sont dĂ©favorables, il n’en tirera peut-ĂȘtre que 75,000 fr., et alors, aprĂšs s’ĂȘtre entiĂšrement dĂ©pouillĂ©, il redevra encore 25,000 fr. Si, au contraire, le possesseur est de mauvaise foi, il n’aura pas droit aux fruits qui peuvent, toutes dĂ©ductions faites, n’avoir Ă©tĂ© que de 3 p. 100, soit 60,000 fr., qui seront toujours insulĂŻisants pour en payer 100,000 ; et alors la valeur de l’immeuble, dans son Ă©tat primitif, sera absorbĂ©e presque entiĂšrement. Non, ce n’est pas lĂ  ce qu’a voulu le lĂ©gislateur; l’attribution des loyers d’une maison, par exemple, toutes dĂ©ductions faites des charges, est une libĂ©ralitĂ© faite aux dĂ©pens du vĂ©ritable propriĂ©taire, la loi n’a pas voulu charger celui-ci d’une libĂ©ralitĂ© avant qu’il ne fĂ»t libĂ©rĂ©; nemo liberalis nisi li- beratus. L’art. 1375 du Code civil, qui est applicable ici, dit que le maĂźtre, dont l’affaire a Ă©tĂ© bien gĂ©rĂ©e, doit rendre le neyotiorwn gestor indemne de ses engagements, de ses dĂ©penses; l’art. 549, qui n’est qu’une exception au droit commun, doit donc s’interprĂ©ter par l’art. 1375, comme on le faisait d’aprĂšs les lois romaines et l’ancien droit. On objectera peut-ĂȘtre qu’avec ces principes et cette solution, un possesseur de bonne foi ne sera pas mieux traitĂ© qu’un possesseur de mauvaise foi; mais, d’une part, l’équitĂ© s’oppose Ă  ce qu’on s’enrichisse mĂȘme aux dĂ©pens d’un possesseur de mauvaise foi; d’autre part, l’objection n’est pas complĂštement exacte, car dans l’estimation et l’allocation des impenses, les juges, apprĂ©ciant les intentions et le but de chacun d’eux, pourront ĂȘtre plus favorables au premier qu’au dernier. On peut facilement supposer que celui-ci a voulu grever le vrai propriĂ©taire pour le mettre dans une position gĂȘnĂ©e, embarrassante, et peut-ĂȘtre le forcer Ă  se dĂ©faire de sa propriĂ©tĂ©, et mĂȘme Ă  la lui abandonner Ă  un prix peu Ă©levĂ©. On ne peut pas faire une semblable supposition Ă  l’égard du possesseur de bonne foi. Au surplus, en expliquant ici ce que nous avons dĂ©jĂ  Ă©noncĂ©, n° 131, p. 734, le possesseur de bonne foi nous paraĂźt n’avoir pas droit aux intĂ©rĂȘts des sommes employĂ©es aux impenses, puisqu’il conserve les fruits, non- seulement de l’immeuble dans son Ă©tat primitif, mais encore des augmentations et amĂ©liorations ; que si, comme cela arrive assez souvent, l’accroissement de revenu est infĂ©rieur Ă  l’intĂ©rĂȘt du capital employĂ© Ă  les payer, par exemple d’un produit de 3 p. 100, il ne pourra exiger un supplĂ©ment d’intĂ©rĂȘt de 2 p. 100, par argument tirĂ© des lois romaines et de l’art. 555 du Code civ., qui ne lui donnent droit qu’à la plus-value; qu’il aura droit aux intĂ©rĂȘts Ă  partir de l’action pĂ©titoire, parce que les fruits cessent alors de lui appartenir ; mais que le vrai propriĂ©taire aura le choix ou de lui payer l’intĂ©rĂȘt au taux lĂ©gal ou de le rĂ©duire Ă  celui reprĂ©sentĂ© par l’augmentation de produit des amĂ©liorations, et sans que le possesseur ait la rĂ©ciprocitĂ© de ce choix. Quant au possesseur de mauvaise foi, il a droit aux intĂ©rĂȘts de ses dĂ©penses puisqu’il restitue les fruits; mais ces intĂ©rĂȘts ne peuvent jamais, suivant nous, excĂ©der la valeur des fruits qu’elles produisent; le vrai propriĂ©taire aura le choix comme dans l’hypothĂšse prĂ©cĂ©dente entre le taux lĂ©gal, si le produit dĂ©passait ce taux, et ce produit lui-mĂȘme et sauf ce qui est dit p. 753, 75Zi. La mĂȘme observation s’appliquerait aux fruits perçus depuis l’action. D’ailleurs, ni le possesseur de mauvaise foi, ni le possesseur de bonne foi n’auraient droit au remboursement des impenses d’augmentations ou d’amĂ©liorations, constructions, plantations et ouvrages, si ces travaux avaient pĂ©ri avant l’action pĂ©titoire ou avant la restitution. La perte de ces additions, lors mĂȘme que la chose principale subsisterait, retomberait sur eux. La dĂ©cision textuelle, comme l'esprit de nos lois françaises n’obligent le vĂ©ritable propriĂ©taire Ă  tenir compte des impenses qu’autant qu’il en profite, et qu’on lui livre la chose qui — 737 — est rĂ©sultĂ©e de ces impenses. La dĂ©cision de la loi 38, ff. de lier. p. ne serait donc pas admise parmi nous. 13/i o4l ' s La plus-value dont le propriĂ©taire est obligĂ© de tenir compte au possesseur qu’il Ă©vince, se calcule sur la valeur des choses, non pas au moment oĂč les travaux ont eu lieu, non pas mĂȘme au moment oĂč l’action pĂ©ti— toire a Ă©tĂ© intentĂ©e, mais au jour oĂč le dĂ©laissement de l’immeuble est rĂ©ellement opĂ©rĂ©; car il ne doit compte que de ce dont il profite. Il lui est seulement interdit de s’enrichir aux dĂ©pens d’autrui; or, l’importance delĂ  plus-value peut varier, et il est sensible que le propriĂ©taire n’est mis Ă  mĂȘme d’en profiter que lorsqu’il rentre en possession de son immeuble. C’était le sentiment de Pothier, qui, dans son TraitĂ© de la Revendication, n° 346, enseignait que le possesseur ne devait ĂȘtre remboursĂ© de ses impenses que jusqu’à concurrence de ce que la chose se trouvait en ĂȘtre augmentĂ©e de valeur au temps du dĂ©lai piil en devait faire; de l'Annotateur de Bourjon, t. II, p. ol/i, qui dit que ce remboursement n’est dĂ» au possesseur de mauvaise foi que suivant la valeur rĂ©elle des impenses lors de la rĂ©intĂ©grande, et conformĂ©ment Ă  la disposition de droit, quatenus dominus factus est locupletior tempore recnperat-ionis suƓ, ce qui est, ajoute-t-il, conforme Ă  l’usage, et au droit commun du royaume; » des auteurs du Nouveau Denizart, V° AmĂ©liorations, § 4, n° 3, suivant lesquels le propriĂ©taire, rentrant dans son hĂ©ritage, ne profite qu’autant que sa chose se trouve ĂȘtre d’un revenu et d’un prix plus considĂ©rable par les dĂ©penses que le possesseur y a faites ; qu’en consĂ©quence, il ne doit ĂȘtre obligĂ© au remboursement que jusqu’à cette concurrence, quand mĂȘme le possesseur aurait dĂ©boursĂ© davantage. » — 758 — C’est aussi la dĂ©cision d’un arrĂȘt de cassation de la chambre civile, du 13 fĂ©vrier 1844, intervenu sur le pourvoi du sieur de Brivazac *, qui, bien que rendu sur une action en rescision d’une vente consentie pendant le cours du papier-monnaie, par application de la loi spĂ©ciale du 19 florĂ©al an vi, n’en est pas moins motivĂ© d’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, et consacre un principe applicable Ă  toutes les affaires analogues ; on y lit en effet que la plus-value ne peut Ă©videmment consister que dans l’augmentation de valeur dont le vendeur profite, et doit consister dans cette augmentation; que peu importe au vendeur que le dĂ©tenteur de la propriĂ©tĂ© dans laquelle il est rĂ©intĂ©grĂ© ait, Ă  une Ă©poque antĂ©rieure, confĂ©rĂ© une plus-value Ă  cette propriĂ©tĂ©, si cette plus- value n’existe plus, lors de la rentrĂ©e du vendeur en possession ; que lui imposer l’obligation de rembourser une plus-value, qui n’existe plus, ce serait lui imposer une perte Ă  laquelle aucune loi ne l’assujettit. » On lit encore dans cet arrĂȘt que le vendeur ne peut s’enrichir aux dĂ©pens d’autrui, et profiter au prĂ©judice de l’acquĂ©reĂŒr de la plus-value confĂ©rĂ©e par celui-ci Ă  l’immeuble, depuis la demande en rescision, jusqu’au dĂ©laissement effectif ; que l’art. 6 de la loi du 19 florĂ©al an vi, consacre en faveur de l’acquĂ©reur un vĂ©ritable droit de rĂ©tention jusqu’à ce qu’il soit pleinement dĂ©sintĂ©ressĂ©. » Les dĂ©cisions contenues dans ces deux derniers motifs sont conformes aux principes par nous dĂ©veloppĂ©s, p. 686, 739. Le possesseur de mauvaise foi ayant droit comme celui qui est de bonne foi, au remboursement des * Devil. et Car. 1844-1-217. impenses, sauf le mode plus ou moins avantageux de dĂ©dommagement, l’indemnitĂ© doit comprendre Ă©videmment les impenses postĂ©rieures Ă  l’action. Le droit de rĂ©tention, consacrĂ© par l’ordonnance de 1667, plus anciennement par l’art. 97 de l’ordonnance de 1539, par l’art. 52 de l’ordonnance de Moulins de 1566, et qui avait comme nous l’avons vu p. 721, son origine dans les lois romaines, n’a pas Ă©tĂ© reproduit par notre nouvelle lĂ©gislation. Les art. 549, 55A, 555 y sont plus contraires que favorables. Si la Cour de cassation, par son arrĂȘt prĂ©cité» en a reconnu l’existence, c’est dans une matiĂšre spĂ©ciale, et en vertu de la disposition exceptionnelle et expresse, contenue dans l’art. 6 de la loi du 19 florĂ©al an vi. Nous persistons donc Ă  penser qu’en rĂšgle gĂ©nĂ©rale le droit de rĂ©tention n’existe plus dans notre lĂ©gislation, et ne peut avoir lieu que par exception, dans les seuls cas oĂč nos lois l’ont expressĂ©ment accordĂ©. Un tel droit est incompatible avec celui de propriĂ©tĂ©, qui consiste Ă  pouvoir jouir et disposer de la chose de la maniĂšre la plus absolue, Ă  moins que des lois ou rĂšglements n’y apportent quelque modification ; modification qui doit ĂȘtre expresse. Art. 5M, Code NapolĂ©on. Autrefois un pareil droit Ă©tait Ă©tabli en termes gĂ©nĂ©raux, et malgrĂ© cela Pothier, Loyseau avouaient qu’il ne pouvait ĂȘtre admis en faveur de l’acquĂ©reur qui, aprĂšs avoir fait des amĂ©liorations, Ă©tait forcĂ© de dĂ©laisser l’immeuble par suite de l’action hypothĂ©caire. On est bien forcĂ© de reconnaĂźtre qu’il en serait de mĂȘme aujourd’hui; V. Grenier, des HypothĂšques, t. II, n° 336; Dalloz, RĂ©pert. Y 0 HypothĂšque, chap. 2, sect. 6, art. 3, n° 2; Troplong, des HypothĂšques, t. III, n° 836. Le possesseur n’a qu’un simple droit de crĂ©ance qui ne peut devenir privilĂ©giĂ©e que — 760 — dans le cas et avec les formalitĂ©s de l’art. 2103 du Code. On a encore reconnu, et la Cour de cassation a jugĂ©, le 12 mai 18/0, que l’acquĂ©reur d’un bien dotal ne pourrait pas non plus retenir cet immeuble ; il en faudrait dire autant pour des biens de mineurs, pour ceux appartenant Ă  l’Etat, Ă  des dĂ©partements et communes indĂ»ment possĂ©dĂ©s par des tiers qui y auraient fait des impenses. Ce sont lĂ  les raisons qui ont empĂȘchĂ© nos lĂ©gislateurs modernes de reproduire les dispositions de l’ancien droit. Nous ajouterons en terminant que les tribunaux n’ont pas la facultĂ© discrĂ©tionnaire d’autoriser ou de refuser la rĂ©tention de l’immeuble; qu’ils ne peuvent l’admettre que dans les cas prĂ©vus par nos lois ; que la Cour de cassation, loin d’annuler les arrĂȘts qui refuseraient la rĂ©tention dans tous les autres cas, rejetterait les pourvois et casserait au contraire si la rĂ©tention avait Ă©tĂ© accordĂ©e. Maintenant, de quelle maniĂšre faut-il dĂ©terminer le chiffre de l’augmentation, ou, comme dit l’art. 555, la somme Ă©gale Ă  celle dont le fonds a augmentĂ© de valeur? apprĂ©ciera-t-on la valeur vĂ©nale pour le cas oĂč le propriĂ©taire voudrait vendre la chose, ou bien la valeur intrinsĂšque et utile ajoutĂ©e Ă  la propriĂ©tĂ©? Il est des cas oĂč le propriĂ©taire ne veut pas vendre, oĂč la chose n’est pas susceptible d’ĂȘtre vendue et ne produit pas de revenus. Les auteurs du Nouveau Denizart, loco cilato, disent que l’on nomme amĂ©liorations les dĂ©penses qui augmentent pour ainsi dire Ă  perpĂ©tuitĂ© la valeur et le prix du fonds sur lequel elles sont faites; qu’en gĂ©nĂ©ral l’estimation des amĂ©liorations est laissĂ©e Ă  la prudence du juge qui doit la dĂ©terminer suivant les circonstances. — 761 BornĂąt, Bourjon, Pothier enseignent une doctrine Ă©quivalente; et la Cour de cassation a jugĂ©, le 2G juillet 1838, affaire Forbin Janson, dans laquelle il s’agissait de constructions faites au mont ValĂ©rien, maison religieuse destinĂ©e de tout temps Ă . un service public, et non susceptible d’ĂȘtre mise dans le commerce, que la plus-value Ă  rembourser au tiers de bonne foi qui avait fait ces constructions devait consister dans la valeur intrinsĂšque et utile, ajoutĂ©e Ă  la propriĂ©tĂ©, et non pas seulement dans la valeur vĂ©nale. L’apprĂ©ciation de l’augmentation de valeur dĂ©pend donc des circonstances et est abandonnĂ©e Ă  la conscience des magistrats. Mais lorsque le vĂ©ritable propriĂ©taire opte pour le payement de la valeur des matĂ©riaux et du prix de la main-d’Ɠuvre, ou qu’il est forcĂ© par la loi de payer cette valeur, doit-elle ĂȘtre calculĂ©e Ă  l’époque du dĂ©laissement de l’immeuble ou bien Ă  celle des travaux? La question n’est pas sans importance, puisque cette valeur peut ĂȘtre fort diffĂ©rente Ă  l’une ou Ă  l’autre Ă©poque. Nous pensons que d’aprĂšs le principe, que nul ne doit s’enrichir aux dĂ©pens d’autrui, et que tout ce Ă  quoi peut prĂ©tendre le possesseur, c’est de ne pas perdre, on doit tenir compte Ă  ce possesseur de ce qu’il a rĂ©ellement dĂ©pensĂ©; rien dĂ©plus, rien de moins; que si cette solution peut prĂ©senter quelques inconvĂ©nients pour le vĂ©ritable propriĂ©taire, ces inconvĂ©nients se trouveront en grande partie attĂ©nuĂ©s par le droit accordĂ© Ă  ce propriĂ©taire lorsque le possesseur est de bonne foi, d’opter entre la plus-value et le prix de la main-d’Ɠuvre et des matĂ©riaux, et la facultĂ© accordĂ©e lorsque le possesseur est de mauvaise foi, de contraindre celui-ci Ă  enlever ses travaux, avec obligation de remettre les lieux dans leur — 7G2 — ancien Ă©tat, et mĂȘme de supporter des dommages-intĂ©rĂȘts. 13 h attr II est Ă©vident que les dispositions de l’art. 555 ne sont pas applicables aux cas oĂč les constructions, plantations, etc., ont eu lieu, soit par un mandataire, soit par un negotiorum gestor; dans l’un et l’autre cas, ils ont Ă©tĂ© exĂ©cutĂ©s pour le compte du vĂ©ritable propriĂ©taire ; on peut dire qu’il est censĂ© les avoir faits lui-mĂȘme, ou du moins qu’il les a fait faire; et il y a lieu alors d’appliquer les art. 1375 sur la gestion d’affaires, les articles 1908, 1999, 2000, 2001 et 2002 sur le mandat. Nous pensons que l’art. 555, surtout en ce qui concerne le droit d’obliger le possesseur de mauvĂąUe foi Ă  l’enlĂšvement des travaux, avec rĂ©tablissement des lieux dans leur ancien Ă©tat et dommages-intĂ©rĂȘts, est Ă©galement inapplicable, ou du moins n’est susceptible d’application qu’avec de certaines modifications, lorsqu’il s’agit de travaux ou plantations faits par un copropriĂ©taire par indivis, un communiste, un cohĂ©ritier, un tiers dĂ©tenteur, poursuivi en dĂ©laissement par des crĂ©anciers hypothĂ©caires, par un associĂ©. Il existe Ă  l’égard de toutes ces personnes des rĂšgles spĂ©ciales Ă©tablies par nos lois, dont il serait trop long de reproduire ici les dispositions, et qu’il faut combiner avec les principes posĂ©s par le lĂ©gislateur dans l’art. 555 , lequel a surtout en vue un tiers qui possĂšde et agit comme propriĂ©taire, sans avoir cependant aucun droit Ă  l’imineuble, objet des impenses. Cour de cassation, 13 dĂ©cembre 1830, 14 janvier 1835, 17 juillet 1848, 29 mars et 14 avril 1852. Mais cet art. 555 serait applicable au fermier, au locataire, sauf ce que nous avons dit, p. 777, au sĂ©questre, Ă  l’antichrĂ©siste, Ă  l’emphytĂ©ote, Ă  moins qu'il n’existĂąt — 763 — des conventions particuliĂšres qui dĂ©rogeassent aux prescriptions lĂ©gales. Les stipulations feraient alors la loi des parties. Cour de cassation, 1 er juillet 1851. Il importe mĂŽme de remarquer que les dispositions de cet article supposent des travaux qui peuvent ĂȘtre enlevĂ©s, et que pour ceux qui ne pourraient pas l’ĂȘtre, mais qui auraient apportĂ© Ă  la chose une grande amĂ©lioration, les juges pourraient adoucir la rigueur du principe par un tempĂ©rament d’équitĂ©. NĂ©anmoins, le possesseur d’une succession, qui aurait fait des constructions et autres impenses sur un immeuble qu’il aurait payĂ© avec des deniers de la succession, mais qu’il aurait achetĂ© en son nom au lieu de dĂ©clarer que l’acquisition Ă©tait pour le compte de l’hĂ©rĂ©ditĂ©, ou qu’il aurait acquis Ă©galement en son nom par Ă©change contre un immeuble de cette hĂ©rĂ©ditĂ©, ne pourrait se dĂ©sister de sa qualitĂ© de propriĂ©taire contre la volontĂ© des hĂ©ritiers et faire considĂ©rer l’immeuble comme Ă©tant la propriĂ©tĂ© de ceux-ci, prĂ©tendre enfin Ă  la rĂ©tention des fruits, au remboursement des impenses; dĂšs que le contrat serait passĂ© en son nom, lui seul serait bien rĂ©ellement propriĂ©taire de l’immeuble qui en aurait Ă©tĂ© l’objet ; les hĂ©ritiers pourraient seulement, comme nous l’avons dit, p. 58/i, pour un cas analogue, exiger le remboursement en capital et accessoires des sommes puisĂ©es dans la caisse hĂ©rĂ©ditaire, ou revendiquer l’immeuble donnĂ© en contre-Ă©change; la loi 25, ff. de Her. pet., dĂ©cidait la question dans notre sens, pour le cas d’acquisition avec des deniers de la succession. Nous donnerions une solution identique, dans le cas oĂč l’acquĂ©reur serait non un simple possesseur partiel de l’hĂ©rĂ©ditĂ©, mais bien rĂ©ellement un cohĂ©ritier, un so- — T 267. — Actions civiles et correctionnelles auxquelles elles donnent lieu, 267, 268. — Distance Ă  laquelle elles doivent ĂȘtre plantĂ©es du fonds voisin, 270 Ă  281. — Quand le fonds intermĂ©diaire est un chemin public, un ruisseau, un acqueduc, ibid. — Ou qu’il y a prescription, ibid. et 633. — Voy. Chemins. halace. — Voy. Chemins. ET marchĂ©s. — Voy. Communes. hĂ©rĂ©ditĂ©. — PĂ©tition d’hĂ©rĂ©ditĂ©. —Ce que c’est, 541, 518, 553, 616, 617, 677, 678. hĂ©ritiers. — LĂ©gitime, bĂ©nĂ©ficiaire, apparent, peuvent intenter les actions pĂ©tiloires ou possessoires et y dĂ©fendre, 424, 425, 660, 664. — Voy. HĂ©rĂ©ditĂ©. hospices. — Actions pĂ©tiloires et possessoires qui les intĂ©ressent, 452, 659. — Voy. Communes. — 789 — I ILES. — Voy. Alluvion, Eaux. impenses. — Ce que c’est, 720. — En droit romain. Le dĂ©fendeur Ă©vincĂ© pouvait retenir l'immeuble jusqu’à remboursement des impenses; il en Ă©tait de mĂȘme en France sous l’ordonnance de 1667, 686, 687, 721 ; — mais il en est autrement en gĂ©nĂ©ral aujourd’hui, ibid. et 759. — Exceptions, ibid. — Dispositions du droit romain sur les impenses, 721 Ă  729. — Distinction entre le possesseur de bonne foi et le possesseur de mauvaise foi, et entre les impenses nĂ©cessaires utiles ou voluptuaires, 731, 755.— Dispositions du droit français sur les impenses, 729, 732. — Le Gode NapolĂ©on distingue aussi entre le possesseur de bonne foi et le possesseur de mauvaise foi, 729. — Mais il ne distingue pas en gĂ©nĂ©ral entre les diverses impenses, nĂ©cessaires, utiles ou voluptuaires; celles-ci peuvent ĂȘtre utiles, 750, 755 Ă  738, 779. — Distingue entre les impenses qui sont charges des fruits et les autres, 750, 751. — Possesseur do bonne foi n’a pas droit aux premiĂšres, puisqu'il conserve les fruits, 731.— A droit au remboursement des capitaux par lui payĂ©s et. des intĂ©rĂȘts, ibid. — Tous travaux exĂ©cutĂ©s sur ou sous un fonds sont censĂ©s faits par le propriĂ©taire Ă  ses frais, et lui appartenir jusqu’à preuve contraire, 755, 769. — Les impenses se compensent avec les fruits acquis au possesseur de bonne foi, 758 Ă  741, 747 Ă  757. — Les bĂ©nĂ©fices obtenus par le talent et l’intelligence ne sont pas des fruits rapporta- bles et compensables, 740, 741. — Les tribunaux peuvent suivant les circonstances accorder dĂ©lai pour le payement des impenses, mais non les convertir en rente, 764. immeubles. — Ceux qui le sont par leur nature, leur destination et l’objet auquel ils s’appliquent donnent lieu Ă  l’action possessoire, 227 et suiv., 258 et suiv. — 11 en est de mĂȘme de ceux qui ont Ă©tĂ© ameublis par stipulation, 248 et suiv. — Voy. Actions pĂ©liloires. imputation par ÉCHELETTE. — Voy. Fruits, Impenses, IntĂ©rĂȘts. inondation. — Voy. Possession. interdits inlerdicla. — Ce que c’était en droit romain, et leurs ditĂŻĂ©rentes espĂšces, 5 Ă  9. — Voy. Actions possessoires. interdits. — AssimilĂ©s aux mineurs, 425, 426. interruption. — Voy. Possession. INTERVENTION, 469, 470. interversion de titres. — Ce que c’est, et dans quel cas a lieu, 153 Ă  141. intĂ©rĂȘts. — Ne sont dus par le possesseur de bonne foi que pour les fruits Ă©chus depuis l’action, 712 — mais le possesseur de mauvaise foi en doit pour les fruits antĂ©rieurs en gĂ©nĂ©ral Ă  compter de l’action, et quelquefois Ă  partir d’une Ă©poque plus ancienne, 712. — Des fruits, des choses sujettes Ă  rapport ou excĂ©dant la portion — 790 — disponible 713. — IntĂ©rĂȘts courent avant la liquidation des fruits, 715 A 716. — Il n’est pas dĂ» d'intĂ©rĂȘts des intĂ©rĂȘts de fruits, 716 h 718. — IntĂ©rĂȘts d’un trĂ©sor. Voy. ce mol .— IntĂ©rĂȘts des impenses. Dans quels cas en est-il dĂ», 753 Ă  769. — Des dĂ©gradations ou destructions, 769 Ă  776. — Comment se calculent et se compensent avec les impenses ou les dĂ©gradations, 775 Ă  775. inviolabilitĂ© de la propriĂ©tĂ©.— Celte inviolabilitĂ© existe Ă  l’égard de toutes les propriĂ©tĂ©s grandes ou petites, de toutes les personnes et de toutes les autoritĂ©s, 767, 768. — Paroles de NapolĂ©on, Bossuet, FĂ©nelon, 768, 769. — TraitĂ© de M. Troplong. J juge de paix. — Celui de la situation de l’objet litigieux ou autre choisi par les parties, est seul compĂ©tent pour prononcer sur les actions possessoires, 419 Ă  423. — Ne connaĂźt jamais des actions pĂ©liloires quelque minime qu’en soit la valeur, 632. jugement au possessoire, 471 A 474. — Quand est en dernier ressort, 475, 6 !2, Ă  654 — Quels sont ses effets, 483 Ă  495. — Doit ĂȘtre entiĂšrement exĂ©cutĂ© par le dĂ©fendeur qui a succombĂ© avant qu’il se pourvoie au pĂ©titoire, 488, 489, 6U0 Ă  607. —Au pĂ©tiloire, 684.— Comment s’exĂ©cute, 684 A 687.— Ses effets, ibid. L labours. — Voy. Impenses. lĂ©gitimitĂ© État de. — Ne donne lieu Ă  l’action possessoire, 408. liquidation de fruits, impenses, amĂ©liorations, dĂ©gradations.— Voyez ces mois. liste civile. — Voy. Commerce, Possession. M main-d’Oeuvre. — Voy. Impenses, MatĂ©riaux. majorĂąt. — Voy. Commerce, Possession. marais. — DessĂšchement, 350 Ă  353, ibid. — RĂšgles de compĂ©tence. Cas d’action possessoire, ibid. mari. — Fxerce les actions pĂ©titoires et possessoires des biens de la communautĂ© et de sa femme, 427, 428, 658. matĂ©riaux. — A quelle Ă©poque faut-il se reporter pour estimer la valeur des matĂ©riaux et de la main-d’Ɠuvre? 761.—Est-ce 5 l’époque delĂ  confection des travaux ou Ă  celle de l’action pĂ©titoire? ibid .— Les matĂ©riaux employĂ©s par le propriĂ©taire de I immeuble et par un tiers, et incorporĂ©s rĂ©ellement Ă  cet immeuble, ne peuvent ĂȘtre — 791 revendiquĂ©s par celui Ă  qui ils appartenaient quel que soit le pro- 1 iiĂ©taire des matĂ©riaux ou du fonds, mĂȘme en cas de convention contraire ou de vente de bĂątiment pour ĂȘtre dĂ©moli, 765, 766.— Exception pour le cas de dĂ©molition volontaire ou accidentelle, 767. meubles. — L’action possessoire n’est pas admise pour meubles isolĂ©s ou universalitĂ© de meubles, 233 Ă  238, — ni pour les actions Ăźle la banque, des canaux, ou les renies sur l’État immobilisĂ©es, 232,233. — lien est de mĂȘme relativement aux actions pĂ©ti- toires, 541, 550, 551, 565, 567, 585, 586, 656, — mĂȘme quant aux meubles devenus immeubles par destination, Ă  moins qu'ils ne soient demandĂ©s avec l’immeuble rĂ©el, 656 ; — mais il en serait dilĂŻĂ©remment pour les meubles devenus immeubles par incorporation, modification, ibid. — Les principes sur la possession et la bonne foi en matiĂšre de droit sur des meubles diffĂ©rent de ceux relatifs aux immeubles, 770 en note. >t eu us. — Actions possessoires qui les intĂ©ressent. Par qui soutenues en demandant et en dĂ©fendant, 425, 426, 427. mines. — Leur dĂ©finition, 353. — Droits et actions qui en rĂ©sultent, 353 Ă  356. — Action possessoire, 356, 764. moĂ»t civile. — Ceux qui en sont frappĂ©s ne peuvent intenter l’action possessoire, 428. — Exception, ibid. — Mort civile ne commence que du jour de l’exĂ©cution de la condamnation, 428, 429. murs. — Quand mitoyens, 281, 282. — Quand il y a prescription contraire, 284, 285. — Aucune restriction pour l’élĂ©vation ni la distance, 282, 283. — Dans quels cas, il peut y avoir lieu Ă  l’action possessoire, 286, 287, 534.— Effets du jugement de maintenue en possession annale, 287, 633. N nĂšgres. — Voy. Esclaves. .nouvel OEUVRE. — Voy. DĂ©nonciation de nouvel Ɠuvre. O offices. — Ne donnent plus lieu Ă  l’action possessoire, 407. ouvrages. — Voy. Impenses. P pacage. — Sa nature, ses diffĂ©rentes espĂšces. Actions auxquelles il donne lieu, 527, 528, 535. passage. — A titre de propriĂ©tĂ©, 684, en note. — Comme servitude. — Voy. Servitudes. patouillet. — Voy. Eaux. — 792 — pĂ©age. — Ne donne lieu Ă  la complainte, 412. pĂȘche. — Le droit de pĂȘche ne peu! ĂȘtre acquis par prescription, ni donner lieu Ă  la complainte, lors mĂȘme qu’il est fondĂ© sur un titre, 414. 415. — Mai? le propriĂ©taire du fonds, troublĂ© par un fait de pĂȘche, peut l’intenter, ibid. pente des cours d'eau. — A qui elle appartient, 325, 326.— Voy. Eaux. pĂ©titoire. — Ne peut ĂȘtre cumulĂ© avec le possessoire, 575, 576. — Voy. Actions pĂ©tiloircs, Actions possessoires. plus-value. — En quoi elle consiste, et comment elle se calcule suivant les diverses espĂšces d’immeubles, 757 Ă  761. — Doit ĂȘtre fixĂ©e d’aprĂšs la valeur Ă  l’époque du dĂ©laissement, ibid. possession. — Ce que c’est, 2. — DiffĂšre de la propriĂ©tĂ©, ibid .— Ne suffit pas au demandeur, au pĂ©titoire, Ă  moins qu’elle ne constitue prescription, 623 Ă  627. — Comment s’acquiert et se conserve, 144 Ă  147. — Nature et durĂ©e de celle requise pour la rĂ©in- tĂ©grande, 44 et suiv. — Pour les autres actions possessoires, 78 Ă  110.— PrĂ©caire, non prĂ©caire. Ce que c’est, 113 Ă  126. — De bonne et mauvaise foi. Ce que c’est, et quand la bonne foi est nĂ©cessaire, 126 Ă  14t. — Cas dans lesquels la bonne et mauvaise foi nuisent ou profitent aux successeurs, 133 Ă  141. — Continue, non interrompue, non suspendue, 141 Ă  157. — Comment on entend la possession annale de choses dont on n’use que par intervalles. 146 Ă  156. — Paisible et non paisible ou troublĂ©e. — Ce que c’est, 157 Ă  184. — Publique. Ce que c’est, 184 Ă  191. — Doit ĂȘtre telle pendant l’annĂ©e antĂ©rieure au trouble, 189 Ă  191. — Non Ă©quivoque et Ă  titre de propriĂ©taire, 191, 192, 193. — De tolĂ©rance et de simple facultĂ©. Ce que c’est, 193 Ă  198. — Violente. Ce que c’est, 198. — Quand la violence cesse, 198 Ă  208. — A qui nuit- elle, 205. possession de choses qui sont dans le commerce et prescriptibles, 208 et suiv., 576. possession nĂ©cessaire pour acquĂ©rir des droits sur les eaux, 309. — QualitĂ©s et conditions de la possession sont absolues et non relatives, 90, 206, 270. — Exception, 185, 207, 208. possession relative aux servitudes, 565, 566. possessoire. — Ne doit pas ĂȘtre cumulĂ© avec le pĂ©titoire, 450, 451, 452. — Voy. Cumul. prĂ©caire. — Voy. Possession. prescription. — Est un moyen d’acquĂ©rir la propriĂ©tĂ© des immeubles mĂȘme des souterrains et des superficies, 587, 589, 594, 595, 616, 617, 618, 666, 769. Il y en a de deux sortes l’nne de dix ans entre prĂ©sents, vingt ans entre absents avec litre et bonne foi, 594, 595. — L’autre de trente ans sans litre ni bonne foi, 594. — Quelquefois la premiĂšre est acquise et le vĂ©ritable propriĂ©taire est sans action conire le possesseur ; mais la derniĂšre ne l’est pas et il a action contre l’auteur de celui-ci, 709. — Effets de cette action, — 793 — 710.— Les choses du domaine de l’Etat sont imprescriptibles tant qu’elles demeurent affectĂ©es au service public, 377, 593. — Mais elles peuvent devenir prescriptibles, 633. — Prescription de cinq ans, inapplicable Ă  la restitution des fruits, 708, 709. — Au payement des indemnitĂ©s pour prĂ©judice causĂ© par les dĂ©gradations, 773. prĂ©somptions. — Voy. Preuve. preuve. — Le demandeur au pĂ©liloire ne peut rĂ©ussir qu’en prouvant sa propriĂ©tĂ© Ă  la chose ou au droit foncier immobilier qui fait l’objet de son action, 383, 607 Ă  fil 1. — Divers modes de preuve, et dispositions du Code civil Ă  ce sujet, 611 Ă  617. — DĂ©veloppements, 616, 617. — Preuve littĂ©rale ou par titres est la principale, 616. — Comprend la preuve de la propriĂ©tĂ© non-seulement dans la personne du demandeur, mais mĂŽme dans celle de ses vendeurs, tant que la prescription n’est pas acquise, 618, 619. — En gĂ©nĂ©ral, la propriĂ©tĂ© doit ĂȘtre prouvĂ©e par litre, il l’exclusion de la preuve testimoniale et de celle par prĂ©somptions, 617 il 617. — Exceptions, admission de la preuve testimoniale et des prĂ©somptions, dans quels cas, ibid. — Ces divers modes de preuve admissibles pour Ă©tablir l'acquisition des souterrains et superficies, et par qui et aux frais do qui des travaux ont Ă©tĂ© faits, 769. procĂ©dure. — Sur les actions pĂ©litoires, 630. — PrĂ©liminaires de conciliation, juge de paix compĂ©tent, ibid. — DĂ©pĂŽt de mĂ©moire dans les affaires de l’Etal, des dĂ©partements, des communes, dans quels cas, 630 Ă  332 ; — FormalitĂ©s le l'ajournement, 661. — Tribunal devant lequel l'ajournement doit ĂȘtre donnĂ©, 632 Ă  637. — Par qui et contre qui les actions doivent-elles ĂȘtre dirigĂ©es, 637 il 661. — Moyens du dĂ©fendeur, aveu ou dĂ©nĂ©gation, cessation ou acquisition de possession, 663 Ă  663. — Sur les actions posses- soircs. — FormalitĂ©s antĂ©rieures Ă  la comparution devant le juge de paix, 319 et suiv. — FormalitĂ©s dans le cours de l’instance devant ce juge, 339 Ă  370. propriĂ©tĂ©. — En quoi diffĂšre de la possession, 2, 333, 380. — Son origine et son importance, 333, 380 Ă  583. Ses caractĂšres, ses avantages et ses effets, ibid et 687. — N’a de valeur que par la possession et par les fruits qu’elle produit, 687. — Dispositions du Code NapolĂ©on et du Code proc. sur les diffĂ©rents modes d’acquisition de la propriĂ©tĂ© et ses consĂ©quences, 587 Ă  593. — PropriĂ©tĂ© en AlgĂ©rie et dans les colonies, 593 Ă  598. — On n’est pas propriĂ©taire d’une chose, et l’on n’a pas droit de la revendiquer, par cela seul qu’elle a Ă©tĂ© achetĂ©e de nos deniers, ou des deniers d’une succession par un mandataire, dĂ©positaire ou cohĂ©ritier, si l’acquisition n’est pas faite en notre nom ou au nom de la succession, 583, 583,762. — PropriĂ©tĂ© imparfaite, rĂ©soluble, temporaire, peut autoriser l’action pĂ©liloire, 583. — Cette action peut avoir lieu pour la partie de la chose qui n'a pas pĂ©ri, ibid .—La preuve de la propriĂ©tĂ© est Ă  la charge du demandeur au pĂ©liloire, 607 a 611,618, 623, 668. — DiffĂ©rents modes de preuve de la propriĂ©tĂ©, 611.— Disposition du Code NapolĂ©on Ă  ce sujet, 611 Ă  616. — PropriĂ©tĂ© doit exister non-seulement au moment de l’action, mais encore au moment de la dĂ©cision, 665. — Si le demandeur, n’étant pas propriĂ©taire lors de l’action, l’était devenu lors 1Ăšre erreur : Ne pas justifier sa dĂ©marche. Une augmentation salariale vise Ă  rĂ©compenser votre performance au sein de l'entreprise. Inutile donc de pousser la porte du bureau de votre manager sans avoir prĂ©parĂ© vos arguments. RĂ©flĂ©chissez Ă  ce que votre contribution apporte Ă  l'entreprise.
Calculer son ovulation l'observation du calendrier du cycle menstruelSi vos cycles menstruels sont rĂ©guliers, rien de plus simple pour calculer votre prochaine ovulation la seule phase fixe du cycle est en effet la phase post-ovulatoire ou lutĂ©ale qui dure invariablement 14 jours. Il vous suffit donc de soustraire 14 jours Ă  la date estimĂ©e de vos prochaines rĂšgles. Exemple si elles doivent survenir le 30 du mois, il suffit de faire 30-14=16, vous ovulerez donc le 16 du mois en cours. Cette mĂ©thode de calcul s’applique aussi bien aux cycles longs de 34 jours 34-14=ovulation au 20e jour du cycle, qu’aux cycles courts de 22 jours 22-14=ovulation au 8e jour. Mais toutes les femmes n’ont pas la chance d’avoir des cycles prĂ©visibles. Heureusement, il existe d’autres astuces et outils pour repĂ©rer la pĂ©riode idĂ©ale pour la l’ovulation survient gĂ©nĂ©ralement au 14e jour d’un cycle de 28 jours, cela ne signifie pas qu’elle a systĂ©matiquement lieu Ă  la moitiĂ© du cycle c’est-Ă -dire au 15e jour d’un cycle de 30 jours ou au 16e jour d’un cycle de 32 jours par exemple. La libĂ©ration de l'ovule survient environ 14 jours avant les prochaines rĂšgles donc au 16e jour d’un cycle de 30 jours puisque 30-14=16.VoilĂ  pourquoi on ne peut connaĂźtre la pĂ©riode oĂč on ovule que de façon rĂ©trospective en prenant un calendrier par exemple, au moment des rĂšgles suivantes. C'est aussi pourquoi il est si compliquĂ© pour les femmes aux cycles irrĂ©guliers de calculer leur date d’ovulation, ne pouvant pas anticiper la date de leurs prochaines rĂšgles. Pour rĂ©ussir Ă  bien la repĂ©rer, pourquoi ne pas utiliser la mĂ©thode des courbes de tempĂ©ratures ou un test d'ovulation ? Que se passe-t-il le jour de l’ovulation ?AprĂšs avoir passĂ© la premiĂšre phase prĂ©-ovulatoire ou folliculaire du cycle menstruel Ă  prĂ©parer plusieurs ovules au 8e ou 10e jour du cycle, un seul d’entre eux continue de se dĂ©velopper tandis que les autres s’arrĂȘtent de progresser, l’ovaire va finalement ne libĂ©rer qu’un ovocyte mature, aussitĂŽt happĂ© par la trompe de Fallope. C’est l’expulsion de cet ovule que dĂ©signe l’ovulation. Certaines femmes ressentent alors une lĂ©gĂšre douleur ou un tiraillement. Si l’ovocyte n’est pas fĂ©condĂ© dans ses 24 heures de durĂ©e de vie, il meurt. S’il est fĂ©condĂ©, il lui restera encore Ă  s’implanter dans la muqueuse utĂ©rine aprĂšs 6 jours de progestation dĂ©veloppement de l’Ɠuf et descente dans la cavitĂ© utĂ©rine. Mais lĂ  encore, fĂ©condation ne rime pas forcĂ©ment avec implantation aussi appelĂ©e nidation. Il ne vous restera plus qu'Ă  faire le test pour savoir si vous ĂȘtes bĂ©bĂ© recevez nos articles par emailChaque semaine, recevez toutes les infos indispensables avant de vous lancer dans cette grande aventure !J'accepte de recevoir les offres d'Uni-mĂ©dias et ses partenaires En savoir plusCombien de temps dure l'ovulation ?Le Dr JoĂ«lle Bensimhon, gynĂ©cologue et auteure de La Grossesse pour les Nuls Ă©ditions First rappelle que si l’ovulation ne dure que 24 heures, la pĂ©riode de fĂ©conditĂ© dĂ©bute gĂ©nĂ©ralement 4 jours avant la libĂ©ration de l'ovocyte et dure jusqu’à 24 heures aprĂšs celle-ci, soit 5 jours au total. La durĂ©e de vie des spermatozoĂŻdes dans les voies gĂ©nitales de la femme pouvant aller jusqu’à 7 jours, il suffirait d’avoir des rapports sexuels rĂ©guliers 2 Ă  3 fois par semaine pour augmenter ses chances de concevoir un bĂ©bĂ©. VoilĂ  aussi pourquoi il est possible de tomber enceinte alors qu'on pensait ĂȘtre en dehors de sa date d'ovulation !Quel est le meilleur moment pour faire un test d'ovulation ?Les tests d’ovulation urinaires vendus en pharmacie fonctionnent sur un principe simple ils dĂ©tectent le taux de LH hormone lutĂ©inisante, dont le pic prĂ©cĂšde l’ovulation de 36 Ă  38h. Ces tests fiables peuvent donc dĂ©terminer si vous vous trouvez dans une pĂ©riode fĂ©conde ou non, et anticiper le meilleur moment pour concevoir un bĂ©bĂ©. Assez onĂ©reux Ă  l’achat Ă  partir de 23 € les 5 et jusqu’à plus de 100 € pour un test Ă©lectronique Ă  recharges, les tests d’ovulation Ă  usage unique nĂ©cessitent d’ĂȘtre conduits sur 4 Ă  5 jours consĂ©cutifs au dĂ©but, puis 3 jours en moyenne les mois suivants. DĂšs que le test affiche positif, il est recommandĂ© d’avoir des rapports sexuels pour optimiser et maximiser ses chances de repĂ©rer son ovulation ? Comment savoir quand on ovule ? La courbe de tempĂ©ratureConseillĂ©e aux femmes qui essaient de concevoir depuis plusieurs mois sans succĂšs, la courbe de tempĂ©rature est une mĂ©thode est assez fastidieuse. Elle consiste Ă  prendre sa tempĂ©rature tous les matins au rĂ©veil, dans les mĂȘmes conditions mĂȘme maniĂšre voie rectale, buccale ou axillaire, au mĂȘme moment et avec le mĂȘme thermomĂštre. Une fois la tempĂ©rature prise, il suffit de la reporter quotidiennement sur une feuille spĂ©ciale, Ă  se procurer chez le gynĂ©cologue ou le pharmacien, ou sur le net. AprĂšs plusieurs semaines, on distingue alors deux pĂ©riodes durant la premiĂšre phase du cycle menstruel prĂ©-ovulatoire ou folliculaire, la tempĂ©rature corporelle de la femme est gĂ©nĂ©ralement basse autour de 36,5°C, tandis qu’elle augmente environ 37°C durant la seconde phase post-ovulatoire ou lutĂ©ale avec la production de progestĂ©rone. C’est entre ces deux pĂ©riodes que l’ovulation se produit, au moment oĂč la courbe de tempĂ©rature montre le dernier point bas, juste avant l’augmentation thermique. Une fois l'augmentation de tempĂ©rature constatĂ©e, l'ovulation a dĂ©jĂ  eu lieu. A priori la pĂ©riode de fĂ©conditĂ© est passĂ©e, il faudra attendre le mois que les valeurs en elles-mĂȘmes n'ont pas vraiment d'importance, car la tempĂ©rature basale varie d'une femme Ă  l'autre. Ce sont les variations de tempĂ©rature qui sont dure combien de jours ? Quelle est la pĂ©riode de fĂ©conditĂ© ?La durĂ©e de l'ovulation est trĂšs courte 48 heures environ. A savoir les spermatozoĂŻdes peuvent survivre prĂšs de 5 jours dans les voies gĂ©nitales fĂ©minines. Il est donc possible de tomber enceinte Ă  la suite d'un rapport sexuel qui a eu lieu quelques jours avant l'ovulation. Le calcul de la pĂ©riode de fĂ©conditĂ© ne peut donc pas ĂȘtre extrĂȘmement calculer sa date d'ovulation quand on a un cycle court ?Si vos cycles sont courts 21 jours par exemple mais rĂ©guliers, votre ovulation se produira le 7e jour aprĂšs la survenue de vos rĂšgles. Pour calculer la date de l'ovulation, il suffit de soustraire 14 jours Ă  la durĂ©e du cycle 21-14 = 7e jour. Pour 22 jours, 22-14 = 8e jour. Ces 14 jours sont dĂ©nommĂ©s “phase lutĂ©ale”. Celle-ci ne varie pas. Comment calculer sa date d'ovulation quand on a un cycle irrĂ©gulier ?Quand on a un cycle irrĂ©gulier, il est plus difficile de repĂ©rer son ovulation avec un simple calcul de date. On peut tenter l'observation des courbes de tempĂ©rature voir ci-dessus, ou l'observation des sĂ©crĂ©tions vaginales en effet, durant la pĂ©riode la plus fertile, la glaire cervicale devient plus claire et prend une texture Ă©lastique. Quel est le meilleur moment du cycle pour tomber enceinte ?La pĂ©riode la plus propice pour concevoir un bĂ©bĂ© s'Ă©tale entre le quatriĂšme jour avant l'ovulation et se termine 24 heures aprĂšs, pour un cycle de 28 jours soit entre le dixiĂšme jour et le quinziĂšme jour du cycle. En vidĂ©o L'ovulation n'a pas forcĂ©ment lieu au 14e jour du cycleEt en cas d’absence d’ovulation ?Contrairement au dispositif intra-utĂ©rin DIU au cuivre qui n’empĂȘche pas l’ovulation, mais l’accĂšs des spermatozoĂŻdes aux trompes de Fallope et l’implantation de l’Ɠuf dans la paroi utĂ©rine, le principe du contraceptif hormonal pilule, implant, patch, injection, anneau vaginal est prĂ©cisĂ©ment d’empĂȘcher ce mĂ©canisme physiologique d’avoir lieu, en inhibant notamment les hormones entrant en jeu FSH et LH. Certains contraceptifs lĂ©gers permettent cependant Ă  l'ovulation de se produire, et jouent sur d'autres facteurs de fĂ©conditĂ© glaire cervicale et muqueuse utĂ©rine. MalgrĂ© tout, il faut souvent plusieurs mois pour que le cycle menstruel reprenne son cours normalement aprĂšs l'arrĂȘt de la contraception. Il peut ainsi arriver qu'aucune ovulation ne se produise lors du premier cycle sans pilule, ou qu'au contraire plusieurs ovulations aient diffĂ©rents troubles de l'ovulation Il existe aussi des facteurs mĂ©dicaux responsables d’une anovulation, ou absence d’ovulation syndrome des ovaires polykystiques, hyperprolactinĂ©mie, anomalies chromosomiques, insuffisance ovarienne, mĂ©nopause prĂ©coce
. En cas de troubles de l’ovulation sur la durĂ©e, un bilan hormonal permet d’orienter le diagnostic du mĂ©decin ou du gynĂ©cologue, et de proposer un Ă©ventuel traitement pour rĂ©gulariser les cycles et favoriser l' est le meilleur moyen pour tomber enceinte ? Selon le Dr Martine Depondt-Gadet, mĂ©decin acupuncteur, diplĂŽmĂ©e en Ă©chographie gynĂ©co-obstĂ©tricale et auteure de l'ouvrage StĂ©rilitĂ© et InfertilitĂ© comment dĂ©bloquer les barrages psychologiques qui entravent la fĂ©conditĂ© ? Ă©ditions Dangles, "Le meilleur moyen d’arriver Ă  faire un bĂ©bĂ©, c’est encore de ne pas y penser et de ne rien calculer", la pression psychologique et l’obsession de la grossesse pouvant ĂȘtre de vrais freins Ă  la conception."
Pourles nouveaux embauchĂ©s : Ă©volution progressive des jours de tĂ©lĂ©travail en fonction du niveau de formation et d’intĂ©gration qui sera Ă©valuĂ© par le manager. A titre d’exemple : 0 Ă  6 mois d’anciennetĂ© = prĂ©sence Ă  temps complet; 6 mois Ă  1 an d’anciennetĂ© = 1 Ă  2 jours tĂ©lĂ©travail; 1 Ă  2 ans d’anciennetĂ© = 2 Ă  3 jours tĂ©lĂ©travail. Tous les mĂ©tiers et postes
Combien de temps en moyenne faut-il Ă  une femme pour tomber enceinte ? Chaque femme est un cas particulier et unique car de nombreux facteurs sont Ă  l’origine de sa variation. Les facteurs physiques et psychologiques sont susceptibles d’augmenter la durĂ©e moyenne pour tomber dĂ©lai nĂ©cessaire pour concevoir Il faudra en moyenne entre 7 mois et un an pour aboutir Ă  un rĂ©sultat positif. C’est le temps moyen qu’il faut pour tomber enceinte, ce qu’on appelle le dĂ©lais nĂ©cessaire pour concevoir ». Il varie d’une femme Ă  l’autre selon son potentiel de fertilitĂ© le temps moyen pour tomber enceinte se situe entre 3 et 6 mois pour un jeune couple, et augmente avec l’ñge. La durĂ©e moyenne pour tomber enceinte dĂ©pend de facteurs physiquesLa contraception et la grossesse La premiĂšre des choses lorsque j’envisage de concevoir un enfant, est de cesser toute forme de contraception. Comme la prise de pilule modifie les cycles naturels menstruels, il me faudra le temps de retrouver un cycle rĂ©gulier et de ce fait ne pas m’inquiĂ©ter si vous je ne tombe pas enceinte du premier coup. L’ñge influe le temps moyen qu’il faut pour tomber enceinte Plus mon Ăąge s’accroit, moins je suis fertile, plus la durĂ©e moyenne pour tomber enceinte augmente. Temps moyen pour tomber enceinte jusqu’à 30 ans Avant 30 ans, les probabilitĂ©s de tomber enceinte sont de 25 % par cycle en moyenne et 85% des couples obtiennent une grossesse dĂšs la premiĂšre annĂ©e et 90% au bout de deux ans. Le temps moyen pour tomber enceinte entre 3 et 6 mois pour un jeune couple. Une femme de 30 ans a en moyenne 75% de probabilitĂ©s d’avoir un enfant dans les 12 mois suivant l’arrĂȘt de sa contraception. AprĂšs 30 ans AprĂšs 40 ans, les chances de grossesse par cycle chutent Ă  6%. La baisse des probabilitĂ©s de tomber enceinte s’accĂ©lĂšre aprĂšs 36 ans. Ne pas attendre pour consulter aprĂšs 35-36 ans. Une femme de 40 ans a en moyenne 44% de probabilitĂ© d’avoir un enfant dans les 12 mois suivant l’arrĂȘt de sa contraception. Concevoir un enfant, c’est Ă©galement dans la tĂȘteLa fĂ©condation, je n’en fais pas une obsession Afin d’optimiser le temps moyen pour tomber enceinte, je n’oublie pas qu’il faut d’abord ĂȘtre bien dans mon corps, et bien dans ma tĂȘte. La fĂ©condation ne doit surtout pas devenir une obsession, l’homme n’aime pas se sentir utilisĂ©, mais aimĂ©. Le futur papa doit y trouver tout d’abord un dĂ©sir et un plaisir incomparable. Pour minimiser le temps qu’il me faudra pour tomber enceinte, je m’assure d’ĂȘtre relax ! Lorsque je serais prĂȘte dans mon cƓur, dans mon corps et dans mon mental, alors je pourrai concevoir un bĂ©bĂ©. Le tout doit ĂȘtre alignĂ©, et sensibilisĂ© par un mode de vie et un environnement adaptĂ© Ă  une bonne hygiĂšne de vie. Je prends soin de nous Je n’oublie pas non plus que l’enfant est le fruit d’un amour. Mon futur bĂ©bĂ© ne doit pas ressentir de poids ni de culpabilitĂ© sur ses Ă©paules afin de s’incarner en moi en toute quiĂ©tude. Prendre soin de ma santĂ©, ainsi que de mon amour pour moi-mĂȘme et pour mon partenaire est donc impĂ©ratif pour limiter le temps qu’il me faudra pour tomber enceinte. Ma grossesse dĂ©butera lorsque je serai dans l’amour de moi, heureuse de ma vie, Ă©panouie, afin d’aimer et de diffuser cet amour Ă  mes proches ainsi qu’à mon futur bĂ©bĂ©. jNxjefx.
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  • delai raisonnable pour tomber enceinte apres embauche